Lourde condamnation d'un ex-policier marchand de sommeil à Marseille

La condamnation "exemplaire" à cinq ans de prison d'un ex-policier, qui louait des taudis à des personnes vulnérables à Marseille a été accueillie avec satisfaction mercredi par les parties civiles (Photo d'illustration, AFP).
La condamnation "exemplaire" à cinq ans de prison d'un ex-policier, qui louait des taudis à des personnes vulnérables à Marseille a été accueillie avec satisfaction mercredi par les parties civiles (Photo d'illustration, AFP).
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Publié le Mercredi 24 janvier 2024

Lourde condamnation d'un ex-policier marchand de sommeil à Marseille

  • Gérard Gallas, qui louait une centaine de logements insalubres essentiellement à des étrangers en situation irrégulière ou demandeurs d'asile, dont des familles avec enfants, a été condamné à 75 000 euros d'amende et 300 000 euros de dommages et intérêts
  • Le tribunal correctionnel de Marseille a également ordonné la confiscation de deux immeubles et de 220 000 euros saisis sur une assurance-vie

MARSEILLE: La condamnation "exemplaire" à cinq ans de prison d'un ex-policier, qui louait des taudis à des personnes vulnérables à Marseille a été accueillie avec satisfaction mercredi par les parties civiles, qui veulent y voir la fin de l'impunité pour les marchands de sommeil.

Outre les cinq ans d'emprisonnement, dont quatre ans ferme, Gérard Gallas, qui louait une centaine de logements insalubres essentiellement à des étrangers en situation irrégulière ou demandeurs d'asile, dont des familles avec enfants, a été condamné à 75 000 euros d'amende et 300 000 euros de dommages et intérêts.

Le tribunal correctionnel de Marseille a également ordonné la confiscation de deux immeubles et de 220 000 euros saisis sur une assurance-vie.

Absent à la lecture du délibéré, Gérard Gallas, 50 ans, est hospitalisé après avoir été placé en détention dans un autre dossier. Le parquet d'Aix-en-Provence a précisé mercredi qu'il avait été écroué le 17 janvier pour viols et violences habituelles sur conjoint ayant entrainé une infirmité permanente.

Contre son "gestionnaire", Ali Faissoili Aliani, 38 ans, absent au procès à l'automne, lors duquel il avait été présenté comme un "factotum zélé qui n'hésitait pas à faire le coup de poing contre les mauvais payeurs", le tribunal a prononcé une peine de quatre ans de prison ferme avec mandat d'arrêt et 45 000 euros d'amende.

En tout, en son nom propre ou via des sociétés civiles immobilières (SCI), l'ancien policier, qui avait travaillé plus de dix ans au Centre de rétention administrative (CRA) de Marseille, possédait une dizaine d'immeubles dans la deuxième ville de France. Mais seuls quatre de ces bâtiments, dans les quartiers populaires du nord de la ville, lui valaient d'être jugé.

Ses logements, parfois aménagés dans des caves, étaient loués jusqu'à 600 euros, souvent réglés directement par la Caisse des allocations familiales (CAF) ou via un terminal bancaire pour les détenteurs d'une allocation de l'Office français de l'immigration.

«L'impunité, c'est terminé»

A l'audience, plusieurs locataires avaient témoigné de l'insalubrité de leurs "logements", des pièces exiguës, parfois aveugles, sans eau chaude ni chauffage, voire sans électricité, où proliféraient cafards et rats.

Ils avaient aussi dit leur "peur" de l'ancien policier, qui les "menaçait" et se disait "copain avec le commissaire" de quartier, tout en expliquant n'avoir "nulle part ailleurs où aller".

Le tribunal, qui est allé au-delà des réquisitions du procureur, a mis en avant les "circonstances aggravantes" liées à la "pluralité de victimes" et à "la grande ampleur" des faits, "répétés sur plus de trois ans malgré de nombreuses alertes".

L'ancien policier, qui "visait une rentabilité locative maximale", "exploitait sans scrupule la misère d'autrui", a asséné le président du tribunal Pascal Gand.

Il a également souligné la "personnalité trouble" de l'accusé qui, à l'audience, s'était présenté comme un "modèle inspirant", président-fondateur d'une "église catholique traditionnelle, filiation apostolique vieille catholique", expert en exorcisme mais aussi en arts martiaux.

"C'est une grande satisfaction pour toutes les victimes. Ce sont des personnes invisibles qui ont gagné en visibilité, malgré leur statut d'étrangers en situation irrégulière", a réagi Me Aurélien Leroux, avocat de plusieurs locataires et de deux associations marseillaises, Réseau Hospitalité et Un centre-ville pour tous.

"C'est la peine la plus lourde jamais prononcée contre un marchand de sommeil à Marseille", ville gangrénée par l'habitat indigne, avec 40 000 taudis, soit 10% du parc immobilier, et "cette décision s'inscrit dans un ras-le-bol à Marseille et en France", a ajouté l'avocat, rappelant que ce verdict survient quelques heures seulement après l'adoption à l'Assemblée nationale d'un projet de loi contre "l'habitat dégradé" qui prévoit de nouveaux outils pour lutter contre les marchands de sommeil.

"Notre mobilisation contre les marchands de misère porte ses fruits et va être renforcée grâce au projet de loi adopté à l'Assemblée nationale", a réagi Benoît Payan, maire divers gauche de Marseille qui s'était constituée partie civile. "L'impunité, c'est terminé", a-t-il affirmé sur le réseau social X.

Même satisfaction du côté des associations parties civiles, qui ont salué un procès "exemplaire". "C'est un verdict qui montre que ces gens qui exploitent la misère humaine ne resteront pas impunis", a souligné Margot Bonis, de Réseau Hospitalité.


Lille: enquête ouverte après les propos sur internet d'une étudiante gazaouie

L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
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  • Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie

LILLE: Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie, dont Sciences Po Lille a annulé l'inscription mercredi.

"Une enquête a été ouverte pour apologie du terrorisme, apologie de crime contre l'humanité avec utilisation d'un service de communication au public en ligne", a écrit la procureure de la République de Lille, Carole Etienne, à l'AFP.

Des captures d'écran circulant sur les réseaux sociaux montrent qu'un compte, attribué à cette étudiante par des internautes et fermé depuis, a repartagé des messages appelant à tuer des juifs.

Elle a été désinscrite de l'Institut d'études politiques de Lille, où elle devait étudier à partir de septembre, en raison du contenu de certaines de ses publications qui "entre en contradiction frontale avec les valeurs portées par Sciences Po Lille", a indiqué l'établissement mercredi.

"Pourquoi on est passé à travers? Il y a quand même une question, il faut y répondre", a reconnu jeudi sur RMC François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l'Intérieur.

"Il y aura des poursuites qui seront engagées et sur la base de ces éléments-là, elle est susceptible d'être renvoyée dans son pays, bien évidemment", a-t-il ajouté.

"Administrativement, semble-t-il, je suis très prudent, il n'y avait pas de difficulté particulière, sauf que sur les réseaux sociaux, voilà, on s'en est rendu compte", a-t-il ajouté, précisant que "les services des titres de séjour relèvent du ministère des Affaires étrangères".

Sollicité par l'AFP, Sciences Po Lille a expliqué avoir "accueilli cette étudiante sur proposition du consulat général de France à Jérusalem".

L'incident a fait largement réagir dans la classe politique, jusqu'au gouvernement.

"Une étudiante gazaouie tenant des propos antisémites n'a rien à faire en France", a réagi sur X le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Il a indiqué avoir "demandé à ce qu'une enquête interne soit diligentée pour que cela ne puisse en aucun cas se reproduire".

Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a souligné sur le même réseau social avoir "demandé de faire fermer ce compte haineux", et a martelé que "les propagandistes du Hamas n'ont rien à faire dans notre pays".


Restitutions coloniales: le gouvernement français annonce un projet de loi

La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
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  • Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation
  • Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises

PARIS: Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation.

S'appliquant en priorité aux pays africains mais de "portée géographique universelle", ce texte vise à accélérer le retour dans leur pays d'origine de biens culturels appartenant aux collections nationales françaises.

Ils doivent revenir à des "Etats qui, du fait d'une appropriation illicite, en ont été privés" entre 1815 et 1972, selon le ministère français de la Culture.

Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises. Les oeuvres à restituer devront avoir été acquises "dans une situation de vol, de pillage, de cession ou de libéralité obtenue par contrainte ou violence ou d'une personne qui ne pouvait en disposer", a précisé le ministère.

La décision de sortie des collections pour opérer cette restitution ne passera plus par un processus législatif au cas par cas mais pourra intervenir sur seul décret du Conseil d'Etat et après avis, le cas échéant, d'une commission scientifique bilatérale.

Cette commission devra en effet documenter et déterminer, si besoin, le caractère illicite de l'appropriation des oeuvres réclamées à travers un travail qui associerait des experts et historiens français et l'Etat demandeur, selon le ministère.

Concernant la période historique retenue, 1815 correspond à la date d'un règlement des conquêtes napoléoniennes qui est dû à un premier mouvement de restitution d'œuvres à l'échelle européenne. 1972 est celle de l'entrée en application de la convention internationale de l'Unesco protégeant les biens culturels contre le trafic illicite.


Droits de douane: la France déçue de l'accord UE-USA

Le ministre français de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Eric Lombard, s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale française, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 10 juin 2025. (AFP)
Le ministre français de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Eric Lombard, s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale française, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 10 juin 2025. (AFP)
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  • La France, déçue de l'accord commercial annoncé dimanche entre l'Union européenne (UE) et les Etats-Unis, a plaidé lundi pour que l'Europe se montre plus ferme lors des négociations à venir
  • Le président français Emmanuel Macron n'avait pas réagi lundi. Mais son Premier ministre François Bayrou a évoqué un "jour sombre" pour l'Europe, qui "se résout à la soumission"

PARIS: La France, déçue de l'accord commercial annoncé dimanche entre l'Union européenne (UE) et les Etats-Unis, a plaidé lundi pour que l'Europe se montre plus ferme lors des négociations à venir sur ses modalités d'application.

Le président français Emmanuel Macron n'avait pas réagi lundi. Mais son Premier ministre François Bayrou a évoqué un "jour sombre" pour l'Europe, qui "se résout à la soumission".

Se projetant vers la suite, le ministre de l'Economie Eric Lombard a lui estimé lundi soir que "cet accord n'est pas complet" et que "le travail continue". Car "l'accord n'est pas finalisé et nous veillerons à ce qu'il soit amélioré", a-t-il dit dans une interview à Libération.

"Les discussions doivent se poursuivre pour les produits pharmaceutiques - on comprend que certains génériques seront exemptés -, sur l'acier, sur l'aluminium, sur les produits chimiques, sur les semi-conducteurs et sur les vins et les produits agricoles", précise-t-il.

"Il ne faudrait pas que cet accord soit la fin de l'histoire, auquel cas nous nous serions tout simplement juste affaiblis", avait estimé sur France Inter dès lundi matin le ministre français délégué au Commerce extérieur, Laurent Saint-Martin.

"Maintenant, il va y avoir une négociation technique" et "nous pouvons nous saisir de cette séquence pour nous renforcer", a-t-il ajouté.

Le président américain Donald Trump et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen ont annoncé dimanche en Ecosse un accord douanier prévoyant que les produits européens exportés aux Etats-Unis soient taxés à 15%.

Avec l'espoir d'éviter une escalade commerciale, l'UE s'est aussi engagée à 750 milliards de dollars d'achats d'énergie - visant notamment à remplacer le gaz russe - et à 600 milliards d'investissements supplémentaires aux Etats-Unis.

A Paris, si on concède que cet accord va apporter de la "stabilité" aux entreprises, on insiste surtout sur son caractère "déséquilibré", selon les termes utilisés par plusieurs membres du gouvernement.

"Notre responsabilité aujourd'hui, c'est de faire en sorte que cet accord, in fine, soit le moins déséquilibré possible", a déclaré sur RTL le ministre de l'Industrie et de l'Energie Marc Ferracci.

- Prochains jours déterminants -

MM. Ferracci et Saint-Martin ont plaidé pour un "rééquilibrage" portant sur les services, en particulier le numérique, en rappelant que si la balance commerciale des Etats-Unis avec l'Europe est déficitaire pour les biens, celle des services est excédentaire.

Concernant les échanges de biens, la France affichait en 2024 un excédent commercial de 16,4 milliards de dollars à l'égard des Etats-Unis selon les Américains, mais les Douanes françaises évoquent pour la même période un déficit de 4,2 milliards d'euros.

Les négociateurs européens devront utiliser "l'ensemble des outils qui sont à leur disposition" et notamment envisager "de limiter l'accès des entreprises américaines aux marchés publics européens", a insisté M. Ferracci.

Du côté des entreprises, Patrick Martin, le président du Medef, première organisation patronale française, a estimé que "si les choses sont bien ce qui nous a été annoncé, ce n'est pas admissible". "Il faut continuer à négocier", selon lui.

La CPME, deuxième organisation patronale, a dit anticiper "des répercussions désastreuses" pour les petites et moyennes entreprises. Et le mouvement des ETI (Meti) a évoqué "des conséquences particulièrement préoccupantes pour les entreprises de taille intermédiaire".

Selon les secteurs, les sentiments sont ambivalents.

"Il y a du soulagement parce que cet accord donne de la visibilité", a déclaré à l'AFP Emmanuel Guichard, délégué général de la Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA). Mais "ce n'est pas un bon accord pour nous, tout simplement parce qu'on avait 0% de droits de douane en janvier vers les Etats-Unis et maintenant on va être à 15%."

"La catastrophe est évitée", en référence aux 30% de droits de douane évoqué par M. Trump, "mais les prochains jours seront déterminants pour le secteur français des vins et spiritueux", déclare dans un communiqué la Fédération des Exportateurs de Vins et Spiritueux (FEVS), à laquelle se joint l’ensemble des interprofessions françaises (CNIV) et de la filière.

Dans l'agroalimentaire, l'organisation patronale du secteur, l'Ania, a dénoncé un "accord clairement inéquitable (...) qui fragilise notre position".

Seuls les secteurs qui pourraient bénéficier d'une exemption de droits de douane, comme l'aéronautique, se sont montrés complètement soulagés.

Le Gifas (Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales) a salué dans une déclaration transmise à l'AFP une exonération "bonne pour une industrie équilibrée entre la France et les Etats-Unis" et qui permettra de "conserver des emplois qualifiés en France à tous les niveaux de la chaîne de sous-traitance."

Les organisations patronales et les fédérations des filières économiques affectées par cet accord seront reçues mercredi à Bercy.