En Chine, l'intelligence artificielle pour parler aux défunts

Cette photo prise le 8 novembre 2023 montre Zhang Zewei, fondateur de la société d'IA Super Brain spécialisée dans les répliques numériques de morts, avec des images de lui prises par un collègue alors qu'il démontre la création d'une vidéo utilisant l'intelligence artificielle à Jiangyin, en Chine. province orientale du Jiangsu. (AFP)
Cette photo prise le 8 novembre 2023 montre Zhang Zewei, fondateur de la société d'IA Super Brain spécialisée dans les répliques numériques de morts, avec des images de lui prises par un collègue alors qu'il démontre la création d'une vidéo utilisant l'intelligence artificielle à Jiangyin, en Chine. province orientale du Jiangsu. (AFP)
Short Url
Publié le Jeudi 14 décembre 2023

En Chine, l'intelligence artificielle pour parler aux défunts

  • Cette technologie représente «un nouveau genre d'humanisme», comparé au portrait ou à la photographie, qui en leur temps avaient révolutionné la façon dont les gens pouvaient se souvenir de leurs défunts
  • L'une des prestations proposées est un appel vidéo avec un employé, dont le visage et la voix sont remplacés par ceux de la personne désirée

TAIZHOU: Dans un cimetière de l'est de la Chine, Seakoo Wu écoute, sur son téléphone, la voix de son défunt fils. Ce n'est pas un enregistrement du temps de son vivant: s'il parle, c'est grâce à l'intelligence artificielle.

"Je sais que tu souffres beaucoup, chaque jour, à cause de moi, et que tu te sens coupable et impuissant", dit le défunt Xuanmo, dans une voix aux accents légèrement robotiques.

"Même si je ne pourrai plus jamais être à tes côtés, mon esprit est toujours dans ce monde et t'accompagne dans la vie."

Comme M. Wu et sa femme, de plus en plus de Chinois endeuillés ont recours à l'intelligence artificielle (IA) pour redonner un semblant de vie à leurs proches disparus.

Pour le père de Xuanmo, l'objectif est de créer à terme un double virtuel de son fils se comportant exactement comme lui.

"Une fois qu'on aura synchronisé la réalité et le métavers, j'aurai à nouveau mon fils avec moi", assure M. Wu.

Plusieurs entreprises chinoises se sont engouffrées dans ce créneau du deuil virtuel: certaines disent avoir créé des milliers de "personnes numériques", parfois juste à partir d'une vidéo de 30 secondes du défunt.

«Bots fantômes»

Saekoo et sa femme ont vu leur vie bouleversée l'an dernier quand leur fils unique est décédé d'un AVC à 22 ans.

Il étudiait la finance et la comptabilité à l'université d'Exeter, au Royaume-Uni. Sportif, "il avait une vie bien remplie", raconte Saekoo.

L'essor en Chine des robots conversationnels de type ChatGPT a donné au père effondré un nouvel espoir: ressusciter son fils virtuellement.

Pour cela, il a rassemblé photos, vidéos et enregistrements audios de Xuanmo. Puis il a dépensé des milliers de dollars auprès de sociétés spécialisées dans l'IA, afin qu'elles clonent le visage et la voix de son enfant.

Si les résultats restent rudimentaires, Saekoo ne veut pas s'arrêter là: muni d'un dossier qu'il a constitué, où fourmille une quantité astronomique d'informations sur son fils, il mise sur des algorithmes pour reproduire sa manière de penser et de parler.

Le phénomène de ces "bots fantômes" n'existe pas qu'en Chine: aux Etats-Unis notamment, des entreprises sont sur ce créneau.

Mais "sur la technologie de l'intelligence artificielle, la Chine est parmi les meilleures du monde", affirme Zhang Zewei, fondateur de l'entreprise Super Brain, spécialisée dans cette technologie, et ancien collaborateur de Saekoo Wu.

"Et il y a une telle population en Chine, beaucoup dans le besoin émotionnel, que cela nous donne un avantage en matière de marché", assure cet homme qui vit à Jingjiang (est).

Super Brain facture de 10.000 à 20.000 yuans (de 1.300 à 2.600 euros) la création d'un avatar basique en environ 20 jours, selon M. Zhang.

Ses clients ne sont pas seulement des personnes endeuillées, mais aussi des parents frustrés de ne pas passer assez de temps avec leurs enfants... voire un amoureux inconsolable qui souhaite revoir son ex-petite amie.

L'une des prestations proposées est un appel vidéo avec un employé, dont le visage et la voix sont remplacés par ceux de la personne désirée.

"C'est d'une énorme importance pour notre société, même pour le monde entier", estime M. Zhang. "Une version numérique de quelqu'un (peut) exister pour toujours, même si son corps n'est plus là."

Consentement

Sima Huapeng, fondateur de l'entreprise Silicon Intelligence, à Nankin (est), en est persuadé: cette technologie représente "un nouveau genre d'humanisme".

Il la compare au portrait ou à la photographie, qui en leur temps avaient révolutionné la façon dont les gens pouvaient se souvenir de leurs défunts.

Ces doubles virtuels peuvent apporter un certain réconfort, reconnaît Tal Morse, chercheur au Centre d'études sur la mort et la société à l'université britannique de Bath. Mais encore faut-il savoir quel sera leur impact psychologique et éthique.

"Une question essentielle ici, c'est de savoir (...) à quel point ces bots fantômes sont +fidèles+ à la personnalité qu'ils sont censés imiter", dit-il.

Car "que se passe-t-il s'ils font des choses qui +polluent+ la mémoire de la personne qu'ils doivent représenter?"

Et comment savoir si la personne décédée aurait été réellement consentante?

Toute technologie nouvelle est "à double tranchant", admet M. Zhang, de Super Brain. Mais "tant qu'on aide ceux qui en ont besoin, je ne vois pas le problème".

Il assure ne pas travailler avec ceux pour qui l'expérience pourrait avoir un impact négatif, citant le cas d'une femme qui a tenté de se suicider après le décès de sa fille.

Xuanmo aurait "probablement accepté" d'être ramené à la vie virtuellement, affirme son père.

"Un jour, mon fils, nous nous retrouverons tous dans le métavers", lance-t-il, tandis que sa femme pleure devant sa tombe. "La technologie s'améliore de jour en jour (...) ce n'est qu'une question de temps."


Le 87ème prix Albert Londres sera remis le 25 octobre à Beyrouth

Le journaliste français et président du Prix Albert Londres, Hervé Brusini, s'exprime lors du dévoilement d'une plaque commémorative en hommage au caméraman de l'AFP Arman Soldin, tué en Ukraine, sur l'esplanade du Centre universitaire de Vichy, dans le centre de la France, le 7 mai. (AFP)
Le journaliste français et président du Prix Albert Londres, Hervé Brusini, s'exprime lors du dévoilement d'une plaque commémorative en hommage au caméraman de l'AFP Arman Soldin, tué en Ukraine, sur l'esplanade du Centre universitaire de Vichy, dans le centre de la France, le 7 mai. (AFP)
Short Url
  • La capitale libanaise devait l'an dernier accueillir les délibérations de la plus prestigieuse récompense de la presse francophone, mais les bombardements israéliens sur plusieurs régions du Liban ont obligé le jury à rapatrier ses travaux sur Paris
  • "Il y a d'abord Beyrouth, Beyrouth est une ville heureuse", écrit Albert Londres en novembre 1919, cité par le communiqué de l'association

PARIS: Le 87ème prix Albert Londres, qui récompense le meilleur reportage écrit et audiovisuel francophone de l'année, sera remis le 25 octobre à Beyrouth, a annoncé mercredi l'association.

La capitale libanaise devait l'an dernier accueillir les délibérations de la plus prestigieuse récompense de la presse francophone, mais les bombardements israéliens sur plusieurs régions du Liban ont obligé le jury à rapatrier ses travaux sur Paris.

"Il y a d'abord Beyrouth, Beyrouth est une ville heureuse", écrit Albert Londres en novembre 1919, cité par le communiqué de l'association.

"Mais l'histoire en décida autrement. Quand le journaliste est revenu dans la région dix ans plus tard, les mots massacres et assassinats se sont imposés sous sa plume. Le conflit israélo-palestinien voyait ses premières victimes", poursuit le texte.

"Déjà ! Près de cent ans plus tard, la tragédie est massive. Informer est un enjeu vital malgré les bombes, malgré les murs. Le Prix Albert Londres se devait d'aller y voir. Le propre du reportage, en somme".

L'association Albert Londres a dévoilé la liste des articles, films et livres pré-sélectionnés pour l'édition 2025, sur 134 candidatures.

Pour le 87ème prix de la presse écrite, ont été choisis : Eliott Brachet (Le Monde), Julie Brafman (Libération) , Emmanuel Haddad (L'Orient-Le Jour), Iris Lambert (Society, Libération), Ariane Lavrilleux (Disclose), Célian Macé (Libération), Matteo Maillard (Libération, Jeune Afrique) et Arthur Sarradin (Libération, Paris Match).

Pour le 41ème prix audiovisuel, ont été retenus : Solène Chalvon-Fioriti pour "Fragments de guerre" (France 5), Marianne Getti et Agnès Nabat pour "Tigré : viols, l'arme silencieuse" (Arte), Jules Giraudat et Arthur Bouvart pour "Le Syndrome de La Havane" (Canal+), Julien Goudichaud pour "Calais-Douvres, l'exil sans fin" (LCP), Louis Milano-Dupont et Elodie Delevoye pour "Rachida Dati, la conquête à tout prix" (France 2) et Solène Oeino pour "Le Prix du papier" (M6).

Pour le 9ème prix du livre, ont été désignés Charlotte Belaich et Olivier Pérou pour "La Meute" (Flammarion), Siam Spencer pour "La Laverie" (Robert Laffont), Quentin Müller pour "L'Arbre et la tempête" (Marchialy) et Elena Volochine pour "Propagande : l'arme de guerre de Vladimir Poutine" (Autrement).

L'an dernier, la journaliste du Monde Lorraine de Foucher avait remporté le prix pour l'écrit pour ses reportages et enquêtes sur les viols de Mazan, les migrantes violées et encore les victimes de l'industrie du porno.

Le prix de l'audiovisuel avait été décerné à Antoine Védeilhé et Germain Baslé pour leur film "Philippines: les petits forçats de l'or" (Arte) et le prix du livre avait couronné Martin Untersinger pour "Espionner, mentir, détruire" (Grasset), une enquête sur les attaques dans le cyberespace.

Créé en 1933 en hommage au journaliste français Albert Londres (1884-1932), père du grand reportage moderne, le prix est doté de 5.000 euros pour chacun des candidats, qui doivent avoir moins de 41 ans.


Des projets architecturaux saoudiens parmi les 15 finalistes du nouveau prix RIBA

Le Wadi Safar Experience Center est une porte d'entrée vers le développement plus large de Wadi Safar et s'inspire du style vernaculaire Najdi. (Fourni)
Le Wadi Safar Experience Center est une porte d'entrée vers le développement plus large de Wadi Safar et s'inspire du style vernaculaire Najdi. (Fourni)
Short Url
  • Deux projets innovants situés à Riyad – le parc King Salman et le centre d’expérience de Wadi Safar – ont été sélectionnés parmi les 15 finalistes du nouveau prix RIBA
  • Ce prix célèbre des projets ayant un impact social fort et une vision durable

DUBAÏ : Riyad s'impose comme un centre du design de pointe, alors que le Royal Institute of British Architects (RIBA) a dévoilé les 15 finalistes de son tout premier prix des bâtiments les plus transformateurs du Moyen-Orient.

Cette nouvelle distinction récompense les projets architecturaux récents ayant le plus d’impact social et de transformation à travers le Golfe, et deux des candidats les plus remarquables se trouvent dans la capitale saoudienne.

Au cœur de la contribution de Riyad figure le parc King Salman, une vaste opération de réhabilitation de l’ancien aéroport de la ville, réalisée par Gerber Architekten, Buro Happold et Setec. Ce projet ambitieux transforme une relique de l’ère aérienne en une oasis urbaine immense, offrant aux habitants et visiteurs un réseau de jardins, de plans d’eau et d’espaces de loisirs. Il met en œuvre des techniques novatrices de régénération des sols désertiques, d’utilisation durable de l’eau et de plantation résistante au climat.

Non loin de là, le centre d’expérience de Wadi Safar sert de porte d’entrée au développement plus large de Wadi Safar. Conçu par Dar Al Omran – Rasem Badran, il s’inspire du style vernaculaire najdi, avec des cours intérieures et un aménagement paysager en bermes de terre créant une atmosphère fraîche et contemplative tout en valorisant le patrimoine régional.

La liste des finalistes met également en lumière l’excellence dans tout le Moyen-Orient. Aux Émirats arabes unis, le sanctuaire des tortues et de la faune de Khor Kalba (Hopkins Architects) soutient la réhabilitation des tortues et oiseaux en danger dans la mangrove ancestrale de Sharjah, avec des pavillons arrondis se fondant dans le paysage côtier. À Dubaï, le centre Jafar du Dubai College (Godwin Austen Johnson) offre un espace STEM flexible, baigné de lumière naturelle, où l’acoustique et l’efficacité énergétique sont prioritaires.

À Doha, le centre Al-Mujadilah et sa mosquée pour femmes (Diller Scofidio + Renfro) réinterprètent de manière contemporaine un espace sacré, avec un toit percé de plus de 5 000 puits de lumière diffusant une lumière naturelle apaisante dans les salles de prière et les espaces communautaires.

Plusieurs projets revisitent les formes patrimoniales dans un contexte contemporain. À Sharjah, The Serai Wing, Bait Khalid Bin Ibrahim (ANARCHITECT) transforme deux maisons familiales des années 1950, autrefois propriétés d’un marchand de perles, en un hôtel boutique alliant préservation du patrimoine et design contemporain.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Cate Blanchett sera à l’honneur au Festival du film d’El Gouna

Cate Blanchett sera l'invitée d'honneur de cette année et recevra le prix Champion de l'humanité. (Getty Images)
Cate Blanchett sera l'invitée d'honneur de cette année et recevra le prix Champion de l'humanité. (Getty Images)
Short Url
  • L’actrice australienne sera l’invitée d’honneur du festival égyptien et recevra le Champion of Humanity Award pour son engagement humanitaire auprès des réfugiés en tant qu’ambassadrice du HCR
  • Reconnue pour ses rôles marquants au cinéma et son implication sur scène, Blanchett est aussi saluée pour son action sur le terrain dans des camps de réfugiés, incarnant la vision du festival : le cinéma au service de l’humanité

DUBAÏ : L’actrice et productrice australienne Cate Blanchett sera mise à l’honneur lors de la 8e édition du Festival du film d’El Gouna, en Égypte, qui se tiendra du 16 au 24 octobre.

Elle sera l’invitée d’honneur de cette édition et recevra le Champion of Humanity Award (Prix de la Championne de l’Humanité).

« De ses rôles emblématiques dans Elizabeth, Blue Jasmine et TÁR, à ses collaborations remarquables avec les plus grands réalisateurs, Cate Blanchett a laissé une empreinte indélébile sur le cinéma mondial », a publié le festival sur Instagram.

« Au-delà de son art, elle continue de défendre des causes humanitaires urgentes en tant qu’ambassadrice de bonne volonté mondiale pour le HCR, reflétant ainsi la vision du festival : le cinéma au service de l’humanité », ajoute le communiqué. « Pour saluer son engagement en faveur des réfugiés et des personnes déplacées de force, Cate Blanchett recevra le Champion of Humanity Award du Festival du film d’El Gouna. »

Cate Blanchett est également connue pour son travail sur scène, ayant été co-directrice artistique de la Sydney Theatre Company. Elle est aussi cofondatrice de Dirty Films, une société de production à l’origine de nombreux films et séries récompensés.

View this post on Instagram

A post shared by El Gouna Film Festival (@elgounafilmfestivalofficial)

Depuis 2016, elle occupe le rôle d’ambassadrice de bonne volonté pour le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés. À ce titre, elle utilise sa notoriété pour sensibiliser à la cause des réfugiés et encourager le soutien international. Elle a visité des camps de réfugiés et des communautés hôtes dans des pays comme la Jordanie, le Liban, le Bangladesh, le Soudan du Sud, le Niger et le Brésil.

En 2018, elle a reçu le Crystal Award lors du Forum économique mondial en reconnaissance de son engagement humanitaire.

Amr Mansi, fondateur et directeur exécutif du Festival d’El Gouna, a déclaré : « C’est un immense honneur d’accueillir une artiste du calibre de Cate Blanchett. Son talent exceptionnel fascine le public depuis des décennies, et son engagement humanitaire à travers le HCR est véritablement inspirant.

Ce partenariat avec le HCR et la Fondation Sawiris, ainsi que sa venue, illustrent parfaitement la mission essentielle de notre festival : utiliser la force du cinéma pour promouvoir un changement positif et soutenir l’humanité. »

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com