«Il faut tuer»: la sanglante reconquête ukrainienne près de Bakhmout

Cette photographie prise le 10 avril 2023 montre les restes d'un bâtiment détruit lors des combats dans le village de Sosnove, dans la région de Donetsk, au milieu de l'invasion russe de l'Ukraine. (AFP)
Cette photographie prise le 10 avril 2023 montre les restes d'un bâtiment détruit lors des combats dans le village de Sosnove, dans la région de Donetsk, au milieu de l'invasion russe de l'Ukraine. (AFP)
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Publié le Samedi 15 juillet 2023

«Il faut tuer»: la sanglante reconquête ukrainienne près de Bakhmout

  • «Bien sûr que c'est effrayant, seul un fou n'a pas peur», abonde le soldat, lunettes noires collées au visage
  • «Tuer quelqu'un est difficile, prendre la vie de quelqu'un est difficile. Les Russes opposent une forte résistance, mais leurs chances sont faibles»

BAKHMOUT: Iouri Korpan a 39 ans. Il en paraît 10 de plus. Les traits tirés, le visage tanné, le fantassin ukrainien revient d'une semaine de combats sanglants près de la ville de Bakhmout, dans l'est de l'Ukraine.

Mobilisé en août dernier, ce père de trois jeunes enfants se bat au nord de Bakhmout, tombée sous contrôle russe en mai après des affrontements extrêmement meurtriers, débutés à l'été 2022.

Lors de son dernier jour sur la ligne de front, "les bombardements ont commencé à 4 heures du matin, avec des mortiers et de l'artillerie. Puis ça s'est un peu calmé. Une heure plus tard, l'ennemi a commencé à monter" à l'attaque, raconte Iouri Korpan à l'AFP.

"Nous avons riposté. Des mitrailleuses, des (lance-roquettes) RPG, des lance-grenades, puis les mortiers. Bref, la bataille a commencé", poursuit l'homme, employé dans le secteur de la construction avant sa mobilisation.

Depuis le début de leur contre-offensive en juin, les Ukrainiens avancent lentement sur les flancs de Bakhmout, au prix de combats "acharnés" selon leur ministère de la Défense, pour tenter de prendre l'ennemi en tenaille et de reconquérir cette ville aujourd'hui dévastée.

«Adrénaline»

Au combat, "l'adrénaline monte dans le sang, on est dans une sorte d'excitation (...) On combat pour sa vie et pour celle de nos frères", raconte Iouri Korpan. "On a besoin d'être là, à cet endroit. On est tendu comme une corde et obsédé par une seule idée: détruire l'ennemi qui est venu sur notre terre".

"Sur le champ de bataille, il faut tuer", répète le soldat.

Ressent-il de la peur ? "Bien sûr, on a peur, mais on se ressaisit. Et quand on se bat, la peur disparaît. Dans le combat lui-même, il ne faut pas avoir peur, il faut la surmonter et accomplir clairement sa tâche. La peur est aussi un ennemi", répond-il.

Après les combats, "les jambes et les bras ont mal à cause d'un grand effort physique. Il faut quelques jours pour récupérer".

Sur le flanc sud de Bakhmout, les troupes ukrainiennes avancent aussi lentement, notamment vers le village de Klichtchiïvka.

C'est là où se bat Vitaliï Stoliartchouk, 31 ans, commandant d'une section d'infanterie.

"Bien sûr que c'est effrayant, seul un fou n'a pas peur", abonde le soldat, lunettes noires collées au visage. "Je crois en Dieu et je le prie constamment pour que mes frères et moi sortions vivants de la bataille. Il faut avoir la tête froide et des yeux à 360 degrés", explique-t-il.

"Tuer quelqu'un est difficile, prendre la vie de quelqu'un est difficile. Les Russes opposent une forte résistance", mais "leurs chances sont faibles: après une préparation d'artillerie, nous sortons et nous achevons ceux qui sont restés", assène le chef de section.

Mines

Compte-t-il le nombre d'ennemis qu'il a tués? "C'est impossible et cela n'a aucun sens", répond Iouri Korpan. "Je n'ai pas compté les Russes morts ! Seuls les débutants font cela".

Dans cette zone, les mines antipersonnel russes guettent les Ukrainiens.

"Tout est généralement miné. Ils (les Russes) s'enfuient très vite en laissant leurs armes derrière eux. Ils minent leurs positions pendant la retraite. Les soldats (ukrainiens) inexpérimentés sont pris par ces pièges", relate Vitaliï Stoliartchouk.

Selon le médecin volontaire Volodymyr Veselovsky, qui opère dans un point de stabilisation où les soldats blessés reçoivent des premiers soins, ce type de blessures s'est multiplié.

"Depuis plusieurs semaines nous avons plus de traumatismes causés par des mines. Des blessures aux pieds, aux jambes. Un jour nous avons eu cinq blessés qui ont dû être amputés par la suite", dit-il à l'AFP.

Mais selon lui, la grande majorité des blessures restent liées à des frappes de l'artillerie, particulièrement celles des redoutables lance-roquettes multiples soviétiques Grad.

"Yary", de son nom de guerre, dirige justement un bataillon comptant une dizaine de LRM Grad, qui peut tirer jusqu'à 40 roquettes en 20 secondes couvrant "un carré de 400 m par 400 m".

«Tout brûle et explose»

"Un carré solide où tout brûle et explose. Cela a aussi un très grand impact psychologique (sur les Russes). Après plusieurs attaques de ce type, il arrive qu'ils jettent leurs armes et courent dans une direction inconnue", assure-t-il.

A moins de 2 km des positions russes, Massik, 27 ans, un pilote de drone, est caché à l'ombre d'arbres dans une courte tranchée. Au dessus de lui dans le ciel bleu, des projectiles sifflent et se croisent régulièrement, tirés à distance depuis des positions d'artillerie de chaque camp.

Il se dit "optimiste" sur l'offensive ukrainienne. "Bakhmut sera à nous", assure-t-il, "nous devons chasser l'ennemi de notre terre" et "libérer tout le pays".

Vitaliï Stoliartchouk, qui était barman à Odessa, ville portuaire du Sud, avant l'invasion russe, espère retourner "chez nous, à la mer, dès que possible".

Pour sa part, Iouri Korpan, qui parle à sa famille "par téléphone, par messages" quand il peut, rêve des vacances, peut-être après l'été.

"J'espère que nous chasserons ce mal de notre terre jusqu'à l'Oural. Et les maris retourneront auprès de leurs femmes, les enfants auprès de leurs parents. Et nous reconstruirons notre pays".


L'Inde cherche à porter la voix du « Sud global » entre le G7 et le Brics

Cette photographie prise et publiée par le Bureau d'information de la presse indienne (PIB) le 6 juin 2025 montre le Premier ministre indien Narendra Modi tenant le drapeau national lors de l'inauguration du pont ferroviaire de Chenab, qui fait partie de la liaison ferroviaire du Cachemire, à Reasi, dans l'État de Jammu-et-Cachemire. (PIB) / AFP)
Cette photographie prise et publiée par le Bureau d'information de la presse indienne (PIB) le 6 juin 2025 montre le Premier ministre indien Narendra Modi tenant le drapeau national lors de l'inauguration du pont ferroviaire de Chenab, qui fait partie de la liaison ferroviaire du Cachemire, à Reasi, dans l'État de Jammu-et-Cachemire. (PIB) / AFP)
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  • L'Inde n'est pas membre du Groupe des Sept (États-Unis, Japon, Allemagne, Royaume-Uni, France, Italie, Canada), mais elle est devenue une habituée de ses sommets, auxquels elle est régulièrement conviée depuis 2019.
  • « Nous contribuons activement à la diplomatie internationale et si cela peut servir de passerelle, c'est un atout pour la diplomatie internationale dans une période de relations difficiles et de tensions accrues », fait valoir M. Jaishankar.

PARIS : Invitée du G7 qui débute dimanche, mais aussi membre fondateur des Brics, l'Inde souhaite porter la voix du « Sud global », se posant en « passerelle » entre les différents acteurs de la scène internationale, affirme son ministre des Affaires étrangères dans un entretien à l'AFP.

L'Inde n'est pas membre du Groupe des Sept (États-Unis, Japon, Allemagne, Royaume-Uni, France, Italie, Canada), mais elle est devenue une habituée de ses sommets, auxquels elle est régulièrement conviée depuis 2019.

« Nous avons été un pays invité depuis plusieurs années et je pense que ça a été bénéfique pour le G7 », déclare à l'AFP Subrahmanyam Jaishankar depuis Paris, où il a clos samedi une visite en France, se félicitant d'avoir « la capacité de travailler avec différents pays sans qu'aucune relation ne soit exclusive ». 

Avec une population en passe de devenir la quatrième économie mondiale, l'Inde est l'un des pays les plus peuplés du globe. Elle siège à la table de nombreuses organisations, avec les Occidentaux au G7 ou au sein du « Quad » (Dialogue quadrilatéral pour la sécurité, avec les États-Unis, le Japon, l'Australie), mais aussi avec la Chine, la Russie et l'Iran au sein des Brics et du Groupe de Coopération de Shangaï.

« Nous contribuons activement à la diplomatie internationale et si cela peut servir de passerelle, c'est un atout pour la diplomatie internationale dans une période de relations difficiles et de tensions accrues », fait valoir M. Jaishankar.

Ancienne colonie britannique, indépendante depuis 1947, l'Inde se pose, avec le Brésil, en héraut du « Sud global », qui réunit « des pays qui ont été victimes de l'ordre mondial ces dernières années, ces derniers siècles ». 

« Dans les pays du Sud, il existe un fort ressentiment face aux inégalités de l'ordre international, une volonté de le changer, et nous en faisons pleinement partie », explique le ministre en poste depuis 2019.

« Aujourd'hui, pour des pays comme les nôtres, il est important de nous exprimer, de mener, de faire sentir notre présence. »

Cette voix passe aussi par les BRICS, devenue « l'une des principales plateformes de rassemblement pour les pays non occidentaux », dont les chefs d'État se réuniront en juillet.

Partisan de « négociations directes » pour résoudre la guerre entre l'Ukraine et la Russie, qui a frappé durement les pays du Sud, M. Jaishankar affiche son scepticisme face aux politiques de sanctions occidentales : « Ça n'a pas vraiment marché jusqu'à présent, non ? » 

Partenaire commercial et allié politique de la Russie, l'Inde pourrait se retrouver exposée en cas de sanctions contre Moscou.

« L'économie mondiale est sous tension. Plus on ajoute des facteurs de tensions, plus les difficultés seront grandes. »

Dans l'ordre mondial actuel, l'Inde doit composer avec la « discontinuité » posée par Donald Trump.

Des négociations en cours sur le sujet ont « bien avancé ».L'Inde doit également chercher « un équilibre » avec la Chine. 

Pékin soutient Islamabad, que New Delhi accuse de soutenir les activités de « terroristes » islamistes sur son sol.

Le 22 avril, une attaque au Cachemire indien a déclenché une confrontation militaire de quatre jours entre les deux pays, la plus grave depuis 1999. Narendra Modi a promis une « riposte ferme » à toute nouvelle attaque « terroriste », renforçant le spectre d'une escalade entre les deux puissances nucléaires.

« En 2008, la ville de Mumbai a été attaquée (plusieurs attentats jihadistes ont fait 166 morts) et nous avons commis l'erreur de ne pas réagir avec fermeté. Nous sommes déterminés à ne pas répéter ces erreurs. Si des terroristes pénètrent en Inde depuis et grâce au soutien d'un pays voisin, nous les poursuivrons et nous les châtierons ».

Mais l'Inde n'a jamais envisagé de recourir à l'arme nucléaire, assure-t-il : « Ces inquiétudes émanaient de personnes mal informées ».

 


Israël appelle les Iraniens à évacuer les zones proches de sites militaires

Des soldats et des membres d'une équipe de recherche et de sauvetage se rassemblent près de voitures endommagées dans la ville de Tamra, dans le nord d'Israël, à la suite d'une attaque à la roquette lancée par l'Iran dans la nuit du 15 juin 2025. (Photo par AHMAD GHARABLI / AFP)
Des soldats et des membres d'une équipe de recherche et de sauvetage se rassemblent près de voitures endommagées dans la ville de Tamra, dans le nord d'Israël, à la suite d'une attaque à la roquette lancée par l'Iran dans la nuit du 15 juin 2025. (Photo par AHMAD GHARABLI / AFP)
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  • L'armée a « demandé à toutes les personnes se trouvant actuellement dans des installations militaires en Iran, ou à proximité, d'évacuer immédiatement les lieux, précisant que leur vie était en danger ».
  • Le communiqué ne précise pas de coordonnées géographiques et n'est accompagné d'aucune carte permettant de localiser ces zones.

JERUSALEM : Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a déclaré dimanche dans un communiqué de son bureau avoir ordonné à l'armée israélienne d'émettre des avis d'évacuation à l'intention des habitants de Téhéran vivant à proximité de sites militaires.

Après cet ordre, l'armée israélienne a appelé les Iraniens à évacuer les zones « à proximité d'installations militaires » dans un communiqué publié sur le réseau social X en persan et en arabe.

L'armée a « demandé à toutes les personnes se trouvant actuellement dans des installations militaires en Iran, ou à proximité, d'évacuer immédiatement les lieux, précisant que leur vie était en danger ».

Le communiqué ne précise pas de coordonnées géographiques et n'est accompagné d'aucune carte permettant de localiser ces zones, contrairement aux communiqués de l'armée israélienne adressés aux Palestiniens de la bande de Gaza, où elle est en guerre contre le mouvement islamiste Hamas.

Cette décision fait partie d'un plan « visant à faire pression sur le régime » en créant des déplacements de population, a déclaré à l'AFP une source sécuritaire israélienne.


La Russie s'apprête à construire la première centrale nucléaire du Kazakhstan

Une vue aérienne montre le village d'Ulken (au premier plan) et le site proposé pour la centrale nucléaire près du village d'Ulken, situé sur les rives du lac Balkhash, à environ 400 kilomètres au nord d'Almaty, le 22 septembre 2024. (Photo de Ruslan PRYANIKOV / AFP)
Une vue aérienne montre le village d'Ulken (au premier plan) et le site proposé pour la centrale nucléaire près du village d'Ulken, situé sur les rives du lac Balkhash, à environ 400 kilomètres au nord d'Almaty, le 22 septembre 2024. (Photo de Ruslan PRYANIKOV / AFP)
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  • « Rosatom a été désigné chef de file du consortium international pour la construction de la première centrale nucléaire au Kazakhstan », a indiqué l'agence kazakhe pour l'énergie atomique.
  • Le Kazakhstan, immense ex-république soviétique et allié de Moscou, est le premier producteur mondial d'uranium (43 %) et le troisième fournisseur d'uranium naturel de l'Union européenne.

ALMATY, KAZAKHSTAN : Le géant russe du nucléaire Rosatom sera le principal constructeur de la première centrale nucléaire du Kazakhstan, ont annoncé samedi les autorités de ce pays d'Asie centrale, premier producteur mondial d'uranium, un chantier que convoitaient la France, la Chine et la Corée du Sud.

« Rosatom a été désigné chef de file du consortium international pour la construction de la première centrale nucléaire au Kazakhstan », a indiqué l'agence kazakhe pour l'énergie atomique.

Le Kazakhstan, immense ex-république soviétique et allié de Moscou, est le premier producteur mondial d'uranium (43 %) et le troisième fournisseur d'uranium naturel de l'Union européenne, mais souffre d'un manque cruel d'électricité pour sa consommation intérieure.

L'agence kazakhe dit désormais « étudier la question de l'obtention de financements publics à l'exportation aux dépens de la Fédération de Russie, conformément aux propositions de Rosatom ». 

Rosatom a salué la décision kazakhe dans un communiqué et promis « la construction d'une centrale nucléaire selon le projet le plus avancé et le plus efficace au monde, basé sur des technologies russes ».

« Les réacteurs VVER-1200 de troisième génération combinent des solutions techniques éprouvées avec les systèmes de protection active et passive les plus récents. Ces derniers ont été développés en stricte conformité avec les normes internationales de sécurité », a ajouté la société.

Rosatom (Russie), China National Nuclear Corporation (Chine), EDF (France) et Korea Hydro & Nuclear Power (Corée du Sud) faisaient partie des quatre entreprises pressenties.

L'agence ajoute qu'elle « continuera à travailler avec des partenaires étrangers pour former un consortium international efficace », sans donner plus de précisions. 

Ce projet de consortium international, qui n'a jamais été spécifié, s'inscrit dans la volonté du dirigeant kazakh Kassym-Jomart Tokaïev de maintenir de bonnes relations avec les grandes puissances.

Moscou, puissance historique en Asie centrale, a ainsi remporté cet appel d'offres aux dépens de la Chine, désormais incontournable dans la région. Cette annonce intervient quelques jours avant la venue du président chinois Xi Jinping au Kazakhstan pour un sommet « Asie centrale-Chine ».

La centrale, dont la construction a été validée lors d'un référendum sans surprise à l'automne, doit être bâtie près du village abandonné d'Ulken, dans le sud du pays, sur les bords du lac Balkhach, le deuxième plus grand d'Asie centrale.

En Ouzbékistan voisin, le géant russe Rosatom va construire une petite centrale nucléaire et a proposé au Kirghizistan un projet similaire.