Dans la manifestation parisienne, les tactiques des gendarmes mobiles

Un manifestant vêtu d'un gilet jaune s'adresse aux gendarmes mobiles anti-émeute lors d'une manifestation contre le projet de loi `` sécurité mondiale '' le 12 décembre 2020 (Thibaud Moritz / AFP)
Un manifestant vêtu d'un gilet jaune s'adresse aux gendarmes mobiles anti-émeute lors d'une manifestation contre le projet de loi `` sécurité mondiale '' le 12 décembre 2020 (Thibaud Moritz / AFP)
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Publié le Dimanche 13 décembre 2020

Dans la manifestation parisienne, les tactiques des gendarmes mobiles

  • Les manifestants commencent à affluer pour le départ d'une nouvelle journée de mobilisation contre la loi Sécurité globale
  • Ce samedi, la tactique "anti-casseurs" retenue par la PP est claire: empêcher toute formation des "blocs", ces petits groupes très mobiles qui se sont greffés sur le cortège pour détruire des commerces et en découdre avec les forces de l'ordre

PARIS : Sous la bruine qui mouille la place du Châtelet, le briefing est studieux ce samedi midi pour les 60 gendarmes mobiles du capitaine Adrien. Autour d'eux, les manifestants commencent à affluer pour le départ d'une nouvelle journée de mobilisation contre la loi Sécurité globale.

Son escadron a été dérouté la veille pour venir encadrer le défilé prévu dans la capitale. Pour cette unité basée en Picardie, c'est la deuxième fois ce mois-ci.

Dans le véhicule de commandement, une équipe bien rôdée. Le capitaine, 31 ans, et son pilote Kamel d'abord. Puis le transmetteur "Nounours", derrière l'ordinateur, un écran branché sur BFMTV, chargé de noter chaque ordre, déplacement, interpellation ou manœuvre de l'escadron.

Et il y a enfin "Spagget", qui reçoit dans son casque et partage en direct toutes les informations de la salle des opérations de la préfecture de police (PP), qui dirige la manœuvre des forces de l'ordre.

Ce samedi, la tactique "anti-casseurs" retenue par la PP est claire: empêcher toute formation des "blocs", ces petits groupes très mobiles qui, les deux dernières semaines, se sont greffés sur le cortège pour détruire des commerces et en découdre avec les forces de l'ordre.

Il s'agit donc pour l'escadron de filtrer et fouiller un maximum de manifestants dès le point de départ.

"On va s'intéresser aux jeunes, à ceux vêtus de noir, même si on sait maintenant qu'ils peuvent se changer en cours de manifestation, ainsi qu'aux équipements, casques, lunettes de protection, armes et projectiles", explique le capitaine Adrien. En cas de doute, l'identité du manifestant sera vérifiée, via une tablette numérique, dans le "fichier central".

Pas de lacrymo

Dehors, les slogans anti-police se déchaînent dans les haut-parleurs.

L'officier laisse glisser. "On est conscient que les gens sont à bout (...), qu'il peut y avoir des dérives. J'ai plus souvent des gens qui nous remercient que de gens qui montrent de l'hostilité. La haine anti-flic, c'est une minorité qui se fait entendre."

C'est l'heure de quitter le camion. "Un drapeau qui peut servir de point de ralliement à un bloc a été identifié", souffle le transmetteur. Son unité a pour mission d'appuyer les policiers de la BRAV (brigade de répression de l'action violente), chargés d'exfiltrer tout manifestant à l'attitude jugée "hostile".

"Casquez-vous!" En une fraction de seconde, deux colonnes de gendarmes mutiques se forment, prêtes à intervenir.

Un nouvel ordre tombe. Aujourd'hui, pas de gaz lacrymogène. "Il faut garder une visibilité totale" pour permettre cette stratégie de "bonds défensifs" dans la foule. La manifestation n'a pas encore bougé, et déjà 47 interpellations. En fin de journée, leur nombre avoisinera les 150.

Le cortège s'ébranle enfin. Toutes sirènes hurlantes, les véhicules se repositionnent 500 mètres plus loin en appui de la "nasse mobile", ce déploiement des forces de l'ordre en forme de U devant et sur les côtés du cortège.

La hantise des forces de l'ordre, "c'est que la manifestation se distende", explique le capitaine. "Si elle s'étend, les éléments hostiles peuvent profiter d'un étalement des forces de l'ordre pour créer des blocs".

Pause "Whisky Charlie"

L'omniprésence, spécialement ce samedi, des policiers et des gendarmes, même s'ils ne sont pas "au contact", risque à tout moment de déclencher des affrontements. Pour l'officier, c'est le moment de rappeler un principe-clé: "montrer la force pour ne pas avoir à l'utiliser".

Sur le terrain, il veille à l'image du déploiement de ses hommes. Surtout pas de mur "qui peut attirer les curieux ou les hostiles et créer un point de crispation".

Le capitaine vérifie aussi leur attitude et s'efforce de masquer tout signe de fébrilité. Ils sont rares, s'empresse-t-il d'ajouter, "grâce à la discipline militaire et une formation en groupe, qui permet de bien se connaître, de bien maîtriser ses émotions, qui permet d'éviter tout geste malheureux qui peut provoquer chez l'adversaire une réaction non désirée".

Après une rapide pause "Whisky Charlie" dans une pharmacie qui a bien voulu prêter ses toilettes aux gendarmes, retour au camion et direction place de la République, point d'arrivée du cortège.

Pour le capitaine Adrien, c'est sans doute le moment le plus "sensible de la journée". Il faut y faire le tri entre "bons et mauvais manifestants, à savoir ceux qui ne veulent pas répondre aux sommations de dispersion".

Ce samedi, son escadron est stationné hors de la place de la République en "deuxième rideau", loin de l'action. "On est beaucoup utilisés en défensif alors qu'on est très habitué à la mobilité, à la manœuvre", regrette le capitaine.

D'autres unités que la sienne se sont chargés de reprendre la place aux manifestants, sans incident majeur à signaler.

 


Un 1er-Mai syndical qui se veut «festif et combatif», mais sans unité large

Pour les salaires, pour l'abrogation de la réforme des retraites, ou encore "contre la trumpisation du monde" : les organisations syndicales appellent à battre le pavé jeudi pour le 1er-Mai, mais la mobilisation se tient sans unité large. (AFP)
Pour les salaires, pour l'abrogation de la réforme des retraites, ou encore "contre la trumpisation du monde" : les organisations syndicales appellent à battre le pavé jeudi pour le 1er-Mai, mais la mobilisation se tient sans unité large. (AFP)
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  • A Paris, la manifestation doit partir à 14H00 de la place d'Italie vers la place de la Nation
  • Si - comme l'an dernier - l'intersyndicale ne sera pas unie pour l'occasion, le numéro un de FO Frédéric Souillot défilera aux côtés de ses homologues, dont la cheffe de file de la CGT Sophie Binet, dans le cortège parisien

PARIS: Pour les salaires, pour l'abrogation de la réforme des retraites, ou encore "contre la trumpisation du monde" : les organisations syndicales appellent à battre le pavé jeudi pour le 1er-Mai, mais la mobilisation se tient sans unité large.

Pour la journée internationale des travailleurs, la CGT a recensé quelque 260 rassemblements en France. La centrale de Montreuil a appelé avec la FSU, Solidaires et des organisations de jeunesse (Union étudiante, Unef, Fage, USL) à défiler "contre l'extrême droite, pour la paix, les libertés et la justice sociale".

Si - comme l'an dernier - l'intersyndicale ne sera pas unie pour l'occasion, le numéro un de FO Frédéric Souillot défilera aux côtés de ses homologues, dont la cheffe de file de la CGT Sophie Binet, dans le cortège parisien.

A Paris, la manifestation doit partir à 14H00 de la place d'Italie vers la place de la Nation.

D'autres cortèges s'élanceront dès le matin, comme Marseille et Lille à 10h30. Ce sera aussi le cas dès 10 heures à Bordeaux, Strasbourg ou Dunkerque, où des responsables de gauche, comme Marine Tondelier (Ecologistes), François Ruffin (ex-LFI) ou Boris Vallaud (PS) sont attendus pour protester contre le plan du sidérurgiste ArcelorMittal prévoyant la suppression d'environ 600 postes.

La numéro un de la CFDT Marylise Léon et son homologue de l'Unsa Laurent Escure se retrouvent, eux, dans la matinée dans le centre de Paris pour un rassemblement et une table ronde sur le travail.

Cent jours après l'arrivée de Donald Trump au pouvoir, la CGT, la FSU et Solidaires veulent aussi faire de cette journée un temps fort "contre la trumpisation du monde et l'internationale réactionnaire qui se développe partout", a expliqué à l'AFP Thomas Vacheron, cadre de la CGT.

Des syndicats internationaux (américain, belge, argentin, notamment) ont été conviés au défilé parisien. "Cette démarche unitaire et internationale est un petit pas" pour lutter contre des politiques qui menacent les travailleurs (hausse des droits de douane ou expulsions massives des travailleurs clandestins), selon Murielle Guilbert (Solidaires).

"Le sang et les larmes"

Cette année encore, de source policière, la présence de militants de l'ultra-gauche est jugée très probable à Paris, Nantes ou Lyon, entre autres.

De même source, dans la capitale où un peu plus de 2.000 membres des forces de l'ordre sont attendus, la décision du gouvernement de dissoudre le groupe antifasciste "La Jeune garde" et le collectif "Urgence Palestine" pourrait tendre le climat.

"On ne tolèrera rien", a averti mercredi le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau.

"Il faut relativiser" cette présence de "black blocs" face aux "centaines de milliers de manifestantes et de manifestants" attendues, a nuancé Sophie Binet mercredi, dénonçant des "stratégies malheureusement classiques (...) pour décrédibiliser la mobilisation sociale".

En 2023, les huit principaux syndicats (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, Solidaires, FSU) avaient défilé ensemble contre la réforme des retraites, du jamais vu depuis près de 15 ans, avec une très forte mobilisation à la clé (entre 800.000, selon les autorités et 2,3 millions, selon la CGT).

L'an dernier, les chiffres étaient revenus dans des fourchettes plus ordinaires: entre 121.000 personnes, selon les autorités, et 210.000, selon la CGT; et jeudi, la mobilisation devrait attirer sensiblement le même nombre de manifestants (100.000 à 150.000 de source policière).

Ce rendez-vous traditionnel se tient au moment où les syndicats craignent que le gouvernement apporte son soutien à des propositions de loi visant à autoriser certaines professions à faire travailler les salariés le 1er-Mai - seul jour férié et chômé en France -, une journée acquise "dans le sang et dans les larmes des ouvriers", rappelle Sophie Binet.

Le syndicat des "Gilets jaunes" a par ailleurs appelé ses sympathisants à mener une opération secrète sur différents points de rassemblement. "On va montrer aux partenaires du pouvoir ce qu’est un VRAI syndicat", ont-ils écrit dans un appel posté sur le réseau social X.


Macron et von der Leyen inciteront lundi les chercheurs étrangers à choisir l'Europe

Le président français Emmanuel Macron accueille la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen à son arrivée au sommet de la « coalition des volontaires » au palais de l'Élysée, à Paris, le 27 mars 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le président français Emmanuel Macron accueille la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen à son arrivée au sommet de la « coalition des volontaires » au palais de l'Élysée, à Paris, le 27 mars 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • Le président français clôturera cette conférence dans la prestigieuse université de la Sorbonne, « dédiée à la science, à l'attractivité de l'Union européenne, mais aussi plus largement à l'innovation, à la recherche et aux libertés académiques »
  • « Ici, en France, la recherche est une priorité, l’innovation est une culture et la science est un horizon sans limite », avait-il assuré.

PARIS : À Paris, le président Emmanuel Macron et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen participeront lundi à une conférence pour vanter les mérites de l'Europe auprès des chercheurs étrangers, notamment américains, confrontés à « un certain nombre de menaces », a annoncé l'Élysée mercredi.

Le président français clôturera cette conférence dans la prestigieuse université de la Sorbonne, « dédiée à la science, à l'attractivité de l'Union européenne, mais aussi plus largement à l'innovation, à la recherche et aux libertés académiques », ont affirmé ses services à la presse.

Le message de cette rencontre sera « très clair » : « Choose Science, Choose Europe ».

Selon son entourage, il s'agit de dire, « dans un moment où les libertés académiques connaissent un certain nombre de reculs ou de menaces, que l'Europe est un continent attractif et que l'innovation, l'attractivité, la science et la recherche sont des éléments essentiels pour la croissance européenne ».

Le chef de l'État aura à cette occasion un entretien avec la présidente de la Commission européenne, qui participera à la conférence. 

Le 18 avril, Emmanuel Macron avait donné rendez-vous le 5 mai aux chercheurs « du monde entier ». Sur le réseau X, il les avait invités à « choisir la France et l'Europe », dans une tentative d'attirer les chercheurs américains menacés par la politique de Donald Trump.

« Ici, en France, la recherche est une priorité, l’innovation est une culture et la science est un horizon sans limite », avait-il assuré.

Parallèlement, le gouvernement a lancé une plateforme baptisée « Choose France for Science », présentée comme « une première étape pour préparer l'accueil des chercheurs internationaux ».

Depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche en janvier, chercheurs et universités sont dans le collimateur de son gouvernement et redoutent pour leur avenir, entre libertés académiques et de recherche menacées et financements réduits.

De plus en plus de chercheurs ou d'aspirants chercheurs réfléchissent donc à quitter le pays, considéré jusqu'ici comme le paradis de la recherche dans nombre de domaines.

En France, dès début mars, le ministre chargé de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Philippe Baptiste, a demandé aux universités de réfléchir à des moyens de les accueillir. 


« La France ne se définit ni par une race, ni par une religion », affirme Macron

Le président français Emmanuel Macron regarde avant d'accueillir le Premier ministre belge pour un déjeuner de travail au palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le président français Emmanuel Macron regarde avant d'accueillir le Premier ministre belge pour un déjeuner de travail au palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • « La France est une patrie de volonté et de bravoure qui ne se définit ni par le sang, ni par une race, ni par une religion, ni par une identité figée », a déclaré le président de la République.
  • Près de 150 nationalités se côtoient au sein de la Légion étrangère, où les légionnaires sont commandés par des officiers français.

AUBAGNE, FRANCE : lors d'une cérémonie militaire commémorant la bataille de Camerone, à Aubagne, où est basé le commandement de la Légion étrangère, Emmanuel Macron a affirmé  mercredi que « la France ne se définit ni par une race, ni par une religion, ni par une identité figée ».

« La France est une patrie de volonté et de bravoure qui ne se définit ni par le sang, ni par une race, ni par une religion, ni par une identité figée », a déclaré le président de la République devant plusieurs dizaines de légionnaires réunis pour commémorer la bataille de Camerone, qui s'est déroulée le 30 avril 1863 au Mexique.

« La France se définit par une volonté chaque jour recommencée d'accomplir de grandes choses avec une poignée de notre terre dans la main. Un rêve d'universel, un idéal, cette solidarité, cette fidélité à la patrie », a poursuivi M. Macron, qui s'est déplacé à Aubagne (Bouches-du-Rhône) pour commémorer cet événement fondateur de la Légion étrangère, célébré chaque année par tous les régiments. 

M. Macron a prononcé ce discours après avoir reçu mardi des représentants d'institutions musulmanes qui ont dénoncé le « climat islamophobe ambiant » et demandé au président de la République des « actes concrets » pour protéger les musulmans, après le meurtre d'un fidèle dans une mosquée du Gard.

À Aubagne, le président a passé en revue les troupes de la Légion étrangère, la force combattante de l'armée de terre qui compte plus de 9 500 hommes.

Près de 150 nationalités se côtoient au sein de la Légion étrangère, où les légionnaires sont commandés par des officiers français.

L'hymne national a été joué et deux avions Rafale ont survolé la cérémonie à laquelle ont assisté les élus locaux et plusieurs centaines de spectateurs.

La cérémonie de Camerone, qui est une fête de la Légion, commémore une bataille survenue à Camerone, dans l'État de Veracruz, dans l'est du Mexique, au cours de laquelle 62 légionnaires français ont résisté à 2 000 soldats mexicains lors de l'expédition française au Mexique. 

Le président Macron a décrit la bataille menée par une « poignée de légionnaires assiégés par 2 000 ennemis » qui ont « tenu une position pendant 11 heures », saluant une « histoire de courage insensé ».

Chargés de protéger le passage d'un convoi de ravitaillement pour les troupes françaises assiégeant la ville de Puebla, les légionnaires retranchés dans une hacienda du village de Camaron de Tejeda avaient fait le serment de se battre jusqu'à la mort.

Après une journée d'affrontement, les derniers encore en état de combattre refusèrent de se rendre et chargèrent les Mexicains à la baïonnette.