La piraterie d’État iranienne menace les voies pétrolières du Moyen-Orient

Cette photo fournie par le site officiel du Corps des gardiens de la révolution iranienne (CGRI) via SEPAH News le 19 novembre 2020, un drone militaire stationné sur un navire de guerre portant le nom du commandant naval Abdollah Roudaki, tué pendant qu'il naviguait dans les eaux du golfe lors de l'inauguration du bateau (Photo, AFP / Archives).
Cette photo fournie par le site officiel du Corps des gardiens de la révolution iranienne (CGRI) via SEPAH News le 19 novembre 2020, un drone militaire stationné sur un navire de guerre portant le nom du commandant naval Abdollah Roudaki, tué pendant qu'il naviguait dans les eaux du golfe lors de l'inauguration du bateau (Photo, AFP / Archives).
Lorsque des «soldats armés» iraniens sont montés à bord du pétrolier Hankuk Chemi battant pavillon sud-coréen le 4 janvier 2021, ils exécutaient une politique officieuse de piraterie d'État de longue date dans les eaux du golfe et du détroit d'Ormuz (Photo, AFP/Archives).
Lorsque des «soldats armés» iraniens sont montés à bord du pétrolier Hankuk Chemi battant pavillon sud-coréen le 4 janvier 2021, ils exécutaient une politique officieuse de piraterie d'État de longue date dans les eaux du golfe et du détroit d'Ormuz (Photo, AFP/Archives).
Détenus par les troupes iraniennes en juin 2004, huit militaires britanniques ont été contraints de marcher les yeux bandés sur les rives de la voie navigable de Chatt al-Arab après s'être soi-disant égarés dans les eaux iraniennes. Le Shatt al-Arab chevauche la frontière entre l'Iran et le sud de l'Irak. (Photo/ AFP).
Détenus par les troupes iraniennes en juin 2004, huit militaires britanniques ont été contraints de marcher les yeux bandés sur les rives de la voie navigable de Chatt al-Arab après s'être soi-disant égarés dans les eaux iraniennes. Le Shatt al-Arab chevauche la frontière entre l'Iran et le sud de l'Irak. (Photo/ AFP).
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Publié le Jeudi 07 janvier 2021

La piraterie d’État iranienne menace les voies pétrolières du Moyen-Orient

  • Les unités navales iraniennes du CGRI et leurs mandataires houthis font un pied de nez au monde en saisissant des pétroliers qui sillonnent le Golfe
  • Le Hankuk Chemi, battant pavillon sud-coréen, n'est que le dernier d'une longue lignée de navires saisis par l'Iran dans le détroit d'Ormuz

LONDRES: L'Iran a attisé les tensions dans le Golfe cette semaine lorsque ses troupes ont pris d'assaut un pétrolier battant pavillon sud-coréen alors qu'il transitait par le détroit stratégique d'Ormuz, un goulot d'étranglement par lequel passe le cinquième de la production mondiale de pétrole. Cet incident est le dernier d'une longue série de «pirateries d'État» dans la région instable.

Le MT Hankuk Chemi était en route du Jubail d'Arabie saoudite vers le Fujairah des Émirats arabes unis. Lundi, des membres de la marine du Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI) ont embarqué sur le navire et l'ont amené au port de Bandar Abbas, dans le sud de l'Iran, plaçant son équipage de 20 matelots, de nationalités diverses, en état d'arrestation.

Les autorités iraniennes ont prétendu que le pétrolier, qui transporte 7 200 tonnes d’éthanol, a été saisi pour infraction aux lois sur l’environnement maritime, selon le propriétaire du navire qui nie toutes ces allégations.

Les observateurs soupçonnent que le navire a été pris en otage dans le cadre d'une dispute avec Séoul au sujet de 7 milliards de dollars de revenus en recettes de pétrole, gelées dans les banques sud-coréennes en vertu des sanctions américaines imposées à l'Iran par l'administration Trump.

Bien que le MT Hankuk Chemi soit le premier grand navire saisi par l'Iran depuis plus d'un an, des incidents de ce genre sont devenus trop courants dans le détroit d'Ormuz ainsi que sur les voies maritimes à proximité.

Plusieurs navires ont été arraisonnés ou mystérieusement attaqués depuis que le président Donald Trump a intensifié sa campagne de «pression maximale», l'Iran étant désigné comme le coupable probable.

La marine du CGRI a longtemps utilisé sa flotte de hors-bords pour harceler les navires commerciaux et militaires de la région, saisissant au moins six navires en 2019, soi-disant pour contrebande de carburant. L'Iran a également menacé à plusieurs reprises de bloquer le détroit si elle est attaquée.

Plusieurs incidents ont pavé la voie aux tensions actuelles. En janvier 2016, le CGRI a saisi deux bateaux de commandement de la marine américaine après leur entrée dans les eaux territoriales iraniennes près de l'île iranienne de Farsi.

Après une vague d'appels téléphoniques entre le secrétaire d'État américain de l'époque, John Kerry, et le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, les marins ont été libérés sains et saufs quinze heures plus tard.

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L'ambassadeur d'Iran en Corée du Sud, Saeed Badamchi Shabestari, arrive au ministère des Affaires étrangères à Séoul le 5 janvier 2021, convoqué au sujet de l’affaire du pétrolier sud-coréen saisi par l'Iran (Photo, AFP/ YONHAP).

En mars 2007, le CGRI a arrêté 15 membres de la marine britannique du HMS Cornwall qui fouillaient un navire marchand au large de la côte irano-irakienne. Ils ont été libérés 13 jours plus tard.

Un incident similaire s'est produit en 2004 lorsque six Royal Marines et deux marins de la Royal Navy ont été capturés par le CGRI à l’intérieur du canal de Chatt al-Arab. Ils ont été libérés trois jours plus tard.

La milice houthie au Yémen, soutenue par l'Iran, a lancé des attaques répétées contre des ports et des navires ces dernières années, plaçant régulièrement des mines marines dans le sud de la mer Rouge et dans le détroit de Bab Al-Mandab sur la voie de navigation commerciale.

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Cette image de vidéosurveillance fournie par la société sud-coréenne Taikun Shipping Co. montre le moment où un pétrolier sud-coréen a été capturé par un hors-bord armé des gardiens de la révolution iraniens, à droite, dans les eaux du golfe et du détroit d'Ormuz le lundi 4 janvier 2021. (Photo, AFP/Archives)

La milice a rejeté à plusieurs reprises les demandes de l'ONU d’autoriser une équipe d'inspection à avoir accès au FSO Safer, un pétrolier de 45 ans abandonné au large du port de Hodeidah, pour effectuer des réparations urgentes. Le 15 juillet 2020, lors d'une session extraordinaire, l'ONU a fait part de ses craintes d’une «catastrophe» si le navire, qui contient 1,1 million de barils de pétrole brut à bord, se désintègre dans la mer Rouge.

En mai 2019, Washington a déployé le porte-avions USS Abraham Lincoln et quatre bombardiers B-52 au Moyen-Orient, invoquant des menaces iraniennes non spécifiées. Quelques jours plus tard, le 12 mai, quatre navires commerciaux, dont deux pétroliers saoudiens d’Aramco, sont endommagés près du port de Fujairah dans le golfe d'Oman. Un «acte de sabotage», d’après les Émirats arabes unis.

Le 13 juin, les pétroliers Front Altair et Kokuka Courageous sont secoués par des explosions, que l’on estime causées par des mines ventouses ou des projectiles. Quelques jours plus tard, le 20 juin, l'Iran abat un drone de surveillance américain RQ-4A survolant le détroit d'Ormuz, ce qui ajoute aux tensions.

À l'époque, le président américain Donald Trump avait déclaré que les bateaux iraniens qui attaquent la marine américaine se verraient «mitraillés jusqu’à ce qu’ils quittent les eaux».

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QUELQUES CHIFFRES

Piraterie iranienne

* 20 marins civils à bord du Hankuk Chemi battant pavillon sud-coréen arrêtés par le CGRI.

* 7 milliards de dollars - Montant réclamé par l'Iran et gelé dans une banque sud-coréenne.

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Le mois suivant, le CGRI a retenu pendant deux mois le pétrolier battant pavillon britannique Stena Impero pour avoir supposément percuté un bateau de pêche. Cette décision est largement considérée comme un acte de représailles, après que les Royal Marines britanniques aient arrêté un pétrolier iranien, le Grace 1, dans le détroit de Gibraltar, soupçonné d'avoir violé les sanctions de l'UE contre la Syrie.

À la suite de l'incident, le Commandement central américain a lancé l'opération Sentinelle, invitant les pays à coordonner la surveillance maritime et à fournir des escortes à leurs navires commerciaux battant pavillon dans le golfe, le détroit d'Ormuz, le détroit de Bab el-Mandeb ainsi que le golfe d'Oman.

Mais les puissances européennes ont fait part de leur préoccupation quant à la possibilité d'être entraînés dans une guerre avec l'Iran. Les États-Unis ont alors rebaptisé l'opération «Restauration de la sécurité maritime internationale» en septembre 2019, basée à Bahreïn.

Les yeux du monde sont une fois de plus tournés vers l’Iran qui utilise la saisie du Hankuk Chemi pour obtenir des concessions de la Corée du Sud. Séoul a confirmé qu'elle était en pourparlers avec Téhéran et Washington dans le but d’utiliser l'argent iranien gelé pour acheter des vaccins contre le coronavirus pour le pays.

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Cette photo non datée prise dans un lieu inconnu et publiée le 5 janvier 2021 par l'agence de presse Yonhap à Séoul montre le destroyer de la marine sud-coréenne ROKS Choi Young. La Corée du Sud enverra une délégation officielle en Iran «le plus tôt possible» afin de négocier la libération du pétrolier saisi et de son équipage, a annoncé le ministère des Affaires étrangères de Séoul le 5 janvier (Photo, AFP/Archives).

Parallèlement, le ministère des Affaires étrangères de la Corée du Sud a annoncé une action en justice pour exiger la libération du navire. Le ministère de la Défense a de plus déployé son unité antipiraterie Cheonghae, forte de 300 hommes, dans le détroit d'Ormuz, à bord du destroyer Choi Young, dans l’intention d’«assurer la sécurité» des ressortissants sud-coréens.

Shin Beom-chul, chercheur en chef à l'Institut de recherche coréen pour l'économie et la société, a déclaré à Arab News que la décision iranienne est une tentative désespérée d'obtenir la reconnaissance de la nouvelle administration Biden aux États-Unis, qui doivent adopter une position relativement plus indulgente vis -a-vis-à-vis de l'Iran.

«Téhéran envoie un message clair selon lequel elle peut à tout moment intensifier l'agression dans la région, surtout que les sanctions financières de l'administration Trump ne se résument pas à l'argent gelé en Corée du Sud», a affirmé Shin.

L'Iran subit les conséquences des sanctions réintroduites après le retrait de l'administration Trump du Plan d'action global conjoint, mieux connu sous le nom de l’accord nucléaire iranien, en mai 2018. Les problèmes économiques de l'Iran sont aussi aggravés par la pandémie du coronavirus, et qui a frappé de plein fouet la région.

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Cette photo fournie par le site officiel du Corps des gardiens de la révolution iranienne (CGRI) via SEPAH News le 19 novembre 2020, montre un drone militaire stationné sur un navire de guerre qui porte le nom du commandant naval Abdollah Roudaki, tué pendant qu’il naviguait dans les eaux du golfe lors de l’inauguration du bateau. (Photo, AFP/Archives)

Les puissances européennes, quant à elles, s'efforcent de sauver l’entente, tout comme l'Iran qui a annoncé lundi avoir augmenté son enrichissement d'uranium à 20% de pureté, bien au-delà des limites fixées dans les clauses.

Les violations consécutives de l'accord nucléaire par Téhéran sont largement interprétées comme un moyen de faire pression sur les signataires européens pour qu'ils allègent les sanctions, une mesure que Washington qualifie de «chantage nucléaire».

Téhéran est, après tout, encore sous le choc de l’élimination de Qassem Soleimani, le commandant de la Force al-Qods du CGRI. Il a été tué par une frappe de drone américain près de l’aéroport de Bagdad il y a un an.

Aux prises avec les sanctions et la Covid-19, blessé par des revers stratégiques, l'Iran a semblé freiner ses activités navales illégales en 2020, mais le CGRI veut de nouveau s'imposer dans les derniers jours de l'administration Trump.

Avec si peu de signes encourageants dans le Golfe, le Hankuk Chemi ne sera peut-être pas le dernier navire commercial ciblé par l'Iran en 2021.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le Hezbollah dit recourir à de nouvelles armes dans ses attaques contre Israël

Des roquettes tirées depuis le sud du Liban sont interceptées par le système de défense aérienne israélien Iron Dome au-dessus du plateau du Golan annexé par Israël, le 17 mai 2024, alors que des affrontements transfrontaliers se poursuivent entre les troupes israéliennes et les combattants du Hezbollah. (Photo Jalaa Marey AFP)
Des roquettes tirées depuis le sud du Liban sont interceptées par le système de défense aérienne israélien Iron Dome au-dessus du plateau du Golan annexé par Israël, le 17 mai 2024, alors que des affrontements transfrontaliers se poursuivent entre les troupes israéliennes et les combattants du Hezbollah. (Photo Jalaa Marey AFP)
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  • Le Hezbollah, selon l'analyste militaire Khalil Helou, est capable d'envoyer «des drones qu'il peut contrôler facilement et qui volent lentement à basse altitude sans être détectés par les radars»
  • Jeudi, le Hezbollah a annoncé avoir mené une attaque à l'aide d'un drone équipé de deux missiles «S5», généralement tirés depuis des avions, contre un site militaire à Metoulla dans le nord d'Israël

BEYROUTH, Liban : Le puissant Hezbollah libanais a eu recours ces dernières semaines à de nouvelles armes dans son conflit avec Israël, dont un drone capable de lancer des missiles avant d'exploser en attaquant ses cibles.

Depuis le début de la guerre à Gaza entre Israël et le Hamas le 7 octobre, le Hezbollah armé et financé par l'Iran affirme attaquer des objectifs militaires principalement dans le nord d'Israël à partir du sud du Liban, où il est fortement implanté, pour soutenir le mouvement islamiste palestinien.

- Drones et missiles -

Jeudi, le Hezbollah a annoncé avoir mené une attaque à l'aide d'un drone équipé de deux missiles «S5», généralement tirés depuis des avions, contre un site militaire à Metoulla dans le nord d'Israël.

Il a publié une vidéo montrant le drone volant vers un site où se trouvent des chars, avant de lancer deux missiles puis d'exploser contre sa cible.

C'est la première fois que le mouvement annonce l'utilisation d'une telle arme depuis le début des échanges de tirs transfrontaliers.

L'armée israélienne a déclaré que trois soldats avaient été blessés dans l’explosion d'un drone à Metoulla.

Selon le Hezbollah, la charge explosive du drone pèse entre 25 et 30 kilos.

L'importance de cette arme, explique à l'AFP l'analyste militaire Khalil Helou, un général de brigade à la retraite, réside dans sa capacité à lancer l'attaque depuis l'intérieur du territoire israélien.

Le Hezbollah, selon lui, est capable d'envoyer «des drones qu'il peut contrôler facilement et qui volent lentement à basse altitude sans être détectés par les radars».

- Missiles iraniens -

Mercredi, le mouvement libanais a annoncé avoir lancé des «drones d'attaque» contre une base militaire proche de Tibériade dans le nord d'Israël, à environ 30 kilomètres de la frontière avec le Liban.

C'est la première fois selon des experts qu'il cible un objectif en profondeur du territoire israélien.

Ces dernières semaines, le Hezbollah a aussi annoncé avoir utilisé simultanément dans une seule attaque contre des sites ou des convois militaires israéliens, des drones explosifs et des missiles guidés.

Il a aussi eu recours à des «missiles guidés» et à des missiles iraniens de type Burkan, Almas et Jihad Moughniyé, du nom d'un commandant du Hezbollah tué par Israël en 2015 en Syrie.

Mais, dit M. Helou, le Hezbollah continue d'utiliser en premier lieu dans ses attaques, des missiles antichars Kornet, qui ont une portée entre 5 et 8 kilomètres.

Le missile antichars russe Konkurs fait également partie de son arsenal et peut échapper au système de défense antimissiles israélien Dôme de fer.

- «Guerre d'usure» -

Le Hezbollah, qui possède un énorme arsenal, a maintes fois annoncé disposer de plusieurs armes et missiles avancés capables d'atteindre Israël en profondeur.

Le 5 avril, son secrétaire général Hassan Nasrallah avait affirmé que le mouvement n'avait «pas encore employé ses principales armes» dans la bataille.

Depuis octobre 2023, le Hezbollah et Israël testent leurs méthodes d'attaque et leurs tactiques militaires, estiment des analystes.

Mais selon M. Helou, le mouvement libanais «ne veut pas élargir le cercle de la guerre. Il s'agit d'une guerre d'usure» dans laquelle il tente de pousser l'armée israélienne à mobiliser davantage de soldats à sa frontière nord et de la dissuader de «lancer une attaque d'envergure au Liban».

 


Israël: tiraillements au sommet de l'Etat sur fond de «bataille décisive» à Rafah

Cette photo diffusée par l'armée israélienne le 7 mai 2024 montre le ministre israélien de la Défense Yoav Gallant avec des soldats près d'un obusier d'artillerie automoteur lors d'une visite à une position le long de la frontière avec la bande de Gaza près de Rafah. (Photo de l'armée israélienne / AFP)
Cette photo diffusée par l'armée israélienne le 7 mai 2024 montre le ministre israélien de la Défense Yoav Gallant avec des soldats près d'un obusier d'artillerie automoteur lors d'une visite à une position le long de la frontière avec la bande de Gaza près de Rafah. (Photo de l'armée israélienne / AFP)
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  • La bataille de Rafah à peine lancée, le ministre de la Défense Yoav Gallant a le 15 mai pressé Benjamin Netanyahu de préparer l'après-Hamas, soulignant que «la fin de la campagne militaire doit s'accompagner d'une action politique»
  • Faute de trouver un remplaçant au Hamas qu'Israël considère comme terroriste, celui-ci ne pourra être vaincu, avertissent les experts

JÉRUSALEM : Des dissensions sont apparues au sommet de l'Etat israélien autour du scénario de l'après-guerre dans la bande de Gaza, au moment où le gouvernement affirme y mener la «bataille décisive» pour anéantir le mouvement palestinien Hamas.

En entrant dans le 8e mois de guerre, l'armée israélienne a lancé le 7 mai des opérations au sol à Rafah, localité adossée à la frontière égyptienne à la lisière sud de la bande de Gaza, où se cachent, selon elle, les derniers bataillons du Hamas.

Mais, la bataille à peine lancée, le ministre de la Défense Yoav Gallant a le 15 mai pressé Benjamin Netanyahu de préparer l'après-Hamas, soulignant que «la fin de la campagne militaire doit s'accompagner d'une action politique», s'opposant publiquement au Premier ministre qui peu avant avait écarté «toute discussion sur l'avenir de la bande de Gaza» avant que «le Hamas soit anéanti».

«Une alternative gouvernementale au Hamas va être préparée immédiatement», a martelé M. Gallant, indiquant clairement qu'il s'opposerait à ce que la bande de Gaza soit placée sous administration civile ou militaire israélienne et sommant M. Netanyahu de déclarer que ce ne sera pas le cas.

Ces propos ont suscité la colère de ministres du gouvernement, parmi lesquels les ministres des Finances Bezalel Smotrich et de la Sécurité nationale Itamar Ben-Gvir, chefs de deux petits partis d'extrême-droite, acteurs-clé de la coalition gouvernementale, qui ont appelé au départ de Gallant.

- «Prix à payer» -

«Avec les critiques de Gallant (...) des réelles fissures sont apparues au sein du cabinet de guerre israélien», estime sur X Colin P. Clarke, directeur de recherche au centre de réflexion Soufan Group.

Et, avertissent les experts, faute de trouver un remplaçant au Hamas qu'Israël considère comme terroriste, celui-ci ne pourra être vaincu.

«Sans alternative pour remplir le vide, le Hamas continuera de prospérer», indique à l'AFP Mairav Zonszein, analyste de l'International Crisis Group (ICG).

«Si le Hamas est laissé seul dans Gaza, bien sûr, il apparaîtra ici et là et l'armée israélienne sera contrainte de courir partout», abonde Emmanuel Navon, professeur à l'université de Tel-Aviv.

Les Etats-Unis, principal soutien militaire d'Israël, pressent aussi M. Netanyahu d'éviter d'être englué, après le conflit, dans une interminable campagne de contre-insurrection. Washington a estimé fin mars qu'une «Autorité palestinienne redynamisée» pouvait jouer un rôle pour «créer les conditions d'une stabilité à la fois en Cisjordanie et dans Gaza», territoires palestiniens toujours considérés comme occupés au regard du droit international.

Une idée balayée par M. Netanyahu, pour qui l'Autorité palestinienne (AP), chassée de Gaza en 2007 par le Hamas et qu'il accuse de «soutenir» et «financer le terrorisme», n'est «certainement pas» une option pour diriger la bande de Gaza.

Pour Yoav Gallant, «le +jour d'après le Hamas+ n'existera qu'avec des entités palestiniennes prenant le contrôle de Gaza, accompagnées par des acteurs internationaux».

«C'est, par dessus tout, dans l'intérêt de l'Etat d'Israël» car «l'administration militaire de Gaza deviendrait le principal effort militaire et sécuritaire» d'Israël ces prochaines années et «le prix à payer serait un bain de sang (...) ainsi qu'un lourd coût économique», a-t-il estimé.

- Combats «acharnés» -

La guerre a été déclenchée par l'attaque sanglante menée par le Hamas dans le sud d'Israël, qui a entraîné la mort, côté israélien, de plus de 1.170 personnes, selon un bilan de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes.

En riposte, Israël a lancé une offensive tous azimuts sur la bande de Gaza, qui a déjà fait plus de 35.000 morts, selon des données du ministère de la Santé du gouvernement de Gaza dirigé par le Hamas.

Et alors qu'Israël dit avoir entamé la «bataille décisive» de Rafah, les soldats israéliens affrontent à nouveau depuis le 12 mai des combattants du Hamas dans le nord du territoire.

L'armée avait pourtant proclamé en janvier avoir «achevé le démantèlement de la structure militaire» du Hamas dans le nord. Elle admet désormais mener, à Jabaliya, ses combats «peut-être les plus acharnées» dans cette zone depuis le début de son offensive terrestre le 27 octobre.

Un signe que «l'anéantissement» du Hamas, un des objectifs de la guerre, n'est peut-être pas si proche. Quant aux espoirs caressés d'une trêve négociée au Caire avec le Hamas, ils se sont évanouis avec le début des opérations dans Rafah.

L'accord de trêve «est dans une impasse totale» et «Israël fait semblant qu'il y a des progrès», explique Mme Zonszein. Les tiraillements au sommet de l'Etat, «plus les désaccords avec les Etats-Unis et le refus de l'Egypte de laisser passer de l'aide» depuis l'offensive israélienne à Rafah, «tout cela commence à faire beaucoup», ajoute-t-elle.

 


Des enfants parmi les victimes alors que les forces israéliennes intensifient leurs attaques contre le Hezbollah

Des soldats de l'armée libanaise et des badauds se rassemblent autour de la carcasse d'une voiture touchée par une frappe israélienne, qui aurait tué un responsable local du Hamas, à Majd al-Jabal dans la vallée de la Bekaa au Liban, le 17 mai 2024. (AFP)
Des soldats de l'armée libanaise et des badauds se rassemblent autour de la carcasse d'une voiture touchée par une frappe israélienne, qui aurait tué un responsable local du Hamas, à Majd al-Jabal dans la vallée de la Bekaa au Liban, le 17 mai 2024. (AFP)
Des volutes de fumée s'élèvent lors du bombardement israélien du village libanais d'Al-Najjariyeh, dans le sud du Liban, près de la frontière avec Israël. (AFP)
Des volutes de fumée s'élèvent lors du bombardement israélien du village libanais d'Al-Najjariyeh, dans le sud du Liban, près de la frontière avec Israël. (AFP)
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  • Le Sud-Liban est confronté à une « escalade de la violence », déclare un vétéran de l'armée à Arab News
  • L'ambassade des Etats-Unis se joint aux appels à élire un nouveau président libanais pour « unir la nation »

BEYROUTH : Deux enfants d'une famille de réfugiés syriens ainsi qu’un combattant du Hezbollah ont été tués lors de frappes aériennes israéliennes ayant touché une zone située à plus de 30 km à l'intérieur de la frontière sud du Liban.

Les frappes israéliennes ont ciblé les villages de Najjariyeh et Addousiyeh, tous deux situés au sud de la ville côtière de Saïda, tuant des enfants et un combattant du Hezbollah qui conduisait un camion pick-up au moment de la frappe.

En riposte à ces raids, le Hezbollah a lancé des dizaines de roquettes en direction de la Haute Galilée, la Galilée occidentale, du bassin de la Galilée et du Golan.

Les médias israéliens ont rapporté que 140 roquettes avaient été tirées vers le nord du pays.

CONTEXTE

Le Hezbollah a échangé des tirs transfrontaliers avec les forces israéliennes presque quotidiennement depuis l'attaque du Hamas au sud d'Israël, le 7 octobre,ce qui a déclenché la guerre à Gaza,depuis déjà  huit mois.

Les tensions entre les forces israéliennes et le Hezbollah ont atteint un niveau critique avec des attaques de drones menées en profondeur dans le territoire libanais et le nord d'Israël.

Le général à la retraite Khaled Hamadé de l'armée libanaise a mis en garde contre une « escalade vers des violences plus graves dans le sud du Liban ».

Le Hezbollah insiste pour conditionner un cessez-le-feu dans le sud du Liban à la fin des hostilités dans la bande de Gaza.

Contrairement à la situation dans la bande de Gaza, aucune initiative n'est prise pour arrêter les affrontements entre Israël et le Hezbollah, selon Hamadé.

Dans un communiqué, le Hezbollah a revendiqué avoir visé la base logistique Tsnobar d'Israël dans le Golan avec 50 roquettes Katyusha en réponse à la frappe sur Najjarieh.

Selon les médias israéliens, des salves de roquettes ont visé des bases militaires à Katzrin et des zones au nord du lac de Tibériade.

Deux personnes ont été blessées dans des explosions de roquettes à Karam bin Zamra dans la Haute Galilée, ont ajouté les médias.

Les caméras de surveillance à Najjarieh ont capturé un drone israélien suivant un camion pick-up alors que le conducteur, nommé Hussein Khodor Mehdi, tentait de s’enfuir.

Le premier missile lancé par le drone a raté sa cible, mais un second a frappé le camion, le mettant en feu et tuant son conducteur. Trois passants ont également été blessés.

Le Hezbollah a déclaré que Mehdi, 62 ans, était un « martyr sur la route de Jérusalem ».

La radio de l'armée israélienne a affirmé que la victime était un commandant de haut rang dans l'armée de l'air du Hezbollah et que les chasseurs de l'armée avaient visé des infrastructures du Hezbollah à Najjarieh.

La deuxième frappe aérienne a touché une salle de congrès et une usine de ciment, blessant plusieurs membres d'une famille de réfugiés syriens. Deux enfants, Osama et Hani Al-Khaled, sont décédés des suites de leurs blessures.

Le Hezbollah a revendiqué avoir visé le site militaire d'Al-Raheb avec l'artillerie et les positions israéliennes à Al-Zaoura avec une salve de roquettes Katioucha.

Selon une source sécuritaire, les dernières cibles du Hezbollah comprenaient des ballons de surveillance près de Tibériade et à Adamit en Galilée.

Tôt vendredi, le Hezbollah a attaqué le nouveau quartier général du 411e Bataillon d'Artillerie au Kibboutz Jaatoun, à l'est de Nahariyya, à l’aide de drones en réponse à la mort de deux combattants du Hezbollah, Ali Fawzi Ayoub, 26 ans, et Mohammed Hassan Ali Fares, 34 ans, la veille.

Dans son sermon du vendredi, cheikh Mohammed Yazbek, chef du Conseil de la charia du Hezbollah, a déclaré que le groupe menait « sa guerre féroce dans le nord de la Palestine, pourchassant l'ennemi, aveuglant ses opérations d'espionnage et franchissant les lignes rouges, tout en traquant ses soldats dans leurs cachettes jusqu'à ce que la guerre à Gaza prenne fin ».

L'ambassade des États-Unis au Liban a lancé une mise en garde concernant le conflit à la frontière sud et la vacance présidentielle dans le pays.

L'élection d'un président est cruciale pour garantir la participation du Liban aux discussions régionales et aux futurs accords diplomatiques concernant sa frontière méridionale, a souligné l'ambassade.

Le Liban « a besoin et mérite un président capable d’unir la nation, de donner la priorité au bien-être de ses citoyens et de former une coalition large et inclusive pour restaurer la stabilité politique et mettre en œuvre les réformes économiques nécessaires », a ajouté le communiqué.

Les ambassadeurs d'Égypte, de France, du Qatar, d'Arabie saoudite et des États-Unis au Liban ont publié cette semaine une déclaration mettant en garde contre « la situation critique à laquelle est confronté le peuple libanais et les répercussions difficiles à gérer sur l'économie et la stabilité sociale du Liban en raison du retard pris dans la mise en œuvre des réformes nécessaires ».