Enseignant tué en France : l'impossible prévention des actes individuels

Des policiers français de l'unité tactique RAID et des sauveteurs se tiennent devant le lycée Gambetta à Arras, dans le nord-est de la France, le 13 octobre 2023, après qu'un enseignant a été tué et deux autres personnes gravement blessées lors d'une attaque au couteau, ont déclaré la police et les autorités régionales. (Photo par Denis Charlet  AFP)
Des policiers français de l'unité tactique RAID et des sauveteurs se tiennent devant le lycée Gambetta à Arras, dans le nord-est de la France, le 13 octobre 2023, après qu'un enseignant a été tué et deux autres personnes gravement blessées lors d'une attaque au couteau, ont déclaré la police et les autorités régionales. (Photo par Denis Charlet AFP)
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Publié le Samedi 14 octobre 2023

Enseignant tué en France : l'impossible prévention des actes individuels

  • Dans une attaque comme celle de vendredi, insiste un ancien expert des Nations unies, «virtuellement aucune préparation n'est requise. C'est quasiment impossible à prévenir (...) sauf si vous avez beaucoup, beaucoup de chance»
  • «On déjoue un attentat tous les deux mois en France», déclarait en septembre Gérald Darmanin, relevant que «5.800 personnes étaient fichées» avec des soupçons qu'elles puissent «passer à l'acte»

PARIS : L'attentat dans lequel un enseignant a été tué vendredi à Arras, dans le nord de la France, rappelle combien les actes isolés d'individus radicalisés sont virtuellement impossibles à prévenir, dans l'Hexagone comme ailleurs.

L'attaque est l'oeuvre d'un homme d'une vingtaine d'années, fiché pour radicalisation (fiché S) donc étroitement surveillé par les services français, et armé d'un simple couteau.

En Europe, la liste des individus surveillés «est très longue (...). Tous les jours, les services de sécurité doivent prendre une décision», relève pour l'AFP Hans-Jakob Schindler, directeur de l'ONG Counter-Extremism Project (CEP).

Dans une attaque comme celle de vendredi, insiste cet ancien expert des Nations unies, «virtuellement aucune préparation n'est requise. C'est quasiment impossible à prévenir (...) sauf si vous avez beaucoup, beaucoup de chance».

Les exemples, de fait, sont légion.

En septembre 2021, un Sri Lankais de 32 ans sous surveillance constante prend un couteau dans un supermarché d'Auckland et blesse plusieurs personnes avant d'être abattu.

- Pas des «loups solitaires» -

En novembre 2022 à Bruxelles, un ancien détenu radicalisé, fiché, profère des menaces et réclame des soins psychiatriques avant de tuer un policier d'un coup de couteau à la gorge.

Début 2023, un sacristain est tué à la machette et un prêtre blessé dans une église d’Algésiras, en Espagne, par un Marocain de 25 ans. Il a crié «Allah Akbar» après son arrestation mais «n’était pas dans le radar» pour radicalisation.

Ce type d'attaques a longtemps été attribué à de prétendus «loups solitaires», des individus qui agiraient seuls. Une thèse depuis battue en brèche par nombre de chercheurs mettant en lumière parfois de véritables réseaux, souvent de multiples sources d'influence.

En 2012, Mohamed Merah assassine avec une arme de poing trois militaires, trois enfants et un enseignant juifs dans le sud de la France. Tué par la police, il deviendra un exemple pour une génération de radicalisés.

«Ce passage à l'acte, dont on aurait pu penser qu'il jette un discrédit auprès des jeunes Français, a en réalité constitué un vrai tournant. Merah est passé pour un héros qui a ouvert le bal», expliquait à l'AFP le chercheur Hugo Micheron, spécialiste du jihadisme, au moment du dixième anniversaire de ses assassinats.

Au delà des filières qui ont conduit tant de jeunes Occidentaux à partir en Syrie sous le califat du groupe Etat islamique (EI, 2014-2019), l'internet joue un rôle surpuissant. Avec des risques souvent liés au contexte international.

- Contexte international -

L'attaque d'Arras vendredi est étrangement proche du troisième anniversaire de l'assassinat de Samuel Paty, un professeur français décapité le 16 octobre 2020 près de son collège.

Mais «il y a un lien malheureusement entre ce qu'il s'est passé sans doute au Proche-Orient et le passage à l'acte», a déclaré le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin sans donner de détails.

De fait, le débat public s'est considérablement durci depuis les attaques du Hamas sur Israël et les ripostes de l'armée israélienne.

«On constate une ébullition en ligne qui s'accompagne d'une forte montée de la désinformation, avec des vidéos recyclées qui ajoutent à la confusion, à la douleur et à la polarisation», explique Laurence Bindner, co-fondatrice de JOS Project, plateforme d'analyse de la propagande extrémiste en ligne.

«Les personnes qui font l'apologie des attentats jihadistes représentent un cercle restreint. Là, sans aller jusqu’à l'apologie, on constate un refus de condamnation des massacres du 7 octobre dans des sphères beaucoup plus larges».

En septembre, Gérald Darmanin avait évoqué la résurgence du risque d'attentats conçus depuis l'étranger, du type de ceux du 13 novembre 2015 à Paris.

Les centrales de l'EI et d'Al-Qaïda ont longtemps été considérées comme trop affaiblies pour pouvoir en préparer ces derniers mois. «Mais l'intention existe et on peut considérer qu'elles essayent de reconstruire le réseau et les cellules nécessaires», assure Katherine Zimmerman, spécialiste de l'antiterrorisme pour l'American Enterprise Institute (AEI) à Washington.

La menace dite endogène, venant d'un individu vivant sur les lieux de son attentat, reste pour autant dominante. «On déjoue un attentat tous les deux mois en France», déclarait en septembre Gérald Darmanin, relevant que «5.800 personnes étaient fichées» avec des soupçons qu'elles puissent «passer à l'acte».

Vendredi, le président Emmanuel Macron a évoqué une autre «tentative d'attentat» déjouée, en référence, selon le ministère de l'Intérieur, à l'arrestation en banlieue parisienne d'un homme connu pour «radicalisation» à la sortie d'une salle de prière.

Un défi posé à toutes les démocraties du monde, estime Katherine Zimmerman, qui juge qu'elles «ne doivent pas compromettre (leurs) valeurs libérales (...) au nom de la sécurité. Changer de la sorte à cause de la menace terroriste laisse les terroristes gagner».


Les députés approuvent la mise en place d'une taxe de deux euros pour les «petits colis»

L'Assemblée nationale a approuvé mercredi la mise en place d'une taxe de deux euros ciblant les "petits colis" d'une valeur inférieure à 150 euros d'origine extra-européenne, qui servira à financer les dispositifs pour contrôler ces produits. (AFP)
L'Assemblée nationale a approuvé mercredi la mise en place d'une taxe de deux euros ciblant les "petits colis" d'une valeur inférieure à 150 euros d'origine extra-européenne, qui servira à financer les dispositifs pour contrôler ces produits. (AFP)
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  • La mesure a suscité de vifs débats, le Rassemblement national dénonçant une "taxe sur la consommation populaire et les classes moyennes"
  • Ces discussions interviennent alors que la plateforme de commerce en ligne d'origine chinoise Shein est sous le feu des critiques, accusée de vendre de nombreux produits non conformes et illicites

PARIS: L'Assemblée nationale a approuvé mercredi la mise en place d'une taxe de deux euros ciblant les "petits colis" d'une valeur inférieure à 150 euros d'origine extra-européenne, qui servira à financer les dispositifs pour contrôler ces produits.

208 députés contre 87 ont approuvé cette mesure proposée par le gouvernement dans le cadre de l'examen en première lecture du budget de l'Etat. Le RN a voté contre, la gauche, la coalition gouvernementale et le groupe ciottiste UDR, allié de Marine Le Pen, pour.

La mesure a suscité de vifs débats, le Rassemblement national dénonçant une "taxe sur la consommation populaire et les classes moyennes", quand la ministre Amélie de Montchalin (Comptes publics) a défendu une "redevance" destinée à contrôler des produits souvent "dangereux".

Ces discussions interviennent alors que la plateforme de commerce en ligne d'origine chinoise Shein est sous le feu des critiques, accusée de vendre de nombreux produits non conformes et illicites.

"Ce n'est pas une taxe pour empêcher la concurrence déloyale chinoise, c'est une taxe sur la consommation populaire et les classes moyennes", a dénoncé le député Jean-Philippe Tanguy (RN).

"Faire croire aux Français qu'en taxant les petits colis, vous arriverez à augmenter de manière spectaculaire le nombre de contrôles, c'est se moquer du monde", a renchéri la présidente du groupe, Marine Le Pen, soulignant que "l'année dernière, 0,125 % de colis ont été vérifiés".

La France insoumise s'est également dite soucieuse des répercussions de la taxe sur les consommateurs, exigeant pour les protéger que les plateformes soient taxées directement et non les colis, et menaçant de voter contre la mesure.

Le gouvernement a déposé un amendement destiné à répondre à cette préoccupation, permettant que la taxe soit payée via "le tuyau de la TVA", qui est "alimenté par les plateformes". Cela a convaincu LFI de soutenir la proposition gouvernementale.

La taxe devrait rapporter environ 500 millions d'euros, destinés selon Mme de Montchalin à financer l'achat de scanners pour contrôler les colis et embaucher des douaniers.

Elle s'est félicitée que la France mette en oeuvre la taxe "dès le 1er janvier", comme la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, neuf mois plus tôt que les autres pays de l'UE.

"Ceux qui ce soir ne voteront pas cette taxe (...) n'ont pas choisi la France, ils n'ont pas choisi nos commerçants, ils auront choisi la Chine et sa submersion", a-t-elle tonné.

Elle a par ailleurs rappelé que les ministres des Finances de l'Union européenne se sont accordés la semaine dernière pour supprimer l'exonération de droits de douane dont bénéficient ces petits colis.

Juste avant minuit, les députés ont en revanche supprimé un autre article du projet de loi, visant à fiscaliser l'ensemble des produits à fumer, avec ou sans tabac ou nicotine.

"Nous sommes 700. 000 personnes à avoir réussi à arrêter de fumer grâce à la cigarette électronique", une alternative efficace pour "sauver des vies" qui est "bien moins dangereuse que la cigarette", a argumenté le député Renaissance Pierre Cazeneuve. Parmi elles, de nombreux députés, dont lui-même.


Macron fustige les «bourgeois des centres-villes» qui financent «parfois» le narcotrafic

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  • Emmanuel Macron a également insisté sur "la nécessité d'avoir une approche interministérielle du très local à l'international"
  • La question est au centre du débat public depuis l'assassinat jeudi à Marseille de Mehdi Kessaci, le frère d'un militant engagé contre le narcotrafic

PARIS: Le président Emmanuel Macron a estimé mercredi lors du Conseil des ministres que ce sont "parfois les bourgeois des centres-villes qui financent les narcotrafiquants", selon des propos rapportés par la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon lors de son compte-rendu.

Le chef de l'État a appuyé "l'importance d'une politique de prévention et de sensibilisation puisque, je reprends ses mots, +c'est parfois les bourgeois des centres-villes qui financent les narcotrafiquants+", a précisé Maud Bregeon, ajoutant: "on ne peut pas déplorer d'un côté les morts et de l'autre continuer à consommer le soir en rentrant du travail".

Emmanuel Macron a également insisté sur "la nécessité d'avoir une approche interministérielle du très local à l'international". La question est au centre du débat public depuis l'assassinat jeudi à Marseille de Mehdi Kessaci, le frère d'un militant engagé contre le narcotrafic.

 


Amiante dans les écoles: plus de 50 personnes et sept syndicats portent plainte à Marseille

Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire. (AFP)
Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire. (AFP)
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  • "La grande majorité des établissements scolaires en France, construits avant son interdiction en 1997, présentent encore à ce jour de l’amiante dans de nombreux éléments du bâti", rappelle dans un communiqué l'avocate Julie Andreu
  • Or, la vétusté de certains d'entre eux aggrave l'exposition à l'amiante et selon l'avocate, "les responsables concernés (collectivités locales) n’ont pas pris les mesures qui s’imposent"

MARSEILLE: Ils sont parents d'élèves, enseignants, agents municipaux: une cinquantaine de personnes, toutes exposées à l'amiante dans des écoles des Bouches-du-Rhône, vont déposer mercredi à Marseille une plainte contre X pour "mise en danger délibérée de la vie d'autrui".

Sept syndicats et trois associations de victimes de l'amiante sont aussi plaignants dans ce dossier, qui concerne 12 établissements scolaires, la plupart à Marseille.

"La grande majorité des établissements scolaires en France, construits avant son interdiction en 1997, présentent encore à ce jour de l’amiante dans de nombreux éléments du bâti", rappelle dans un communiqué l'avocate Julie Andreu, qui représente ces plaignants d'une douzaine d'établissements scolaires et dont la plainte va être déposée à 14h.

Or, la vétusté de certains d'entre eux aggrave l'exposition à l'amiante et selon l'avocate, "les responsables concernés (collectivités locales) n’ont pas pris les mesures qui s’imposent".

Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire.

"Une collègue est décédée en avril 2024 des suites d’un cancer lié à l’amiante, reconnu comme maladie professionnelle", a expliqué dans un dossier de presse le collectif stop amiante éducation, dans lequel sont réunis les syndicats et associations plaignants.

Le collectif dénonce "de nombreuses défaillances", notamment une absence d'information sur l'amiante, malgré les obligations réglementaires, ou encore une absence de protection pendant les travaux.

En mars, les syndicats enseignants avaient révélé que plus de 80% des bâtiments scolaires en France étaient potentiellement concernés par la présence d'amiante.

Un rapport du Haut Conseil de la Santé Publique publié en 2014, prévoit que d’ici 2050, 50.000 à 75.000 décès par cancer du poumon dus à l’amiante aient lieu, auxquels s’ajoutent jusqu'à 25.000 décès par mésothéliome (un autre type de cancer).