Macron «dubitatif» sur le choix d'une Américaine pour réguler la «big tech»

Le président français Emmanuel Macron s'adresse à la presse après avoir assisté à la session plénière d'un sommet de l'Union européenne et de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes (UE-CELAC) à Bruxelles le 18 juillet 2023. (Photo, AFP)
Le président français Emmanuel Macron s'adresse à la presse après avoir assisté à la session plénière d'un sommet de l'Union européenne et de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes (UE-CELAC) à Bruxelles le 18 juillet 2023. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 19 juillet 2023

Macron «dubitatif» sur le choix d'une Américaine pour réguler la «big tech»

  • La nomination de Mme Scott Morton comme nouvelle économiste en chef à la Direction générale de la concurrence a suscité des réactions indignées parmi les eurodéputés
  • Mais la Commission européenne leur a adressé une fin de non-recevoir ainsi qu'au gouvernement français qui a demandé l'annulation du recrutement de cette professeure d'économie à la prestigieuse université de Yale

BRUXELLES: Le président français Emmanuel Macron s'est dit "dubitatif" mardi sur la nomination de l'Américaine Fiona Scott Morton à un poste clé de l'UE pour la régulation des géants de la tech et a affirmé attendre des réponses de la Commission européenne.

Sa déclaration faite à Bruxelles, en marge d'un sommet des Vingt-Sept avec les pays d'Amérique latine et des Caraïbes, intervenait juste avant une audition de la vice-présidente de l'exécutif européen, Margrethe Vestager, qui a défendu ce recrutement devant le Parlement européen.

"J'ai essayé d'engager la meilleure personne possible pour ce job", a-t-elle martelé, tout en expliquant qu'il ne s'agissait pas d'un poste décisionnel mais seulement de conseiller.

La nomination de Mme Scott Morton comme nouvelle économiste en chef à la Direction générale de la concurrence a suscité des réactions indignées parmi les eurodéputés.

Mais la Commission européenne leur a adressé une fin de non-recevoir ainsi qu'au gouvernement français qui a demandé l'annulation du recrutement de cette professeure d'économie à la prestigieuse université de Yale.

"Si nous n'avons aucun chercheur (européen) de ce niveau pour être recruté par la Commission, ça veut dire que nous avons un très grand problème avec tous les systèmes académiques européens", a expliqué mardi Emmanuel Macron.

Il a souligné l'absence de "réciprocité" de la part des Etats-Unis et de la Chine pour nommer des Européens qui seraient "au coeur de (leurs) décisions".

Des élus ont épinglé les anciennes fonctions de Mme Scott Morton comme responsable de l'analyse économique à la division antitrust du ministère américain de la Justice, entre 2011 et 2012, ou de consultante pour des grands groupes de la tech comme Amazon, Apple et Microsoft.

Ils dénoncent de possibles conflits d'intérêts et le risque d'une ingérence de Washington dans des décisions de l'UE.

Le président français a dit avoir "beaucoup de respect" pour l'experte américaine. Mais "elle a été embauchée par beaucoup d'entreprises et devrait se porter en retrait de ces situations ce qui rend assez inopérant ce pour quoi on l'embauche", a-t-il estimé.

Plaidant pour "une autonomie stratégique" de l'Europe, il considère que la nomination de Mme Scott Morton "n'est pas forcément la décision la plus cohérente à cet égard".

Shérif américain

"L'idée qu'elle a travaillé pour tous les Gafam et qu'à cause de cela, elle ne peut travailler sur le secteur des technologies n'est tout simplement pas vraie", a répondu Mme Vestager devant les eurodéputés, évoquant des collaborations comme "consultante" mais "jamais comme lobbyiste".

Elle a reconnu qu'il y aurait quelques dossiers sur lesquels Mme Scott Morton ne pourrait être impliquée pour éviter des conflits d'intérêts. Mais "il s'agit de très peu de cas, une poignée tout au plus", a-t-elle affirmé, refusant d'en dévoiler la liste pour raison de "confidentialité", malgré les demandes insistantes de plusieurs eurodéputés.

L'ouverture du poste aux candidatures non européennes apparaissait sur l'avis de vacance publié dès le mois de mars, a-t-elle encore expliqué, justifiant ce choix par la rareté des compétences disponibles.

Malgré cela, la Commission a seulement reçu 11 candidatures, dont quatre répondant aux critères de sélection, a affirmé la commissaire à la Concurrence.

"Assurant avoir une confiance à 100%" en Mme Scott Morton, elle a jugé "discutable l'idée qu'une personne ait automatiquement un préjugé favorable aux entreprises originaires du même pays qu'elle".

La puissante Direction générale de la concurrence est chargée de veiller au bon fonctionnement de la concurrence dans l'Union européenne (UE) et d'enquêter notamment sur les abus de position dominante des géants du numérique, qui ont donné lieu à des amendes record ces dernières années.

La nomination de Mme Scott Morton survient au moment où l'UE doit mettre en œuvre de nouvelles législations ambitieuses pour réguler ce secteur.

"Nous avons mis fin au Far West numérique pour nommer un shérif américain ? (...) Cette nomination va à l'encontre de notre souveraineté et de notre autonomie stratégique", a estimé l'eurodéputée Stéphanie Yon-Courtin (Renew, centristes et libéraux).

"Madame Vestager n'a pas convaincu le Parlement européen. Elle a fait semblant de ne pas comprendre les problèmes", a réagi l'eurodéputé PPE (droite) Geoffroy Didier. "S'entêter dans cette nomination serait pour la Commission une faute politique lourde".


Dix passeurs présumés jugés pour un naufrage meurtrier dans la Manche

Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
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  • Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés
  • La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche

LILLE: Dix hommes, dont huit Afghans, sont jugés à partir de lundi à Lille pour leur rôle présumé de passeurs dans le naufrage d'une embarcation clandestine qui avait fait quatre morts et quatre disparus dans la Manche en décembre 2022.

Parti entre 1H00 et 1H30 du matin dans la nuit du 13 au 14 décembre 2022, le canot, qui transportait en majorité des migrants afghans, avait fait naufrage à quelques kilomètres des côtes anglaises.

Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés.

La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche.

Selon les éléments de l'enquête, alors que les migrants gonflaient le bateau avant le départ, plusieurs ont entendu une détonation, synonyme selon eux de crevaison. Les passeurs leur ont dit de ne pas s'en faire et qu'il s'agissait du seul bateau disponible pour eux.

D'après les témoignages des rescapés, il n'y avait pas assez de gilets de sauvetage pour tout le monde et aucune des personnes décédées n'en portait un. La température était glaciale et la mer très agitée.

Après une ou deux heures de traversée, un boudin a commencé à se dégonfler et l'eau à entrer dans l'embarcation, jusqu'à atteindre les genoux des passagers. Paniqués, ils se sont mis debout pour tenter de faire signe à un bateau. Mais le fond du canot, peu solide, a ployé sous leur poids et celui de l'eau, et tous se sont retrouvés à l'eau.

Neuf des prévenus sont jugés, jusqu'à vendredi, pour homicide involontaire par violation d'une obligation de sécurité, deux d'entre eux le sont pour blanchiment, tous pour aide au séjour irrégulier. Huit sont afghans, un syrien, un irakien.

Certains des prévenus sont soupçonnés d'avoir recruté des passeurs et assuré la logistique auprès des passagers, d'autres d'avoir géré l'organisation sur le camp de migrants de Loon-Plage (Nord), où vivaient les migrants avant leur tentative de traversée, toujours selon les éléments de l'enquête. D'autres encore sont jugés pour s'être occupés du transport des migrants vers la plage et de la mise à l'eau du canot, et deux pour avoir collecté une partie des paiements.

Le mineur sénégalais qui pilotait le canot est, lui, inculpé dans le cadre d'une procédure au Royaume-Uni.

Apparu en 2018, le phénomène des traversées de la Manche en petites embarcations est à l'origine de nombreux naufrages, le plus meurtrier ayant coûté la vie à 27 personnes en novembre 2021.

Depuis le début de l'année, au moins 15 migrants sont morts dans la Manche, bras de mer parmi les plus fréquentés du monde et où les conditions météorologiques sont souvent difficiles, selon un décompte de l'AFP à partir de chiffres officiels. En 2024, 78 étaient morts ainsi, un record.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».