A Marseille, «le nouveau monde» du narcobanditisme plongé dans une logique de vendetta

Des manifestants fuient des grenades lacrymogènes lancées lors d'affrontements avec la police à Marseille, dans le sud de la France, le 1er juillet 2023. (AFP)
Des manifestants fuient des grenades lacrymogènes lancées lors d'affrontements avec la police à Marseille, dans le sud de la France, le 1er juillet 2023. (AFP)
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Publié le Jeudi 17 août 2023

A Marseille, «le nouveau monde» du narcobanditisme plongé dans une logique de vendetta

  • Il y a tout un travail pour remonter au plus haut des réseaux, insiste Mme Camilleri, la Préfète de police, et «pour s'attaquer à l'argent sale»
  • Mercredi, Mme Camilleri a confirmé «autour de 30 décès directement liés aux trafics de stupéfiants». Autant déjà que les 31 morts par balles liés aux stupéfiants de 2022

MARSEILLE: La guerre des gangs à Marseille tourne à la logique de vendetta entre deux groupes rivaux des quartiers Nord gangrénés par le trafic de stupéfiants, "Yoda" et "DZ Mafia", principaux responsables de l'hécatombe dans la deuxième ville de France depuis le début de l'année.

Avec 12 morts depuis la mi-juillet, "le bain de sang" dénoncé en avril par la procureure de la République de Marseille Dominique Laurens a donc repris. Dernière victime en date: un homme d'une trentaine d'années tué d'une balle de Kalachnikov en pleine tête mardi soir dans un quartier populaire du nord de la cité.

"Il ne s'agit ni plus ni moins que de la reprise du conflit entre +Yoda+ et +DZ Mafia+", a insisté Frédérique Camilleri, la Préfète de police, devant la presse mercredi.

Selon elle, 80% des 68 homicides ou tentatives d'homicides en bande organisée depuis le début de l'année dans la ville qui abrita la "French connection" dans les années 70 sont liés à la rivalité entre ces deux bandes de la Paternelle, l'une des cités des quartiers Nord, pour le contrôle de ses lucratifs "plans stups".

Au total, selon le dernier décompte de l'AFP, 36 personnes ont perdu la vie dans la cité phonéenne depuis le début de l'année sur fond de trafic de drogue. Dont cet adolescent de 17 ans mort de ses blessures en février après avoir été lynché par une trentaine de personnes, dans cette même cité de la Paternelle. Une agression filmée et diffusée en direct sur Snapchat.

Mercredi, Mme Camilleri a confirmé "autour de 30 décès directement liés aux trafics de stupéfiants". Autant déjà que les 31 morts par balles liés aux stupéfiants de 2022.

«Je tue pour faire peur»

Derrière ces chiffres, "c'est un nouveau monde, un changement de paradigme auquel nous assistons", analyse-t-elle: "Désormais, nous sommes face à une logique de vendetta plus que d'appropriation de territoire, +je tue pour faire peur+, pas pour éliminer un concurrent gênant ou récupérer un point de deal".

Et la Préfète de souligner "la banalisation du recrutement des tueurs" par chaque réseau, "comme on recrute un guetteur": "il n'y a plus d'équipe de tueurs attitrés comme avant". Et les tueurs sont parfois aussi jeunes que leurs victimes: début avril, c'est ainsi Matteo F., 18 ans, qui est interpellé, soupçonné d'avoir abattu Djibril, 15 ans, et Kaïs, 16 ans. Pour tous les "contrats" qu'il aurait exécutés, il a affirmé avoir perçu 200.000 euros.

Et le vivier de candidats ne semble pas se tarir, malgré l'arrestation en flagrant délit de cinq commandos depuis le printemps, soit 17 personnes au total.

"Pour les anciens de la PJ, quand une équipe de tueurs était interpellée, c'était six mois de calme, mais c'est fini ça", constate Mme Camilleri.

Paradoxalement, si le nombre de morts s'emballe en 2023, c'est une année d'activité record pour les enquêteurs, souligne la Préfète: 740 armes saisies, dont 62 fusils d'assaut (+24% par rapport à 2022), 1.144 trafiquants interpellés à Marseille (+26%), 12 millions d'euros d'avoirs criminels saisis, des points de deal en diminution constante (70 de moins qu'en 2021).

Avec l'interpellation en juin en Algérie de Mohamed Djeha, dit "Mimo", c'est même un des plus gros trafiquants de drogue de France, ex-boss de la cité marseillaise de la Castellane, qui est mis hors d'état de nuire.

«Tout le monde veut partir d'ici»

Il y a tout un travail pour remonter au plus haut des réseaux, insiste Mme Camilleri, et "pour s'attaquer à l'argent sale": "Nous cherchons à toucher au portefeuille, en frappant les points de deal, +la vache à lait+ des réseaux, mais aussi les collecteurs d'argent et les réseaux de blanchiment".

Face "à la tectonique des plaques entre réseaux", la stratégie de "pilonnage" des points de deal va elle continuer.

Le ministre français de l'Intérieur, Gérald Darmanin, a annoncé jeudi l'envoi à Marseille de la CRS 8, une unité spécialisée dans la lutte contre les violences urbaines, "afin d'y mener des opérations cibles contre les trafics de drogue au cours des prochain jours".

Cette unité restera à Marseille environ une semaine, avec pour objectif de mener des actions coups de poing contre le trafic, sur les points de deal notamment.

Pour répondre au fléau de la drogue, Emmanuel Macron a annoncé en juin des mesures inédites contre "l'inégalité scolaire" et le risque de recrutement par les réseaux. Le président français s'était rendu notamment dans les quartiers sensibles du nord de la ville gangrénés par le narcotrafic pour dévoiler l'Acte II de son plan "Marseille en grand" destiné à lutter contre la pauvreté et donner une nouvelle dynamique à la cité.

Des habitants lui ont fait part de leur désarroi: "On est pris en otage, nous avons peur de sortir la nuit, tout le monde veut partir d'ici", a lancé une habitante du quartier de La Busserine.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.