Marche interdite: Youssouf Traoré est sorti de l'hôpital

L'activiste française et leader du Comité Vérité et Justice pour Adama Assa Traore et le membre français du Comité Vérité et Justice pour Adama Youssouf Traore (Photo, AFP).
L'activiste française et leader du Comité Vérité et Justice pour Adama Assa Traore et le membre français du Comité Vérité et Justice pour Adama Youssouf Traore (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Lundi 10 juillet 2023

Marche interdite: Youssouf Traoré est sorti de l'hôpital

  • Youssouf Traoré, 29 ans, apparaît l'oeil droit tuméfié et la manche du t-shirt déchirée dans une vidéo publiée en début d'après-midi
  • Le plaquage ventral qu'il a subi lors de son interpellation lui a occasionné «une fracture du nez et un traumatisme crânien avec contusion oculaire»

PARIS: Vingt-quatre heures après son interpellation musclée lors de la manifestation interdite en mémoire de son frère Adama, Youssouf Traoré est sorti libre de l'hôpital dimanche.

Un deuxième homme, également interpellé lors de ce rassemblement polémique, est ressorti libre de garde à vue dimanche en fin d'après-midi, a annoncé le Comité Adama à l'AFP.

Il a été convoqué à une date ultérieure devant le délégue du procureur pour un avertissement pénal probatoire, a indiqué dans la soirée le parquet de Paris.

Quant à Youssouf Traoré, 29 ans, "l'enquête se poursuit", a déclaré le parquet.

Il est apparu l'oeil droit tuméfié au rassemblement de soutien à l'autre homme interpellé, a constaté l'AFP.

Selon le compte rendu médical que l'AFP a pu consulter, le plaquage ventral qu'il a subi lors de son interpellation lui a occasionné une fracture du nez, un traumatisme crânien avec contusion oculaire, des contusions thoraciques, abdominales et lombaires.

L'avocat de Youssouf Traoré, Me Yassine Bouzrou, a annoncé dimanche avoir déposé plainte pour violences volontaires.

Selon une source proche du dossier, Youssouf Traoré a été accusé d'avoir "porté un coup" à une commissaire de police au début du rassemblement, samedi place de la République.

Les images de son interpellation filmée par plusieurs témoins - on le voit résister puis être plaqué et maintenu face au sol par plusieurs policiers - ont provoqué des condamnations de plusieurs élus de gauche sur les réseaux sociaux.

Environ 2.000 personnes se sont rassemblées samedi à Paris, malgré l'interdiction de la préfecture de police, derrière Assa Traoré en mémoire de son frère Adama, décédé peu après son arrestation par des gendarmes en juillet 2016.

Un deuxième homme, identifié comme Samir par les membres du comité Adama, a été arrêté samedi. Le rassemblement pour exiger sa libération devant le commissariat du Ier arrondissement de Paris, dimanche en début d'après-midi, s'est terminé dans le calme au bout de deux heures.

Une cinquantaine de personnes y ont participé, dont les députés LFI Eric Coquerel, Jérôme Legavre et Thomas Portes, et ont été rejointes par Youssouf et Assa Traoré.

"C'est une injustice que j'ai subie", a estimé M. Traoré, affirmant avoir reçu un "uppercut bien voulu". "Ils (les policiers) n'ont pas à faire ça", a-t-il ajouté.

Sa soeur a dénoncé un "guet-apens", estimant que les images de l'interpellation avaient "réveillé beaucoup de choses. Mon frère (Adama) est mort exactement de la même façon", a-t-elle dit.

Quant à l'accusation de coup porté à la commissaire, Youssouf Traoré estime n'avoir "rien à (se) reprocher"

Droite et majorité vent debout contre les élus de gauche présents à la marche interdite pour Adama Traoré

"Atterrée", "provocation évidente", "honte à eux": la présence de députés insoumis et écologistes au rassemblement parisien interdit en mémoire d'Adama Traoré fait beaucoup réagir la droite et le camp présidentiel qui accuse LFI de sortir du "champ républicain". La France insoumise estime, elle, qu'elle se devait d'être "aux côtés de la famille".

"Je suis atterrée de voir des élus de la Nation, arborant l’écharpe tricolore, mutiques et souriants en entendant des manifestants scander +tout le monde déteste la police+", a tweeté dimanche la présidente Renaissance de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet.

"La provocation est évidente (...), elle est double quand vous êtes un élu de la République", a abondé Aurore Bergé, la présidente du groupe Renaissance au Palais-Bourbon.

«Insupportable»
Plusieurs élus de gauche ont dénoncé l'interpellation de Youssouf Traoré et défendu leur participation au rassemblement de samedi.

Mathilde Panot (LFI) a estimé sur BFMTV que sa place était "aux côtés de la famille" Traoré. Elle a exhorté à "une refonte de la police de la cave au grenier".

"Une journée à attendre en vain des regrets des +responsables+ de la NUPES qui défilent dans une manifestation interdite au cri de +tout le monde déteste la police+. Quelle tristesse pour la République et pour les femmes et les hommes qui la défendent..", a tweeté le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.

"Les factieux et dangereux députés de la Nupes (...) ont une fois de plus piétiné nos lois et l’autorité de l’Etat. Insupportable", a écrit le patron des Républicains, Eric Ciotti.

Les associations, syndicats et partis politiques classés à gauche (parmi lesquels LFI, EELV, CGT et Solidaires) à l'origine des "marches citoyennes" contre les violences policières organisées la veille en France, ont exigé dimanche la "libération sans condition ni poursuite" de Youssouf Traoré et du deuxième homme, "militant des quartiers populaires de longue date".

Elles appellent à une nouvelle "mobilisation large" contre les violences policières, le 15 juillet à Paris.

Sur les images filmées par des témoins à la fin du rassemblement parisien samedi, qui s'est déroulé dans le calme selon les journalistes de l'AFP, on voit également une femme se faire violemment projeter au sol par un policier et des journalistes violentés par les forces de l'ordre.

Une enquête administrative a été ouverte pour faire la lumière sur ces violences, a annoncé la préfecture de police à l'AFP.


Lille: enquête ouverte après les propos sur internet d'une étudiante gazaouie

L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
Short Url
  • Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie

LILLE: Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie, dont Sciences Po Lille a annulé l'inscription mercredi.

"Une enquête a été ouverte pour apologie du terrorisme, apologie de crime contre l'humanité avec utilisation d'un service de communication au public en ligne", a écrit la procureure de la République de Lille, Carole Etienne, à l'AFP.

Des captures d'écran circulant sur les réseaux sociaux montrent qu'un compte, attribué à cette étudiante par des internautes et fermé depuis, a repartagé des messages appelant à tuer des juifs.

Elle a été désinscrite de l'Institut d'études politiques de Lille, où elle devait étudier à partir de septembre, en raison du contenu de certaines de ses publications qui "entre en contradiction frontale avec les valeurs portées par Sciences Po Lille", a indiqué l'établissement mercredi.

"Pourquoi on est passé à travers? Il y a quand même une question, il faut y répondre", a reconnu jeudi sur RMC François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l'Intérieur.

"Il y aura des poursuites qui seront engagées et sur la base de ces éléments-là, elle est susceptible d'être renvoyée dans son pays, bien évidemment", a-t-il ajouté.

"Administrativement, semble-t-il, je suis très prudent, il n'y avait pas de difficulté particulière, sauf que sur les réseaux sociaux, voilà, on s'en est rendu compte", a-t-il ajouté, précisant que "les services des titres de séjour relèvent du ministère des Affaires étrangères".

Sollicité par l'AFP, Sciences Po Lille a expliqué avoir "accueilli cette étudiante sur proposition du consulat général de France à Jérusalem".

L'incident a fait largement réagir dans la classe politique, jusqu'au gouvernement.

"Une étudiante gazaouie tenant des propos antisémites n'a rien à faire en France", a réagi sur X le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Il a indiqué avoir "demandé à ce qu'une enquête interne soit diligentée pour que cela ne puisse en aucun cas se reproduire".

Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a souligné sur le même réseau social avoir "demandé de faire fermer ce compte haineux", et a martelé que "les propagandistes du Hamas n'ont rien à faire dans notre pays".


Restitutions coloniales: le gouvernement français annonce un projet de loi

La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
Short Url
  • Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation
  • Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises

PARIS: Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation.

S'appliquant en priorité aux pays africains mais de "portée géographique universelle", ce texte vise à accélérer le retour dans leur pays d'origine de biens culturels appartenant aux collections nationales françaises.

Ils doivent revenir à des "Etats qui, du fait d'une appropriation illicite, en ont été privés" entre 1815 et 1972, selon le ministère français de la Culture.

Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises. Les oeuvres à restituer devront avoir été acquises "dans une situation de vol, de pillage, de cession ou de libéralité obtenue par contrainte ou violence ou d'une personne qui ne pouvait en disposer", a précisé le ministère.

La décision de sortie des collections pour opérer cette restitution ne passera plus par un processus législatif au cas par cas mais pourra intervenir sur seul décret du Conseil d'Etat et après avis, le cas échéant, d'une commission scientifique bilatérale.

Cette commission devra en effet documenter et déterminer, si besoin, le caractère illicite de l'appropriation des oeuvres réclamées à travers un travail qui associerait des experts et historiens français et l'Etat demandeur, selon le ministère.

Concernant la période historique retenue, 1815 correspond à la date d'un règlement des conquêtes napoléoniennes qui est dû à un premier mouvement de restitution d'œuvres à l'échelle européenne. 1972 est celle de l'entrée en application de la convention internationale de l'Unesco protégeant les biens culturels contre le trafic illicite.


Droits de douane: la France déçue de l'accord UE-USA

Le ministre français de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Eric Lombard, s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale française, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 10 juin 2025. (AFP)
Le ministre français de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Eric Lombard, s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale française, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 10 juin 2025. (AFP)
Short Url
  • La France, déçue de l'accord commercial annoncé dimanche entre l'Union européenne (UE) et les Etats-Unis, a plaidé lundi pour que l'Europe se montre plus ferme lors des négociations à venir
  • Le président français Emmanuel Macron n'avait pas réagi lundi. Mais son Premier ministre François Bayrou a évoqué un "jour sombre" pour l'Europe, qui "se résout à la soumission"

PARIS: La France, déçue de l'accord commercial annoncé dimanche entre l'Union européenne (UE) et les Etats-Unis, a plaidé lundi pour que l'Europe se montre plus ferme lors des négociations à venir sur ses modalités d'application.

Le président français Emmanuel Macron n'avait pas réagi lundi. Mais son Premier ministre François Bayrou a évoqué un "jour sombre" pour l'Europe, qui "se résout à la soumission".

Se projetant vers la suite, le ministre de l'Economie Eric Lombard a lui estimé lundi soir que "cet accord n'est pas complet" et que "le travail continue". Car "l'accord n'est pas finalisé et nous veillerons à ce qu'il soit amélioré", a-t-il dit dans une interview à Libération.

"Les discussions doivent se poursuivre pour les produits pharmaceutiques - on comprend que certains génériques seront exemptés -, sur l'acier, sur l'aluminium, sur les produits chimiques, sur les semi-conducteurs et sur les vins et les produits agricoles", précise-t-il.

"Il ne faudrait pas que cet accord soit la fin de l'histoire, auquel cas nous nous serions tout simplement juste affaiblis", avait estimé sur France Inter dès lundi matin le ministre français délégué au Commerce extérieur, Laurent Saint-Martin.

"Maintenant, il va y avoir une négociation technique" et "nous pouvons nous saisir de cette séquence pour nous renforcer", a-t-il ajouté.

Le président américain Donald Trump et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen ont annoncé dimanche en Ecosse un accord douanier prévoyant que les produits européens exportés aux Etats-Unis soient taxés à 15%.

Avec l'espoir d'éviter une escalade commerciale, l'UE s'est aussi engagée à 750 milliards de dollars d'achats d'énergie - visant notamment à remplacer le gaz russe - et à 600 milliards d'investissements supplémentaires aux Etats-Unis.

A Paris, si on concède que cet accord va apporter de la "stabilité" aux entreprises, on insiste surtout sur son caractère "déséquilibré", selon les termes utilisés par plusieurs membres du gouvernement.

"Notre responsabilité aujourd'hui, c'est de faire en sorte que cet accord, in fine, soit le moins déséquilibré possible", a déclaré sur RTL le ministre de l'Industrie et de l'Energie Marc Ferracci.

- Prochains jours déterminants -

MM. Ferracci et Saint-Martin ont plaidé pour un "rééquilibrage" portant sur les services, en particulier le numérique, en rappelant que si la balance commerciale des Etats-Unis avec l'Europe est déficitaire pour les biens, celle des services est excédentaire.

Concernant les échanges de biens, la France affichait en 2024 un excédent commercial de 16,4 milliards de dollars à l'égard des Etats-Unis selon les Américains, mais les Douanes françaises évoquent pour la même période un déficit de 4,2 milliards d'euros.

Les négociateurs européens devront utiliser "l'ensemble des outils qui sont à leur disposition" et notamment envisager "de limiter l'accès des entreprises américaines aux marchés publics européens", a insisté M. Ferracci.

Du côté des entreprises, Patrick Martin, le président du Medef, première organisation patronale française, a estimé que "si les choses sont bien ce qui nous a été annoncé, ce n'est pas admissible". "Il faut continuer à négocier", selon lui.

La CPME, deuxième organisation patronale, a dit anticiper "des répercussions désastreuses" pour les petites et moyennes entreprises. Et le mouvement des ETI (Meti) a évoqué "des conséquences particulièrement préoccupantes pour les entreprises de taille intermédiaire".

Selon les secteurs, les sentiments sont ambivalents.

"Il y a du soulagement parce que cet accord donne de la visibilité", a déclaré à l'AFP Emmanuel Guichard, délégué général de la Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA). Mais "ce n'est pas un bon accord pour nous, tout simplement parce qu'on avait 0% de droits de douane en janvier vers les Etats-Unis et maintenant on va être à 15%."

"La catastrophe est évitée", en référence aux 30% de droits de douane évoqué par M. Trump, "mais les prochains jours seront déterminants pour le secteur français des vins et spiritueux", déclare dans un communiqué la Fédération des Exportateurs de Vins et Spiritueux (FEVS), à laquelle se joint l’ensemble des interprofessions françaises (CNIV) et de la filière.

Dans l'agroalimentaire, l'organisation patronale du secteur, l'Ania, a dénoncé un "accord clairement inéquitable (...) qui fragilise notre position".

Seuls les secteurs qui pourraient bénéficier d'une exemption de droits de douane, comme l'aéronautique, se sont montrés complètement soulagés.

Le Gifas (Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales) a salué dans une déclaration transmise à l'AFP une exonération "bonne pour une industrie équilibrée entre la France et les Etats-Unis" et qui permettra de "conserver des emplois qualifiés en France à tous les niveaux de la chaîne de sous-traitance."

Les organisations patronales et les fédérations des filières économiques affectées par cet accord seront reçues mercredi à Bercy.