Comment Bruxelles veut imposer sa loi aux géants de la tech

Le commissaire européen au marché intérieur et aux services Thierry Breton donne une conférence de presse conjointe avec le vice-président exécutif européen sur la loi sur la gouvernance des données à la Commission européenne à Bruxelles le 25 novembre 2020. (STEPHANIE LECOCQ/POOL/AFP)
Le commissaire européen au marché intérieur et aux services Thierry Breton donne une conférence de presse conjointe avec le vice-président exécutif européen sur la loi sur la gouvernance des données à la Commission européenne à Bruxelles le 25 novembre 2020. (STEPHANIE LECOCQ/POOL/AFP)
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Publié le Vendredi 11 décembre 2020

Comment Bruxelles veut imposer sa loi aux géants de la tech

  • "L'internet ne peut rester un Far west", affirme le commissaire au Marché intérieur, Thierry Breton, chargé de préparer de nouvelles régulations européennes
  • L'assassinat en France du professeur Samuel Paty, ciblé sur les réseaux sociaux, a souligné les dangers de l'anarchie numérique

BRUXELLES : Haine en ligne, pratiques anticoncurrentielles et loi du plus fort... "L'internet ne peut rester un Far west", affirme le commissaire au Marché intérieur, Thierry Breton, chargé de préparer de nouvelles régulations européennes avec la vice-présidente de la Commission, Margrethe Vestager.

Voici les principaux points de leur projet.

Haine en ligne et désinformation 

L'assassinat en France du professeur Samuel Paty, ciblé sur les réseaux sociaux, a souligné les dangers de l'anarchie numérique. La désinformation via les plateformes avait été dénoncée après l'élection américaine de 2016 ou le référendum sur le Brexit au Royaume-Uni.

Le Règlement sur les Services Numériques ("Digital Services Act" ou DSA) imposera à tous les intermédiaires en ligne de nouvelles obligations dont celle de coopérer avec les régulateurs pour retirer des contenus dangereux. La législation définira au niveau européen ce qui est hors la loi, comme les discours de haine, le terrorisme, la pédopornographie.

Contrefaçons et produits dangereux 

La vente sur internet est propice aux arnaques, et les plateformes sont régulièrement montrées du doigt pour le manque de contrôle sur leurs revendeurs. Sous couvert de bonnes affaires, certains écoulent des contrefaçons et des produits bafouant les normes européennes.

Le DSA imposera aux vendeurs en ligne de "mettre en place des procédures simples et claires pour gérer les notifications" de pratiques illégales, a indiqué Mme Vestager. Ils devront aussi "contrôler l'identité des revendeurs avant de les autoriser sur leur plateforme".

Des règles visant les géants 

La grande nouveauté sera la création d'interdictions et d'obligations qui toucheront uniquement les acteurs les plus puissants. Ces règles figureront dans le Règlement sur les Marchés Numériques ("Digital Market Act" ou DMA), complément du DSA.

"Nous allons augmenter le pouvoir de l'UE de réduire les comportements déloyaux des plateformes systémiques pour que l'internet ne profite pas seulement à une poignée de compagnies mais aussi à de nombreuses petites et moyennes entreprises", assure Thierry Breton, qui promet "des sanctions dissuasives".

La Commission affirme élaborer "des critères quantitatifs et qualitatifs" pour déterminer les entreprises soumises à ces règles spécifiques.

Transparence des algorithmes 

Les grandes plateformes devront "fournir plus d'informations sur le fonctionnement de leurs algorithmes", a expliqué Mme Vestager.

Elles "devront nous dire comment elles décident des informations et produits qu'elles nous recommandent, et de ceux qu'elles cachent, et nous donner la possibilité d'influencer ces décisions. Elles devront nous dire qui paye pour les publicités que nous voyons et pourquoi nous avons été ciblés".

Google, par exemple, est accusé de paramétrer son moteur de recherche pour rendre ses offres plus visibles que celles des concurrents. La nouvelle loi "visera l'interdiction de l'auto-préférence", affirme Mme Vestager.

Partage des données

Certaines contraintes "concerneront les données et le partage de données", assure la vice-présidente de la Commission. 

"Les personnes qui contrôlent les données, contrôlent les algorithmes et donc la nouvelle économie, a expliqué à l'AFP Alexandre de Streel, professeur de droit à l'Université de Namur, spécialiste du numérique. Si on veut instaurer une concurrence à armes égales, le remède, c'est le partage des données".

L'exécutif européen reste évasif sur les données personnelles mais envisage d'interdire aux plateformes systémiques de profiter des données de leurs clients business pour les concurrencer, comme Amazon est accusé de le faire avec des revendeurs de sa plateforme.

Interopérabilité

Le phénomène est bien connu des utilisateurs de réseaux sociaux comme Facebook, Instagram ou Whatsapp: il est intéressant d'en faire partie si on peut interagir avec un maximum de gens. Quand les outils disponibles ne communiquent pas entre eux, on plébiscite les plus utilisés en favorisant du même coup la domination des plus forts.

Solution: permettre aux utilisateurs des petits réseaux de communiquer avec ceux des géants américains. "Une façon d'empêcher les plateformes systémiques d'enfermer leurs utilisateurs pourrait être de rendre plus facile le changement de plateforme ou bien le fait de pouvoir utiliser plus qu'un seul service", a indiqué Mme Vestager.

Nouveaux outils d'investigation 

L'UE peut lancer des enquêtes qui durent des années quand elle constate un abus de position dominante. Mais les amendes qui en résultent ne sont pas dissuasives pour les géants du numériques et arrivent trop tard, quand la concurrence a déjà disparu.

Mme Vestager proposera de nouveaux outils d'investigation afin de "pouvoir intervenir sur ces marchés avant que la dominance soit établie".


Les ministres du Groupe E3 condamnent les frappes israéliennes à Doha

Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
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  • Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza
  • Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas

PARIS: Les ministres des Affaires étrangères de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni ont condamné, dans une déclaration conjointe, les frappes israéliennes ayant visé Doha le 9 septembre. Ils estiment que ces attaques constituent une violation de la souveraineté du Qatar et représentent un risque d’escalade supplémentaire dans la région.

Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza. « Nous appelons toutes les parties à intensifier leurs efforts pour parvenir à un cessez-le-feu immédiat », ont-ils insisté.

Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas. Ils appellent les parties à « faire preuve de retenue » et à saisir l’opportunité de rétablir la paix.

Les ministres ont réaffirmé que la priorité devait rester la mise en place d’un cessez-le-feu permanent, la libération des otages et l’acheminement massif d’aide humanitaire à Gaza pour enrayer la famine. Ils demandent l’arrêt immédiat des opérations militaires israéliennes dans la ville de Gaza, dénonçant les déplacements massifs de civils, les pertes humaines et la destruction d’infrastructures vitales.

Ils exhortent par ailleurs à garantir aux Nations unies et aux ONG humanitaires un accès sûr et sans entrave à l’ensemble de la bande de Gaza, y compris dans le Nord.

Enfin, le Groupe E3 a rappelé sa condamnation « sans équivoque » des crimes commis par le Hamas, qualifié de mouvement terroriste, qui doit, selon eux, « libérer immédiatement et sans condition les otages, être désarmé et écarté définitivement de la gouvernance de la bande de Gaza ».


L’ONU adopte une résolution franco-saoudienne pour la paix israélo-palestinienne sans le Hamas

L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
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  • Résolution adoptée par 142 voix pour, 10 contre — dont Israël et les États-Unis
  • Le vote précède un sommet de haut niveau co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre

​​​​​​NEW YORK : L’Assemblée générale des Nations unies a voté massivement vendredi en faveur de l’adoption de la « Déclaration de New York », une résolution visant à relancer la solution à deux États entre Israël et la Palestine, sans impliquer le Hamas.

Le texte a été approuvé par 142 pays, contre 10 votes négatifs — dont Israël et les États-Unis — et 12 abstentions. Il condamne fermement les attaques du Hamas du 7 octobre 2023, exige le désarmement du groupe, la libération de tous les otages, et appelle à une action internationale collective pour mettre fin à la guerre à Gaza.

Intitulée officiellement « Déclaration de New York sur le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution à deux États », la résolution a été présentée conjointement par l’Arabie saoudite et la France, avec le soutien préalable de la Ligue arabe et de 17 États membres de l’ONU.

Le texte souligne la nécessité de mettre fin à l’autorité du Hamas à Gaza, avec un transfert des armes à l’Autorité palestinienne, sous supervision internationale, dans le cadre d’une feuille de route vers une paix durable. Celle-ci inclut un cessez-le-feu, la création d’un État palestinien, le désarmement du Hamas, et une normalisation des relations entre Israël et les pays arabes.

L’ambassadeur de France, Jérôme Bonnafont, qui a présenté la résolution, l’a qualifiée de « feuille de route unique pour concrétiser la solution à deux États », soulignant l’engagement de l’Autorité palestinienne et des pays arabes en faveur de la paix et de la sécurité. Il a aussi insisté sur l’urgence d’un cessez-le-feu immédiat et de la libération des otages.

Ce vote intervient à quelques jours d’un sommet de haut niveau de l’ONU, co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre, où le président Emmanuel Macron s’est engagé à reconnaître officiellement un État palestinien.

La représentante américaine, Morgan Ortagus, s’est vivement opposée à la résolution, la qualifiant de « coup de communication malvenu et malavisé » qui récompenserait le Hamas et nuirait aux efforts diplomatiques authentiques.

Elle a dénoncé la mention du « droit au retour » dans le texte, estimant qu’il menace le caractère juif de l’État d’Israël.

« Cette résolution est un cadeau au Hamas,» a déclaré Mme Ortagus, ajoutant que le désarmement du Hamas et la libération des otages étaient la clé de la fin de la guerre. Elle a exhorté les autres nations à se joindre aux États-Unis pour s'opposer à la déclaration.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Frappes ukrainiennes sur les raffineries et forte demande: en Russie, l'essence devient chère

Début septembre, le prix de la tonne d'AI-95, l'un des carburants sans-plomb les plus populaires en Russie, s'est envolé pour atteindre plus de 82.000 roubles (environ 826 euros), tutoyant des records, selon les données de la bourse de Saint-Pétersbourg. (AFP)
Début septembre, le prix de la tonne d'AI-95, l'un des carburants sans-plomb les plus populaires en Russie, s'est envolé pour atteindre plus de 82.000 roubles (environ 826 euros), tutoyant des records, selon les données de la bourse de Saint-Pétersbourg. (AFP)
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  • Mercredi, le média Izvestia évoquait des "interruptions d'approvisionnement" dans "plus de dix régions" de Russie, l'un des principaux producteurs de pétrole au monde
  • A Moscou, vitrine de la Russie, pas de pénurie mais une hausse qui a propulsé le litre de sans-plomb 95 à plus de 66 roubles (0,67 euro)

MOSCOU: "Doucement mais sûrement": Oleg fait le plein d'essence à Moscou et vitupère contre la hausse des prix nourrie par une demande accrue et les frappes ukrainiennes contre les infrastructures pétrolières, secteur clé de l'économie russe que les Occidentaux veulent sanctionner.

"Tout le monde l'a remarqué", tonne Oleg, retraité de 62 ans: les prix des carburants vont crescendo à la pompe. Au 1er septembre, l'essence au détail coûtait 6,7% de plus que fin 2024, selon Rosstat, l'agence nationale des statistiques.

Ce renchérissement s'inscrit dans un contexte de hausse générale des prix, avec une inflation annuelle qui a été de 8,14% en août, à l'heure où la Russie intensifie l'offensive qu'elle a lancée en 2022 en Ukraine.

Début septembre, le prix de la tonne d'AI-95, l'un des carburants sans-plomb les plus populaires en Russie, s'est envolé pour atteindre plus de 82.000 roubles (environ 826 euros), tutoyant des records, selon les données de la bourse de Saint-Pétersbourg.

Et depuis le début de l'été, les réseaux sociaux sont saturés de vidéos montrant des files d'attente devant les stations-service de l'Extrême-Orient russe, en Crimée - région que la Russie a annexée au détriment de Kiev en 2014 -, et dans certaines régions du sud proches de l'Ukraine, pour cause de pénurie.

Mercredi, le média Izvestia évoquait des "interruptions d'approvisionnement" dans "plus de dix régions" de Russie, l'un des principaux producteurs de pétrole au monde.

Raffineries frappées 

A Moscou, vitrine de la Russie, pas de pénurie mais une hausse qui a propulsé le litre de sans-plomb 95 à plus de 66 roubles (0,67 euro). Ce prix, qui reste bien inférieur à ceux affichés dans de nombreux pays européens, surprend le consommateur russe, habitué à ne pas payer cher l'essence et au revenu moyen moindre.

Artiom, un Moscovite qui ne souhaite pas donner son nom de famille, observe cette augmentation "depuis le début de l'année". "Pour des personnes ordinaires, 300 ou 400 roubles en plus par plein (3 à 4 euros, ndlr), cela commence à être sensible", dit-il.

Sur le site Gazeta.ru, Igor Iouchkov, analyste au Fonds national de sécurité énergétique, met en avant l'augmentation d'"environ 16%" du droit d'accise (impôt indirect) depuis le 1er janvier et la baisse de subsides versés aux compagnies pétrolières.

Car, comme l'explique à l'AFP Sergueï Teriochkine, expert en questions énergétiques, "plus les subventions sont faibles, plus la rentabilité est faible", ce qui pousse les pétroliers à "répercuter" ces pertes sur les prix au détail.

La demande a, elle, été dopée par les départs en vacances et les engins agricoles.

Restent - surtout - les frappes contre les raffineries et dépôts de pétrole que l'Ukraine a multipliées afin de toucher Moscou au portefeuille et d'entraver sa capacité à financer son offensive.

"Les frappes ont ciblé de grandes raffineries dans la partie européenne de la Russie", notamment dans les régions de Samara, Riazan, Volgograd et Rostov, énumère Alexandre Kots, journaliste russe spécialiste des questions militaires, sur Telegram.

"Ce n'est rien!" 

L'une de ces attaques, à la mi-août, a touché la raffinerie de Syzran, dans la région de Samara, selon l'état-major ukrainien. Le complexe se trouve à plus de 800 km de la frontière ukrainienne. Il est présenté par Kiev comme le "plus important du système Rosneft", géant russe des hydrocarbures.

Moscou n'a pas quantifié l'impact de ces frappes, mais dans le journal Kommersant, l'analyste Maxime Diatchenko parle d'une baisse de la production "de près de 10%" depuis le début de l'année.

"C'est rien!", assure Alexandre, un homme d'affaires moscovite, après avoir rempli le réservoir de sa berline allemande. "Une frappe, deux frappes, trois frappes, ça n'est rien pour le marché en général ou pour les prix".

"Le pays a besoin d'argent. L'augmentation du prix de l'essence, c'est une façon d'augmenter le revenu de l'Etat", estime de son côté Vladimir, un Moscovite de 50 ans.

Pour tenter de stabiliser la situation, Moscou a prolongé une interdiction d'"exporter de l’essence pour les automobiles" jusque fin octobre.

La Russie reste par ailleurs un exportateur majeur de pétrole brut, des exportations que les Occidentaux entendent étouffer pour tarir une des principales sources de financement de l'offensive russe en Ukraine, pays qui compte l'Union européenne comme principale alliée.