Forest City, la ville fantôme chinoise à 100 milliards de dollars en Malaisie

Cette photo prise le 1er septembre 2023 montre une miniature de Forest City, du promoteur immobilier chinois Country Garden, un projet de développement lancé dans le cadre de l'initiative chinoise Belt and Road, dans sa galerie de vente à Gelang Patah, dans l'État malaisien de Johor. (Photo par Mohd RASFAN / AFP)
Cette photo prise le 1er septembre 2023 montre une miniature de Forest City, du promoteur immobilier chinois Country Garden, un projet de développement lancé dans le cadre de l'initiative chinoise Belt and Road, dans sa galerie de vente à Gelang Patah, dans l'État malaisien de Johor. (Photo par Mohd RASFAN / AFP)
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Publié le Dimanche 03 septembre 2023

Forest City, la ville fantôme chinoise à 100 milliards de dollars en Malaisie

  • Bâtie sur une île artificielle dans le détroit de Johor, face à la prospère cité-Etat de Singapour, Forest City était l'un des nombreux paris mirobolants de Country Garden
  • Les pressions sur Garden City pour qu'il rembourse ses créanciers «pourraient avoir un impact sur sa capacité à terminer des projets immobiliers à l'étranger», estime Bernard Aw, économiste en chef de la Coface pour l'Asie-Pacifique

FOREST CITY, Malaisie : A l'approche de Forest City, un projet immobilier de 100 milliards de dollars en Malaisie porté par le géant chinois Country Garden, un pont effondré oblige les automobilistes à faire un détour. Et dans la ville parsemée de palmiers, les rues, les appartements et les magasins restent désespérément vides.

Ciblant les investisseurs chinois de la classe moyenne, Forest City a pour le moment survécu à un bide commercial, au contrôle des changes par la Chine, aux confinements dû à la pandémie et à la colère de l'opinion publique face à l'influence croissante des Chinois en Malaisie.

Et son avenir est à nouveau assombri par les difficultés financières du promoteur chinois Country Garden, devenu en quelques années le plus grand groupe immobilier privé du pays mais qui croule désormais sous une dette colossale de 196 milliards de dollars.

Country Garden a annoncé fin août une perte record pour le premier semestre 2023. Ses créanciers ont accepté samedi de rééchelonner un remboursement, lui évitant in extremis un défaut de paiement qui aurait mis en péril des milliers de projets dans le monde.

Le groupe n'est pas tiré d'affaire pour autant. Un délai de grâce de 30 jours, accordé début août quand il s'était avéré incapable de verser 22,5 millions de dollars d'intérêts à ses créanciers, expire mardi, avec un nouveau risque de défaut de paiement.

«J'espère que Country Garden pourra surmonter ses difficultés financières», dit Zhao Bojian, un Chinois de 29 ans qui a acheté l'un des 26.000 appartements de Forest City pour environ 430.000 dollars il y a cinq ans.

«Si personne ne vient à Forest City, nous ne pouvons pas faire affaire ici», se plaint-il.

- Pari mirobolant -

Bâtie sur une île artificielle dans le détroit de Johor, face à la prospère cité-Etat de Singapour, Forest City était l'un des nombreux paris mirobolants de Country Garden.

Lancé dans le cadre des Nouvelles routes de la soie, ambitieux projet d'infrastructures destiné à renforcer l'influence de la Chine dans le monde, et partiellement contrôlé par un puissant sultan malaisien, le complexe immobilier ne compte que 9.000 résidents, bien en-deçà de l'objectif de 700.000 habitants.

A la tombée du jour, quand repartent les ouvriers qui travaillent sur les chantiers, un silence inquiétant s'abat sur la ville insulaire et ses autoroutes à quatre voies. Dans les dizaines de tours géantes, seules quelques fenêtres sont éclairées.

Les trottoirs déserts longent des rangées de magasins fermés, certains avec des injonctions judiciaires collées sur la porte pour exiger des paiements qui ne viendront jamais. A l'intérieur, des déchets jonchent le sol.

Dans un immeuble de 45 étages, seuls deux niveaux sont occupés et le reste est à vendre, confie un responsable.

La plupart des propriétaires ne vivent pas sur place, raconte à l'AFP un garde de sécurité, et ont acheté afin de faire un investissement.

Des maquettes des quatre îles artificielles qui doivent composer la ville une fois le projet achevé, ce qui est encore loin d'être le cas, trônent dans le hall d'une salle d'exposition pour acheteurs potentiels, guidés par des panneaux en mandarin, en malais et en anglais.

Le Premier ministre malaisien, Anwar Ibrahim, tente de sauver le projet du naufrage. Il a annoncé la création d'une «zone financière spéciale», et des incitatifs tels qu'un taux avantageux pour l'impôt sur le revenu des résidents et des visas à entrées multiples.

- Gratte-ciels futuristes-

Mais les analystes sont sceptiques. Les pressions sur Garden City pour qu'il rembourse ses créanciers «pourraient avoir un impact sur sa capacité à terminer des projets immobiliers à l'étranger», estime Bernard Aw, économiste en chef de la Coface pour l'Asie-Pacifique.

Située à trois heures de route de la capitale Kuala Lumpur, Forest City attire les visiteurs curieux d'observer ses gratte-ciels futuristes .

«Je n'aimerais pas habiter ici, c'est une ville-fantôme. Les rues sont sombres et dangereuses et il n'y a pas d'éclairage public», raconte Denish Raj, un Singapourien de 32 ans.

Seuls les travailleurs étrangers, dont beaucoup viennent du Népal ou du Bangladesh, maintiennent un certain niveau d'activité en balayant les rues, taillant les arbustes ou en gardant les tours désertes.

Sur une plage artificielle jonchée de cannettes vides, quelques familles pique-niquent à l'ombre des palmiers, face à un panneau mettant en garde les baigneurs contre les crocodiles.

«Je suis venu ici en vacances après avoir vu des vidéos sur TikTok», explique Nursziwah Zamri, un employé de 30 ans de l'Etat de Malacca. «Si vous me demandez si j'aurais envie d'habiter ici, la réponse est non».


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
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  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.


Face à l'explosion des dépenses militaires, l'ONU appelle à «repenser les priorités»

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté. (AFP)
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté. (AFP)
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  • "Aujourd'hui, nous publions un rapport qui révèle une réalité saisissante: le monde dépense bien plus à faire la guerre qu'à construire la paix", a-t-il déclaré Antonio Guterres
  • Selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), les dépenses militaires mondiales ont atteint en 2024 près de 2.700 milliards de dollars, en hausse de plus de 9% sur un an

NATIONS-UNIES: Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté.

"Aujourd'hui, nous publions un rapport qui révèle une réalité saisissante: le monde dépense bien plus à faire la guerre qu'à construire la paix", a-t-il déclaré Antonio Guterres.

Selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), les dépenses militaires mondiales ont atteint en 2024 près de 2.700 milliards de dollars, en hausse de plus de 9% sur un an.

C'est "l'équivalent de 334 dollars par habitant de la planète", "près de 13 fois le montant de l'aide publique au développement des pays les plus riches et 750 fois le budget ordinaire de l'ONU", a noté Antonio Guterres.

Et en parallèle, la majorité des Objectifs de développement durables (ODD) visant à améliorer le sort de l'humanité d'ici 2030 (éradication de l'extrême pauvreté, égalité hommes-femmes, éducation...) ne sont pas sur la bonne voie.

Pourtant, mettre un terme à la faim dans le monde d'ici 2030 nécessiterait seulement 93 milliards de dollars par an, soit 4% des dépenses militaires de 2024, et faire en sorte que chaque enfant soit totalement vacciné coûterait entre 100 et 285 milliards par an, note le rapport demandé par les Etats membres.

Au total, l'ONU estime aujourd'hui à 4.000 milliards de dollars les investissements supplémentaires nécessaires chaque année pour atteindre l'ensemble des ODD, un montant qui pourrait grimper à 6.400 milliards dans les prochaines années.

Alors le secrétaire général de l'ONU a lancé un "appel à l'action, un appel à repenser les priorités, un appel à rééquilibrer les investissements mondiaux vers la sécurité dont le monde a vraiment besoin".

"Des dépenses militaires excessives ne garantissent pas la paix, souvent elles la sapent, encourageant la course aux armements, renforçant la méfiance et détournant des ressources de ce qui représentent les bases de la stabilité", a-t-il ajouté. "Un monde plus sûr commence par investir au moins autant pour lutter contre la pauvreté que nous le faisons pour faire la guerre".

"Rediriger même une fraction des dépenses militaires actuelles pourraient combler des écarts vitaux, envoyer des enfants à l'école, renforcer les soins de santé de base, développer les énergies propres et des infrastructures résistantes, et protéger les plus vulnérables", a-t-il plaidé.