Accord international pour décarboner le secteur maritime, les ONG très critiques

Les ONG écologistes se sont, elles, montrées très critiques,  demandant de cibler -50% d'ici 2030 et la neutralité carbone d'ici 2040 (Photo, AFP).
Les ONG écologistes se sont, elles, montrées très critiques, demandant de cibler -50% d'ici 2030 et la neutralité carbone d'ici 2040 (Photo, AFP).
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Publié le Samedi 08 juillet 2023

Accord international pour décarboner le secteur maritime, les ONG très critiques

  • En 2018, l'OMI avait donné aux transporteurs l'objectif de réduire leurs émissions de CO2 de 50% en 2050 par rapport à 2008
  • A l'inverse, nombre de gros exportateurs comme la Chine, le Brésil, l'Argentine, entre autres, ont freiné

LONDRES: Un accord international pour décarboner le secteur très polluant du fret maritime a été promulgué vendredi par l'Organisation maritime internationale (OMI), mais il est moins ambitieux qu'espéré et très critiqué par les ONG.

Objectifs de réduction des émissions polluantes plus modestes, absence de mesures contraignantes, et le projet d'une taxe internationale sur les émissions de carbone du commerce maritime relégué dans un éventail de mesures possibles pour réduire les émissions du fret: les ONG dénoncent un compromis beaucoup trop timide.

L'accord met en avant "une ambition commune améliorée d'atteindre la neutralité carbone pour le fret maritime international près de 2050", et vise une réduction des émissions de CO2 "d'une moyenne d'au moins 40% d'ici 2030 comparé à 2008", écrit sur son site l'organisation, qui dépend de l'ONU.

Le compromis prévoit ainsi des objectifs "indicatifs" (donc non contraignants) de réduction des émissions polluantes d'au moins 70% d'ici 2040, avec en ligne de mire au moins 80%, comparé à 2008.

"C'est un jour important pour le climat" s'est félicité Dieter Janecek, qui représentait l'Allemagne lors des discussions cette semaine au siège de l'OMI.

"Nous devons cependant nous assurer d'atteindre l'objectif de température fixé par l'accord de Paris" de tendre à limiter la hausse à 1,5°C, insiste-t-il.

Le secrétaire d'État français chargé de la Mer Hervé Berville, a quant à lui salué une "étape majeure (...) vers la neutralité climatique" avant l'adoption de "mesures contraignantes".

"Nous nous sommes certes assis à la table des négociations avec des ambitions plus fortes que l'accord final obtenu", a-t-il admis, "mais il s'agit indéniablement d'un succès".

L'Union européenne réclamait en effet lors des négociations cette semaine au siège de l'OMI à Londres un objectif plus ambitieux de zéro émission nette en 2050 avec deux étapes intermédiaires: réduction de 29% en 2030 et 83% en 2040.

Les îles-États du Pacifique, particulièrement menacées par le réchauffement climatique, voulaient aller plus loin, soutenues par les États-Unis, le Royaume-Uni et le Canada: -96% d'ici 2040.

"Il reste toutefois beaucoup de travail pour s'assurer que le réchauffement plafonné à 1,5 degré (...) devienne une réalité", a souligné dans son discours de clôture, dont le texte a été reçu par l'AFP, le représentant à l'OMI des îles Marshall, Albon Ishoda.

En 2018, l'OMI avait donné aux transporteurs l'objectif de réduire leurs émissions de CO2 de 50% en 2050 par rapport à 2008, ce qui était largement jugé insuffisant.

«Profondément inquiets»

A l'inverse, nombre de gros exportateurs comme la Chine, le Brésil, l'Argentine, entre autres, ont freiné, affirmant que des objectifs trop stricts profiteraient aux pays riches, aux dépens des pays en développement.

Ils s'opposaient notamment au projet d'une taxe carbone, soutenu par le président français Emmanuel Macron et par des entreprises comme le géant du fret maritime Maersk.

Une éventuelle taxe n'apparaît désormais dans le projet d'accord que dans un éventail de mesures proposées pour réduire les émissions du fret.

Le panier de mesures de réduction des émissions polluantes à moyen terme devrait être finalisé et approuvé "d'ici 2025", et d'autres mesures "pourraient être finalisées et approuvées par le comité entre 2023 et 2030", selon le compromis.

Le vice-secrétaire général de la Chambre internationale de la marine marchande (ICS) Simon Bennett a salué "un signal très fort aux exploitants de navires et surtout aux producteurs d'énergie" pour fournir "des carburants marins sans émissions de gaz à effet de serre en très grandes quantités".

La très grande majorité des 100.000 navires qui transportent 90% des marchandises mondiales sont propulsés par du fioul lourd. Le secteur est responsable de près de 3% des émissions de CO2 mondiales d'après l'ONU.

S'il s'agit d'une stratégie "ambitieuse, c'est indéniable", a estimé le délégué général d'Armateurs de France Jean-Philippe Casanova. "Les technologies qui permettraient de décarboner tous les navires ne sont pas encore connues", a-t-il fait remarquer.

Les ONG écologistes se sont, elles, montrées très critiques. Elles demandaient de cibler -50% d'ici 2030 et la neutralité carbone d'ici 2040.

L'accord "n'est malheureusement pas à la hauteur des attentes", regrette Harjeet Singh, responsable de la stratégie politique mondiale du Climate Action Network International, insistant sur la "disparité évidente" avec les objectifs de l'accord de Paris.

A ce titre, il a également été jugé "très inférieur à ce qui est nécessaire" par l'association Clean Shipping Coalition, pour qui "la formulation du texte est vague et non contraignante".

Greenpeace a également jugé l'accord "trop faible" dans un secteur qui a "trop longtemps (...) fonctionné à l'abri des regards".

"Les représentants de la société civile sont profondément inquiets", conclut l'ONG Ocean Campaigns.


Mobilisation en soutien à Gaza: affrontements et intervention de la police sur le campus de la UCLA à Los Angeles

Des agents de la CHP marchent près d'un campement de partisans des Palestiniens de Gaza, sur le campus de l'UCLA, à Los Angeles, Californie, États-Unis, le 1er mai 2024. (Reuters)
Des agents de la CHP marchent près d'un campement de partisans des Palestiniens de Gaza, sur le campus de l'UCLA, à Los Angeles, Californie, États-Unis, le 1er mai 2024. (Reuters)
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  • Manifestants et contre-manifestants se sont opposés à coups de bâton et se sont lancé des projectiles
  • Quelques heures plus tôt, la police de New York avait délogé des manifestants pro-palestiniens barricadés dans un bâtiment de l'université Columbia, campus américain d'où est partie la mobilisation estudiantine pro-palestinienne

LOS ANGELES : Des affrontements ont éclaté dans la nuit de mardi à mercredi en marge d'un rassemblement étudiant dénonçant la guerre menée par Israël à Gaza à l'Université UCLA, à Los Angeles, dernier épisode d'un mouvement étudiant qui secoue les Etats-Unis.

Les heurts ont éclaté quand un important groupe de contre-manifestants, pour beaucoup masqués, a attaqué un campement pro-palestinien installé sur une pelouse de l'UCLA, selon un photographe de l'AFP sur place.

Les assaillants ont tenté d'enfoncer une barricade improvisée autour du campement, composée de barrières métalliques et de panneaux de contreplaqué. Manifestants et contre-manifestants se sont ensuite opposés à coups de bâton et se sont lancé des projectiles.

«La violence en cours à l'UCLA est absolument abjecte et inexcusable», a fustigé la maire de Los Angeles, Karen Bass, ajoutant que la police de la ville était déployée sur le campus.

Cette dernière a indiqué avoir été appelée en renfort par la direction après «de nombreux actes de violence commis dans le campement à l'intérieur du campus».

Tôt mercredi, les policiers étaient toujours présents en grand nombre sur le site universitaire.

Quelques heures plus tôt, la police de New York avait délogé des manifestants pro-palestiniens barricadés dans un bâtiment de l'université Columbia, intervenant manu militari sur le campus américain d'où est partie la mobilisation estudiantine pro-palestinienne.

Le campement de tentes installé sur la pelouse du site a été démantelé, a pu constater une journaliste de l'AFP dans la nuit de mardi à mercredi.

Environ 300 personnes ont été interpellées, a indiqué la police new-yorkaise.

Dans le sud-ouest du pays, la police de l'Université de l'Arizona a annoncé mercredi matin avoir utilisé du gaz lacrymogène pour disperser «un rassemblement illégal».

En Caroline du Nord, sur la côte est, la police est intervenue mardi pour évacuer un campement sur un campus de Chapel Hill, arrêtant plusieurs manifestants dans un face-à-face tendu.

- Accord -

Depuis deux semaines, les mobilisations de soutien à Gaza se multiplient à travers les campus américains, de la Californie aux grandes universités du nord-est, en passant par le sud et le centre du pays -- rappelant les manifestations contre la guerre du Vietnam.

Les étudiants appellent les établissements à couper les ponts avec des mécènes ou entreprises liés à Israël, et dénoncent le soutien de Washington à son allié israélien.

Se distinguant ainsi des autres institutions, l'université Brown dans l'Etat de Rhode Island a annoncé mardi avoir trouvé un accord avec les manifestants, prévoyant le démantèlement de leur campement en échange d'un vote de l'université en octobre sur d'éventuels «désinvestissements dans des +sociétés qui rendent possible et profitent du génocide à Gaza+».

A Columbia, les négociations entre direction et groupes étudiants n'avaient pas abouti. «Les événements de la nuit dernière sur le campus ne nous ont pas donné le choix», avait écrit la présidente de l'université, Minouche Shafik, dans une lettre rendue publique demandant à la police de New York d'intervenir sur le campus.

A Los Angeles, le président de l'UCLA Gene Block avait mis en garde avant les heurts de la nuit contre la présence de personnes extérieures à l'université.

Dimanche, des militants pro-palestiniens et pro-israéliens, soutenus par de nombreux manifestants extérieurs au campus, en étaient venus aux mains, avec des bousculades et des insultes.

«Beaucoup de manifestants et de contre-manifestants pratiquent leur militantisme de manière pacifique. Mais d'autres emploient des méthodes franchement choquantes et honteuses», avait écrit M. Block dans un message posté mardi sur le site de l'université.

«Ces incidents ont provoqué, tout particulièrement chez nos étudiants juifs, une profonde anxiété et de la peur», a-t-il ajouté.

- A 6 mois de la présidentielle -

Depuis le début du mouvement, des centaines de personnes - étudiants, enseignants et militants - ont été interpellées, parfois arrêtées et poursuivies en justice dans plusieurs universités du pays.

Les images de policiers anti-émeutes intervenant sur les campus, à la demande des universités, ont fait le tour du monde et on fait vivement réagir le monde politique, à six mois de la présidentielle dans un pays polarisé.

Joe Biden «doit faire quelque chose» contre ces «agitateurs payés», a déclaré mardi soir sur Fox News le candidat républicain Donald Trump. «Il nous faut mettre fin à l'antisémitisme qui gangrène notre pays aujourd'hui», a-t-il ajouté.

«Occuper par la force un bâtiment universitaire est la mauvaise approche» et ne représente «pas un exemple de manifestation pacifique», avait tonné avant l'intervention de la police John Kirby, porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche.


Royaume-Uni: Premiers migrants arrêtés avant leur expulsion vers le Rwanda, d'autres campent à Dublin

Des demandeurs d'asile dormant dans des tentes à Dublin affirment que la vie sous les bâches est meilleure et plus sûre que le risque d'être envoyé par le Royaume-Uni au Rwanda  (Photo, AFP).
Des demandeurs d'asile dormant dans des tentes à Dublin affirment que la vie sous les bâches est meilleure et plus sûre que le risque d'être envoyé par le Royaume-Uni au Rwanda (Photo, AFP).
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  • L'adoption d'une loi permettant l'expulsion des migrants vers le Rwanda a déclenché leur départ du Royaume-Uni
  • Une centaine de tentes ont poussé devant l'Office, depuis que le gouvernement irlandais a cessé il y a quelques mois de fournir un hébergement aux demandeurs d'asile

LONDRES: Les premiers migrants susceptibles d'être expulsés par le Royaume-Uni vers le Rwanda ont été arrêtés et placés en détention, a annoncé mercredi le ministère britannique de l'Intérieur, sans préciser le nombre de personnes concernées.

"Les premiers migrants en situation irrégulière devant être expulsés vers le Rwanda ont été placés en détention à la suite d'une série d'opérations menées cette semaine à l'échelle nationale", écrit le Home Office dans un communiqué.

Davantage d'arrestations "devraient être menées dans les semaines à venir", a-t-il ajouté.

"Cette action est un élément clé du plan visant à assurer des vols vers le Rwanda dans les neuf à onze semaines à venir", a poursuivi le ministère.

Le gouvernement conservateur de Rishi Sunak a promis de mettre un terme aux traversées de la Manche par les migrants clandestins.

Le Parlement a adopté la semaine dernière une loi très controversée permettant d'expulser vers le Rwanda des migrants arrivés illégalement au Royaume-Uni.

Leur demande d'asile sera examinée dans ce pays d'Afrique de l'Est et ils ne pourront pas revenir au Royaume-Uni, quelle que soit l'issue de leur démarche.

Le gouvernement compte commencer les expulsions au début de l'été et espère qu'elles dissuaderont d'autres migrants de venir au Royaume-Uni.

Cette politique "montrera clairement que si vous venez ici illégalement, vous ne pouvez pas rester", redit le ministère de l'Intérieur dans son communiqué.

"Nos équipes (...) travaillent à un rythme soutenu pour arrêter rapidement les personnes qui n'ont pas le droit d'être ici, afin que nous puissions faire décoller les vols", a déclaré le ministre de l'Intérieur James Cleverly, cité dans le communiqué.


L'ONG HRW critique l'application mobile pour demander l'asile à la frontière mexicano-américaine

Des migrants de différentes nationalités demandant l'asile aux États-Unis voyagent à bord des wagons de marchandises du train mexicain connu sous le nom de « La Bête » alors qu'ils arrivent à la ville frontalière de Ciudad Juarez, dans l'État de Chihuahua, au Mexique, le 24 avril 2024 (Photo, AFP).
Des migrants de différentes nationalités demandant l'asile aux États-Unis voyagent à bord des wagons de marchandises du train mexicain connu sous le nom de « La Bête » alors qu'ils arrivent à la ville frontalière de Ciudad Juarez, dans l'État de Chihuahua, au Mexique, le 24 avril 2024 (Photo, AFP).
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  • Depuis mai 2023, avant de se présenter à la frontière, les demandeurs d'asile, sauf les mineurs isolés, sont censés obtenir un rendez-vous sur l'application téléphonique de la police américaine des frontières
  • Beaucoup des personnes interrogées ont fait état de nombreux problèmes pour utiliser l'application

WASHINGTON: L'obligation pour les demandeurs d'asile aux Etats-Unis d'obtenir un rendez-vous sur une application mobile avant de se présenter à la frontière avec le Mexique livre les migrants à la violence des cartels, déplore mercredi Human Rights Watch (HRW).

Depuis mai 2023, avant de se présenter à la frontière, les demandeurs d'asile, sauf les mineurs isolés, sont censés obtenir un rendez-vous sur l'application téléphonique de la police américaine des frontières ou s'être vu refuser l'asile dans un des pays traversés. Autrement, leur demande est présumée illégitime et ils risquent une procédure d'expulsion accélérée, leur interdisant pendant cinq ans l'entrée aux Etats-Unis.

Cette réglementation fait suite à la levée par l'administration du président démocrate Joe Biden d'une mesure de son prédécesseur républicain Donald Trump qui verrouillait depuis trois ans l'accès au territoire américain.

"Mais un résultat pratique reste le même pour les demandeurs d'asile", affirme HRW dans un rapport publié mercredi : pendant de longues semaines, voire des mois, "ils sont forcés d'attendre dans le nord du Mexique, ainsi que dans beaucoup d'autres villes ailleurs au Mexique par lesquelles transitent les migrants".

Systématiquement visés 

Ils y sont "systématiquement visés par les cartels qui, parfois avec l'aide de responsables des autorités mexicaines, les enlèvent, les rackettent, les agressent sexuellement et les dévalisent", énumère l'ONG.

L'exigence de prise de rendez-vous sur l'application crée un "filtrage numérique", qui livre "aux cartels une population vulnérable", selon le rapport, établi à partir d'interviews avec 128 demandeurs d'asile, des employés de centres d'accueil, des responsables mexicains et des employés d'organisations humanitaires.

Bien que l'inscription pour un rendez-vous sur l'application ne soit en principe pas obligatoire, dans les faits, les demandeurs qui se présentent à la frontière sans l'avoir préalablement obtenue sont éconduits par les autorités frontalières mexicaines et américaines, indique HRW.

Beaucoup des personnes interrogées ont fait état de nombreux problèmes pour utiliser l'application, notamment matérielles, techniques, ou linguistiques. L'application n'est ainsi disponible qu'en anglais, en espagnol et en créole haïtien.

Ces pratiques "violent le principe juridique fondamental de non-refoulement" des demandeurs d'asile vers des pays où leur vie ou leur liberté serait en danger, souligne l'ONG.

Elle exhorte donc l'administration Biden à donner instruction à la police des frontières de traiter toutes les demandes d'asile, indépendamment de la façon ou du lieu de dépôt, ainsi que de l'obtention d'un rendez-vous via l'application "CBP One" de la police des frontières.

Human Rights Watch lui suggère en outre d'en améliorer l'accessibilité et la facilité d'utilisation, y compris par l'ajout d'autres langues, comme l'arabe, le français, le russe, le chinois, le portugais, et de langages amérindiens.