L’actrice saoudienne Joud Alsufyani évoque son rôle dans la série Tahir’s House et son amour pour la culture coréenne

Dans Tahir’s House, Joud Alsufyani incarne Azizah, la jeune fille d’une famille basée à Djeddah. (Photo fournie)
Dans Tahir’s House, Joud Alsufyani incarne Azizah, la jeune fille d’une famille basée à Djeddah. (Photo fournie)
Short Url
Publié le Jeudi 07 septembre 2023

L’actrice saoudienne Joud Alsufyani évoque son rôle dans la série Tahir’s House et son amour pour la culture coréenne

  • Dans Tahir’s House, la première série comique originale Netflix en Arabie saoudite, la star de TikTok Joud Alsufyani incarne Azizah, une jeune fille d’une famille basée à Djeddah
  • Contrairement aux acteurs des générations précédentes, principalement influencés par Hollywood, Alsufyani a poursuivi sa passion davantage en raison de sa fascination pour les séries coréennes comme les K-drama

DUBAÏ: Les meilleures comédies reflètent souvent la vie réelle. Lorsque les créateurs de Tahir’s House, la première série comique originale Netflix en Arabie saoudite, étaient à la recherche d’une actrice pour incarner Azizah, la jeune fille d’une famille basée à Djeddah, ils imaginaient une jeune fille qui, selon eux, représentait parfaitement la prochaine génération de femmes saoudiennes. Elle serait intelligente et vive d’esprit, une meneuse née et attentive au reste du monde. En choisissant l’actrice saoudienne et star de TikTok Joud Alsufyani, ils ont réussi à se rapprocher de la réalité plus qu’ils n’auraient pu l’imaginer.

«Honnêtement, nous avons eu l’impression que Joud était née pour jouer ce rôle», confie Sultan al-Abdelmohsen, le réalisateur de la série, à Arab News. «Nous n’arrivions pas à y croire.» 

photo
Joud Alsufyani, star de TikTok, dans la série comique originale de Netflix Tahir’s House (Netflix).

Le plus grand choc est survenu lors de l’audition. Dans une scène, Joud Alsufyani devait parler de son amour de la culture coréenne, en particulier de sa célèbre exportation, la K-pop. On a demandé à Alsufyani si elle connaissait ce genre musical. En réponse, elle s’est mise à parler coréen.

 

«Ils étaient choqués, mais parler coréen est devenu naturel pour moi maintenant», plaisante Alsufyani. «À la maison, je parle à moitié en coréen. Même ma mère me voit déambuler dans ma chambre avec des baguettes et des nouilles coréennes et me demande: “Qu’est-ce qui t’arrive, Joud?” Je lui réponds simplement: “Désolée, maman, mais je vais me coucher”!» dit Alsufyani en coréen, nous traduisant ensuite la phrase qu’elle vient de prononcer.

Alsufyani est l’incarnation de la génération Z de Djeddah, et pas seulement en raison de sa prédilection pour la culture coréenne. Si Tahir’s House, qui a fait ses débuts le 6 septembre sur la plus grande plate-forme de streaming au monde, est peut-être l’occasion pour cette jeune femme de 22 ans de devenir une star mondiale, elle avait déjà, comme beaucoup de ses pairs talentueux, trouvé un terrain d’expression pour ses talents créatifs sur TikTok, où elle a gagné plus de 700 000 abonnés sous le pseudonyme de Jay Starlit.

 

 

Alors qu’elle commençait à se faire connaître en ligne, ses talents d’actrice l’ont aidée à gérer l’attention accrue que suscitait son contenu, créé dans sa chambre à coucher. «Sur les réseaux sociaux, vous devez être fort, vous devez avoir confiance en vous et vous devez incarner un personnage que tout le monde va aimer et accepter. Bien sûr, il y a toujours des détracteurs sur les réseaux sociaux, mais le métier d’actrice m’a appris à ne pas laisser cela me faire perdre la tête», explique Alsufyani.

«Être actrice m’a appris à parler différemment, à réagir différemment. Grâce à ça, je peux sourire et avancer sans que les personnes sachent ce que je ressens réellement», poursuit-elle. Ces émotions ne remontent pas à la surface lorsque les gens la critiquent personnellement, mais lorsque les trolls s’en prennent à ses proches, précise-t-elle. «Je ne me soucie pas des commentaires des gens à mon sujet. Je ne me soucie que de ma famille. Ils sont mon refuge et je tiens à les protéger. Si ma mère figure dans une vidéo avec moi et que quelqu’un parle d’elle, ce n’est pas quelque chose que je peux laisser passer facilement», ajoute Alsufyani.

photo
C’est la mère de Joud Alsufyani qui l’a soutenue lorsqu’elle décroché son premier grand rôle dans The Inheritance. (Photo fournie)

Ce dévouement va dans les deux sens. C’est sa mère qui l’a soutenue lorsqu’elle a décroché son premier grand rôle dans le feuilleton saoudien The Inheritance. Pendant deux ans et demi, Alsufyani a fait des allers-retours entre Djeddah et Abu Dhabi pour tourner, et a même dû vivre aux Émirats arabes unis pendant une longue période en raison de la pandémie. «Ma mère m’a toujours soutenue dans la poursuite de ce rêve. Mon père, quant à lui, est très strict et, au début, il ne voulait pas que je me lance. Cependant, au bout de trois mois, il a vu que je réussissais rapidement et a accepté», raconte Alsufyani.

 

 

photo
L’actrice saoudienne Joud Alsufyani dans The Inheritance. (Photo fournie)

Comme c’est le cas pour la plupart des jeunes Saoudiens qui veulent devenir acteurs et réalisateurs, l’industrie est un territoire inconnu pour Joud Alsufyani. Alors que les familles sont confrontées aux changements que la célébrité rapide peut entraîner, les jeunes femmes découvrent que leur capacité à s’exprimer devant un public leur confère une autonomie qu’elles n’auraient jamais pu imaginer auparavant.

«J’ai l’impression de devenir très puissante», affirme-t-elle. «Avant, personne ne pouvait entendre ma voix. C’est énorme pour moi de pouvoir dire que je suis actrice, surtout dans ma génération. Je suis la première actrice de toute ma famille.»

Contrairement aux acteurs des générations précédentes, qui étaient principalement influencés par Hollywood, Alsufyani a été poussée à poursuivre sa passion davantage en raison de sa fascination pour les séries coréennes comme les K-drama, très populaires dans le monde entier, avec un rythme et un style qui leur sont propres.

«J’avais 13 ou 14 ans lorsque j’ai commencé à regarder des K-drama, et j’ai tout de suite été obsédée. Au début, j’ai appris la langue rien qu’en regardant ces séries. Je devais savoir tout ce qu’ils disaient et j’ai commencé à chercher et à comprendre», se souvient Alsufyani.

 

 

«Le style d’interprétation est totalement différent. Dans les K-drama, ils aiment tout exagérer, les sentiments, les expressions. Ils ont une façon unique de montrer leurs émotions sur leur visage ou avec leurs mains, et je me suis inspirée de tout cela, consciemment et inconsciemment. Même leur façon de se maquiller m’a influencée», poursuit-elle. 

La culture coréenne a également commencé à avoir un impact important sur Djeddah dans son ensemble. «Il y a maintenant beaucoup de touristes coréens qui visitent l’Arabie saoudite. Un restaurant coréen a même été ouvert par une famille de Séoul qui s’est installée ici. C’est formidable de voir cet échange. On dirait qu’il y a une affinité mutuelle, et j’aime voir ça», déclare Alsufyani. «J’espère qu’un jour je pourrai aller là-bas et jouer dans un drame coréen. Ce serait mon rêve, j’aimerais pouvoir contribuer aux émissions que j’aime tant», ajoute-t-elle. 

Le plateau de Tahir’s House était un environnement merveilleusement encourageant, où Alsufyani était non seulement incitée à partager son amour de la culture à la fois devant la caméra et hors caméra, mais aussi à se développer en tant qu’artiste.

«Tout le monde se souciait vraiment de ce que les autres ressentaient. J’ai vraiment l’impression qu’ils m’ont accueillie et qu’ils ont continué à m’élever. J’ai grandi en tant qu’actrice et j’ai adoré chaque minute de cette expérience», confie-t-elle. 

 

 

La jeune actrice s’est même découvert un nouveau centre d’intérêt pendant le tournage: la réalisation. «Je m’asseyais toujours avec le réalisateur pour comprendre chacune de ses décisions, j’apprenais comment fonctionne l’éclairage, je regardais chaque prise sur le moniteur. J’étais fascinée par tout ça et j’ai réalisé que je voulais vraiment essayer de le faire moi-même», indique-t-elle.

Bien qu’elle adore la culture coréenne, en tant que réalisatrice en herbe, elle souhaite ardemment immortaliser la beauté de son premier amour: la ville de Djeddah. Elle cite un proverbe qui dit que, contre vents et marées, Djeddah est toujours là. Elle veut être là pour la ville, mais également pour ses talents émergents. «De nombreux acteurs ici à Djeddah n’ont pas encore eu leur chance, alors j’espère pouvoir les aider afin de montrer au monde qu’une nouvelle génération d’acteurs arrive», déclare Alsufyani. 

«J’ai tellement de choses à faire et je n’ai pas de modèle à suivre», poursuit-elle. Je dis toujours: “N’ayez jamais de modèle”. Dans cette vie, vous devez devenir votre propre modèle.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


La bibliothèque Jadal est une oasis culturelle dans la province orientale de l'Arabie saoudite

Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Short Url
  • Ali Al-Herz a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres, offrant aux visiteurs un espace où la mémoire, la philosophie et la culture prennent vie.
  • adal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

DHAHRAN : Dans le village tranquille d'Umm Al-Hamam, situé dans la province orientale de l'Arabie saoudite, une passion de longue date pour les livres s'est transformée en un havre culturel.

Ali Al-Herz, bibliophile et archiviste littéraire, a transformé sa maison en une bibliothèque d'exception nommée Jadal, un véritable trésor contenant plus de 37 000 livres, plus de 100 000 journaux et magazines, ainsi que des antiquités, dont certaines datent de plus d'un siècle.

Mais Jadal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

Al-Herz a déclaré à Arab News : « Depuis ma naissance, j'ai été entouré des livres de ma mère. J'ai grandi immergé dans cette passion, à tel point qu'elle m'a complètement envahi ; je suis devenu un rat de bibliothèque. »

L'étincelle qui a tout déclenché a été la rencontre d'Al-Herz avec l'épopée Sirat Antar à l'âge de 13 ans. « À partir de cette épopée, et à travers elle, j'ai commencé à explorer d'autres mondes », a-t-il déclaré. 

C'est cette curiosité et cette fascination qui ont finalement conduit Al-Herz à créer l'une des initiatives les plus originales du royaume d'Arabie saoudite.

Le nom « Jadal » signifie « débat » ou « discussion » en arabe, reflétant l'esprit curieux de la bibliothèque. Pour Al-Herz, l'objectif n'est pas seulement de préserver les textes, mais aussi l'idée de questionner et d'explorer les idées.

Al-Herz a déclaré : « J'ai choisi ce nom pour la bibliothèque, car il est profondément ancré dans l'histoire philosophique de la Grèce antique, ainsi que dans notre propre tradition culturelle arabo-islamique, en particulier dans notre héritage religieux. »

L'atmosphère philosophique imprègne les trois salles principales, nommées d'après Socrate, Platon et Aristote, qui accueillent les visiteurs dans un univers dédié à la lecture et à la réflexion. 

Des manuscrits rares, des textes anciens, des journaux et des antiquités ont été soigneusement archivés. Chaque pièce est un murmure du passé qui s'adresse à l'avenir. 

Al-Herz explique : « Même mon intérêt récent pour l'achat de livres s'est principalement orienté vers les éditions rares et les imprimés anciens, afin de créer une harmonie entre patrimoine et modernité. »

Mais Jadal ne se laisse pas envahir par la nostalgie, car Al-Herz organise toutes les deux semaines une réunion littéraire. Cet événement fait revivre une tradition qui était autrefois importante dans la vie intellectuelle des Arabes.

C'est un environnement où écrivains, universitaires et penseurs se réunissent autour d'un café arabe pour échanger des idées dans une atmosphère animée. 

À une époque où les gens recherchent des informations instantanées en ligne, Al-Herz continue d'utiliser des méthodes traditionnelles. « Il y a une lutte permanente entre deux générations », observe-t-il. « La victoire reviendra finalement à cette dernière génération, une fois que ma génération aura disparu. Les bibliothèques papier seront alors transformées en musées. »

Il a peut-être raison, mais pour l'instant, au cœur de la campagne de Qatif, la bibliothèque Jadal continue d'exister, et c'est un lieu où l'encre, la mémoire, le débat et le patrimoine continuent de façonner l'âme culturelle du Royaume. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com 


Amin Maalouf apporte un soutien inattendu aux langues régionales

Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
Short Url
  • Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs,
  • Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale.

PARIS : Une initiative d'un collectif visant à enseigner le patrimoine littéraire dans les langues régionales de France a reçu lundi  un soutien inattendu : celui du secrétaire perpétuel de l'Académie française, Amin Maalouf.

M. Maalouf, écrivain franco-libanais, a été élu en 2023 à la tête d'une institution dont la mission est de veiller au rayonnement et à l'intégrité de la langue française.

Toutefois, il soutient la démarche du Collectif pour les littératures en langues régionales, qui suggère un enseignement de ce type au collège ou au lycée, a indiqué ce collectif à l'AFP.

Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs, afin de sensibiliser à la « richesse de la production littéraire » dans d'autres langues que le français. 

« M. Maalouf, comme nous, est convaincu qu'il est nécessaire que les élèves français découvrent ces trésors culturels », écrit ce collectif à M. Bayrou, qui parle lui-même le béarnais.

Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale (de l'alsacien au tahitien, en passant par le basque ou le corse), traduits en français.

On y trouve entre autres un poème en provençal de Frédéric Mistral (prix Nobel de littérature en 1904) intitulé Mirèio, une chronique en breton de Pierre-Jakez Hélias intitulée Bugale ar Republik, un court récit en créole martiniquais de Raphaël Confiant intitulé Bitako-a, ainsi qu'une chanson en picard d'Alexandre Desrousseaux intitulée Canchon dormoire (plus connue sous le nom de P'tit Quinquin).

« Il ne s'agit pas de donner des cours de langues régionales, mais de présenter des œuvres issues des littératures en langues régionales, que ce soit en français ou en version bilingue », précise le collectif.

Idéalement, selon lui, les élèves aborderaient des langues issues d'autres régions que la leur. « Pourquoi seuls les élèves antillais apprendraient-ils qu'il existe une littérature en créole ? », demande ce collectif, qui présente son initiative à la presse lors d'une visioconférence lundi après-midi. 


L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle

L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle. (Photo Fournie)
L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle. (Photo Fournie)
Short Url
  • Fraîchement conçue, cette installation baignée de jaune, ancrée dans les œuvres passées de l'artiste, offre une expérience sensorielle riche et complexe ainsi qu'un commentaire culturel incisif.
  • « The Social Health Club » s'articule autour d'objets trouvés au marché Haraj de Djeddah en 2018.

RIYAD : Ce mois-ci, l'artiste saoudienne Ahaad Alamoudi fait monter la température au Basel Social Club qui se tient jusqu'au 21 juin dans la ville suisse avec sa dernière installation, « The Social Health Club ». 

Fraîchement conçue, cette installation baignée de jaune, ancrée dans les œuvres passées de l'artiste, offre une expérience sensorielle riche et complexe ainsi qu'un commentaire culturel incisif. Elle marque également une première pour l'artiste avec un élément de performance en direct.

Basée à Djeddah, Alamoudi est connue pour créer des installations multimédias immersives s'inspirant de la dynamique complexe de son pays natal en pleine évolution. « The Social Health Club » s'articule autour d'objets trouvés au marché Haraj de Djeddah en 2018, notamment divers équipements de sport, dont un rameur.

« Ce sont des pièces que j'ai chinées dans des brocantes. J'aime le fait qu'aucune instruction n'accompagne ces machines : je ne connais ni leur nom, ni leur provenance, ni leur fabricant. Mais elles font désormais partie du paysage urbain dans lequel j'évolue. J'ai essayé de créer un espace ludique », a-t-elle déclaré à Arab News. 

Dans « The Social Health Club », les équipements, peints principalement dans un jaune vif et saturé, restent intacts, symbolisant une culture obsédée par l'auto-optimisation. Au cœur de l'installation se trouve un caméo représentant un fer à repasser peint en jaune, déjà présent dans son œuvre vidéo de 2020 intitulée « Makwah Man » (Makwah signifie « fer à repasser » en arabe).

« Beaucoup de mes œuvres sont issues d'un récit que je crée dans une vidéo. Dans « Makwah Man », cet homme vêtu d'une thobe jaune repasse un long morceau de tissu jaune au milieu du désert. Et pendant qu'il repasse, il nous dit comment vivre notre vie. Mais en nous disant comment vivre notre vie, il commence aussi à remettre en question la sienne, à comprendre le rôle du pouvoir, à prendre conscience de la pression du changement et de l'adaptation », explique Alamoudi. 

« Le jaune est présent dans la vidéo, mais l'artiste porte également une thobe jaune. Il y a aussi, dans cette version présentée à Art Basel, un portant de thobes jaunes qui tournent dans l'exposition. Pour moi, la thobe jaune est un symbole unificateur. J'essaie de dire que nous vivons tous cela différemment. Ainsi, dans la performance (pour « The Social Health Club »), un culturiste local vêtu d'une thobe jaune fera des exercices sur ces machines. Il n'a pas de règles à suivre. Il ne connaît rien, ne sait pas comment utiliser « correctement » l'équipement. Il entrera dans l'espace et utilisera les machines comme il le pourra.

« La performance sera enregistrée. Mais je pense que c'est plutôt une activation », a-t-elle poursuivi. « Ce n'est pas l'œuvre elle-même. L'œuvre existe sous la forme des machines. 

« Le Social Health Club » a été créé en étroite collaboration avec la conservatrice Amal Khalaf. Ensemble, ils se sont rendus à Djeddah où Alamoudi a pu découvrir avec elle des « machines un peu inhabituelles, différentes des machines classiques que l'on trouve dans les salles de sport et dont tout le monde connaît immédiatement l'utilité », explique Alamoudi.

« Elle est vraiment incroyable », a-t-elle poursuivi. « Nous avons vraiment construit cet espace ensemble. En gros, j'ai principalement créé la vidéo ; tout le reste a été construit à partir de là. Elle m'a beaucoup aidée. Elle s'est vraiment intéressée aux changements sociaux et à la manière dont nous les abordons. Notre collaboration a été parfaite. »

Le jaune domine chaque centimètre carré de l'œuvre, de manière délibérée et intense. 

« Je suis obsédé par les symboles dans certaines de mes œuvres. Et cela s'accompagne également d'une couleur », explique Alamoudi. « Je voulais mettre en valeur quelque chose de luxueux, de coloré, presque comme de l'or, mais qui n'est pas de l'or. Son apparence est assez austère. » 

Le jaune est à la fois une invitation et un avertissement. « Je pense que le jaune est également assez trompeur. J'aime cette couleur qui incite les gens à s'approcher pour voir ce qui se passe, mais qui les amène en même temps à se demander ce que c'est  elle est si agressive qu'elle en devient un peu inconfortable. »

L'interaction du spectateur est essentielle à la signification de l'œuvre. 

« Je pense que les machines représentent quelque chose et qu'elles véhiculent quelque chose, mais elles sont en réalité activées par les gens, par ce que les gens font avec elles », explique Alamoudi. « C'est pourquoi j'encourage beaucoup de spectateurs à interagir avec les œuvres, à les utiliser ou à essayer de les utiliser sans aucune instruction. Beaucoup de personnes qui entrent dans l'espace peuvent avoir peur de les toucher ou d'interagir avec elles. La présence de l'artiste qui active les structures ajoute une autre dimension à l'œuvre elle-même. »

Elle espère que les visiteurs se sentiront libres d'explorer les œuvres, sans être encombrés par des attentes.

« Les gens sont censés les utiliser à leur guise. Ils peuvent s'asseoir dessus, se tenir debout dessus, les toucher — ils peuvent aussi les laisser tranquilles », conclut-elle en riant. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com