La colère triste de la mère de Socayna, tuée dans sa chambre par une balle perdue

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Publié le Jeudi 21 décembre 2023

La colère triste de la mère de Socayna, tuée dans sa chambre par une balle perdue

  • Le 10 septembre vers 23h00, la jeune femme, 24 ans, était touchée au visage par une balle à travers le contre-plaqué sous sa fenêtre, au 3e étage d'un petit immeuble de la cité Saint-Thys
  • Sur place, les enquêteurs ont trouvé 23 douilles de kalachnikov. Mais pour l'heure personne n'aurait encore été interpellé

MARSEILLE: "Le jour où ils ont tué ma fille, tout le monde était à la fenêtre. Les deux voyous étaient sur une moto, casqués, avec les kalachnikovs": aujourd'hui, dans cette cité marseillaise jusque là épargnée par le narcobanditisme, "personne ne sait rien", dénonce la mère de Socayna.

Le 10 septembre vers 23h00, la jeune femme, 24 ans, était touchée au visage par une balle à travers le contre-plaqué sous sa fenêtre, au 3e étage d'un petit immeuble de la cité Saint-Thys. Un choc pour ce quartier défraîchi mais arboré situé dans le sud-est de la ville.

"Ma fille a pris une balle dans la tête dans sa chambre, en pyjama, elle était en train de travailler sur son ordi. Qui peut expliquer ça ?", poursuit Layla.

Socayna venait de se servir un café pour travailler une partie de la nuit. Elle étudiait le droit, rêvait de devenir avocate. Sa vie était à la fac et dans ses livres.

Dehors, un point de deal s'était installé avec l'été. Est-ce une bande rivale venue tirer à l'aveugle ? Etait-ce une de ces démonstrations de force avec arme de guerre qui s'exhibent sur les réseaux sociaux ? Une rafale est-elle partie toute seule ?

Le procureur de Marseille, Nicolas Bessone, pourrait apporter des réponses jeudi à 17h00 lors de sa conférence de presse consacrée au funeste record 2023 d'une cinquantaine de "narchomicides" dans la 2e ville de France.

L'enquête est en tous cas sur le haut de la pile de la police judiciaire. Sur place, les enquêteurs ont trouvé 23 douilles de kalachnikov. Mais pour l'heure personne n'aurait encore été interpellé. "C'est compliqué d'avoir des gens qui parlent sur le dossier", confirme à l'AFP une source proche de l'enquête.

Trois mois après ce drame, qui s'est reproduit fin novembre à Dijon, avec la mort d'un père de famille dans son lit, l'AFP a retrouvé Layla au milieu des cartons, dans son nouvel appartement d'une résidence presque neuve et sécurisée.

Un mur contre les dealers

Le bailleur social Unicil a accédé à sa demande de déménagement, adaptant le loyer à sa capacité financière. Sabrina, sa plus jeune fille, tente elle de reprendre le fil de sa scolarité au collège.

Layla s'inquiète pour elle, tout en avouant combien il est difficile de partager leurs douleurs respectives. Mère célibataire, elle joignait les deux bouts avec un petit salaire de 800 euros d'accompagnatrice d'élèves en situation de handicap. Elle n'est pas en état de reprendre pour l'instant.

Elle dénonce l'argent roi dans la société --"y a que ça qui compte"-- et le silence de ses anciens voisins: "Moi j'ai perdu ma fille et toi tu as peur de parler, mais pourquoi ? Je n'arrive pas à trouver de réponse".

Elle se souvient aussi avec tristesse du peu de personnes (une centaine) qui avaient fait le déplacement pour la marche blanche en octobre sous la banderole: "Une déferlante s'abat sur notre cité phocéenne. Et nos chambres sont devenus des cercueils".

A Saint-Thys, habitants comme commerçants sont fuyants. "On est tranquille, il y a la BAC (NDLR: brigade anticriminalité) qui passe", dit l'un. "Des dealers ? Je peux pas dire, je suis dans le magasin", dit un autre.

Depuis le drame, le passage sous un immeuble que les trafiquants occupaient a été muré. Un équipement de sport extérieur vient d'être inauguré, à côté du club de boxe. Des travaux de rénovation sont planifiés pour 2024. Le député Renaissance Lionel Royer-Perreaut insiste lui sur le fragile équilibre à préserver ici, avec une mixité sociale qui tend à disparaître, comme dans les quartiers Nord.

"Le public locataire est de plus en plus pauvre", appuie Hervé Menchon, adjoint écologiste au maire de Marseille, qui a grandi ici.

"Quand j'étais petit il y avait un papetier, un boucher, remplacés depuis par des commerces de nuit. Et les jeunes faisaient de la petite délinquance. Un jour ils ont volé les roues de la voiture de mon père", raconte l'élu. "Pour moi l'ascenseur social a marché, Socayna c'était l'espoir de cette ascension", conclut-il, amer et ému.


S&P dégrade la note de la France, avertissement au nouveau gouvernement

Cette photo d'illustration prise à Toulouse le 29 mars 2025 montre un écran affichant le logo de l'agence de notation Standard and Poor's. (AFP)
Cette photo d'illustration prise à Toulouse le 29 mars 2025 montre un écran affichant le logo de l'agence de notation Standard and Poor's. (AFP)
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  • L’agence S&P a abaissé la note de la France à A+, invoquant une incertitude persistante sur les finances publiques malgré la présentation du budget 2026 et un déficit prévu à 5,4 % du PIB en 2025

PARIS: L'une des plus grandes agences de notation a adressé un avertissement au nouveau gouvernement Lecornu en dégradant la note de la France vendredi, invoquant une incertitude "élevée" sur les finances publiques en dépit de la présentation d'un budget pour 2026.

Moins d'une semaine après la formation de la nouvelle équipe gouvernementale et trois jours après la publication d'un projet de loi de finances (PLF) pour l'année prochaine, S&P Global Ratings a annoncé abaisser d'un cran sa note de la France à A+.

"Malgré la présentation cette semaine du projet de budget 2026, l'incertitude sur les finances publiques françaises demeure élevée", a affirmé l'agence, qui figure parmi les trois plus influentes avec Moody's et Fitch.

Réagissant à cette deuxième dégradation par S&P (anciennement Standard & Poors) en un an et demi, le ministre de l'Economie Roland Lescure a dit "(prendre) acte" de cette décision.

"Le gouvernement confirme sa détermination à tenir l'objectif de déficit de 5,4% du PIB pour 2025", a ajouté son ministère dans une déclaration transmise à l'AFP.

Selon S&P, si cet "objectif de déficit public de 5,4% du PIB en 2025 sera atteint", "en l'absence de mesures supplémentaires significatives de réduction du déficit budgétaire, l'assainissement budgétaire sur (son) horizon de prévision sera plus lent que prévu".

L'agence prévoit que "la dette publique brute atteindra 121% du PIB en 2028, contre 112% du PIB à la fin de l'année dernière", a-t-elle poursuivi dans un communiqué.

"En conséquence, nous avons abaissé nos notes souveraines non sollicitées de la France de AA-/A-1+ à A+/A-1", écrit-elle. Les perspectives sont stables.

"Pour 2026, le gouvernement a déposé mardi 14 octobre un projet de budget qui vise à accélérer la réduction du déficit public à 4,7% du PIB tout en préservant la croissance", a répondu le ministère de l'Economie.

"Il s'agit d'une étape clef qui nous permettra de respecter l'engagement de la France à ramener le déficit public sous 3% du PIB en 2029", a ajouté Bercy.

"Il est désormais de la responsabilité collective du gouvernement et du Parlement de parvenir à l'adoption d'un budget qui s'inscrit dans ce cadre, avant la fin de l'année 2025", selon la même source.

- "Plus grave instabilité" depuis 1958 -

Mais le gouvernement qui, à peine entré en fonctions, a échappé de peu cette semaine à la censure après une concession aux socialistes sur la réforme des retraites, va devoir composer avec une Assemblée nationale sans majorité lors de débats budgétaires qui s'annoncent houleux, alors même que le Premier ministre Sébastien Lecornu s'est engagé à ne pas recourir à l'article 49.3 pour imposer son texte.

Cette nouvelle dégradation de la note de la France par S&P intervient avant une décision de Moody's attendue le 24 octobre. Elle a lieu un mois après que Fitch a elle aussi abaissé la note française à A+.

Les agences comme Fitch, Moody's et S&P Global Ratings classent la qualité de crédit des Etats - soit leur capacité à rembourser leur dette -, de AAA (la meilleure note) à D (défaut de paiement).

Les dégradations de note par les agences sont redoutées par les pays car elles peuvent se traduire par un alourdissement de leurs intérêts.

Ceux payés par la France sont estimés à environ 55 milliards d'euros en 2025, alors que depuis la dissolution de l'Assemblée nationale en juin 2024, la dette française se négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande.

"La France traverse sa plus grave instabilité politique depuis la fondation de la Cinquième République en 1958", a estimé S&P: "depuis mai 2022, le président Emmanuel Macron a dû composer avec deux Parlements sans majorité claire et une fragmentation politique de plus en plus forte".

Pour l'agence, "l'approche de l'élection présidentielle de 2027 jette un doute (...) sur la capacité réelle de la France à parvenir à son objectif de déficit budgétaire à 3% du PIB en 2029".

En tombant en A+ chez S&P, la France se retrouve au niveau de l'Espagne, du Japon, du Portugal et de la Chine.


France : l'ancien Premier ministre Philippe demande encore le départ anticipé de Macron

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  • Allié de M. Macron dont il fut le premier chef de gouvernement de mai 2017 à juillet 2020, Edouard Philippe avait lancé un pavé dans la mare la semaine dernière, après la démission éclair du premier gouvernement de Sébastien Lecornu
  • "Je n'ai pas pris cette position parce que je pensais que je serais populaire ou parce que j'espérais convaincre le président (Macron). Le président, il a envie d'aller au terme de son mandat, et je peux le comprendre"

PARIS: L'ancien Premier ministre français Edouard Philippe a à nouveau réclamé jeudi le départ anticipé du président Emmanuel Macron, pour lui "la seule décision digne qui permet d'éviter 18 mois" de "crise" politique avant la prochaine élection présidentielle prévue pour le printemps 2027.

Allié de M. Macron dont il fut le premier chef de gouvernement de mai 2017 à juillet 2020, Edouard Philippe avait lancé un pavé dans la mare la semaine dernière, après la démission éclair du premier gouvernement de Sébastien Lecornu - reconduit depuis -, en suggérant un départ anticipé et "ordonné" du chef de l'Etat, qui peine à trouver une majorité.

"Je n'ai pas pris cette position parce que je pensais que je serais populaire ou parce que j'espérais convaincre le président (Macron). Le président, il a envie d'aller au terme de son mandat, et je peux le comprendre. Je l'ai dit parce que c'est la seule décision digne qui permet d'éviter 18 mois d'indétermination et de crise, qui se terminera mal, je le crains", a déclaré l'ancien Premier ministre sur la chaîne de télévision France 2.

"Ca n'est pas simplement une crise politique à l'Assemblée nationale à laquelle nous assistons. C'est une crise très profonde sur l'autorité de l'Etat, sur la légitimité des institutions", a insisté M. Philippe.

"J'entends le président de la République dire qu'il est le garant de la stabilité. Mais, objectivement, qui a créé cette situation de très grande instabilité et pourquoi ? Il se trouve que c'est lui", a-t-il ajouté, déplorant "une Assemblée ingouvernable" depuis la dissolution de 2024, "des politiques publiques qui n'avancent plus, des réformes nécessaires qui ne sont pas faites".

"Je ne suis pas du tout pour qu'il démissionne demain matin, ce serait désastreux". Mais Emmanuel Macron "devrait peut-être, en prenant exemple sur des prédécesseurs et notamment le général De Gaulle, essayer d'organiser un départ qui nous évite pendant 18 mois de continuer à vivre dans cette situation de blocage, d'instabilité, d'indétermination", a-t-il poursuivi.

Edouard Philippe, qui s'est déclaré candidat à la prochaine présidentielle, assure ne pas avoir de "querelle" avec Emmanuel Macron. "Il est venu me chercher (en 2017), je ne me suis pas roulé par terre pour qu'il me nomme" à la tête du gouvernement et après avoir été "congédié" en 2020, "je ne me suis pas roulé par terre pour rester".


Motion de censure: Le Pen attend la dissolution avec une «impatience croissante»

 Marine Le Pen a dénoncé jeudi à l'Assemblée nationale l'"année noire fiscale" que représentera pour les Français "l'année blanche" inscrite dans le budget du gouvernement, disant attendre "la dissolution avec une impatience croissante". (AFP)
Marine Le Pen a dénoncé jeudi à l'Assemblée nationale l'"année noire fiscale" que représentera pour les Français "l'année blanche" inscrite dans le budget du gouvernement, disant attendre "la dissolution avec une impatience croissante". (AFP)
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  • Ce budget est "l'acte ultime, nous l'espérons, d'un système politique à bout de souffle", a affirmé la présidente des députés Rassemblement national en défendant la motion de censure de son parti contre le gouvernement de Sébastien Lecornu
  • Elle a dénoncé au passage l'"insondable sottise des postures" qui pourrait le "sauver"

PARIS: Marine Le Pen a dénoncé jeudi à l'Assemblée nationale l'"année noire fiscale" que représentera pour les Français "l'année blanche" inscrite dans le budget du gouvernement, disant attendre "la dissolution avec une impatience croissante".

Ce budget est "l'acte ultime, nous l'espérons, d'un système politique à bout de souffle", a affirmé la présidente des députés Rassemblement national en défendant la motion de censure de son parti contre le gouvernement de Sébastien Lecornu. Elle a dénoncé au passage l'"insondable sottise des postures" qui pourrait le "sauver".

"Poursuite du matraquage fiscal" avec 19 milliards d'impôts supplémentaires, "gel du barème" de l'impôt sur le revenu qui va rendre imposables "200.000 foyers" supplémentaires, "poursuite de la gabegie des dépenses publiques", "absence totale d'efforts sur l'immigration" ou sur "l'aide médicale d'Etat", ce budget "est un véritable musée de toutes les horreurs coincées depuis des années dans les tiroirs de Bercy", a-t-elle estimé.

Raillant le premier secrétaire du PS Olivier Faure, qui a accepté d'épargner le gouvernement en échange de la suspension de la réforme des retraites sans savoir par "quel véhicule juridique" et sans assurance que cela aboutisse, elle s'en est pris aussi à Laurent Wauquiez, le chef des députés LR, qui préfère "se dissoudre dans le socialisme" plutôt que de censurer.

"Désormais, ils sont tous d'accord pour concourir à éviter la tenue d'élections", "unis par la terreur de l'élection", a-t-elle dit.