Argentine: Milei réaffirme un cap libéral sans concession

Le candidat à la présidentielle argentine Javier Milei fait des gestes, alors qu'il se rend dans un bureau de vote pour voter, lors du second tour de l'élection présidentielle argentine, à Buenos Aires, en Argentine, le 19 novembre 2023. (REUTERS)
Le candidat à la présidentielle argentine Javier Milei fait des gestes, alors qu'il se rend dans un bureau de vote pour voter, lors du second tour de l'élection présidentielle argentine, à Buenos Aires, en Argentine, le 19 novembre 2023. (REUTERS)
Short Url
Publié le Lundi 20 novembre 2023

Argentine: Milei réaffirme un cap libéral sans concession

  • L'ultra-libéral Milei aux positions controversées contre le changement climatique, s'est ainsi entretenu par vidéoconférence avec l'ex-président d'extrême droite brésilien, Jair Bolsonaro, qui l'a chaleureusement félicité
  • La veille, il avait reçu un message de félicitations d'un «très fier» Donald Trump, auquel il est parfois comparé, mais se réfère très rarement dans les faits

BUENOS AIRES: Inflation "détruite" d'ici deux ans, privatisations tous azimuts, médias publics dans le viseur: le président élu argentin Javier Milei a réaffirmé lundi un cap économique libéral sans concession.

Il a assuré n'avoir "littéralement" pas dormi dans la nuit suivant sa retentissante victoire, avec 55,6% des voix, face au ministre de l'Economie sortant, Sergio Massa. Les interlocuteurs étrangers appelaient, "il fallait travailler", a-t-il expliqué.

L'ultra-libéral Milei aux positions controversées contre le changement climatique, s'est ainsi entretenu par vidéoconférence avec l'ex-président d'extrême droite brésilien, Jair Bolsonaro, qui l'a chaleureusement félicité, et annoncé qu'il viendrait à son investiture le 10 décembre.

La veille, il avait reçu un message de félicitations d'un "très fier" Donald Trump, auquel il est parfois comparé, mais se réfère très rarement dans les faits. Il y a deux mois, il a cependant salué "la défense des idées de liberté", et "la lutte contre le socialisme" de l'ancien président américain.

A l'aube, un Milei combatif a donné une série d'interviews à la radio, réaffirmant, et détaillant un peu, sa détermination à faire prendre un virage radical à l'économie argentine. Dans la lignée d'un discours de victoire où il a averti: "pas de demi-mesures".

Vaincre l'inflation chronique, qui à 143% sur un an exténue les Argentins? "Si l'on réduit aujourd’hui l'émission monétaire, ce processus prendrait entre 18 et 24 mois", a-t-il estimé, souhaitant "la détruire et la ramener aux niveaux internationaux les plus bas".

Tempérant certains espoirs --mais aussi des craintes-- l'économiste ultralibéral de 53 ans a assuré qu'il ne lèverait pas le contrôle des changes immédiatement, sinon "on arriverait à une hyperinflation".

Dialogue avec le FMI

Mais M. Milei a surtout répété que son programme de privatisations serait de grande portée: "Tout ce qui peut être dans les mains du secteur privé le sera".

Il a ainsi cité le géant pétrolier YPF, nationalisé en 2012 sous la présidence péroniste de Cristina Kirchner. Mais aussi des médias publics comme l'agence officielle Telam et la télévision TVP, "devenue un mécanisme de propagande", a-t-il dénoncé dans une autre interview sur Radio Mitre.

Et il a réaffirmé sa volonté d'éliminer, à terme, la Banque centrale, via la dollarisation de l'économie. "La monnaie sera celle que les Argentins choisiront librement. Au fond, tu dollarises pour te débarrasser de la Banque centrale". Il n'a pas donné d'échéancier.

Concernant le Fonds monétaire international (FMI), auquel l'Argentine peine à rembourser un prêt de 44 milliards de dollars octroyé en 2018, M. Milei a assuré que son équipe "dialogue depuis un bon moment avec les gens du FMI".

La directrice du FMI, Kristalina Georgieva, a félicité lundi M. Milei et a espéré "collaborer étroitement" avec lui en vue d'un plan à même "de protéger la stabilité macroéconomique et renforcer la croissance inclusive pour tous les Argentins".

Mais le programme d’ajustement du Fonds "est mort", estime le nouveau président, car l'Argentine est selon lui bien au-delà des objectifs de déficit budgétaire, "près de 3% du PIB au lieu de 1,9%".

Il faut corriger cela "le plus vite possible", et "on va commencer par une réforme de l'Etat, remettre les comptes publics en ordre très rapidement", a promis celui qui, lors de ses meetings électoraux, brandissait régulièrement une "tronçonneuse" contre la dépense publique.

Ajustement «inexorable»

"L'ajustement, il faut le faire, inexorablement, la grande différence est que +la caste+ le faisait payer aux gens, et nous on le fera payer à la +caste et ses associés+", a-t-il encore avancé, en référence à l'élite au pouvoir ces dernières années.

Lundi étant un jour férié en Argentine, il était difficile d'évaluer la réaction des marchés à la victoire de M. Milei et son impact en particulier sur le peso, de l'avis général notoirement surévalué à 369 pour un dollar aux taux officiels (trois fois plus au marché parallèle).

Jusqu'à son investiture, "la période va être plus compliquée, plus bruyante" que si M. Massa, au programme plus prévisible du point de vue des marchés, avait gagné, prédisait l'économiste Elisabet Bacigalupo, du cabinet Abeceb.

Par ailleurs, cherchant à rassurer sur l'avenir de l'éducation, de la santé publique, M. Milei a rappelé lundi qu'ils "ne peuvent pas se privatiser, car ils sont du ressort des provinces", l'Argentine étant un Etat fédéral. Sur ces sujets, il a dénoncé une  "campagne de peur" contre lui.

Pas un mot par contre sur des thèmes controversées, que M. Milei a esquivé de plus en plus récemment: le changement climatique -il estime qu'il n'est "pas de la responsabilité de l'homme". 

Il a enfin indiqué qu'il voyagerait "dans les prochains jours" aux Etats-Unis -Miami et New York- puis en Israël, mais des déplacements à titre privé, avant sa prise de fonction.


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Short Url
  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Short Url
  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Short Url
  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.