A trois mois des Européennes, un paysage politique en pleine redéfinition

Jordan Bardella lance dimanche son premier meeting de campagne, suivi par les têtes de liste du camp présidentiel et des socialistes le week-end suivant. (AFP)
Jordan Bardella lance dimanche son premier meeting de campagne, suivi par les têtes de liste du camp présidentiel et des socialistes le week-end suivant. (AFP)
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Publié le Vendredi 01 mars 2024

A trois mois des Européennes, un paysage politique en pleine redéfinition

  • Jusqu'ici, le Rassemblement national s'impose inlassablement en tête des intentions de vote - 30% selon une étude BVA Xsight pour RTL
  • Un tiers des Français entend utiliser son bulletin de vote pour "exprimer (son) opposition à la politique actuelle", selon BVA

PARIS: Le RN favori, la majorité en danger, une primaire avant l'heure à gauche: à 100 jours du scrutin européen qui promet de redéfinir le paysage politique, Jordan Bardella lance dimanche son premier meeting de campagne, suivi par les têtes de liste du camp présidentiel et des socialistes le week-end suivant.

D'ici le 9 juin, une surprise est-elle possible ? Jusqu'ici, le Rassemblement national s'impose inlassablement en tête des intentions de vote - 30% selon une étude BVA Xsight pour RTL parue mercredi.

Jordan Bardella, à nouveau tête de liste pour le parti d'extrême droite, lance sa campagne dimanche à Marseille lors d'un meeting géant, manière d'asseoir une dynamique jusqu'alors ininterrompue.

L'enjeu est multiple pour le RN : l'objectif officiel est d'arriver en tête et de dépasser son score d'il y a cinq ans (23,34%), une ambition unanimement jugée raisonnable.

Mais les stratèges lepénistes s'autorisent en privé à viser la barre des 30% et à surclasser d'au moins 10 points la macronie, avec laquelle ils avaient fait jeu quasi-égal en 2019.

En assumant de "nationaliser" le scrutin pour en faire des "élections de mi-mandat" contre l'exécutif et la majorité, ces Européennes doivent être le marche-pied à une quatrième candidature de Marine Le Pen à l'Elysée dans trois ans.

Quitte à dramatiser: "si on se plante, on ne pourra pas gagner en 2027", estime un cadre.

D'autres s'inquiètent d'un statut de favori qui pourrait démobiliser l'électorat - un talon d'Achille historique du RN, qui l'avait notamment empêché de remporter la moindre région en 2021, au mépris des pronostics.

Vote anti-macron ?

Face à la machine Bardella, l'alliance Renaissance-MoDem-Horizons s'essaie au rôle du challenger et, pour inverser la tendance (18% d'intentions de vote, selon BVA), mise sur les fondamentaux macronistes: une campagne courte et une volonté de transformer le scrutin en référendum pour ou contre l'Union européenne.

Le choix d'une inconnue du grand public pour mener la liste, l'eurodéputée sortante Valérie Hayer, doit notamment éviter le piège d'une personnalisation trop clivante, alors que Bruno Le Maire, Olivier Véran ou Clément Beaune avaient un temps été évoqués pour porter le brassard de capitaine.

Les plus optimistes parient sur une polarisation de la campagne sur la nécessité de davantage d'Europe, notamment dans le conflit ukrainien, pour réunir la plus grande partie des électeurs pro-UE, tout en pilonnant le RN sur son euroscepticisme et ses liens passés avec la Russie.

Mais quel impact aura dans les urnes la crise agricole qui secoue plusieurs pays européens, dont la France, depuis des semaines ?

L'exécutif devrait s'impliquer pleinement dans la campagne - en premier lieu Emmanuel Macron.

Toutefois un tiers des Français entend utiliser son bulletin de vote pour "exprimer (son) opposition à la politique actuelle", selon BVA.

"Peut-être que se prendre une taule permettrait de remettre les compteurs à zéro et de mieux repartir", s'interroge un cadre, soucieux de donner un nouvel élan à un quinquennat englué par une majorité seulement relative à l'Assemblée.

Survie politique 

Jusqu'à céder la deuxième place du podium? Au PS, on veut croire en la dynamique de Raphaël Glucksmann, présenté comme l'arme pour récupérer les électeurs de centre gauche déçus du macronisme. Il recueille pour l'instant 11% des intentions de vote.

Fait notable: parmi les principales listes, à 44 ans, l'essayiste est le meneur d'équipe le plus âgé de ce scrutin.

Le parti socialiste n'a par ailleurs pas échappé aux polémiques sur une composition de liste - y compris sa tête - jugée trop urbaine et élitiste.

Dans un scrutin qui lui est historiquement favorable, EELV espère pour sa part rééditer sa performance de 2019, lorsque la liste Jadot avait atteint 13,48%. Une gageure? La campagne emmenée par Marie Toussaint, eurodéputée sortante à la notoriété limitée, est pour l'instant créditée de 7%, à égalité avec La France insoumise. LFI repart, elle, avec Manon Aubry, les mélenchonistes se faisant pour leur part peu d'illusions sur une élection qui n'est habituellement pas leur point fort.

L'autre bataille sera celle de la survie politique. D'abord, pour Reconquête! Eric Zemmour a préféré passer son tour et laissé à Marion Maréchal la responsabilité de passer ou non la barre fatidique des 5%, qu'elle ne dépasse pour l'instant que d'un seul point.

Ensuite, pour Les Républicains, qui - par défaut, soufflent d'aucuns - ont confié à nouveau à François-Xavier Bellamy la première place de leur liste qui émarge à 8%.

Un paradoxe français. Le parti européen auquel ils appartiennent - le PPE - devrait à nouveau compter le plus gros contingent dans l'hémicycle de Strasbourg.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.