Bagdad: Dix ans plus tard, le Taurus express n'est plus que l'ombre de lui-même

Au gré de la géopolitique et des conflits, le trajet du "Taurus Express" qui reliait depuis le début du XXe siècle Bassora, à la pointe sud de l'Irak, à la Turquie, dans le prolongement du célébrissime Orient-Express --Paris-Vienne-Istanbul-- s'est réduit comme peau de chagrin. (Photo Zaid Al-OBEIDI/AFP).
Au gré de la géopolitique et des conflits, le trajet du "Taurus Express" qui reliait depuis le début du XXe siècle Bassora, à la pointe sud de l'Irak, à la Turquie, dans le prolongement du célébrissime Orient-Express --Paris-Vienne-Istanbul-- s'est réduit comme peau de chagrin. (Photo Zaid Al-OBEIDI/AFP).
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Publié le Mardi 28 juillet 2020

Bagdad: Dix ans plus tard, le Taurus express n'est plus que l'ombre de lui-même

  • De Mossoul, où le trafic ferroviaire a drastiquement baissé après l'invasion américaine de 2003, deux trains ont continué à partir chaque semaine, direction Gaziantep en Turquie
  • Amer Abdallah, 47 ans, conduisait lui les trains vers la Syrie, à l'Ouest, et Bagdad, au Sud

MOSSOUL : Il y a bien longtemps, Irakiens et Orientalistes en goguette partaient d'ici pour rallier Berlin, Istanbul ou Venise. Aujourd'hui, la gare de Mossoul en ruines et ses locomotives calcinées rappellent chaque jour aux habitants à quel point ils sont coupés du monde.

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Au gré de la géopolitique et des conflits, le trajet du "Taurus Express" qui reliait depuis le début du XXe siècle Bassora, à la pointe sud de l'Irak, à la Turquie, dans le prolongement du célébrissime Orient-Express --Paris-Vienne-Istanbul-- s'est réduit comme peau de chagrin.

De Mossoul, où le trafic ferroviaire a drastiquement baissé après l'invasion américaine de 2003, deux trains ont continué à partir chaque semaine, direction Gaziantep en Turquie. Jusqu'à un jour de l'été 2010 et un aller-simple pour cette localité du sud de la Turquie.

 

Amer Abdallah, 47 ans, conduisait lui les trains vers la Syrie, à l'Ouest, et Bagdad, au Sud. "Tous les jours, il y avait des trains de passagers ou de marchandises", se souvient ce père de cinq enfants qui appelle encore sa locomotive "chérie". 

L'âge d'or oublié

Aujourd'hui, sa "chérie" jaune, rouge, verte et noire gît, renversée sur un côté et rongée par la rouille, alors qu'alentour, wagons et rails ne sont plus que rouille et débris calcinés.

Avant, se rappelle Ali Ogla, 58 ans, "pour seulement 1.000 ou 2.000 dinars (moins d'un euro) on pouvait aller à Bagdad ou ailleurs en Irak".

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"C'était un moyen de transport confortable pour les malades ou les handicapés. Et on était sûrs que la marchandise arriverait sans retard ni dégât", poursuit l'homme, imposante moustache noire et jellaba grise.

Le roi Fayçal II, renversé en 1958, avait même dans la gare sa salle de réception, rappelle Mohammed Abdelaziz, ingénieur ferroviaire au chômage technique depuis des années. 

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"Il y avait ici l'un des plus vieux hôtels de Mossoul, des cafés, des jardins, un garage pour les voitures et, avant elles, les calèches", raconte-t-il à l'AFP.

Des centaines de familles vivaient grâce au train: "des employés de la voie ferrée ou du bâtiment, des commerçants, des restaurateurs, des cafetiers, des chauffeurs de taxi...".

C'est via Mossoul que le 1er juin 1940, un train a rallié pour la première fois Istanbul depuis Bagdad.

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Aujourd'hui, la capitale n'est plus reliée qu'à Fallouja (ouest), et Kerbala et Bassora (sud). Bien loin des 72 liaisons quotidiennes assurées sur 2.000 kilomètres de voie ferrée à la grande époque, juste avant l'embargo imposé au régime de Saddam Hussein dans les années 1990.

Ruines et désolation

Déjà bien avant, l'Irak était à la pointe du progrès au Moyen-Orient. Dès 1869, Bagdad s'est dotée d'un tramway, dont aujourd'hui rien ne subsiste, ni les élégantes voitures en bois à deux étages ni même les rails, engloutis par l'extension galopante de la capitale sous l'effet de l'exode rural.

L'agonie de la gare de Mossoul a été plus longue. Le 31 mars 2009, un camion piégé en a fait exploser une partie. Puis, le 1er juillet 2010, le dernier train est parti: un aller simple pour Gaziantep.

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La troisième ville d'Irak, longtemps carrefour commercial du Moyen-Orient, a ensuite été ravagée par les combats contre le groupe jihadiste Etat islamique (EI), entre 2014 et 2017.

La gare a été "détruite à 80%", affirme Qahtan Loqman, numéro deux des chemins de fer du nord de l'Irak.

Les colonnes de ses quais ont été éventrées par des tirs, sa façade est aujourd'hui méconnaissable et les mosaïques des carreaux de son hall à peine visibles.

Mais depuis la libération il y a trois ans, la gare est la grande absente des projets de reconstruction avec "aucun fond ni calendrier", assure M. Loqman.

"Retrouver les beaux jours"

Pourtant, avec elle, c'est une part de l'Irak qui disparaît. Outre sa position stratégique aux confins de l'Irak, de la Syrie et de la Turquie, la gare de Mossoul a vu défiler les plus grands.

Il y a près d'un siècle, c'est dans ses allées que la romancière britannique Agatha Christie a élaboré ses aventures policières, dont certaines situées à Mossoul. 

Quelques décennies plus tard, la diva de la chanson arabe Oum Kalsoum "est passée par la salle de réception royale", assure le directeur de la gare, Mohammed Ahmed. 

Et en 1970, le temps d'un concert mythique de la chanteuse libanaise Sabah, la gare a accepté de faire taire ses cloches et autres sifflets, pour ne pas perturber l'auditoire.

Nour Mohammed, mère de famille de 37 ans, elle, se rappelle des voyages en train avec sa grand-mère pour aller à la campagne.

"J'avais dix ans et avec famille, amis et voisins, on regardait le paysage défiler par les fenêtres. C'était les beaux jours. Et j'espère y revenir", raconte-t-elle, nostalgique


Turquie: le chef kurde Öcalan veut agir avec «sérieux et responsabilité»

 Le chef emprisonné de la guérilla kurde Abdullah Öcalan appelle à agir avec "sérieux et sens des responsabilités" pour mener le processus de paix en cours avec la Turquie à son terme, dans un message publié mardi par des députés turcs. (AFP)
Le chef emprisonné de la guérilla kurde Abdullah Öcalan appelle à agir avec "sérieux et sens des responsabilités" pour mener le processus de paix en cours avec la Turquie à son terme, dans un message publié mardi par des députés turcs. (AFP)
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  • "Pour passer à une phase positive, il est essentiel que chacun agisse avec sensibilité, sérieux et sens des responsabilités"
  • Abdullah Öcalan, qui a appelé en février son mouvement à se dissoudre, est détenu à l'isolement depuis 1999 sur l'île prison d'Imrali, au large d'Istanbul

ISTANBUL: Le chef emprisonné de la guérilla kurde Abdullah Öcalan appelle à agir avec "sérieux et sens des responsabilités" pour mener le processus de paix en cours avec la Turquie à son terme, dans un message publié mardi par des députés turcs.

"Pour passer à une phase positive, il est essentiel que chacun agisse avec sensibilité, sérieux et sens des responsabilités", écrit le leader historique du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), auquel une délégation du parti prokurde DEM a rendu visite lundi.

Abdullah Öcalan, qui a appelé en février son mouvement à se dissoudre, est détenu à l'isolement depuis 1999 sur l'île prison d'Imrali, au large d'Istanbul.

Le PKK a annoncé le 26 octobre le retrait vers le nord de l'Irak de ses derniers combattants présents en Turquie, complétant ainsi la première phase du processus de paix initié un an auparavant par Ankara.

Lors d'une cérémonie en juillet, une trentaine de combattants en treillis avaient symboliquement brûlé leurs armes.

Le parti prokurde, troisième force au Parlement, a appelé à "passer à la deuxième phase, à savoir les étapes juridiques et politiques".

"Nous nous efforçons de développer une phase positive, et non une phase destructrice et négative", poursuit M. Öcalan. "L'intégration du phénomène kurde dans toutes ses dimensions dans le cadre légal de la République et un processus de transition solide doivent en constituer le fondement", écrit-il.

Une commission parlementaire transpartisane planche depuis août sur une traduction légale et encadrée de cette transition vers la paix.

Elle doit notamment décider du sort d'Abdullah Öcalan et de possibles garanties de sécurité pour ses combattants.

La libération du leader kurde âgé de 76 ans est au cœur des demandes du PKK. Il a été autorisé en septembre à rencontrer ses avocats pour la première fois en six ans.

Selon des analystes, le PKK est affaibli par des décennies de guérilla qui ont fait au moins 50.000 morts, selon un bilan officiel. Et la communauté kurde, qui représente selon des estimations 20% de la population turque sur 86 millions d'habitants, est épuisée par un long conflit.


Un hôpital de Gaza déclare avoir reçu les corps de 15 prisonniers palestiniens

L'hôpital Nasser, dans le sud de la bande de Gaza, a annoncé mercredi avoir reçu les corps de 15 prisonniers palestiniens dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu avec Israël. (AFP)
L'hôpital Nasser, dans le sud de la bande de Gaza, a annoncé mercredi avoir reçu les corps de 15 prisonniers palestiniens dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu avec Israël. (AFP)
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  • Sur les 28 otages décédés que le Hamas avait accepté de remettre à Israël dans le cadre de l'accord, 21 ont été restitués à ce jour. Israël exige toujours la restitution des sept dernières dépouilles
  • Le mouvement islamiste palestinien a également libéré le 13 octobre les 20 derniers otages vivants retenus dans la bande de Gaza, en échange de la libération de près de 2.000 prisonniers palestiniens

KHAN YOUNES: L'hôpital Nasser, dans le sud de la bande de Gaza, a annoncé mercredi avoir reçu les corps de 15 prisonniers palestiniens dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu avec Israël.

"La dixième série de dépouilles de martyrs palestiniens, soit 15 martyrs", est arrivée "dans le cadre de l'échange de dépouilles entre la partie palestinienne et l'occupation israélienne", a déclaré l'hôpital en précisant que 285 dépouilles ont été reçues dans la bande de Gaza depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu le 10 octobre.

Sur les 28 otages décédés que le Hamas avait accepté de remettre à Israël dans le cadre de l'accord, 21 ont été restitués à ce jour. Israël exige toujours la restitution des sept dernières dépouilles.

Le mouvement islamiste palestinien a également libéré le 13 octobre les 20 derniers otages vivants retenus dans la bande de Gaza, en échange de la libération de près de 2.000 prisonniers palestiniens.

Mardi, la branche armée du Hamas a fait parvenir aux autorités israéliennes la dépouille d'une personne, identifiée mercredi comme Itay Chen, un soldat israélo-américain tué à l'âge de 19 ans.

Dans la bande de Gaza, des proches de personnes arrêtées par Israël et qui attendent leur retour ont dit lors de plusieurs remises de dépouilles par Israël que les corps étaient très difficiles à identifier.

Le service de presse du gouvernement du Hamas à Gaza a de nouveau accusé mercredi les autorités israéliennes de refuser de transmettre des listes de noms des personnes dont les dépouilles arrivent dans le territoire palestinien.


Soudan: 40 morts au Kordofan, les combats s'intensifient dans la région

Une attaque dans la ville stratégique d'El-Obeid, capitale régionale du Kordofan-Nord au Soudan, a fait au moins 40 morts, a annoncé mercredi l'ONU, pendant que les violences continuent dans la région voisine du Darfour. (AFP)
Une attaque dans la ville stratégique d'El-Obeid, capitale régionale du Kordofan-Nord au Soudan, a fait au moins 40 morts, a annoncé mercredi l'ONU, pendant que les violences continuent dans la région voisine du Darfour. (AFP)
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  • L'attaque, qui a visé un enterrement, s'est produite mardi sur la ville assiégée par les paramilitaires des Forces de Soutien Rapide (FSR), alors que les combats pour le contrôle de cette région du centre du Soudan se sont intensifiés ces derniers jours
  • "Des sources locales rapportent qu'au moins 40 civils ont été tués et des dizaines de blessés hier dans une attaque sur un rassemblement lors de funérailles"

PORT-SOUDAN: Une attaque dans la ville stratégique d'El-Obeid, capitale régionale du Kordofan-Nord au Soudan, a fait au moins 40 morts, a annoncé mercredi l'ONU, pendant que les violences continuent dans la région voisine du Darfour.

L'attaque, qui a visé un enterrement, s'est produite mardi sur la ville assiégée par les paramilitaires des Forces de Soutien Rapide (FSR), alors que les combats pour le contrôle de cette région du centre du Soudan se sont intensifiés ces derniers jours.

Le conflit entre l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane et les FSR de Mohammed Daglo a éclaté en avril 2023 et se concentre désormais au Kordofan, région stratégique car située entre la capitale Khartoum, contrôlée par les militaires, et le Darfour, aux mains des paramilitaires.

"Des sources locales rapportent qu'au moins 40 civils ont été tués et des dizaines de blessés hier dans une attaque sur un rassemblement lors de funérailles" à El-Obeid, a déclaré le Bureau des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha).

Les violences continuent aussi au Darfour, selon l'Ocha, qui fait état de "multiples frappes aériennes et de drones" survenues dimanche, sans pouvoir donner de bilan du fait de l'accès limité au terrain et des difficultés de communications.

"Viols collectifs" 

Depuis la chute aux mains des paramilitaires le 26 octobre de la ville d'El-Facher, dernier bastion de l'armée au Darfour, l'ONU a fait état de massacres, viols, pillages et déplacements massifs de population.

"Nous nous réveillons en tremblant de peur, les images du massacre nous hantent", a témoigné Amira, mère de quatre enfants réfugiée à Tawila, une ville à environ 70 kilomètres d'El-Facher, où s'entassent les déplacés sous des bouts de tissus transformés en tentes ou en auvent.

"C'étaient des viols collectifs. Des viols collectifs en public, devant tout le monde, et personne ne pouvait les arrêter", a-t-elle raconté.

Des images satellite analysées par le Humanitarian Research Lab (HRL) de l'université américaine de Yale, qui documente la situation à El-Facher depuis le début du siège il y a 18 mois, ont permis de mettre en évidence des atrocités sur place.

Ces rapports ont déclenché l'"indignation générale", a déclaré à l'AFP Nathaniel Raymond, directeur du HRL qui croise les vidéos postées par des paramilitaires "en train de tuer des gens à un volume record" avec les images satellites afin de géolocaliser les exactions.

Le patron de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus, s'est indigné des "attaques continues visant le système de santé", affirmant que quatre personnes, dont des enfants, avaient été tuées à l'hôpital pédiatrique de la région de Kernoi, au Darfour, près de la frontière du Tchad.

Pourparlers ou combats ? 

L'émissaire américain pour l'Afrique, Massad Boulos, s'est efforcé ces derniers jours, lors d'un déplacement au Caire, de finaliser une proposition de trêve humanitaire formulée mi-septembre sous son égide par un groupe de médiateurs incluant aussi l'Egypte, l'Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis.

Ce groupe de médiation, dit du Quad, travaille sur un plan global de paix pour le Soudan, mais ses dernières propositions sont restées lettre morte.

Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, avait pourtant exhorté mardi les belligérants à "venir à la table des négociations" et "mettre fin à ce cauchemar de violence".

Mais après avoir étudié la proposition de cessez-le-feu, les autorités pro-armée ont affirmé que la guerre allait continuer.

"Les préparatifs pour la bataille du peuple soudanais se poursuivent", a déclaré le ministre de la Défense, Hassan Kabroun.

Le Conseil de souveraineté présidé par le chef de l'armée, le général al-Burhane, a néanmoins présenté un plan pour "faciliter l'accès à l'aide humanitaire" et "la restauration de la sécurité et de la paix dans toutes les régions du Soudan", selon le compte-rendu du ministre.

 "Malnutrition sévère" 

"La situation sur le terrain est très compliquée", a reconnu la porte-parole de la Maison Blanche, Karoline Leavitt.

Plus de 71.000 civils ont fui El-Facher depuis sa chute et quelque 12.000 arrivées ont été enregistrées à Tawila, selon l'ONU.

La guerre entre l'armée et les FSR a déjà fait des dizaines de milliers de morts et près de 12 millions de déplacés, selon l'ONU.

La situation des populations déplacées reste critique, a averti l'Unicef en soulignant que 14,6% des enfants de moins de cinq ans souffraient de malnutrition sévère.