Le bouzkachi en Afghanistan: du pain, des jeux et de l'argent

Pratiqué depuis des siècles dans les steppes du nord de l'Afghanistan, ce sport national, au cœur de l'identité afghane, est passé d'un passe-temps rude et rural à un phénomène professionnalisé et riche en argent (Photo, AFP).
Pratiqué depuis des siècles dans les steppes du nord de l'Afghanistan, ce sport national, au cœur de l'identité afghane, est passé d'un passe-temps rude et rural à un phénomène professionnalisé et riche en argent (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 18 mars 2024

Le bouzkachi en Afghanistan: du pain, des jeux et de l'argent

  • Le rustique bouzkachi s'est embourgeoisé
  • Avant le retour des talibans, il y avait en Afghanistan 100 à 200 tchopendoz

MAZAR-E-SHARIF: Ses points de suture tout frais entre les yeux n'ont pas empêché le cavalier de bouzkachi Sarwar Pahlawan de remporter avec son équipe la finale d'un sport toujours violent mais désormais financé en Afghanistan par des investisseurs.

A bientôt 40 ans, dont 20 en tournois, l'un des meilleurs "tchopendoz" du pays se félicite des récentes évolutions de ce sport équestre au coeur de l'identité afghane, pratiqué depuis des siècles dans les steppes du Nord, et qui enfièvre désormais aussi le Sud.

"Le jeu a changé du tout au tout", a-t-il expliqué à l'AFP dans sa maison de Mazar-e-Sharif (nord), après la récente victoire de son équipe Yama devant une foule exclusivement masculine, les femmes étant bannies des stades.

"Avant on nous payait avec du riz, de l'huile, un tapis ou une vache", mais aujourd'hui les tchopendoz ont des contrats de professionnels, jusqu'à 10.000 dollars (9.150 euros) par an.

Les équipiers de Yama, après leur victoire, se sont aussi partagé 35.000 dollars, trois chameaux et une voiture offerts par des sponsors.

En outre, chaque but a rapporté à son auteur 100 dollars. C'est-à-dire quand, après une âpre mêlée de sabots levés et de coups de cravache, un cavalier parvient à jeter au sol, dans le "cercle de justice", le sac de cuir de 30 kg qui remplace désormais la carcasse d'une chèvre.

Le rustique bouzkachi s'est embourgeoisé.

"Avant, après un tournoi, on nous versait de l'eau froide sur les épaules, maintenant on a des hammams et des saunas", explique Sarwar.

De même, les cavaliers ne se pendent plus aux arbres ni ne fendent plus de bois pour se muscler: ils soulèvent de la fonte dans des salles de gym.

"Ma vie a beaucoup changé", dit le tchopendoz de 1,65 m seulement mais dont la puissance lui vaut le surnom de "lion".

"Maintenant j'ai une voiture. Je n'avais presque pas de moutons et j'en ai beaucoup, je n'avais pas de terrain, et j'en ai un. Je n'avais pas de maison, et j'en ai deux".

Mais Sarwar reste "un homme simple". Entre deux tournois, il élève ses moutons.

Un million de dollars 

Le magnat du pétrole Saeed Karim, qui partage sa vie entre Mazar-e-Sharif, Dubaï et Istanbul, est le plus gros financier du bouzkachi nouveau.

Il a monté l'équipe qui porte le nom de sa compagnie, Yama Petroleum, il y a cinq mois.

Il a acquis les deux meilleurs tchopendoz du pays (dont Sarwar) et une quarantaine d'étalons, certains au Kazakhstan ou Tadjikistan, dont le prix peut atteindre 100.000 dollars.

"On a investi un million de dollars dans les chevaux, les cavaliers, les écuries et les équipements", explique-t-il.

L'entrepreneur possède quatre propriétés en Turquie, dont une maison de quatre millions de dollars à Istanbul. Combien en a-t-il au total? "Je n'ai pas compté".

"Je veux juste servir mon peuple", dit-il. "Quand mon équipe gagne, c'est un honneur".

Les talibans, revenus au pouvoir en 2021, avaient interdit ce sport "immoral" lors de leur premier règne (1996-2001).

Mais "le bouzkachi c'est la passion de cette nation. Les talibans savent qu'il rend les gens heureux, c'est pour cela qu'ils l'autorisent", estime le président de la Fédération de bouzkachi, Ghulam Sarwar Jalal.

Ils perçoivent aussi des taxes sur les tournois.

Une ligue nationale a été créée en 2020 et le bouzkachi s'est professionnalisé.

Avant, chaque équipe faisait jouer un nombre illimité de chevaux, "aujourd'hui c'est six chacune, ce sont les normes internationales", explique M. Karim.

De même un peu d'ordre a été mis dans ces combats brutaux, et les cartons jaunes ou rouges pleuvent en cas de faute.

Mais c'est surtout l'arrivée d'argent qui a transformé le bouzkachi.

"Les fans viennent plus nombreux car ils savent qu'il y a davantage de bons chevaux et de bonnes équipes sur le terrain", dit le propriétaire de Yama.

Mais "avec 40 chevaux, il faut 300.000 dollars par an" pour 15 cavaliers, 20 palefreniers et les soins des magnifiques étalons nourris d'orge, de dattes, oeufs et huile de poisson.

Pour le confort de ses hommes, qui ont souvent des jambes, côtes ou doigts cassés, M. Karim a fait construire un vaste ranch où ont été plantés des poiriers importés de Turquie et des amandiers, déjà en fleurs.

«Comme le football»

Dix-mille hommes s'étaient entassés pour la finale dans le stade de Mazar-e-Sharif, bravant les décharges de Taser ou les bastonnades des gardes qui canalisaient la foule, et hurlant quand un cavalier s'emparait de "la chèvre" et fusait au grand galop.

Parmi les spectateurs, Mohammad Yama Razaqyar. Il travaille pour un des sponsors de la finale.

"L'investissement des hommes d'affaires est bon pour le jeu. L'organisation est parfaite", se réjouit-il, tout en insistant sur le fait que "les spectateurs peuvent venir sans peur", avec la fin des combats meurtriers depuis le retour des talibans.

A la Fédération, M. Jalal est un président heureux.

"Cette année, 20 entrepreneurs nous ont contactés. Quatre ou cinq millions de dollars seront investis dans de nouvelles équipes".

"On veut faire (du bouzkachi) un sport comme le football ou le cricket", un sport "commercial", avance le président.

Avant le retour des talibans, il y avait en Afghanistan 100 à 200 tchopendoz.

"Maintenant on a au moins 500. Le bouzkachi attire les jeunes", lance-t-il.


Diriyah: écrin d’histoire, une exposition qui transporte les parisiens au cœur de l’Arabie Saoudite

D’emblée, l’exposition plonge le public dans une expérience multisensorielle. Les projections géantes des portes sculptées des maisons de la cité, décorées de pigments minéraux aux motifs simples et joyeux, rappellent le raffinement discret de l’architecture locale. (Photo Arlette Khouri)
D’emblée, l’exposition plonge le public dans une expérience multisensorielle. Les projections géantes des portes sculptées des maisons de la cité, décorées de pigments minéraux aux motifs simples et joyeux, rappellent le raffinement discret de l’architecture locale. (Photo Arlette Khouri)
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  • D’emblée, l’exposition plonge le public dans une expérience multisensorielle
  • Les projections géantes des portes sculptées des maisons de la cité, décorées de pigments minéraux aux motifs simples et joyeux, rappellent le raffinement discret de l’architecture locale

PARIS: À peine franchi le seuil du Grand Palais Immersif à Paris, le visiteur de l’exposition « Diriyah : un écrin d’histoire » quitte le tumulte parisien pour se retrouver transporté au cœur de l’Arabie saoudite.
Le parcours débute par un long couloir aux murs sobres, délicatement éclairés, recouverts de tapis tissés artisanalement et ponctués de chants d’oiseaux.
À son terme, une porte massive en bois brut, sculptée selon la tradition ancestrale de Diriyah : l’immersion commence, dans une atmosphère d’apaisement et de sérénité.

D’emblée, l’exposition plonge le public dans une expérience multisensorielle. Les projections géantes des portes sculptées des maisons de la cité, décorées de pigments minéraux aux motifs simples et joyeux, rappellent le raffinement discret de l’architecture locale.
Plus loin, un salon inspiré des habitations traditionnelles accueille les visiteurs. Assis au son apaisant du oud, ils dégustent café et figues, un goûter authentique qui évoque l’hospitalité saoudienne.

L’exposition déroule ensuite une série d’images monumentales retraçant la vie quotidienne d’autrefois : cavalerie, danses, vannerie et artisanats. Mais le point d’orgue du parcours est une immersion totale d’environ quatre minutes dans les rues de Diriyah.
Le spectateur se retrouve au milieu des habitants, partagé entre marchés animés, activités agricoles et scènes de fête : une expérience surprenante, qui donne l’impression de voyager sans quitter Paris.

Diriyah ne se limite pas à son passé. Située aux portes de Riyad, elle est aujourd’hui au cœur de la Vision 2030 de l’Arabie saoudite, un vaste plan de développement qui fait du patrimoine et de la culture des leviers de rayonnement international.

Cette exposition n’est pas seulement une prouesse visuelle : elle incarne l’esprit d’une cité majeure de l’histoire saoudienne. Diriyah, berceau de l’État saoudien, est en effet le lieu où la dynastie Al Saoud a vu le jour au XVIIIᵉ siècle, au sein du site d’At-Turaif.
Inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, At-Turaif est un ensemble exceptionnel de palais et de demeures en briques de terre crue, restaurés avec soin et visités aujourd’hui par des millions de personnes. Il permet de revivre les origines politiques et culturelles du Royaume.

Mais Diriyah ne se limite pas à son passé. Située aux portes de Riyad, elle est aujourd’hui au cœur de la Vision 2030 de l’Arabie saoudite, un vaste plan de développement qui fait du patrimoine et de la culture des leviers de rayonnement international.
Diriyah s’étend sur 11,7 km² et se compose de quartiers mêlant espaces résidentiels, commerciaux et culturels. Le projet de développement prévoit plus de 30 hôtels, des parcs, des zones de loisirs, ainsi que la création de 178 000 emplois.

Depuis son ouverture au public en 2022, Diriyah a déjà attiré plus de trois millions de visiteurs.

Parmi ses joyaux contemporains, les terrasses de Bujairi séduisent par leurs restaurants raffinés et leurs boutiques, tandis que le wadi Hanifa, une vallée verdoyante transformée en oasis moderne, invite à la promenade entre arbres nouvellement plantés, pistes cyclables et sentiers équestres.
Ce mélange de patrimoine et de modernité fait de Diriyah une destination unique, alliant mémoire historique, innovation et respect de l’environnement.

« Nous voulons que les visiteurs s’imprègnent pleinement de la vie de Diriyah, qu’ils ressentent son passé, son présent et son avenir », explique Saeed Abdulrahman Metwali, directeur général de la stratégie d’orientation touristique et du design.
Selon lui, l’expérience immersive proposée à Paris est une manière de donner un avant-goût de la richesse culturelle et humaine que Diriyah réserve à ses visiteurs : « À travers ces images, on découvre les habitants, les marchés, les maisons et l’âme de la cité. L’idée est d’offrir une perception vivante et authentique, qui incite à venir découvrir Diriyah sur place. »

Les chiffres confirment d’ailleurs cet engouement : depuis son ouverture au public en 2022, Diriyah a déjà attiré plus de trois millions de visiteurs.
L’objectif est ambitieux : en accueillir 50 millions d’ici 2030, grâce à une offre hôtelière et culturelle sans cesse enrichie.

L’exposition parisienne, de courte durée (du 12 au 14 septembre), illustre la volonté de Diriyah de s’ouvrir à l’international et témoigne de sa stratégie visant à se positionner comme un lieu mondial du tourisme culturel, où se conjuguent tradition et modernité.


Un documentaire met en lumière le patrimoine environnemental des monts Al-Arma

La chaîne de montagnes Al-Arma est située dans la réserve royale du roi Khalid, au nord-est de Riyad. (SPA)
La chaîne de montagnes Al-Arma est située dans la réserve royale du roi Khalid, au nord-est de Riyad. (SPA)
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  • Le film présente de superbes images panoramiques des montagnes d'Al-Arma
  • Le film sera diffusé sur la chaîne Thaqafiya et disponible sur la plateforme Shahid

RIYAD: L'Autorité de développement de la réserve royale Imam Abdulaziz bin Mohammed a annoncé la production d'un nouveau film documentaire sur les monts Al-Arma, un point de repère environnemental situé dans la réserve royale du roi Khalid, au nord-est de Riyad.

Sami Al-Harbi, directeur de la communication de l'autorité, a déclaré que le film présente des images panoramiques époustouflantes des monts Al-Arma, ainsi que des points de vue d'experts et de chercheurs qui discutent de leur importance environnementale et historique particulière.

Il a ajouté que le film sera diffusé sur la chaîne Thaqafiya et disponible sur la plateforme Shahid.

M. Al-Harbi a déclaré que cette production médiatique s'inscrivait dans le cadre des efforts déployés par l'autorité pour sensibiliser à l'environnement et promouvoir l'écotourisme durable, conformément aux objectifs de la Saudi Vision 2030.


Rare découverte d'un tableau de Rubens que l'on croyait disparu

Un tableau du célèbre peintre Pierre Paul Rubens (1577-1640), que l'on pensait disparu depuis 1613, a été retrouvé à Paris dans un hôtel particulier, a indiqué mercredi le commissaire-priseur à l'origine de cette découverte. (AP)
Un tableau du célèbre peintre Pierre Paul Rubens (1577-1640), que l'on pensait disparu depuis 1613, a été retrouvé à Paris dans un hôtel particulier, a indiqué mercredi le commissaire-priseur à l'origine de cette découverte. (AP)
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  • "C'est un chef d'oeuvre, un Christ en croix, peint en 1613, qui avait disparu, et que j'ai retrouvé en septembre 2024 lors de l'inventaire et de la vente d'un hôtel particulier du 6e arrondissement à Paris", a précisé à l'AFP Jean-Pierre Osenat
  • "C'est rarissime et une découverte inouïe qui marquera ma carrière de commissaire-priseur", a-t-il ajouté.

PARIS: Un tableau du célèbre peintre Pierre Paul Rubens (1577-1640), que l'on pensait disparu depuis 1613, a été retrouvé à Paris dans un hôtel particulier, a indiqué mercredi le commissaire-priseur à l'origine de cette découverte.

"C'est un chef d'oeuvre, un Christ en croix, peint en 1613, qui avait disparu, et que j'ai retrouvé en septembre 2024 lors de l'inventaire et de la vente d'un hôtel particulier du 6e arrondissement à Paris", a précisé à l'AFP Jean-Pierre Osenat, président de la maison de vente éponyme, qui mettra le tableau aux enchères le 30 novembre.

"C'est rarissime et une découverte inouïe qui marquera ma carrière de commissaire-priseur", a-t-il ajouté.

"Il a été peint par Rubens au summum de son talent et été authentifié par le professeur Nils Büttner", spécialiste de l'art allemand, flamand et hollandais du XVe au XVIe siècle et président du Rubenianum, un organisme situé à Anvers près de l'ancienne maison-atelier de Rubens et chargé de l'étude de son oeuvre, selon M. Osenat.

"J'étais dans le jardin de Rubens et je faisais les cent pas pendant que le comité d'experts délibérait sur l'authenticité du tableau quand il m'a appelé pour me dire +Jean-Pierre on a un nouveau Rubens !+", a-t-il raconté avec émotion.

"C'est tout le début de la peinture baroque, le Christ crucifié est représenté, isolé, lumineux et se détachant vivement sur un ciel sombre et menaçant. Derrière la toile de fond rocheuse et verdoyante du Golgotha, apparait une vue montrant Jérusalem illuminée, mais apparemment sous un orage", a-t-il détaillé.

Ce tableau "est une vraie profession de foi et un sujet de prédilection pour Rubens, protestant converti au catholicisme", a poursuivi M. Osenat, précisant que l'oeuvre est dans un "très bon état" de conservation.

Sa trace a été remontée à partir d'une gravure et il a été authentifié à l'issue d'une "longue enquête et d'examens techniques comme des radiographies et l'analyse des pigments", a encore précisé le commissaire-priseur.

Si le peintre a réalisé nombre de tableaux pour l'Eglise, ce chef d'oeuvre, d'une dimension de 105,5 sur 72,5 centimètres, était probablement destiné à un collectionneur privé. Il a appartenu au peintre académique du XIXe siècle William Bouguereau puis aux propriétaires de l'hôtel particulier parisien où il été retrouvé.