Amour, graphisme et lutte des classes: la designeuse Matali Crasset revisite «Giselle»

Dans ce récit né de l'imagination de Théophile Gautier et chorégraphié à Paris en 1841 par Jean Coralli et Jules Perrot, Giselle est une jeune villageoise qui meurt en apprenant qu'Albrecht, l'homme dont elle est tombée amoureuse, est un aristocrate déjà fiancé à une princesse. (AFP)
Dans ce récit né de l'imagination de Théophile Gautier et chorégraphié à Paris en 1841 par Jean Coralli et Jules Perrot, Giselle est une jeune villageoise qui meurt en apprenant qu'Albrecht, l'homme dont elle est tombée amoureuse, est un aristocrate déjà fiancé à une princesse. (AFP)
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Publié le Jeudi 07 décembre 2023

Amour, graphisme et lutte des classes: la designeuse Matali Crasset revisite «Giselle»

  • Dans sa réinterprétation contemporaine de ce classique des ballets de l'ère romantique, racontant un amour impossible par-delà la mort, Matali Crasset confronte deux mondes viscéralement opposés
  • «Il y a le "monde d'en bas", une communauté de villageois qui défend le vivant, et le "monde d'en haut", celui des propriétaires terriens qui craignent de perdre leurs privilèges», explique la créatrice

BORDEAUX: A l'Opéra de Bordeaux, la designeuse Matali Crasset, connue pour ses créations ludiques et politiques, propose jusqu'au 31 janvier, une version épurée et graphique du célèbre ballet romantique "Giselle", sur fond de lutte des classes.

Dans sa réinterprétation contemporaine de ce classique des ballets de l'ère romantique, racontant un amour impossible par-delà la mort, Matali Crasset confronte deux mondes viscéralement opposés.

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Dans sa réinterprétation contemporaine de ce classique des ballets de l'ère romantique, racontant un amour impossible par-delà la mort, Matali Crasset confronte deux mondes viscéralement opposés. (AFP)

"Il y a le +monde d'en bas+, une communauté de villageois qui défend le vivant, et le +monde d'en haut+, celui des propriétaires terriens qui craignent de perdre leurs privilèges", explique la créatrice, reconnaissable à sa coupe à la Jeanne d'Arc et ses lunettes carrées.

Dans ce récit né de l'imagination de Théophile Gautier et chorégraphié à Paris en 1841 par Jean Coralli et Jules Perrot, Giselle est une jeune villageoise qui meurt en apprenant qu'Albrecht, l'homme dont elle est tombée amoureuse, est un aristocrate déjà fiancé à une princesse.

Serpillères contre combinaisons synthétiques

Marqueur de différences entre ces deux mondes: la matière des costumes, en serpillères de coton et déchets recyclés pour les villageois; en matière synthétique - polyester et élasthanne - rappelant les maillots de bain et combinaisons étanches pour la noblesse.

Grâce au "savoir-faire" des costumiers de l'opéra bordelais, le tissu gaufré teint en vert olive ou orange mandarine, fabriqué par le dernier fabricant français de serpillières dans le Rhône, se révèle étonnamment élégant, "presque comme une veste en tweed iconique de chez Chanel", sourit la designeuse.

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Dans ce récit né de l'imagination de Théophile Gautier et chorégraphié à Paris en 1841 par Jean Coralli et Jules Perrot, Giselle est une jeune villageoise qui meurt en apprenant qu'Albrecht, l'homme dont elle est tombée amoureuse, est un aristocrate déjà fiancé à une princesse. (AFP)

Les costumes sophistiqués de la noblesse, rappelant les lignes de Courrèges, aux couleurs "un peu artificielles", entre turquoise, rose ou violet ultra vif, dénotent du "culte de l'apparence" d'une société "déconnectée du vivant".

Mais le véritable "personnage principal" du ballet, jonglant entre tradition et modernité, est bien le "tutu", qu'"il n'était pas du tout question d'enlever, en particulier dans le deuxième acte, très féérique".

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Marqueur de différences entre ces deux mondes: la matière des costumes, en serpillères de coton et déchets recyclés pour les villageois; en matière synthétique - polyester et élasthanne - rappelant les maillots de bain et combinaisons étanches pour la noblesse. (AFP)

Car Giselle se métamorphose ensuite en esprit qui hante la forêt. Elle rejoint les Willis, spectres de jeunes fiancées défuntes qui, la nuit, attirent les hommes pour se venger, les condamnant à danser jusqu'à la mort. Dans un dernier tête-à-tête amoureux, avant que les premières lueurs du jour ne fassent disparaître les fantômes, Giselle sauvera l'être aimé.

Dans la scénographie, la forme iconique du tutu est partout : dans les branches des arbres formés de tubes de bois, dans la chaumière stylisée de Giselle, la crinoline de la reine, les cols à la Médicis et bijoux des aristocrates.

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Dans la scénographie, la forme iconique du tutu est partout : dans les branches des arbres formés de tubes de bois, dans la chaumière stylisée de Giselle, la crinoline de la reine, les cols à la Médicis et bijoux des aristocrates. (AFP)

Sans décors peints 

Parés de longs rubans de soie blanche, les bustiers et tutus vaporeux des danseuses deviennent aussi graphiques, tout comme les capes et les guêtres et décorations d'apparats des nobles ou les haillons des vendangeurs. Par petites "touches symboliques", la scénographie renforce aussi un récit "plus écologique et féministe" avec des Willis  "femmes fatales qui prennent le pouvoir".

"Je me suis amusée, en apportant un côté ludique pour emporter tout le monde, amateurs de ballet et néophytes", ajoute la créatrice touche-à-tout, qui a travaillé pour une grande marque d'ameublement scandinave et des kiosques de journaux parisiens. Ses jeux de couleurs relookent nombre de locaux éducatifs et culturels ou encore les dernières rames du Thalys.

La designeuse, dont la réflexion créatrice s'articule aussi autour des valeurs d'empathie, a volontairement chassé tout décor peint du paysage pour permettre au spectateur d'être "au plus près" des danseurs, ajoute-t-elle.

Cette nouvelle version, sans les codes et accessoires du ballet traditionnel, est plus porteuse de sens, selon le directeur de ballet. "Est-ce qu'on a finalement besoin de peindre des arbres pour avoir une forêt, ou un prince avec une épée? On comprend très bien l'histoire et ces deux mondes qui se font face avec de simples lignes. Les moments codifiés ont été changés en regards, plus intenses au niveau de l'interprétation", pointe Eric Quilleré.

Une version contemporaine de Giselle "plus humaine" à laquelle "on s'identifie plus" selon lui. "Giselle, ici, Ce n'est plus juste de la danse, c'est un message".


Art Basel Qatar dévoile les détails de sa première édition prévue en 2026

M7 à Doha, où se déroulera une partie de l'événement. (Fourni)
M7 à Doha, où se déroulera une partie de l'événement. (Fourni)
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  • Art Basel Qatar lancera sa première édition en février 2026 à Doha, avec 87 galeries, 84 artistes et neuf commandes monumentales dans l’espace public
  • L’événement mettra fortement l’accent sur la région MENASA, autour du thème « Becoming », explorant transformation, identité et enjeux contemporains

DUBAÏ : Art Basel Qatar a révélé les premiers détails de sa toute première édition, qui se tiendra en février 2026, offrant un aperçu du secteur Galleries et de son programme Special Projects, déployé dans le quartier de Msheireb Downtown Doha.

Aux côtés des présentations de 87 galeries exposant les œuvres de 84 artistes, Art Basel Qatar proposera neuf commandes monumentales et in situ investissant les espaces publics et les lieux culturels de Msheireb. Conçus par le directeur artistique Wael Shawky, en collaboration avec le directeur artistique en chef d’Art Basel Vincenzo de Bellis, ces projets répondent au thème central de la foire : « Becoming » (« Devenir »).

Couvrant la sculpture, l’installation, la performance, le film et l’architecture, ces projets interrogent les notions de transformation — matérielle, sociale et politique — en abordant le changement environnemental, la migration, la mémoire et l’identité. Parmi les artistes participants figurent Abraham Cruzvillegas, Bruce Nauman, Hassan Khan, Khalil Rabah, Nalini Malani, Nour Jaouda, Rayyane Tabet, Sumayya Vally, ainsi que Sweat Variant (Okwui Okpokwasili et Peter Born). Parmi les temps forts annoncés : l’installation vidéo immersive en 3D de Bruce Nauman à M7, la projection monumentale en plein air de Nalini Malani sur la façade de M7, et le majlis évolutif imaginé par Sumayya Vally, conçu comme un espace vivant de rencontre et de dialogue.

Le secteur Galleries réunira des exposants issus de 31 pays et territoires, dont 16 galeries participant pour la première fois à Art Basel. Plus de la moitié des artistes présentés sont originaires de la région MENASA, confirmant l’ancrage régional de la foire. Les présentations iront de figures majeures telles que Etel Adnan, Hassan Sharif et MARWAN à des voix contemporaines comme Ali Cherri, Ahmed Mater, Sophia Al-Maria et Shirin Neshat.

Des galeries de l’ensemble de la région seront représentées, y compris celles disposant d’antennes dans les États du Golfe, notamment au Qatar, aux Émirats arabes unis et en Arabie saoudite.

Le Moyen-Orient élargi et l’Asie seront également présents, avec des galeries venues du Liban, de Turquie, d’Égypte, du Maroc, de Tunisie et d’Inde.

Art Basel Qatar se tiendra du 5 au 7 février 2026, à M7, dans le Doha Design District et dans plusieurs autres lieux de Msheireb Downtown Doha.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Une nouvelle initiative cinématographique à AlUla vise à stimuler le talent créatif saoudien

Le programme propose des cours de formation et des ateliers couvrant toutes les étapes de la production cinématographique, de l'écriture du scénario et de la réalisation à la cinématographie, au montage et à la post-production. (SPA)
Le programme propose des cours de formation et des ateliers couvrant toutes les étapes de la production cinématographique, de l'écriture du scénario et de la réalisation à la cinématographie, au montage et à la post-production. (SPA)
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  • Les efforts visent à soutenir les jeunes talents et à contribuer à la croissance du secteur cinématographique du Royaume
  • Villa Hegra organise également des programmes éducatifs et interactifs pour les enfants afin de développer leurs talents et leurs capacités créatives

ALULA : Villa Hegra, en collaboration avec Film AlUla, a lancé un programme spécialisé dans la réalisation de films pour développer les compétences cinématographiques et soutenir les talents créatifs, a rapporté lundi l'Agence de presse saoudienne.

Cette initiative reflète l'engagement de Villa Hegra à renforcer l'activité culturelle et cinématographique tout en favorisant un environnement inspirant pour les créateurs de contenu et les cinéphiles.

Le programme propose des cours de formation et des ateliers couvrant toutes les étapes de la production cinématographique, de l'écriture du scénario et de la réalisation à la cinématographie, au montage et à la post-production.

Ces efforts visent à soutenir les jeunes talents et à contribuer à la croissance du secteur cinématographique du Royaume, a ajouté la SPA.

Villa Hegra organise également des programmes éducatifs et interactifs pour les enfants afin de développer leurs talents et leurs capacités créatives.

Ces programmes comprennent des ateliers qui simplifient les concepts scientifiques et les intègrent aux pratiques artistiques modernes, créant ainsi un environnement d'apprentissage qui encourage la découverte et l'innovation.

Ils ont suscité une forte participation des élèves dans tout le gouvernorat en raison de leur approche pratique et interactive, qui renforce la réflexion et la créativité des enfants.

Les initiatives sont mises en œuvre en collaboration avec des institutions françaises et saoudiennes, reflétant ainsi la diversité culturelle et les partenariats internationaux tout en améliorant la qualité du contenu éducatif pour les jeunes générations.

Villa Hegra est la première fondation culturelle franco-saoudienne basée à AlUla. Lancée en octobre, elle soutient la scène culturelle de la région en proposant des plateformes éducatives qui développent les compétences des enfants et des jeunes saoudiens, tout en renforçant la présence d'AlUla sur la scène culturelle internationale.


Eurovision: Nemo rend son trophée 2024 pour protester contre la participation d'Israël

Le chanteur suisse Nemo, qui représentait la Suisse avec la chanson « The Code », célèbre sur scène avec son trophée après avoir remporté la finale du 68e Concours Eurovision de la chanson (CEC) 2024, le 11 mai 2024 à la Malmö Arena de Malmö, en Suède. (AFP)
Le chanteur suisse Nemo, qui représentait la Suisse avec la chanson « The Code », célèbre sur scène avec son trophée après avoir remporté la finale du 68e Concours Eurovision de la chanson (CEC) 2024, le 11 mai 2024 à la Malmö Arena de Malmö, en Suède. (AFP)
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  • L’artiste suisse Nemo, vainqueur de l’Eurovision 2024, rend son trophée pour protester contre la participation maintenue d’Israël, dénonçant une contradiction avec les valeurs d’unité et de dignité affichées par l’UER
  • Cinq pays — Islande, Espagne, Pays-Bas, Irlande et Slovénie — ont déjà annoncé leur boycott de l’édition 2026, sur fond de critiques liées à la guerre à Gaza et d’accusations d’irrégularités de vote

GENEVE: L'artiste suisse Nemo, qui a remporté l’Eurovision 2024 en Suède, a annoncé jeudi rendre son trophée pour protester contre le maintien de la participation d'Israël dans la compétition, qui a déjà provoqué le boycott de cinq pays.

"En tant que personne et en tant qu'artiste, aujourd'hui, je ne pense plus que ce trophée ait sa place sur mon étagère", a déclaré dans une vidéo postée sur Instagram Nemo, qui s'était déjà joint aux appels réclamant l'exclusion d'Israël du plus grand événement musical télévisé en direct au monde.

"L'Eurovision prétend défendre l'unité, l'inclusion et la dignité de tous (...) Mais la participation continue d'Israël, alors que la commission d'enquête internationale indépendante (mandatée par) l'ONU a conclu à un génocide, démontre un conflit évident entre ces idéaux et les décisions prises par" l'Union européenne de Radio-Télévision (UER), a déclaré le chanteur de 26 ans.

"Il ne s'agit pas d'individus ou d'artistes. Il s'agit du fait que le concours a été utilisé à maintes reprises pour redorer l'image d'un État accusé de graves atrocités", a ajouté Nemo, devenu en 2024 le premier artiste non binaire à être sacré à l'issue d'une édition déjà marquée par une controverses sur la participation d'Israël en pleine guerre dans la bande de Gaza.

Mercredi, la télévision publique islandaise RUV a annoncé boycotter l'édition 2026 de l'Eurovision après le feu vert donné à la participation d'Israël, devenant le cinquième pays à ne pas participer au prochain concours à Vienne.

Début décembre, la majorité des membres de l'UER avaient estimé qu'il n'était pas nécessaire de voter sur la participation d'Israël avec sa télévision publique KAN.

Cette décision a déclenché instantanément les annonces de boycott des diffuseurs de l'Espagne, des Pays-Bas, de l'Irlande et de la Slovénie, sur fond de critiques de la guerre dans la bande de Gaza mais aussi d'accusations d'irrégularités dans les votes lors des précédentes éditions.

"Quand des pays entiers se retirent, il est évident que quelque chose ne va pas du tout. C'est pourquoi j'ai décidé de renvoyer ce trophée au siège de l'UER à Genève, avec gratitude et un message clair : incarnez vos valeurs", a ajouté Nemo, avant de déposer son trophée dans une boite.