Nahel: le policier inculpé pour homicide volontaire, marche blanche à Nanterre

Mounia (centre gauche), la mère de Nahel, un adolescent abattu par un policier, est assise sur un camion suivi par des participants lors d'une marche commémorative pour son fils, dans la banlieue parisienne de Nanterre, le 29 juin 2023. (Photo par Alain JOCARD / AFP)
Mounia (centre gauche), la mère de Nahel, un adolescent abattu par un policier, est assise sur un camion suivi par des participants lors d'une marche commémorative pour son fils, dans la banlieue parisienne de Nanterre, le 29 juin 2023. (Photo par Alain JOCARD / AFP)
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Publié le Jeudi 29 juin 2023

Nahel: le policier inculpé pour homicide volontaire, marche blanche à Nanterre

  • La mère de la victime, juchée sur une camionnette, portant un tee-shirt «Justice pour Nahel», a ouvert la manifestation, suivie de plusieurs milliers de participants regroupés derrière une banderole portant le même slogan
  • Le drame à l'origine de l'embrasement s'est produit à proximité de la station de RER Nanterre-Préfecture, lors d'un contrôle de police sur la voiture conduite par Nahel

NANTERRE : Une information judiciaire a été ouverte jeudi pour homicide volontaire à l'encontre du policier auteur du coup de feu lors d'un contrôle routier ayant conduit à la mort de Nahel à Nanterre, où une marche blanche s'est élancée en début d'après-midi, après deux nuits de violences urbaines.

Le policier auteur du tir fatal contre l' adolescent de 17 ans, mardi près de Paris, a été inculpé jeudi pour homicide volontaire et placé en détention provisoire, a annoncé le parquet.

"Le policier déféré ce jour dans le cadre d'une ouverture d'information judiciaire pour homicide volontaire a été mis en examen de ce chef et placé en détention provisoire", selon un communiqué de presse du parquet.

La marche en hommage au jeune homme de 17 ans est partie vers 14h00 de la cité Pablo Picasso, aux cris de «justice pour Nahel» et «plus jamais ça», ont constaté des journalistes de l'AFP.

La mère de la victime, juchée sur une camionnette, portant un tee-shirt «Justice pour Nahel», a ouvert la manifestation, suivie de plusieurs milliers de participants regroupés derrière une banderole portant le même slogan.

La marche s'est terminée dans la confusion avec des heurts, des échanges de tirs de gaz lacrymogène et de fusées d'artifice, quelques feux et du mobilier urbain détruit. Plusieurs voitures ont été incendiées, a constaté l'AFP.

Dans la matinée, le procureur de la République de Nanterre, Pascal Prache, a annoncé que le policier, un motard âgé de 38 ans, devait être présenté dans la journée à deux magistrats instructeurs en vue de sa mise en examen.

«Le parquet considère que les conditions légales d'usage de l'arme ne sont pas réunies», a souligné le magistrat lors d'une conférence de presse. Il a requis le placement en détention du policier, un choix rarissime dans ce genre d'affaire.

«Nous déplorons que le procureur occulte la possible complicité d'homicide volontaire du second policier et les possibles faux en écritures publiques résultant des déclarations mensongères initiales du tireur, qui avait formellement affirmé que le jeune Nahel avait tenté de lui foncer dessus avec le véhicule», a indiqué l'un des avocats de la famille, Me Yassine Bouzrou, dans un communiqué.

Une vidéo, authentifiée par l'AFP, a montré qu'un des deux policiers tenait Nahel en joue, puis a tiré à bout portant. Le jeune conducteur est décédé peu de temps après avoir été atteint au thorax.

Un des deux passagers du véhicule est toujours recherché.

Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, a demandé au préfet de police la suspension administrative du policier.

La mort du mineur a été suivie d'une flambée de violences, notamment en Île-de-France, qui sont montées d'un cran dans la nuit de mercredi à jeudi.

Devant les façades de mairies noircies par les flammes, les nombreuses carcasses calcinées de voitures et l'odeur de brûlé qui flottait au petit matin dans de nombreuses villes de France, Emmanuel Macron a dénoncé «des scènes de violences» contre «les institutions et la République» qui sont «injustifiables».

Pour tenter d'éviter la réédition des émeutes de novembre 2005 dans les quartiers populaires, le président a convoqué dans la matinée une cellule interministérielle de crise. Les déplacements non prioritaires des ministres prévus jeudi ont été reportés.

Pour la seule nuit dernière, 180 personnes ont été interpellées, 170 policiers et gendarmes blessés, et plusieurs bâtiments publics «incendiés ou attaqués», selon le ministère de l'Intérieur.

- «Eviter toute escalade» -

«J'appelle vraiment à un retour au calme, le plus rapidement possible», a plaidé Benoit Jimenez, maire de Garges-lès-Gonesse, où l'hôtel de ville a été incendié. La Première ministre Elisabeth Borne y a appelé à «éviter toute escalade».

Des écoles ont également été visées, comme à Tourcoing, Evreux (Eure) ou encore Halluin (Nord), et des commissariats à Rouen, Elbeuf (Seine-Maritime) et Trappes (Yvelines) pour ne citer qu'eux. A Amiens, une médiathèque a été «complètement détruite» par le feu.

«Il faut que tout cela cesse», a déclaré le garde des Sceaux, qui s'est rendu à la prison de Fresnes (Val-de-Marne), attaquée au mortier d'artifice par des personnes encagoulées. «Tous ceux qui de façon irresponsable (...) crachent sur la police et sur la justice sont aussi les complices moraux des exactions qui sont commises», a par ailleurs critiqué Eric Dupond-Moretti.

A Nanterre, dans le quartier populaire Pablo-Picasso en particulier, les heurts ont duré jusqu'au milieu de la nuit, avec des jets de pavés, des cris «à mort les keufs!» et des tags «justice pour Nahel», auxquels les forces de l'ordre ont répondu par des tirs de gaz lacrymogène.

Dans le département de Seine-Saint-Denis voisin, des sources policières ont fait état de feux multiples de voitures et magasins, de pillages, de commissariats attaqués, de mairies dégradées, d'une médiathèque incendiée...

Des incidents ont été déplorés également dans plusieurs villes des Hauts-de-Seine mais aussi ailleurs en France, à Lyon, Roubaix, Amiens et Nice, Dijon et Toulouse.

- Renforcement du déploiement policier -

Le drame à l'origine de l'embrasement s'est produit à proximité de la station de RER Nanterre-Préfecture, lors d'un contrôle de police sur la voiture conduite par Nahel, mineur de 17 ans connu pour des refus d'obtempérer. Le précédent lui avait valu une présentation au parquet dimanche dernier, en vue d'une convocation en septembre prochain devant un tribunal pour enfants.

L'affaire a relancé la controverse sur l'action des forces de l'ordre en France, où un nombre record de 13 décès a été enregistré en 2022 après des refus d'obtempérer lors de contrôles routiers.

Jeudi, des voix s'élevaient à droite pour réclamer l'état d'urgence, à l'instar du président des Républicains Eric Ciotti, qui souhaite que soient instaurées «sans délai» ces mesures d'exception qui avaient été utilisées en novembre 2005 après 10 jours d'émeutes dans les banlieues.

«Je crois qu'on peut mobiliser énormément de moyens (...) sans qu'on ait besoin de recourir à des articles particuliers de la Constitution», a réagi Gérald Darmanin, qui annonce un déploiement sécuritaire plus important pour jeudi soir: 40.000 policiers et gendarmes mobilisés, dont 5.000 à Paris (contre 2.000 la nuit passée).

Le gouvernement prévoit aussi un «changement de doctrine, plus offensive» dans la réponse aux émeutes, selon une source policière.

Ce que l'on sait des circonstances du drame et de l'enquête

Nahel, 17 ans, a été tué par un tir de police mardi à Nanterre lors d'un contrôle routier. Voici ce que l'on sait des circonstances de ce drame et des investigations menées dans ce dossier, confiées jeudi à deux juges d'instruction.

Le déroulé des faits:

Deux motards de la compagnie territoriale de circulation et de sécurité routière des Hauts-de-Seine viennent de prendre leur service mardi quand ils remarquent vers 7H55, boulevard Jacques-Germain Soufflot à Nanterre, derrière le quartier d'affaires de la Défense, une Mercedes jaune immatriculée en Pologne, a détaillé jeudi le procureur de Nanterre, Pascal Prache.

La "vive allure" du véhicule sur une voie de bus et "le jeune âge apparent des passagers du conducteur" intriguent les policiers, qui tentent une première fois de procéder à un contrôle. Ils activent leur gyrophare, se portent à hauteur du véhicule à un feu rouge et lui demandent de stationner.

La voiture redémarre, grille le feu et continue de rouler près de la station de RER Nanterre-Préfecture, les deux policiers à ses trousses, avant d'être coincée dans les bouchons.

Les deux policiers ont alors mis pied à terre et "crié au conducteur de s'arrêter" en se positionnant "sur le côté gauche" de la voiture, "l'un au niveau de la portière du conducteur, l'autre près de l'aile avant gauche", selon le procureur.

Ils disent "avoir tous deux sorti leurs armes et les avoir pointées sur le conducteur pour le dissuader de redémarrer en lui demandant de couper le contact".

Quand la voiture redémarre, un des policiers tire à bout portant et le véhicule finit sa course dans un élément de mobilier urbain. Il est 8h19.

Les premiers secours prodigués par le policier auteur du tir ne permettront pas de sauver Nahel, pas plus que les tentatives des sapeurs-pompiers. Le décès est constaté à 9h15. Il est dû, selon l'autopsie, à une balle qui a traversé le bras gauche et le thorax de la victime de gauche à droite.

Les protagonistes

Le policier qui a reconnu être l'auteur du coup de feu est un motard âgé de 38 ans. Les analyses toxicologiques et de dépistage d'alcoolémie se sont avérées négatives.

Le conducteur, Nahel, avait 17 ans. Il était élevé seul par sa mère, assure cette dernière. Il fréquentait régulièrement le centre de loisirs du quartier du Vieux-Pont, selon une Nanterrienne interrogée par l'AFP.

Né en 2006, il était connu pour des faits de refus d'obtempérer, les derniers ayant donné lieu à sa présentation au parquet dimanche dernier, en vue d'une convocation en septembre prochain devant un tribunal pour enfants.

A bord de la Mercedes, aucun objet dangereux ni produit stupéfiant n'a été découvert.

Deux passagers se trouvaient dans la Mercedes: un à l'avant, qui a pris la fuite, et un autre à l'arrière, entendu par les enquêteurs et dont la garde à vue a été levée mardi après-midi.

Deux enquêtes puis une information judiciaire ouvertes

Deux enquêtes ont été ouvertes mardi par le parquet de Nanterre.

L'une, pour refus d'obtempérer et pour tentative d'homicide volontaire sur personne dépositaire de l'autorité publique, a été confiée au commissariat de Nanterre et à la sûreté territoriale des Hauts-de-Seine.

L'autre, pour homicide volontaire par dépositaire de l'ordre public, a été menée par l'Inspection générale de la police nationale (IGPN), la "police des polices".

Les enquêteurs ont épluché les images de vidéosurveillance et celles amateurs diffusées sur les réseaux sociaux, et ont interrogé à plusieurs reprises les policiers, y compris dans le cas d'une confrontation.

A ce stade, selon le procureur, "l'exploitation des vidéos confirme les déclarations des policiers sur le parcours du véhicule et le refus d'obtempérer".

Pour le reste, une information judiciaire pour homicide volontaire a été ouverte visant le policier auteur du coup de feu, qui avait été placé en garde à vue mardi.

"Le parquet considère que les conditions légales d'usage de l'arme n'étaient pas réunies", a expliqué Pascal Prache. "Au regard des faits et de la nécessité de préserver les investigations", le procureur a requis le placement en détention provisoire de l'auteur du tir.

Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, a demandé au préfet de police la suspension administrative de ce policier.

La version policière selon laquelle l'adolescent aurait foncé sur le motard a été infirmée par une vidéo du drame circulant sur les réseaux sociaux. On y entend distinctement "tu vas te prendre une balle dans la tête", sans que l'on puisse attribuer cette phrase à quelqu'un en particulier.

Les avocats de la famille de Nahel ont indiqué avoir déposé plainte jeudi pour homicide volontaire et pour faux en écriture publique, et demandé le dépaysement de l'enquête.

Refus d'obtempérer: Bernard Cazeneuve réfute que la loi soit un «permis de tuer»

L'ancien Premier ministre socialiste et ministre de l'intérieur Bernard Cazeneuve a réfuté jeudi auprès de l'AFP que la loi modifiant les règles d'usage de leur arme de service par les policiers, qu'il a fait adopter en 2017, soit une loi «permis de tuer», comme l'affirme Jean-Luc Mélenchon.

«Ce texte n'est pas du tout un texte qui dit aux policiers +vous pouvez tirer+», a affirmé M. Cazeneuve, alors que certains accusent l'application de cette loi d'être la cause du tir du policier qui a tué un jeune automobiliste de 17 ans à Nanterre, qui refusait d'obtempérer à un contrôle.

«Ce n'est pas la loi +permis de tuer+», a-t-il insisté. «C'est un texte qui dit : +vous ne pouvez tirer que lorsque vous êtes en situation de légitime défense+. Hors le cadre de la légitime défense, l'utilisation de la force non proportionnée et aboutissant à des drames peut faire l'objet d'une condamnation pénale des policiers», a-t-il précisé.

«Si on trouve un alinéa qui permet de légitimer ce qui a pu se passer à Nanterre, vous me dites quel alinéa. Le permis de tuer, il est où dans ce texte ?», a-t-il demandé, assurant que selon cette loi, «quelqu'un qui part avec un véhicule et qui ne menace personne de mort avec son véhicule, ne peut pas se voir tirer dessus».

«Extrêmement choqué» par les images de Nanterre, M. Cazeneuve exprime toute sa «solidarité» à la famille de la victime, appelant aussi «au calme et à l'esprit de responsabilité».

Mais «quand il y a une tragédie de cette nature, le seul devoir d'un républicain c'est de dire la vérité et de rappeler les faits, pas d'instrumentaliser des drames, en essayant d'attiser le feu qui couve», remarque-t-il.

L'ancien Premier ministre rappelle aussi que «cette loi a été adoptée dans des circonstances particulières, celles des attentats terroristes de 2015 et 2016, où la question se posait de savoir comment des policiers pouvaient interrompre le périple meurtrier d'un terroriste».

Il explique notamment qu'à l'issue d'un groupe de travail parlementaire, «nous avions décidé non pas d'ajouter des dispositions nouvelles en droit mais de transcrire dans la loi, à droit constant, ce que la jurisprudence avait déjà arrêté de dispositions» sur la légitime défense.

Alors que La France insoumise a déposé une proposition de loi pour «abroger l’article 435-1» du code de la sécurité intérieure portant sur cette légitime défense, Bernard Cazeneuve n'est «jamais défavorable à ce qu'on révise un texte de loi, si c'est nécessaire, mais faisons-le de façon rationnelle. Regardons ce qui dans ce texte peut éventuellement poser problème», dit-il.


Ultime vote sur le budget de la Sécurité sociale à l'Assemblée

Le Premier ministre français Sébastien Lecornu (au centre) s'exprime lors d'une déclaration gouvernementale sur la stratégie de défense nationale à l'Assemblée nationale, à Paris, le 10 décembre 2025. (AFP)
Le Premier ministre français Sébastien Lecornu (au centre) s'exprime lors d'une déclaration gouvernementale sur la stratégie de défense nationale à l'Assemblée nationale, à Paris, le 10 décembre 2025. (AFP)
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  • L’Assemblée devrait adopter définitivement le budget de la Sécurité sociale 2026, fruit de compromis, malgré une majorité introuvable et sans 49.3
  • Le budget de l’État reste très incertain : déficit visé à 5% du PIB, fortes divergences sur les recettes, CMP à haut risque

PARIS: Sauf surprise, l'Assemblée nationale devrait définitivement adopter mardi le budget de la Sécurité sociale pour 2026, un succès arraché à force de concessions par Sébastien Lecornu, qui risque toutefois de ne pas réussir le même pari pour le budget de l'Etat, à l'issue bien plus incertaine.

Alors qu'approche la date butoir du 31 décembre, l'heure est aux dernières tractations pour les parlementaires, au terme de longues semaines de débats. Tous les yeux sont désormais braqués sur le projet de loi de finances (PLF), avec des négociations décisives jusqu'au week-end.

Il y a une semaine pourtant, beaucoup doutaient d'une possible adoption du premier des deux textes budgétaires, la loi de financement de la Sécurité sociale, qui doit notamment acter la suspension de la réforme des retraites.

Pour le PS, qui a érigé cette mesure en condition de sa non-censure, l'étape doit marquer le succès de sa stratégie de négociation avec l'exécutif, à rebours du reste de la gauche. Et pour le Premier ministre, elle couronnerait au moins temporairement sa méthode du compromis.

Après un dernier passage express au Sénat vendredi, le texte revient mardi dans l'hémicycle, où les députés devront renouveler le scrutin serré de la semaine dernière (247 voix contre 234), à haut risque en l'absence de majorité et de 49.3.

Les socialistes, quoique dans l'opposition, avaient consenti à massivement voter pour. Hésitant jusqu'au dernier moment à voter contre, les Ecologistes s'étaient en majorité abstenus. Et malgré les consignes d'abstention de leur parti, 18 députés LR et 9 Horizons l'avaient soutenu.

Au gouvernement, une issue semblable est attendue mardi, même s'il "faut veiller à ce qu'il n'y ait pas de démobilisation" dans l'hémicycle, concède un ministre.

Les syndicats FO et CGT ont appelé à des rassemblements devant l'Assemblée, critiquant notamment la limitation de la durée des arrêts maladie, ou une taxe sur les mutuelles dont ils craignent la répercussion sur les cotisations.

Le texte prévoit par ailleurs la création d'un nouveau congé de naissance, ou d'un "réseau France santé" voulu par M. Lecornu pour l'accès aux soins.

Le gouvernement a vu sa copie profondément remaniée par les députés, qui ont supprimé le gel des pensions de retraite et minima sociaux, et contraint l'exécutif à renoncer à doubler les franchises médicales.

Le déficit anticipé pour la Sécurité sociale est de 19,4 milliards d'euros en 2026 (contre 23 milliards en 2025). Mais au prix de transferts de 4,5 milliards d'euros des caisses de l'Etat vers celles de la Sécu.

- Négociations députés-sénateurs -

Des transferts qui contribuent à compliquer l'équation pour le budget de l'Etat, où ils doivent être compensés.

La copie du budget de l'Etat adoptée lundi au Sénat, qui a peiné à trouver des économies significatives dans les dépenses, porterait le déficit à 5,3% du PIB. Or le gouvernement a placé l'objectif à 5%.

Une commission mixte paritaire (CMP) réunissant sept députés et sept sénateurs doit tenter de trouver un accord vendredi et possiblement samedi, une opération périlleuse au vu des divergences entre les deux chambres.

L'Assemblée avait massivement rejeté le texte en première lecture.

Les négociations avant et pendant la CMP porteront notamment sur la question des recettes, alors que les socialistes réclament des mesures de justice fiscale, quand la droite se montre intransigeante dans son refus de nouveaux prélèvements.

"Il ne pourra pas y avoir d'accord sur un budget qui augmenterait considérablement les impôts et ne réduirait pas significativement la dette", insiste le chef des Républicains Bruno Retailleau.

Même si l'ancien socle commun, majoritaire au sein de la CMP, trouve un accord, il faudra encore qu'il puisse être adopté la semaine prochaine à l'Assemblée.

Et ce alors que les socialistes promettent cette fois de s'abstenir au mieux, et les Écologistes de voter contre.

Autres possibilités: utiliser le 49.3 en s'assurant d'une non-censure dans la foulée -- comme le plaident l'ancienne Première ministre Élisabeth Borne ou l'ex-président François Hollande -- ou se résoudre à une loi spéciale, avec une reprise des négociations en janvier.

Une dernière option loin de remporter l'enthousiasme général.

"Il faut que ça s'arrête cette séquence budgétaire", estime un cadre socialiste. "On connaît toutes les données du problème. Si le compromis est possible, alors il faut qu'il ait lieu maintenant."


Le musée du Louvre resté fermé lundi en raison d'une grève

Le LNR, ou Louvre Nouvelle Renaissanc, et une rénovation à grande échelle annoncée par le président français Emmanuel Macron.  Les organisations syndicales ont ensuite été reçues au ministère de la Culture. (AFP)
Le LNR, ou Louvre Nouvelle Renaissanc, et une rénovation à grande échelle annoncée par le président français Emmanuel Macron. Les organisations syndicales ont ensuite été reçues au ministère de la Culture. (AFP)
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  • Les personnels du musée le plus visité au monde, réunis en assemblée générale, avaient voté "à l'unanimité" une grève reconductible pour dénoncer les conditions de travail et d'accueil du public
  • Plusieurs dizaines d'agents ont ensuite déployé devant la pyramide une banderole indiquant "Le Louvre en lutte pour des conditions de travail décentes, hausse des salaires, + d'effectifs contre la vétusté du palais et le projet LNR"

PARIS: Le musée du Louvre à Paris est resté fermé lundi en raison d'une "grève reconductible" de ses agents, une nouvelle épreuve pour une institution dans la tourmente depuis le spectaculaire cambriolage du 19 octobre et la mise à nu de ses dysfonctionnements.

A 9H00 (8H00 GMT), les portes du musée sont restées closes devant une file de visiteurs, puis la direction a annoncé la fermeture pour "toute la journée".

"Je suis vraiment déçu, le Louvre était la raison principale de notre venue à Paris, parce que nous voulions voir Mona Lisa", le célèbre tableau de La Joconde de Léonard de Vinci, a déclaré à l'AFP Minsoo Kim, 37, Coréen, en lune de miel.

"C'est normal qu'ils fassent grève s'ils ont besoin de meilleures conditions de travail. Bien sûr, en tant que touriste, ce n'est pas génial d'être ici et que le musée soit fermé, mais nous avons réussi à reporter notre visite, donc ça n'est pas un problème", a estimé de son côté Patricia, une touriste brésilienne qui n'a pas souhaité donner son nom.

Un peu plus tôt, les personnels du musée le plus visité au monde, réunis en assemblée générale, avaient voté "à l'unanimité" une grève reconductible pour dénoncer les conditions de travail et d'accueil du public.

Plusieurs dizaines d'agents ont ensuite déployé devant la pyramide une banderole indiquant "Le Louvre en lutte pour des conditions de travail décentes, hausse des salaires, + d'effectifs contre la vétusté du palais et le projet LNR".

Le LNR, ou Louvre Nouvelle Renaissanc, et une rénovation à grande échelle annoncée par le président français Emmanuel Macron.

Les organisations syndicales ont ensuite été reçues au ministère de la Culture.

"Nous avons eu quelques avancées en matière de rémunération, mais cela reste insuffisant et nous attendons une proposition écrite du ministère - certainement mardi - pour nous prononcer", a déclaré à l'AFP Alexis Fritche, du syndicat CFDT-Culture, à l'issue de deux heures de réunion.

Selon lui, "pas d'avancée" non plus sur les emplois: "On nous annonce 28 postes pour la surveillance, mais ils proviennent de redéploiements".

A l'issue de l'AG, le délégué du syndicat CGT Christian Galani avait rappelé que la filière accueil et surveillance avait "perdu 200 équivalents temps plein en l'espace de 15 ans, alors que la fréquentation a augmenté de moitié".

Une prochaine AG est prévue mercredi à 9H00 locales, le mardi étant le jour de fermeture hebdomadaire du Louvre.

Conflit social et réorganisation 

"On est en colère", "nous ne sommes pas d'accord avec la manière dont Le Louvre a été géré", a dit devant la presse Elise Muller, agente de surveillance du syndicat Sud Culture.

Valérie Baud, représentante CFDT, s'était félicitée d'un mouvement "interprofessionnel", regroupant métiers de la "conservation, agents d'accueil et de surveillance, professions support, juristes, graphistes".

En parallèle de ce conflit social, le musée doit faire face à une réorganisation à marche forcée et continuer de répondre aux interrogations sur les failles qui ont permis à un commando de s'emparer de huit joyaux de la Couronne, toujours introuvables.

Fragilisée, la présidente du Louvre, Laurence des Cars, devra travailler en tandem avec Philippe Jost, le haut fonctionnaire chargé du chantier de reconstruction de Notre-Dame, à qui la ministre française de la Culture Rachida Dati a confié vendredi la mission de "réorganiser en profondeur le musée".

Audition de la présidente mercredi 

"Des mesures indispensables sont à prendre, bien au-delà de la sûreté et de la sécurité", a déclaré Mme Dati.

"Toute réflexion sur l'avenir du Louvre ne saurait se limiter à une approche technico-organisationnelle", avait réagi la CFDT.

Le ministère de la Culture a précisé que la mission de M. Jost serait menée en janvier et février et que ses recommandations étaient attendues "fin février".

Des sénateurs vont par ailleurs poursuivre leur quête de réponses sur les dysfonctionnements du musée.

Mardi, ils doivent entendre pour la première fois l'ancien président du Louvre Jean-Luc Martinez, destinataire pendant son double mandat (2013-2021) de deux audits alarmants peu suivis d'effets.

Mercredi, ce sera Mme des Cars, à la tête du musée depuis fin 2021, pour comprendre notamment comment ces deux audits n'ont été découverts par l'actuelle direction qu'après le casse du 19 octobre.

 


La mère du journaliste français Christophe Gleizes a adressé une demande de grâce au président algérien

Le journaliste de 36 ans a par ailleurs formé un pourvoi en cassation contre sa condamnation pour obtenir un nouveau procès, ont fait savoir ses avocats dimanche. (AFP)
Le journaliste de 36 ans a par ailleurs formé un pourvoi en cassation contre sa condamnation pour obtenir un nouveau procès, ont fait savoir ses avocats dimanche. (AFP)
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  • Dans un communiqué publié lundi, l'association Reporters sans frontières (RSF), qui coordonne le comité de soutien de Christophe Gleizes, appuie cette demande de grâce "afin de mettre fin à une grave injustice"
  • La mère du journaliste sportif français Christophe Gleizes, condamné début décembre en Algérie à sept ans de prison ferme en appel, a transmis une demande de grâce au président algérien Abdelmadjid Tebboune, selon une lettre consultée lundi par l'AFP

PARIS: La mère du journaliste sportif français Christophe Gleizes, condamné début décembre en Algérie à sept ans de prison ferme en appel, a transmis une demande de grâce au président algérien Abdelmadjid Tebboune, selon une lettre consultée lundi par l'AFP.

"Je vous demande respectueusement de bien vouloir envisager de gracier Christophe, afin qu'il puisse retrouver sa liberté et sa famille", écrit Sylvie Godard dans cette missive du 10 décembre, assurant faire appel à la "haute bienveillance" du président algérien.

Le journaliste de 36 ans a par ailleurs formé un pourvoi en cassation contre sa condamnation pour obtenir un nouveau procès, ont fait savoir ses avocats dimanche.

Collaborateur des magazines français So Foot et Society, Christophe Gleizes a été arrêté le 28 mai 2024 en Algérie où il s'était rendu pour un reportage sur le club de football le plus titré du pays, la Jeunesse Sportive de Kabylie (JSK), basé à Tizi-Ouzou, à 100 kilomètres à l'est d'Alger.

Le 3 décembre 2025, la Cour d'appel de Tizi-Ouzou a confirmé sa condamnation à sept ans de prison pour "apologie du terrorisme". La justice algérienne lui reproche des contacts avec des personnes liées au mouvement séparatiste MAK (Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie), classé terroriste en Algérie.

"La confirmation de la condamnation à sept années de prison ferme a été pour Christophe, comme pour moi et ma famille, un choc immense", indique Mme Godard dans sa lettre au chef de l'État algérien, qu'elle dit écrire "avec gravité et une profonde émotion".

"Cette sentence nous est incompréhensible au regard des faits et du parcours de mon fils", développe-t-elle. "Nulle part dans aucun de ses écrits vous ne trouverez trace d'un quelconque propos hostile à l'Algérie et à son peuple."

Deux jours après la décision en appel, le président français Emmanuel Macron avait jugé "excessif" et "injuste" le jugement prononcé contre Christophe Gleizes, se disant déterminé à trouver "une issue favorable".

"Grave injustice" 

Dans un communiqué publié lundi, l'association Reporters sans frontières (RSF), qui coordonne le comité de soutien de Christophe Gleizes, appuie cette demande de grâce "afin de mettre fin à une grave injustice".

"Nous appelons désormais les autorités algériennes à prendre rapidement la seule décision possible dans ce dossier : libérer Christophe et lui permettre de retrouver les siens le plus rapidement possible", détaille Thibaut Bruttin, directeur général de l'association, cité dans le communiqué.

M. Gleizes est actuellement le seul journaliste français en détention à l'étranger.

Sa condamnation en première instance en juin 2025 avait été prononcée au pic d'une grave crise diplomatique entre la France et l'Algérie, marquée notamment par le retrait des deux ambassadeurs et des expulsions réciproques de diplomates.

Mais les relations bilatérales avaient semblé en voie d'apaisement après l'octroi d'une grâce et la libération par Alger de l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, le 12 novembre

Selon son avocat français Emmanuel Daoud, Christophe Gleizes a, parallèlement au recours en grâce et au pourvoi en cassation, la possibilité d'adresser une demande de mise en liberté à la Cour Suprême, qui peut s'accompagner "d'une demande d'aménagement de sa peine".

"Il est aussi très important, psychologiquement, pour Christophe, de contester toute culpabilité car, comme il l'a dit à la Cour, il n'a fait que son métier et n'a, en aucune façon, enfreint la déontologie journalistique", assure l'avocat, cité dans le communiqué publié lundi.