Accès direct aux infirmiers et kinés: adoption en vue au Parlement, malgré une portée limitée

La députée française (Renaissance) Stéphanie Rist prononce un discours lors du débat sur le projet de loi sur la réforme du système de retraite à l'Assemblée nationale à Paris, le 6 février 2023. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
La députée française (Renaissance) Stéphanie Rist prononce un discours lors du débat sur le projet de loi sur la réforme du système de retraite à l'Assemblée nationale à Paris, le 6 février 2023. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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Publié le Mercredi 10 mai 2023

Accès direct aux infirmiers et kinés: adoption en vue au Parlement, malgré une portée limitée

  • Initié par la députée macroniste Stéphanie Rist, ce texte vise à faciliter l'accès aux soins en désembouteillant les cabinets des généralistes
  • Mais l'ambition initiale de la proposition de loi, qui a provoqué une levée de boucliers des médecins, a été en partie réduite

PARIS: Le Parlement s'apprête à adopter définitivement mercredi une proposition de loi pour accéder directement à certaines infirmières, à des kinés ou des orthophonistes, un premier pas à la portée limitée après une série de protestations des médecins.

Initié par la députée macroniste Stéphanie Rist, ce texte vise à faciliter l'accès aux soins en désembouteillant les cabinets des généralistes. Il a obtenu un ultime feu vert du Sénat mardi, avant le vote de l'Assemblée attendu en fin d'après-midi ce mercredi.

Sous certaines conditions, les Français pourront, sans passer par leurs médecins traitants, consulter des infirmières en pratique avancée - les "IPA" qui interviennent notamment sur certaines maladies chroniques - ainsi que des kinésithérapeutes et des orthophonistes.

Mais l'ambition initiale de la proposition de loi, qui a provoqué une levée de boucliers des médecins, a été en partie réduite. Pour se rendre chez des IPA et des kinés, l'accès direct sera limité à ceux exerçant dans des structures comme les maisons de santé pluriprofessionnelles, en coordination avec des médecins.

Contrairement à ce que voulaient les députés, seront donc exclus du dispositif les soignants simplement inscrits dans le cadre plus souple des Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), qui couvrent environ la moitié de la population.

Un bras de fer a opposé sénateurs et députés sur ce point. Les discussions furent "âpres et longues" en commission mixte paritaire, selon Stéphanie Rist (Renaissance), avant que les parlementaires ne renoncent à intégrer dans cette loi ces infirmières et kinés exerçant de façon indépendante.

Les députés ont toutefois arraché une expérimentation dans six départements dont deux d'Outre-mer, souligne-t-elle.

Et pour les orthophonistes en CPTS, l'accès direct restera possible.

Au Sénat, la rapporteure LR Corinne Imbert a revendiqué une "approche équilibrée", "raisonnable", permettant d'éviter "les tensions entre les professionnels de santé". Et le ministre de la Santé François Braun a à son tour loué le "dialogue" pour un "partage de compétences", plutôt que "des mesures de coercition".

Mais la réduction de la portée du texte a agacé certains professionnels: "une fois de plus, nous avons cédé devant le lobbying médical principalement sénatorial", dénonce Emmanuel Hardy, président de l'Union nationale des infirmiers de pratique avancée.

Déserts médicaux

Le texte "n'aura qu'un effet cosmétique", juge de son côté Sébastien Guérard, le président de la Fédération française des masseurs kinésithérapeutes rééducateurs (FFMKR), qui estime que seulement 3% des kinés exercent en maison de santé.

L'accès direct à ces kinés sera possible pour huit séances, au lieu des dix dans le texte voté en première lecture à l'Assemblée.

Le texte suscite en revanche beaucoup plus d'enthousiasme chez les pharmaciens dont le rôle sera accru, notamment pour renouveler une ordonnance en cas d'affection chronique et administrer les vaccins.

Un amendement de dernière minute autorisera à titre pérenne les pharmaciens biologistes, en laboratoires, à pratiquer des frottis du col de l'utérus dans le cadre du dépistage du cancer.

Dans l'ensemble, aux yeux de l'UFC-Que Choisir, même s'"il ne faut pas trop se faire d'illusion sur l'impact immédiat" de cette loi pour les patients, "une digue a sauté en terme de partage de compétences entre le médecin" et les autres soignants.

"On donne des clés supplémentaires pour accéder aux soins dans des territoires comme le mien", se réjouit la députée de la Nièvre Perrine Goulet (MoDem). "C'est intéressant, on aurait peut-être voulu aller plus loin, mais il faut entendre aussi les critiques du monde médical", nuance-t-elle.

Comme le soutenaient les sénateurs, les parlementaires de la commission mixte paritaire ont rejeté la demande "d'engagement territorial" des médecins, qui aurait pu amener certains à prendre plus de patients, faire des gardes ou exercer dans un désert médical par exemple.

Le député Horizons Frédéric Valletoux devrait porter un texte en juin devant l'Assemblée, avec le soutien de Renaissance, en faveur d'un "engagement territorial" renforcé.

Mais il est insuffisant aux yeux du socialiste Guillaume Garot qui mène un travail transpartisan sur la question. Ce député voudrait flécher de façon plus contraignante médecins libéraux et chirurgiens dentistes vers les déserts médicaux.


Accord EU-USA: Bayrou juge que la France a été "un peu seule"

Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis
  • Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire"

PARIS: Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis, en marge d'un déplacement dans les locaux de Tracfin, organisme de lutte contre la criminalité financière, à Montreuil (93).

Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire", et qu'il fallait "un processus encore pas totalement élucidé de ratification" de cet accord.

"Il y a à vérifier quelle est la portée exacte de ces accords, et les Etats auront d'une manière ou d'une autre leur mot à dire", a-t-il ajouté.

"Je sais que toutes les autorités françaises, et en particulier le président de la République (Emmanuel Macron), ont été ceux qui se sont battus le plus contre des concessions qu'on considérait comme excessives", a-t-il affirmé avant de s'interroger: "Est-ce que nous avons été un peu seuls? Oui".

"Est-ce qu'on a le sentiment qu'à l'intérieur de l'Union européenne, des forces politiques et économiques étaient plutôt sur une ligne de trouver des accommodements? Oui", a-t-il ajouté, en estimant que de son point de vue, "la voie pour l'Europe est une voie d'affirmation et de résistance quand il faut et de fierté le plus souvent possible".

La classe politique française a été unanime à dénoncer l'accord conclu entre le président américain, Donald Trump, et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui prévoit notamment une hausse de 15% des droits de douane sur les exportations européennes.

Le président Emmanuel Macron a déploré mercredi en Conseil des ministres que l'Union européenne n'ait pas été assez "crainte" dans ses négociations commerciales avec les Etats-Unis, affirmant que la France continuerait de faire montre "d'exigence et de fermeté" dans la suite des discussions.


Lille: enquête ouverte après les propos sur internet d'une étudiante gazaouie

L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
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  • Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie

LILLE: Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie, dont Sciences Po Lille a annulé l'inscription mercredi.

"Une enquête a été ouverte pour apologie du terrorisme, apologie de crime contre l'humanité avec utilisation d'un service de communication au public en ligne", a écrit la procureure de la République de Lille, Carole Etienne, à l'AFP.

Des captures d'écran circulant sur les réseaux sociaux montrent qu'un compte, attribué à cette étudiante par des internautes et fermé depuis, a repartagé des messages appelant à tuer des juifs.

Elle a été désinscrite de l'Institut d'études politiques de Lille, où elle devait étudier à partir de septembre, en raison du contenu de certaines de ses publications qui "entre en contradiction frontale avec les valeurs portées par Sciences Po Lille", a indiqué l'établissement mercredi.

"Pourquoi on est passé à travers? Il y a quand même une question, il faut y répondre", a reconnu jeudi sur RMC François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l'Intérieur.

"Il y aura des poursuites qui seront engagées et sur la base de ces éléments-là, elle est susceptible d'être renvoyée dans son pays, bien évidemment", a-t-il ajouté.

"Administrativement, semble-t-il, je suis très prudent, il n'y avait pas de difficulté particulière, sauf que sur les réseaux sociaux, voilà, on s'en est rendu compte", a-t-il ajouté, précisant que "les services des titres de séjour relèvent du ministère des Affaires étrangères".

Sollicité par l'AFP, Sciences Po Lille a expliqué avoir "accueilli cette étudiante sur proposition du consulat général de France à Jérusalem".

L'incident a fait largement réagir dans la classe politique, jusqu'au gouvernement.

"Une étudiante gazaouie tenant des propos antisémites n'a rien à faire en France", a réagi sur X le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Il a indiqué avoir "demandé à ce qu'une enquête interne soit diligentée pour que cela ne puisse en aucun cas se reproduire".

Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a souligné sur le même réseau social avoir "demandé de faire fermer ce compte haineux", et a martelé que "les propagandistes du Hamas n'ont rien à faire dans notre pays".


Restitutions coloniales: le gouvernement français annonce un projet de loi

La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
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  • Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation
  • Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises

PARIS: Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation.

S'appliquant en priorité aux pays africains mais de "portée géographique universelle", ce texte vise à accélérer le retour dans leur pays d'origine de biens culturels appartenant aux collections nationales françaises.

Ils doivent revenir à des "Etats qui, du fait d'une appropriation illicite, en ont été privés" entre 1815 et 1972, selon le ministère français de la Culture.

Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises. Les oeuvres à restituer devront avoir été acquises "dans une situation de vol, de pillage, de cession ou de libéralité obtenue par contrainte ou violence ou d'une personne qui ne pouvait en disposer", a précisé le ministère.

La décision de sortie des collections pour opérer cette restitution ne passera plus par un processus législatif au cas par cas mais pourra intervenir sur seul décret du Conseil d'Etat et après avis, le cas échéant, d'une commission scientifique bilatérale.

Cette commission devra en effet documenter et déterminer, si besoin, le caractère illicite de l'appropriation des oeuvres réclamées à travers un travail qui associerait des experts et historiens français et l'Etat demandeur, selon le ministère.

Concernant la période historique retenue, 1815 correspond à la date d'un règlement des conquêtes napoléoniennes qui est dû à un premier mouvement de restitution d'œuvres à l'échelle européenne. 1972 est celle de l'entrée en application de la convention internationale de l'Unesco protégeant les biens culturels contre le trafic illicite.