Niger: Bazoum appelle à l'aide, les putschistes menacent de riposter

Ci-dessus, les chefs de la défense de l'Afrique de l'Ouest se réunissent pour délibérer à Abuja, au Nigeria, sur les troubles politiques dans la République du Niger, le 2 août 2023. (AFP)
Ci-dessus, les chefs de la défense de l'Afrique de l'Ouest se réunissent pour délibérer à Abuja, au Nigeria, sur les troubles politiques dans la République du Niger, le 2 août 2023. (AFP)
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Publié le Vendredi 04 août 2023

Niger: Bazoum appelle à l'aide, les putschistes menacent de riposter

  • La tension est encore montée d'un cran dans le pays, alors que la date butoir donnée par la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) pour rétablir l'ordre constitutionnel approche
  • Tard jeudi, dans un communiqué lu à la télévision, les putschistes ont dénoncé «les accords de coopération dans le domaine de la sécurité et de la défense avec la France», dont un contingent militaire est déployé au Niger

NIAMEY: Le président élu du Niger Mohamed Bazoum a prédit des "conséquences dévastatrices" dans la région si le coup d'Etat réussit dans son pays et appelé la communauté internationale à l'aide, les putschistes promettant pour leur part une "riposte immédiate" à "toute agression".

La tension est encore montée d'un cran dans le pays, alors que la date butoir donnée par la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) pour rétablir l'ordre constitutionnel approche.

Tard jeudi, dans un communiqué lu à la télévision, les putschistes ont dénoncé "les accords de coopération dans le domaine de la sécurité et de la défense avec la France", dont un contingent militaire est déployé au Niger.

Et ils ont promis une "riposte immédiate" à "toute agression" de la part d'un pays de la Cédéao, hors Mali et Burkina Faso, membres "amis" suspendus, eux aussi dirigés par des putschistes.

Ces annonces sont intervenues peu après l'arrivée d'une délégation du bloc ouest-africain à Niamey pour tenter de trouver une sortie de crise, huit jours après le coup d'Etat au Niger qui a renversé le 26 juillet Mohamed Bazoum.

Celui-ci s'est exprimé jeudi soir, dans une tribune publiée par le quotidien américain Washington Post. Il a mis en garde contre les conséquences "dévastatrices" du coup d'Etat pour le monde et le Sahel, qui pourrait passer, selon lui, sous l'"influence" de la Russie par le biais du groupe paramilitaire Wagner.

"J'appelle le gouvernement américain et l'ensemble de la communauté internationale à aider à restaurer l'ordre constitutionnel", écrit-il, "à titre d'otage", dans sa première déclaration publique depuis son renversement.

La Cédéao, qui a imposé de lourdes sanctions à Niamey, a donné jusqu'à dimanche aux putschistes pour rétablir M. Bazoum, sous peine de potentiellement utiliser "la force".

Le président du Nigeria Bola Tinubu, aussi président en exercice de la Cédéao, a toutefois demandé à Abdulsalami Abubakar, à la tête de la délégation, de "tout faire" pour trouver une "résolution à l'amiable".

L'organisation, qui a notamment suspendu les transactions financières avec le Niger, a dit se préparer à une opération militaire, même si elle a souligné qu'il s'agissait de "la dernière option sur la table".

Les chefs d'état-major de la Cédéao sont réunis à Abuja jusqu'à vendredi. Plusieurs armées ouest-africaines, dont celle du Sénégal, se disent prêtes à intervenir.

Revenir à la raison

Les relations sont tendues entre Niamey et le bloc ouest-africain, et le sont également avec la France, ancienne puissance coloniale.

L'ambassadeur nigérien à Paris a d'ailleurs été limogé par les putschistes, tout comme ceux aux Etats-Unis, au Togo et au Nigeria.

Jeudi, les programmes de Radio France Internationale (RFI) et de la chaîne de télévision d'information France 24 ont été interrompus au Niger, "une décision prise hors de tout cadre conventionnel et légal", selon la maison-mère des deux médias, France Médias Monde.

Les signaux des deux médias ont été coupés "sur instructions des nouvelles autorités militaires", a indiqué à l'AFP un haut fonctionnaire nigérien.

La France a condamné "très fermement" cette décision.

RFI et France 24 sont déjà suspendus au Burkina Faso et au Mali voisins, où les militaires nigériens au pouvoir ont envoyé des délégations mercredi.

Le Mali et le Burkina Faso ont affirmé que toute intervention armée au Niger serait considérée "comme une déclaration de guerre" à leurs deux pays.

Evacuations

Des incidents dimanche lors d'une manifestation devant l'ambassade de France à Niamey ont entraîné l'évacuation de 577 de ses ressortissants au Niger mardi et mercredi.

Des milliers de manifestants soutenant la junte au pouvoir sont sortis jeudi dans le calme dans les rues de plusieurs villes nigériennes, à l'appel du M62, une coalition d'organisations de la société civile "souverainistes".

Nombre d'entre eux scandaient des slogans critiques de la France et brandissaient des drapeaux de la Russie -- dont se sont déjà rapprochés le Mali et le Burkina.

Les accès à l'ambassade française et à d'autres chancelleries proches étaient bloqués jeudi par les forces de l'ordre nigériennes, ont constaté des journalistes de l'AFP. Avant la manifestation, Paris avait rappelé "que la sécurité des emprises et des personnels diplomatiques (étaient) des obligations au titre du droit international".

Selon le chef de la junte, le général Abdourahamane Tiani, il n'y a "aucune raison objective" de "quitter" le pays.

Les Etats-Unis, partenaires du Niger comme la France, ont de leur côté affrété un avion pour évacuer leur personnel non essentiel dans le pays, quand le président Joe Biden a appelé "à la libération immédiate du président Bazoum".

Les deux alliés de ce pays en proie à des violences jihadistes depuis plusieurs années y déploient respectivement 1.100 et 1.500 militaires, dont l'évacuation n'est pas prévue.

M. Bazoum, 63 ans, est retenu avec sa famille depuis le jour du putsch dans sa résidence présidentielle. L'électricité y a été volontairement coupée jeudi, a affirmé son parti.


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.