La Russie veut épuiser l'Ukraine avec ses frappes massives

Des employés des services publics réparent des conduites d'eau à l'extérieur d'un immeuble détruit à la suite d'une attaque de missile russe dans le centre de Kiev, le 3 janvier 2024. (AFP)
Des employés des services publics réparent des conduites d'eau à l'extérieur d'un immeuble détruit à la suite d'une attaque de missile russe dans le centre de Kiev, le 3 janvier 2024. (AFP)
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Publié le Jeudi 04 janvier 2024

La Russie veut épuiser l'Ukraine avec ses frappes massives

  • L'un des premiers objectifs du Kremlin, explique un chercheur, est de "tester" la défense antiaérienne ukrainienne, qui est montée en puissance grâce au système américain Patriot ou encore à son équivalent franco-italien
  • La principale cible des frappes russes est à ce titre "l'industrie de défense" que Kiev tente de renforcer face à l'essoufflement des livraisons d'armes occidentales

PARIS: Les récentes frappes massives russes contre des grandes villes ukrainiennes visent, selon les experts, à épuiser la population et la défense antiaérienne de l'Ukraine, qui a une nouvelle fois réclamé plus d'armes à ses alliés occidentaux.

Selon le président ukrainien Volodymyr Zelensky, la Russie a tiré près de 300 missiles et plus de 200 drones explosifs Shahed, dans deux attaques, le 29 décembre et dans la nuit du 1er au 2 janvier, qui ont provoqué la mort d'une cinquantaine de personnes.

Un an après des frappes massives de Moscou sur les infrastructures énergétiques de l'Ukraine, cette campagne au milieu de l'hiver a touché des installations civiles essentielles et des quartiers résidentiels, selon Kiev. Comme à son habitude, Moscou affirme de son côté ne viser que des cibles militaires.

L'un des premiers objectifs du Kremlin, explique Mick Ryan, chercheur associé au CSIS (Center for strategic and international studies), est de "tester" la défense antiaérienne ukrainienne, qui est montée en puissance grâce au système américain Patriot ou encore à son équivalent franco-italien SAMP/T MAMBA.

Moscou cherche à engager une course contre la montre en espérant que "l'Ukraine sera à court d'intercepteurs avant que la Russie ne soit à court de missiles et de drones", relève ce général australien à la retraite sur X (ex-Twitter).

Frappes ukrainiennes: des écoles d'une région russe fermées jusqu'au 19 janvier

La région russe de Belgorod, frontalière de l'Ukraine, a annoncé jeudi prolonger les vacances scolaires dans des écoles et recommandé aux universités d'enseigner à distance, après des frappes ukrainiennes meurtrières d'une ampleur sans précédent.

"Je rapporte les décisions qui ont été prises : prolonger les vacances scolaires du 9 au 19 janvier" dans des municipalités, notamment la ville de Belgorod, la capitale régionale de quelque 360.000 habitants, a indiqué sur Telegram le gouverneur Viatcheslav Gladkov.

"Dans les collèges techniques et les universités situés dans ces municipalités, il est recommandé d'organiser des sessions à distance. Si nécessaire, prolonger les vacances", a-t-il ajouté.

Si M. Gladkov n'a pas précisé les raisons de cette décision, sa région -- déjà régulièrement visée -- a été la cible ces derniers jours de bombardements d'ampleur des forces ukrainiennes, dont une frappe sans précédent contre Belgorod samedi, qui a fait 25 morts et plus d'une centaine de blessés.

Mardi soir, Belgorod avait été attaquée par quatre vagues de missiles ukrainiens, qui ont fait un mort et onze blessés.

La Russie a mené de son côté deux séries de frappes massives sur les villes ukrainiennes dont l'une a fait une cinquantaine de morts vendredi, l'autre cinq morts mardi.

L'industrie de défense visée

La Russie est passée en économie de guerre, alors que les Occidentaux peinent à fournir la quantité nécessaire de missiles antiaériens sol-air, beaucoup plus complexes et coûteux à fabriquer que certains drones construits en partie à base de matériel civil.

La principale cible des frappes russes est à ce titre "l'industrie de défense" que Kiev tente de renforcer face à l'essoufflement des livraisons d'armes occidentales, analyse le ministère britannique de la Défense.

Les Russes "essaient maintenant d'attaquer le complexe militaro-industriel, des entreprises, pas des infrastructures énergétiques (contrairement à l'hiver dernier, NDLR), mais la production d'armes", explique à l’AFP l'analyste militaire Mykola Bielieskov, de l'Institut ukrainien pour les études stratégiques.

"Nous avons commencé à produire plus d'armes qu'avant", souligne auprès de l’AFP Sergiy Zgourets, le directeur du centre de recherche ukrainien Défense express, évoquant des munitions, des drones, des véhicules blindés ou des radars.

Pour atteindre ces cibles, "le séquençage et le panachage des projectiles russes ont changé, ils sont devenus plus complexes", explique à l'AFP Stéphane Audrand, consultant français en risques internationaux.

Le commandant en chef de l'armée ukrainienne a ainsi décrit sur Telegram la panoplie de projectiles utilisée par les Russes au cours de l'attaque des 1er-2 janvier : drones, missiles de croisière modernes, d'autres plus anciens et missiles balistiques.

L’Ukraine affirme aussi avoir abattu à cette occasion 10 missiles hypersoniques Kinjal, pourtant présentés comme "invincibles" par le Kremlin.

Pression psychologique 

L'objectif des frappes russes est également, comme depuis le début de la guerre en février 2022, de miner le moral de la population.

"Les 'victoires' russes sur le terrain sont locales et sont atteintes à un prix humain exorbitant. (Vladimir) Poutine essaie donc à nouveau cet autre levier de pression", analyse Tatiana Kastouéva-Jean, de l'Institut français de relations internationales.

"'Je ne lâcherai pas, je suis prêt à tout, vous allez souffrir sans répit et mourir si vous ne vous pliez pas à mes conditions' – tel est son message", explique-t-elle, interrogée par l'AFP.

Le président russe s'adresse aussi aux Occidentaux, en voulant prouver que "le soutien à l’Ukraine ne fait que prolonger les souffrances de la population et fait de l'Ukraine un gouffre financier, où les infrastructures chères à reconstruire peuvent être frappées encore et encore", selon elle.

Ces attaques prennent enfin une dimension de représailles, estime Tatiana Stanovaya, la fondatrice de R. Politik, un centre d’analyse de la politique russe. Après les frappes ukrainiennes sur la ville russe de Belgorod qui ont fait 25 morts le 30 décembre, Vladimir Poutine a envoyé le message suivant : "l'Ukraine ne peut pas nous attaquer sans conséquences", dit-elle.

Face à cette campagne russe, le chef de la diplomatie ukrainienne, Dmytro Kouleba, a demandé l'accélération des livraisons occidentales de "systèmes de défense antiaérienne supplémentaires, de drones de combat" et de "missiles d'une portée de plus de 300 kilomètres".

Un message relayé par la Pologne, qui a appelé mercredi à équiper l'Ukraine de missiles de longue portée pour répliquer aux attaques russes.

Kiev attend aussi les avions de combat F-16 promis par plusieurs pays européens, qui peuvent participer à la défense antiaérienne avec des missiles air-air.


Ukraine: l'aide européenne compense le désengagement américain, selon le Kiel Institute

Gabriel Felbermayr, économiste autrichien et président de l'Institut de Kiel pour l'économie mondiale, participe à une conférence de presse le 11 mars 2020 à Berlin afin de commenter l'impact économique et politique de l'épidémie du nouveau coronavirus. (Photo de Tobias SCHWARZ / AFP)
Gabriel Felbermayr, économiste autrichien et président de l'Institut de Kiel pour l'économie mondiale, participe à une conférence de presse le 11 mars 2020 à Berlin afin de commenter l'impact économique et politique de l'épidémie du nouveau coronavirus. (Photo de Tobias SCHWARZ / AFP)
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  • « L'Europe comble largement le retrait de l'aide américaine », écrit l'institut dans un communiqué, qui recense l'aide militaire, financière et humanitaire promise et livrée à l'Ukraine depuis l'invasion russe du 24 février 2022.
  • Début 2025, les données du Kiel Institute montrent que « la récente augmentation de l'aide européenne a été tirée par un petit groupe de pays », au premier rang desquels se trouvent « les pays nordiques et le Royaume-Uni ».

PARIS : Selon l'institut de recherche allemand Kiel Institute, une hausse de l'aide des pays européens à l'Ukraine a permis début 2025 de combler le vide laissé par le désengagement de la nouvelle administration américaine de Donald Trump.

« L'Europe comble largement le retrait de l'aide américaine », écrit l'institut dans un communiqué, qui recense l'aide militaire, financière et humanitaire promise et livrée à l'Ukraine depuis l'invasion russe du 24 février 2022.

Alors que « les États-Unis, qui étaient auparavant le plus gros donateur à l'Ukraine, n'ont pas annoncé de nouvelle enveloppe depuis début janvier », l'Ukraine a tout de même reçu plus d'aide de janvier à avril 2025 qu'en moyenne les années précédentes sur la même période. 

« Reste à savoir s'il s'agit d'une hausse temporaire ou du début d'une évolution plus durable du rôle de l'Europe en tant que principal soutien de l'Ukraine », a déclaré Christoph Trebesch, qui dirige l'équipe du Kiel Institute chargée de suivre les engagements en faveur de l'Ukraine, cité dans le communiqué.

Début 2025, les données du Kiel Institute montrent que « la récente augmentation de l'aide européenne a été tirée par un petit groupe de pays », au premier rang desquels se trouvent « les pays nordiques et le Royaume-Uni ».

En revanche, « il est frappant de constater le peu d'aide allemande allouée ces derniers mois », a-t-il commenté. « Au lieu d'augmenter son soutien après l'arrivée de Trump au pouvoir, nous observons une forte baisse de l'aide allemande par rapport aux années précédentes. »

« La tendance est la même pour l'Italie et l'Espagne », a-t-il précisé. 

Au 30 avril 2025, 294 milliards d'euros au total ont été alloués à des dépenses précises en faveur de l'Ukraine (sur 405 milliards promis), selon les derniers chiffres du Kiel Institute. Les 111 milliards restants ont été promis à long terme, mais pas encore alloués.

Sur la somme déjà donnée, 140 milliards d'euros correspondent à de l'aide militaire, 133 milliards à de l'aide financière et 21 milliards à de l'aide humanitaire.

Les principaux donateurs sont l'Union européenne et ses membres (131 milliards d'euros donnés ou alloués), les États-Unis (115 milliards) et le Royaume-Uni (19 milliards).

En matière d'aide militaire, l'Europe, le Royaume-Uni compris, « dépasse pour la première fois depuis juin 2022 les États-Unis », selon le Kiel Institute. Les Européens ont déjà donné ou alloué 72 milliards d'euros d'aide militaire à l'Ukraine depuis le début de la guerre, contre 65 milliards pour les États-Unis. 


Les dirigeants du G7, dont Trump, se rejoignent au Canada tandis qu'un conflit oppose l'Iran et Israël

Le logo du G7 2025 est visible sur la pelouse devant le centre des médias de Banff, à l'approche du sommet du Groupe des Sept (G7) qui se tiendra à Kananaskis, dans la province canadienne de l'Alberta, le 16 juin 2025. (Photo : Ben Sheppard / AFP)
Le logo du G7 2025 est visible sur la pelouse devant le centre des médias de Banff, à l'approche du sommet du Groupe des Sept (G7) qui se tiendra à Kananaskis, dans la province canadienne de l'Alberta, le 16 juin 2025. (Photo : Ben Sheppard / AFP)
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  • Les pays du G7 ont entamé dimanche des négociations dans l'espoir de trouver un langage commun concernant le conflit entre l'Iran et Israël.
  • La priorité absolue pour tous sera d'éviter les drames, malgré les nombreux sujets de frictions, des droits de douane imposés par Donald Trump à la guerre en Ukraine, ou encore à celle du Moyen-Orient.

KANANASKIS, CANADA : Les pays du G7 ont entamé dimanche des négociations dans l'espoir de trouver un langage commun concernant le conflit entre l'Iran et Israël, alors que leurs dirigeants, dont le président américain, se retrouvent pour un sommet sous tension dans les Rocheuses canadiennes.

Il s'agit du premier grand sommet depuis que Donald Trump est revenu au pouvoir en janvier, ce qui a fragilisé l'unité du club des grandes démocraties industrialisées (Allemagne, Royaume-Uni, Canada, États-Unis, France, Italie et Japon).

Le président américain, qui n'a cessé de menacer le Canada ces derniers mois, est arrivé en fin de journée dans ce pays, avec sur la tête une casquette blanche portant son slogan « Make America Great Again » (« Rendre sa grandeur à l'Amérique »).

Pour cette réunion qui se déroule à Kananaskis, dans le parc national de Banff, dans l'ouest du Canada, il retrouvera ses alliés du G7 ainsi que les dirigeants de nombreux autres pays invités : l'Inde, l'Ukraine, le Mexique, l'Afrique du Sud et l'Australie seront notamment présents.

La priorité absolue pour tous sera d'éviter les drames, malgré les nombreux sujets de frictions, des droits de douane imposés par Donald Trump à la guerre en Ukraine, ou encore à celle du Moyen-Orient.

Mais parviendront-ils à parler d'une voix commune, notamment sur cette région du monde ?

Israël a stupéfié le monde vendredi en ouvrant un nouveau front avec une campagne militaire surprise et massive contre l'Iran.

Selon une source gouvernementale citée par l'AFP, les dirigeants du G7 travaillent à une déclaration commune. Reste à décider s'il s'agit d'appeler à la désescalade ou simplement de soutenir Israël en affirmant que le pays a le droit de se défendre. 

Mais cette guerre n'est pas le seule enjeu des discussions à Kananaskis. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky est parmi les invités et doit s'entretenir avec Donald Trump

Le président américain, qui s'est rapproché de façon spectaculaire de Moscou, a de nouveau eu un entretien téléphonique samedi avec le président russe Vladimir Poutine. Ce dernier lui a dit être prêt à un nouveau round de négociations.

De leur côté, les Européens tentent de convaincre Donald Trump de promulguer de nouvelles sanctions contre Moscou, ciblant plus précisément les ventes de pétrole russe. 

Tous les pays souhaitent par ailleurs aborder l'aspect commercial avec le président Trump. En imposant des taxes douanières d'au moins 10 % sur la plupart des produits entrant aux États-Unis, ce dernier a dévié le cours de la mondialisation et menacé l'économie mondiale d'un ralentissement général. 

Ce sommet du G7 est la première visite du président américain sur le sol canadien depuis qu'il a menacé son voisin du nord, estimant qu'il serait préférable qu'il devienne le 51^e État américain.

Le Premier ministre canadien, Mark Carney, et Donald Trump se rencontreront lundi matin lors d'un tête-à-tête. Outre MM. Carney et Zelensky, le dirigeant américain doit aussi rencontrer la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum. 


Donald Trump appelle Iran et Israël à «trouver un accord»

Donald Trump a appelé Israël et l'Iran à "trouver un accord" dimanche, même s'ils vont peut-être devoir se battre auparavant. (AFP)
Donald Trump a appelé Israël et l'Iran à "trouver un accord" dimanche, même s'ils vont peut-être devoir se battre auparavant. (AFP)
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  • Israël a multiplié dimanche ses frappes meurtrières à travers l'Iran, visant la capitale, la ville de Machhad à l'extrémité nord-est du pays ainsi que des installations militaires dans l'ouest, auxquelles Téhéran a riposté par de nouveaux tirs de missiles
  • En fin de journée, avant son départ pour le G7 au Canada, Donald Trump a renouvelé son appel aux deux pays: "Je pense qu'il est temps de conclure un accord et nous verrons ce qui se passera"

WASHINGTON: Donald Trump a appelé Israël et l'Iran à "trouver un accord" dimanche, même s'ils vont peut-être devoir se battre auparavant, a-t-il déclaré au moment où des échanges intenses de tirs entre les deux pays se poursuivent pour la quatrième nuit consécutive.

"L'Iran et Israël devraient trouver un accord, et ils vont trouver un accord", a écrit le président américain sur son réseau Truth Social dimanche matin, ajoutant que "de nombreux appels et rencontres ont lieu en ce moment".

En fin de journée, avant son départ pour le G7 au Canada, Donald Trump a renouvelé son appel aux deux pays: "Je pense qu'il est temps de conclure un accord et nous verrons ce qui se passera. Parfois, ils doivent se battre, mais nous verrons ce qui se passera. Je pense qu'il y a de bonnes chances qu'il y ait un accord", a-t-il déclaré sur le seuil de la Maison Blanche avant d'embarquer dans son hélicoptère Marine One.

Israël a multiplié dimanche ses frappes meurtrières à travers l'Iran, visant la capitale, la ville de Machhad à l'extrémité nord-est du pays ainsi que des installations militaires dans l'ouest, auxquelles Téhéran a riposté par de nouveaux tirs de missiles.

Au troisième jour de l'offensive aérienne israélienne, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a menacé de faire payer à l'Iran "un prix très lourd" après la mort de civils provoquée par les salves de missiles balistiques iraniens tirées en représailles sur Israël, qui ont touché des zones habitées.

L'Iran a de son côté promis dimanche une "réponse dévastatrice" aux attaques israéliennes et affirmé qu'Israël ne serait bientôt "plus habitable".