«Le Royaume-Uni, j'oublie» : les étudiants Erasmus paient le prix du Brexit

Le commissaire européen à l'éducation, à la culture, à la jeunesse et au sport, Tibor Navracsics, s'adresse à une conférence de presse sur le 30e anniversaire du programme Erasmus, à la Commission européenne à Bruxelles le 26 janvier 2017. (AFP)
Le commissaire européen à l'éducation, à la culture, à la jeunesse et au sport, Tibor Navracsics, s'adresse à une conférence de presse sur le 30e anniversaire du programme Erasmus, à la Commission européenne à Bruxelles le 26 janvier 2017. (AFP)
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Publié le Samedi 26 décembre 2020

«Le Royaume-Uni, j'oublie» : les étudiants Erasmus paient le prix du Brexit

  • Face à l'arrêt du programme européen d'échanges Erasmus au Royaume-Uni, les étudiants français contraints de changer leurs projets
  • En 33 ans de collaboration, le royaume britannique s'était imposé comme l'un des principaux pays d'accueil des étudiants européens au sein d'Erasmus

PARIS: «On ne va pas s'obstiner à étudier en Angleterre, c'est trop cher»: face à l'arrêt du programme européen d'échanges Erasmus au Royaume-Uni, les étudiants français contraints de changer leurs projets oscillent entre déception et fatalisme.

En première année à l'université de Lille, Lucas Santerre espérait mettre le cap en septembre 2021 sur Leeds, dans le Yorkshire.

«Pour apprendre l'anglais, ça semblait incontournable», estime le jeune homme de 18 ans, qui souhaitait poursuivre son cursus d' «études culturelles» dans le pays qui a développé cette discipline.

Mais avec l'accord post-Brexit annoncé mercredi et l'abandon d'Erasmus par le Royaume-Uni, «ça ne sera pas possible», soupire l'étudiant. «J'ai complètement laissé tomber l'idée. Le Royaume-Uni, j'oublie, je vais tenter la Pologne ou la Hongrie.»

Grâce à Erasmus, il aurait pu avoir une bourse et s'inscrire à Leeds en payant les mêmes frais de scolarité qu'en France, soit «quelques centaines d'euros». Avec la fin du programme outre-Manche, «hors de question» pour ce fils d'agriculteur de s'accrocher à son projet initial et d'investir «plus de 10 000 livres» pour financer son année.

«L'objectif c'est pas de s'endetter, c'est de partir à l'étranger parce que c'est une belle expérience et c'est enrichissant», justifie-t-il.

Amateur de châteaux, Lucas se voyait déjà «approfondir l'architecture de la période victorienne» dans la bibliothèque du campus, ou «aller voir le mur d'Hadrien» à la frontière écossaise.

«J'irai peut-être faire tout ça comme voyageur, mais pas comme étudiant», regrette-t-il. «C'est dommage, le Royaume-Uni s'isole.»

En 33 ans de collaboration, le royaume britannique s'était imposé comme l'un des principaux pays d'accueil des étudiants européens au sein d'Erasmus.

Les jeunes Français en ont fait leur destination favorite entre 2014 et 2019, selon les chiffres de l'agence Erasmus+ France, qui gère le programme dans l'Hexagone.

La tendance s'était toutefois infléchie avec la menace du Brexit. En 2018-2019, un peu plus de 4 000 Français sont partis au Royaume-Uni, ce qui en faisait «le troisième pays de destination, derrière l'Espagne et l'Irlande», rappelle à l'AFP la directrice de l'agence, Laure Coudret-Laut.

- «Cavalier seul» -

Désormais, «les étudiants les plus modestes ne pourront pas envisager de faire des études au Royaume-Un» à cause des «droits d'entrée très importants», analyse-t-elle. Conséquence, «l'Irlande, Malte et les pays nordiques, qui proposent de nombreux cursus en anglais, vont beaucoup bénéficier du Brexit».

Cette haute fonctionnaire trouve «très surprenant que le Royaume-Uni décide de faire cavalier seul».

Le Premier ministre Boris Johnson a annoncé la création d'un programme mondial propre pour permettre aux étudiants britanniques de partir à l'étranger. Selon lui, Erasmus coûtait «extrêmement cher» au Royaume-Uni, car le pays accueillait plus d'étudiants européens (35 000 par an environ) qu'il n'envoyait de jeunes Britanniques (17000) sur le Vieux continent.

«C'est un argument qui ne tient pas la route», estime Mme Coudret-Laut, en rappelant que les jeunes qui s'installent dans un pays étranger «consomment et contribuent à la vie économique».

En rapportant ces dépenses à la participation du Royaume-Uni pour financer Erasmus, le pays engrangeait un bénéfice net de 243 millions livres, soit environ 270 millions d'euros, selon l'organisation Universities UK, qui représente plus de 140 établissements d'Angleterre, d'Ecosse, du Pays-de-Galles et d'Irlande du Nord.

Pour Mme Coudret-Laut, «mettre en place un programme mondial sera coûteux. En sortant d'Erasmus, le Royaume-Uni se prive surtout de talents.»

«Cela gâche mes projets, mais je vais passer au plan B», confirme François Boyer, qui rêvait d'une année à Londres, charmé par «l'effervescence de la ville». «Fataliste», l'étudiant lillois en sciences politiques «espère rebondir dans un autre pays anglophone comme le Canada», où son université a noué des partenariats.

«C'est vraiment triste, pour les étudiants britanniques comme pour les Européens», regrette Juliette Soudarin, étudiante en journalisme qui a bénéficié du programme il y a deux ans.

Erasmus l'a envoyée à l'université de Keele, dans le centre de l'Angleterre. Au-delà des études, cette passionnée de musique a «découvert la scène rock» du Royaume-Uni et y a rencontré son «boyfriend».

«Avec le Brexit, on se rend compte qu'on a été très chanceux de vivre tout ça.»

 


L’histoire de Donia, arrivée de Gaza à Paris, le quotidien morbide des Gazaouis qui ne veulent que vivre

Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
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  • Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
  • Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable.

PARIS: Depuis le début de la guerre à Gaza, les récits qui parviennent à franchir les ruines et le silence imposé sont rares.
Derrière les chiffres et les bilans atones relayés par les médias, il y a des voix : celles de civils qui ont vu leur existence basculer en quelques heures.
Parmi elles, Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable. Donia témoigne de ce que signifie vivre la guerre : vivre avec la peur, la faim, fuir sous les bombes, errer d’un abri de fortune à un autre.
Marcher pour ne pas crever, marcher avec le seul souci de garder en vie ses deux enfants (une fille et un garçon) restés avec elle, les deux autres étant en Égypte.
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous.
Son récit, émouvant par-dessus tout, saccadé par de longs silences et des larmes qui coulent spontanément sur les joues, n’en est pas moins ferme : pour elle, indéniablement, Gaza est le foyer des Gazaouis qui feront tout pour reconstruire.

 


Lecornu recevra les socialistes mercredi, annonce Olivier Faure

Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure. (AFP)
Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure. (AFP)
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  • Depuis sa nomination mardi, Sébastien Lecornu a commencé ses consultations avec d'abord les partis de son "socle commun" (bloc central et LR), puis les syndicats et organisations patronales avec qui il a des entretiens encore lundi et mardi
  • Mais le rendez-vous le plus attendu est celui avec les socialistes. Déjà menacé de censure par LFI et le RN, c'est eux qui peuvent éviter à M. Lecornu de connaître le même sort que ses prédécesseurs

PARIS: Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure.

"On a rendez-vous mercredi matin et donc nous le verrons pour la première fois", a déclaré M. Faure lundi sur France 2. Les Ecologistes de Marine Tondelier et le Parti communiste de Fabien Roussel ont également indiqué à l'AFP être reçus mercredi, respectivement à 14H et 18H.

Depuis sa nomination mardi, Sébastien Lecornu a commencé ses consultations avec d'abord les partis de son "socle commun" (bloc central et LR), puis les syndicats et organisations patronales avec qui il a des entretiens encore lundi et mardi.

Mais le rendez-vous le plus attendu est celui avec les socialistes. Déjà menacé de censure par LFI et le RN, c'est eux qui peuvent éviter à M. Lecornu de connaître le même sort que ses prédécesseurs.

Au coeur de ce rendez-vous le projet de budget 2026 que le nouveau gouvernement devra présenter avant la mi-octobre au Parlement.

Les socialistes posent notamment comme conditions un moindre effort d'économies l'année prochaine que ce qu'envisageait François Bayrou et une fiscalité plus forte des plus riches, à travers la taxe sur les très hauts patrimoines élaborée par l'économiste Gabriel Zucman (2% sur les patrimoines de plus de 100 millions d'euros).

Mais Sébastien Lecornu, s'il s'est dit prêt samedi à "travailler sans idéologie" sur les questions "de justice fiscale" et de "répartition de l'effort", a déjà fait comprendre son hostilité à cette taxe Zucman, et notamment au fait de taxer le patrimoine professionnel "car c'est ce qui permet de créer des emplois".

"Quand on parle patrimoine professionnel, vous pensez à la machine outil ou aux tracteurs mais pas du tout. On parle d'actions, la fortune des ultrariches, elle est essentiellement en actions", lui a répondu M. Faure.

"Si vous dites que, dans la base imposable, on retire ce qui est l'essentiel de leur richesse, en réalité, vous n'avez rien à imposer", a-t-il argumenté.

"C'était déjà le problème avec l'Impôt sur la fortune (ISF, supprimé par Emmanuel Macron) qui touchait les +petits riches+ et épargnaient les +ultrariches+ parce que les +ultrariches+ placent leur argent dans des holdings", a-t-il reconnu.

 


Pour Sébastien Lecornu, un premier déplacement consacré à la santé

Sébastien Lecornu assiste à la présentation du supercalculateur Asgard au Mont Valérien à Suresnes, près de Paris, le 4 septembre 2025. (AFP)
Sébastien Lecornu assiste à la présentation du supercalculateur Asgard au Mont Valérien à Suresnes, près de Paris, le 4 septembre 2025. (AFP)
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  • Déplacement symbolique à Mâcon : Pour son premier déplacement, Sébastien Lecornu met l'accent sur l'accès aux soins et le quotidien des Français
  • Conscient de l'absence de majorité, il consulte partis et syndicats, cherchant des terrains d'entente sur le budget, tout en laissant la porte ouverte à une fiscalité plus juste

PARIS: Sébastien Lecornu se rend samedi en province, à Mâcon, pour son premier déplacement en tant que Premier ministre consacré à la santé et à "la vie quotidienne" des Français, délaissant pendant quelques heures les concertations qu'il mène activement à Paris avant de former un gouvernement.

Quatre jours à peine après sa nomination, le nouveau et jeune (39 ans) locataire de Matignon va à la rencontre des Français, pour qui il reste encore un inconnu. Il échangera notamment avec des salariés d'un centre de santé de Saône-et-Loire dont le but est d'améliorer l'accès aux soins.

Lui-même élu local de l'Eure, où il a été maire, président de département et sénateur, ce fils d'une secrétaire médicale et d'un technicien de l'aéronautique avait assuré dès le soir de sa nomination "mesurer les attentes" de ses concitoyens et "les difficultés" qu'ils rencontraient.

Celles-ci sont souvent "insupportables" pour accéder à un médecin ou à un professionnel de santé, parfois "source d'angoisse", souligne son entourage. Le Premier ministre entend dans ce contexte "témoigner de la reconnaissance de la Nation à l’égard des personnels soignants" et "réaffirmer la volonté du gouvernement de faciliter l’accès aux soins".

Il s'agit aussi pour Sébastien Lecornu de convaincre l'opinion, autant que les forces politiques, du bien-fondé de sa méthode: trouver des terrains d'entente, en particulier sur le budget, permettant de gouverner sans majorité.

Sébastien Lecornu est très proche d'Emmanuel Macron, avec qui il a encore longuement déjeuné vendredi à l'Elysée.

- Mouvements sociaux -

Sa nomination coïncide avec plusieurs mouvements sociaux. Le jour de sa prise de fonction, une mobilisation lancée sur les réseaux sociaux pour "bloquer" le pays a réuni 200.000 manifestants, et une autre journée de manifestations à l'appel des syndicats est prévue jeudi.

"Il y a une grande colère" chez les salariés, a rapporté Marylise Léon, la secrétaire générale de la CFDT, premier syndicat de France, à l'issue d'une entrevue vendredi avec le nouveau Premier ministre, qui lui a dit travailler sur une "contribution des plus hauts revenus" dans le budget 2026.

C'est sur le budget que ses deux prédécesseurs, François Bayrou et Michel Barnier, sont tombés. Et Sébastien Lecornu cherche en priorité une forme d'entente avec les socialistes.

Mais il lui faut dans le même temps réduire les déficits, alors que l'agence de notation Fitch a dégradé vendredi soir la note de la dette française.

Le centre et la droite de la coalition gouvernementale se disent prêts à taxer plus fortement les ultra-riches sans pour autant aller jusqu'à l'instauration de la taxe Zucman sur les plus hauts patrimoines, mesure phare brandie par les socialistes et dont LR ne veut pas.

Une telle mesure marquerait en tout cas une des "ruptures" au fond prônées par Sébastien Lecornu à son arrivée, puisqu'elle briserait le tabou des hausses d'impôts de la macronie.

- Méthode -

Sébastien Lecornu veut aussi des changements de méthode.

Il a d'abord réuni jeudi --pour la première fois depuis longtemps-- les dirigeants des partis du "socle commun", Renaissance, Horizons, MoDem et Les Républicains, afin qu'ils s'entendent sur quelques priorités communes.

Un format "présidents de parti" qui "permet de travailler en confiance, de façon plus directe, pour échanger sur les idées politiques, sur les arbitrages", salue un participant.

Avant les oppositions et à quelques jours d'une deuxième journée de manifestations, il a consulté les partenaires sociaux, recevant vendredi la CFDT et Medef, avant la CGT lundi.

En quête d'un compromis pour faire passer le budget, le chef de gouvernement pourrait repartir du plan de son prédécesseur François Bayrou délesté de ses mesures les plus controversées. A l'instar de la suppression de deux jours fériés.

L'hypothèse d'une remise sur les rails du conclave sur les retraites semble aussi abandonnée. Les partenaires sociaux refusent de toute façon de le rouvrir.

Des gestes sont attendus à l'égard des socialistes alors qu'à l'Elysée, on estime que le Rassemblement national, premier groupe à l'Assemblée nationale, se range désormais comme la France insoumise du côté du "dégagisme".

Cultivant une parole sobre voire rare, Sébastien Lecornu ne s'exprimera qu'à l'issue de ces consultations "devant les Français", avant la traditionnelle déclaration de politique générale, devant le Parlement.