La piraterie d’État iranienne menace les voies pétrolières du Moyen-Orient

Cette photo fournie par le site officiel du Corps des gardiens de la révolution iranienne (CGRI) via SEPAH News le 19 novembre 2020, un drone militaire stationné sur un navire de guerre portant le nom du commandant naval Abdollah Roudaki, tué pendant qu'il naviguait dans les eaux du golfe lors de l'inauguration du bateau (Photo, AFP / Archives).
Cette photo fournie par le site officiel du Corps des gardiens de la révolution iranienne (CGRI) via SEPAH News le 19 novembre 2020, un drone militaire stationné sur un navire de guerre portant le nom du commandant naval Abdollah Roudaki, tué pendant qu'il naviguait dans les eaux du golfe lors de l'inauguration du bateau (Photo, AFP / Archives).
Lorsque des «soldats armés» iraniens sont montés à bord du pétrolier Hankuk Chemi battant pavillon sud-coréen le 4 janvier 2021, ils exécutaient une politique officieuse de piraterie d'État de longue date dans les eaux du golfe et du détroit d'Ormuz (Photo, AFP/Archives).
Lorsque des «soldats armés» iraniens sont montés à bord du pétrolier Hankuk Chemi battant pavillon sud-coréen le 4 janvier 2021, ils exécutaient une politique officieuse de piraterie d'État de longue date dans les eaux du golfe et du détroit d'Ormuz (Photo, AFP/Archives).
Détenus par les troupes iraniennes en juin 2004, huit militaires britanniques ont été contraints de marcher les yeux bandés sur les rives de la voie navigable de Chatt al-Arab après s'être soi-disant égarés dans les eaux iraniennes. Le Shatt al-Arab chevauche la frontière entre l'Iran et le sud de l'Irak. (Photo/ AFP).
Détenus par les troupes iraniennes en juin 2004, huit militaires britanniques ont été contraints de marcher les yeux bandés sur les rives de la voie navigable de Chatt al-Arab après s'être soi-disant égarés dans les eaux iraniennes. Le Shatt al-Arab chevauche la frontière entre l'Iran et le sud de l'Irak. (Photo/ AFP).
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Publié le Jeudi 07 janvier 2021

La piraterie d’État iranienne menace les voies pétrolières du Moyen-Orient

  • Les unités navales iraniennes du CGRI et leurs mandataires houthis font un pied de nez au monde en saisissant des pétroliers qui sillonnent le Golfe
  • Le Hankuk Chemi, battant pavillon sud-coréen, n'est que le dernier d'une longue lignée de navires saisis par l'Iran dans le détroit d'Ormuz

LONDRES: L'Iran a attisé les tensions dans le Golfe cette semaine lorsque ses troupes ont pris d'assaut un pétrolier battant pavillon sud-coréen alors qu'il transitait par le détroit stratégique d'Ormuz, un goulot d'étranglement par lequel passe le cinquième de la production mondiale de pétrole. Cet incident est le dernier d'une longue série de «pirateries d'État» dans la région instable.

Le MT Hankuk Chemi était en route du Jubail d'Arabie saoudite vers le Fujairah des Émirats arabes unis. Lundi, des membres de la marine du Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI) ont embarqué sur le navire et l'ont amené au port de Bandar Abbas, dans le sud de l'Iran, plaçant son équipage de 20 matelots, de nationalités diverses, en état d'arrestation.

Les autorités iraniennes ont prétendu que le pétrolier, qui transporte 7 200 tonnes d’éthanol, a été saisi pour infraction aux lois sur l’environnement maritime, selon le propriétaire du navire qui nie toutes ces allégations.

Les observateurs soupçonnent que le navire a été pris en otage dans le cadre d'une dispute avec Séoul au sujet de 7 milliards de dollars de revenus en recettes de pétrole, gelées dans les banques sud-coréennes en vertu des sanctions américaines imposées à l'Iran par l'administration Trump.

Bien que le MT Hankuk Chemi soit le premier grand navire saisi par l'Iran depuis plus d'un an, des incidents de ce genre sont devenus trop courants dans le détroit d'Ormuz ainsi que sur les voies maritimes à proximité.

Plusieurs navires ont été arraisonnés ou mystérieusement attaqués depuis que le président Donald Trump a intensifié sa campagne de «pression maximale», l'Iran étant désigné comme le coupable probable.

La marine du CGRI a longtemps utilisé sa flotte de hors-bords pour harceler les navires commerciaux et militaires de la région, saisissant au moins six navires en 2019, soi-disant pour contrebande de carburant. L'Iran a également menacé à plusieurs reprises de bloquer le détroit si elle est attaquée.

Plusieurs incidents ont pavé la voie aux tensions actuelles. En janvier 2016, le CGRI a saisi deux bateaux de commandement de la marine américaine après leur entrée dans les eaux territoriales iraniennes près de l'île iranienne de Farsi.

Après une vague d'appels téléphoniques entre le secrétaire d'État américain de l'époque, John Kerry, et le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, les marins ont été libérés sains et saufs quinze heures plus tard.

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L'ambassadeur d'Iran en Corée du Sud, Saeed Badamchi Shabestari, arrive au ministère des Affaires étrangères à Séoul le 5 janvier 2021, convoqué au sujet de l’affaire du pétrolier sud-coréen saisi par l'Iran (Photo, AFP/ YONHAP).

En mars 2007, le CGRI a arrêté 15 membres de la marine britannique du HMS Cornwall qui fouillaient un navire marchand au large de la côte irano-irakienne. Ils ont été libérés 13 jours plus tard.

Un incident similaire s'est produit en 2004 lorsque six Royal Marines et deux marins de la Royal Navy ont été capturés par le CGRI à l’intérieur du canal de Chatt al-Arab. Ils ont été libérés trois jours plus tard.

La milice houthie au Yémen, soutenue par l'Iran, a lancé des attaques répétées contre des ports et des navires ces dernières années, plaçant régulièrement des mines marines dans le sud de la mer Rouge et dans le détroit de Bab Al-Mandab sur la voie de navigation commerciale.

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Cette image de vidéosurveillance fournie par la société sud-coréenne Taikun Shipping Co. montre le moment où un pétrolier sud-coréen a été capturé par un hors-bord armé des gardiens de la révolution iraniens, à droite, dans les eaux du golfe et du détroit d'Ormuz le lundi 4 janvier 2021. (Photo, AFP/Archives)

La milice a rejeté à plusieurs reprises les demandes de l'ONU d’autoriser une équipe d'inspection à avoir accès au FSO Safer, un pétrolier de 45 ans abandonné au large du port de Hodeidah, pour effectuer des réparations urgentes. Le 15 juillet 2020, lors d'une session extraordinaire, l'ONU a fait part de ses craintes d’une «catastrophe» si le navire, qui contient 1,1 million de barils de pétrole brut à bord, se désintègre dans la mer Rouge.

En mai 2019, Washington a déployé le porte-avions USS Abraham Lincoln et quatre bombardiers B-52 au Moyen-Orient, invoquant des menaces iraniennes non spécifiées. Quelques jours plus tard, le 12 mai, quatre navires commerciaux, dont deux pétroliers saoudiens d’Aramco, sont endommagés près du port de Fujairah dans le golfe d'Oman. Un «acte de sabotage», d’après les Émirats arabes unis.

Le 13 juin, les pétroliers Front Altair et Kokuka Courageous sont secoués par des explosions, que l’on estime causées par des mines ventouses ou des projectiles. Quelques jours plus tard, le 20 juin, l'Iran abat un drone de surveillance américain RQ-4A survolant le détroit d'Ormuz, ce qui ajoute aux tensions.

À l'époque, le président américain Donald Trump avait déclaré que les bateaux iraniens qui attaquent la marine américaine se verraient «mitraillés jusqu’à ce qu’ils quittent les eaux».

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QUELQUES CHIFFRES

Piraterie iranienne

* 20 marins civils à bord du Hankuk Chemi battant pavillon sud-coréen arrêtés par le CGRI.

* 7 milliards de dollars - Montant réclamé par l'Iran et gelé dans une banque sud-coréenne.

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Le mois suivant, le CGRI a retenu pendant deux mois le pétrolier battant pavillon britannique Stena Impero pour avoir supposément percuté un bateau de pêche. Cette décision est largement considérée comme un acte de représailles, après que les Royal Marines britanniques aient arrêté un pétrolier iranien, le Grace 1, dans le détroit de Gibraltar, soupçonné d'avoir violé les sanctions de l'UE contre la Syrie.

À la suite de l'incident, le Commandement central américain a lancé l'opération Sentinelle, invitant les pays à coordonner la surveillance maritime et à fournir des escortes à leurs navires commerciaux battant pavillon dans le golfe, le détroit d'Ormuz, le détroit de Bab el-Mandeb ainsi que le golfe d'Oman.

Mais les puissances européennes ont fait part de leur préoccupation quant à la possibilité d'être entraînés dans une guerre avec l'Iran. Les États-Unis ont alors rebaptisé l'opération «Restauration de la sécurité maritime internationale» en septembre 2019, basée à Bahreïn.

Les yeux du monde sont une fois de plus tournés vers l’Iran qui utilise la saisie du Hankuk Chemi pour obtenir des concessions de la Corée du Sud. Séoul a confirmé qu'elle était en pourparlers avec Téhéran et Washington dans le but d’utiliser l'argent iranien gelé pour acheter des vaccins contre le coronavirus pour le pays.

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Cette photo non datée prise dans un lieu inconnu et publiée le 5 janvier 2021 par l'agence de presse Yonhap à Séoul montre le destroyer de la marine sud-coréenne ROKS Choi Young. La Corée du Sud enverra une délégation officielle en Iran «le plus tôt possible» afin de négocier la libération du pétrolier saisi et de son équipage, a annoncé le ministère des Affaires étrangères de Séoul le 5 janvier (Photo, AFP/Archives).

Parallèlement, le ministère des Affaires étrangères de la Corée du Sud a annoncé une action en justice pour exiger la libération du navire. Le ministère de la Défense a de plus déployé son unité antipiraterie Cheonghae, forte de 300 hommes, dans le détroit d'Ormuz, à bord du destroyer Choi Young, dans l’intention d’«assurer la sécurité» des ressortissants sud-coréens.

Shin Beom-chul, chercheur en chef à l'Institut de recherche coréen pour l'économie et la société, a déclaré à Arab News que la décision iranienne est une tentative désespérée d'obtenir la reconnaissance de la nouvelle administration Biden aux États-Unis, qui doivent adopter une position relativement plus indulgente vis -a-vis-à-vis de l'Iran.

«Téhéran envoie un message clair selon lequel elle peut à tout moment intensifier l'agression dans la région, surtout que les sanctions financières de l'administration Trump ne se résument pas à l'argent gelé en Corée du Sud», a affirmé Shin.

L'Iran subit les conséquences des sanctions réintroduites après le retrait de l'administration Trump du Plan d'action global conjoint, mieux connu sous le nom de l’accord nucléaire iranien, en mai 2018. Les problèmes économiques de l'Iran sont aussi aggravés par la pandémie du coronavirus, et qui a frappé de plein fouet la région.

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Cette photo fournie par le site officiel du Corps des gardiens de la révolution iranienne (CGRI) via SEPAH News le 19 novembre 2020, montre un drone militaire stationné sur un navire de guerre qui porte le nom du commandant naval Abdollah Roudaki, tué pendant qu’il naviguait dans les eaux du golfe lors de l’inauguration du bateau. (Photo, AFP/Archives)

Les puissances européennes, quant à elles, s'efforcent de sauver l’entente, tout comme l'Iran qui a annoncé lundi avoir augmenté son enrichissement d'uranium à 20% de pureté, bien au-delà des limites fixées dans les clauses.

Les violations consécutives de l'accord nucléaire par Téhéran sont largement interprétées comme un moyen de faire pression sur les signataires européens pour qu'ils allègent les sanctions, une mesure que Washington qualifie de «chantage nucléaire».

Téhéran est, après tout, encore sous le choc de l’élimination de Qassem Soleimani, le commandant de la Force al-Qods du CGRI. Il a été tué par une frappe de drone américain près de l’aéroport de Bagdad il y a un an.

Aux prises avec les sanctions et la Covid-19, blessé par des revers stratégiques, l'Iran a semblé freiner ses activités navales illégales en 2020, mais le CGRI veut de nouveau s'imposer dans les derniers jours de l'administration Trump.

Avec si peu de signes encourageants dans le Golfe, le Hankuk Chemi ne sera peut-être pas le dernier navire commercial ciblé par l'Iran en 2021.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Soudan: craintes de la poursuite des exactions à El-Facher

Des enfants et des familles déplacés d'El-Fasher dans un camp où ils se sont réfugiés pour échapper aux combats entre les forces gouvernementales et le RSF, à Tawila, dans la région du Darfour. (UNICEF via AP)
Des enfants et des familles déplacés d'El-Fasher dans un camp où ils se sont réfugiés pour échapper aux combats entre les forces gouvernementales et le RSF, à Tawila, dans la région du Darfour. (UNICEF via AP)
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  • Des massacres se poursuivent à El-Facher, dernière grande ville du Darfour tombée aux mains des Forces de soutien rapides (FSR) après 18 mois de siège
  • La situation est décrite comme « apocalyptique » par les diplomaties allemande et britannique, tandis que l’ONU réclame des enquêtes rapides sur les atrocités et que plus de 65 000 civils ont fui la ville, désormais en ruines

Port-Soudan: De nouvelles images satellites et l'ONG Médecins sans frontières (MSF) suggèrent samedi la poursuite des massacres dans la ville soudanaise d'El-Facher, près d'une semaine après sa prise par les paramilitaires.

Alors que les informations sur des violences contre les civils se multiplient, les chefs de la diplomatie allemande et britannique ont alerté sur une situation "absolument apocalyptique" et "véritablement terrifiante" sur le terrain.

Après 18 mois de siège, les Forces de soutien rapides (FSR, paramilitaires) de Mohamed Daglo ont pris dimanche El-Facher, dernière grande ville du Darfour (ouest) qui échappait encore à leur contrôle dans leur guerre contre l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane.

Selon le Laboratoire de recherche humanitaire de l'université de Yale, qui analyse des vidéos et des images satellites, les dernières images datant de vendredi ne "montrent aucun mouvement à grande échelle" à El-Facher, ce qui suggère que la majorité de sa population est "morte, capturée ou cachée".

Le laboratoire a identifié au moins 31 groupes d'objets correspondant à des corps humains entre lundi et vendredi, dans différents quartiers, sur des sites universitaires et des sites militaires. "Les indices montrant que les massacres se poursuivent sont clairement visibles", conclut-il.

- "Tuées, retenues, pourchassées" -

MSF a lui aussi dit craindre samedi qu'un "grand nombre de personnes" y soient toujours "en grave danger de mort" et que les civils soient empêchés par les FSR et leurs alliés "d'atteindre des zones plus sûres" comme Tawila.

Des milliers de personnes ont déjà fui El-Facher pour cette ville située à environ 70 km à l'ouest, et où les équipes de MSF se sont préparées à faire face à un afflux massif de déplacés et de blessés.

Des survivants ont raconté à l'ONG que les personnes ont été séparées selon leur sexe, âge ou identité ethnique présumée, et que beaucoup sont toujours détenues contre rançon. Un survivant a rapporté des "scènes horribles" où des combattants écrasaient des prisonniers avec leurs véhicules.

"Le nombre de personnes arrivées à Tawila est très faible (...) Où sont toutes les personnes manquantes, qui ont déjà survécu à des mois de famine et de violence à El-Facher?" s'interroge Michel-Olivier Lacharité, responsable des opérations d'urgence chez MSF. "D'après ce que nous disent les patients, la réponse la plus probable, bien qu'effrayante, est qu'elles sont tuées, retenues et pourchassées lorsqu'elles tentent de fuir", relate-t-il.

Au total, plus de 65.000 civils ont fui El-Facher, où des dizaines de milliers de personnes sont encore piégées, selon l'ONU. Avant l'assaut final des paramilitaires, la ville comptait environ 260.000 habitants.

- "Apocalyptique" -

Depuis dimanche, plusieurs vidéos sur les réseaux sociaux montrent des hommes en uniforme des FSR procédant à des exécutions sommaires à El-Facher, les paramilitaires affirmant que plusieurs de ces enregistrements ont été "fabriqués" par des sites liés à l'armée.

Les paramilitaires ont affirmé jeudi avoir arrêté plusieurs de leurs combattants soupçonnés d'exactions lors de la prise d'El-Facher, l'ONU réclamant vendredi des enquêtes "rapides et transparentes" après des "témoignages effroyables" d'atrocités dans cette localité.

S'exprimant en marge d'une conférence à Bahreïn, le ministre allemand des Affaires étrangères, Johann Wadephul, a décrit samedi la situation à El-Facher comme "absolument apocalyptique", évoquant comme l'ONU la "pire crise humanitaire du monde". "Les FSR se sont publiquement engagés à protéger les civils et devront rendre compte de leurs actions", a-t-il ajouté.

"Les informations qui nous parviennent du Darfour ces derniers jours sont véritablement terrifiantes", a déclaré son homologue britannique Yvette Cooper, évoquant les "atrocités commises, exécutions de masse, famine et le viol comme arme de guerre".

Le Soudan est déchiré depuis avril 2023 par une guerre opposant l'armée, qui contrôle l'est et le nord du pays, et les FSR, désormais maîtres de l'ensemble du Darfour, une région vaste comme la France métropolitaine.

Les pourparlers en vue d'une trêve, menés depuis plusieurs mois par un groupe réunissant les Etats-Unis, l'Egypte, les Emirats arabes unis et l'Arabie saoudite, sont dans l'impasse, selon un responsable proche des négociations.

Les FSR ont reçu armes et drones des Emirats arabes unis, selon des rapports de l'ONU, tandis que l'armée bénéficie de l'appui de l'Egypte, de l'Arabie saoudite, de l'Iran et de la Turquie, selon des observateurs. Tous nient toute implication.


Le président libanais accuse Israël de répondre à son offre de négociations en intensifiant ses attaques

Le président libanais Joseph Aoun a accusé vendredi Israël de répondre à son offre de négociation en intensifiant ses frappes aériennes, dont la dernière a tué un homme à moto dans le sud du Liban. (Reuters/File)
Le président libanais Joseph Aoun a accusé vendredi Israël de répondre à son offre de négociation en intensifiant ses frappes aériennes, dont la dernière a tué un homme à moto dans le sud du Liban. (Reuters/File)
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  • Le président libanais Joseph Aoun accuse Israël d’avoir répondu à son offre de négociations par une intensification des frappes, qui ont tué deux personnes dans le sud du Liban
  • En visite à Beyrouth, le ministre allemand Johann Wadephul appelle à un retrait israélien du sud du Liban et à un désarmement du Hezbollah, condition jugée essentielle pour la reprise du dialogue

BEYROUTH: Le président libanais, Joseph Aoun, a accusé Israël de répondre à l'offre de négociations du Liban par une intensification de ses frappes, les dernières ayant tué vendredi deux hommes dans le sud du pays selon Beyrouth.

"Le Liban est prêt à des négociations pour mettre fin à l'occupation israélienne, mais toute négociation (...) a besoin d'une volonté réciproque, ce qui n'est pas le cas", a affirmé M. Aoun à l'issue d'un entretien avec le ministre allemand des Affaires étrangères, Johann Wadephul.

Le chef de l'Etat s'était déjà prononcé le 13 octobre pour des négociations entre les deux pays voisins, toujours formellement en état de guerre, et qui ont émergé en novembre dernier d'un an de conflit meurtrier entre Israël et le Hezbollah libanais.

Israël "répond à cette option en menant davantage d'attaques contre le Liban (...) et en intensifiant la tension", a déploré M. Aoun

Selon le ministère de la Santé libanais, deux personnes ont été tuées vendredi lors de deux frappes israéliennes dans le sud du pays.

L'Agence nationale d'information libanaise (Ani, officielle) a indiqué qu'un drone avait notamment visé un homme à moto dans le village de Kounine.

L'armée israélienne a affirmé avoir tué un "responsable de la maintenance du Hezbollah", qui oeuvrait selon elle à rétablir des infrastructures du mouvement pro-iranien.

La veille, une unité israélienne s'était introduite dans le village frontalier de Blida, où les soldats ont tué un employé municipal.

M. Aoun a demandé à l'armée de "faire face" à toute nouvelle incursion israélienne en territoire libanais.

- "Condition sine qua non" -

Malgré le cessez-le-feu ayant mis fin en novembre 2024 à la guerre entre le Hezbollah et Israël, ce dernier continue de mener des frappes régulières au Liban disant viser des cibles du mouvement chiite, et a intensifié ses raids ces derniers jours.

L'armée israélienne se maintient aussi dans cinq positions dans le sud du Liban.

Selon un bilan de l'AFP basé sur des données du ministère de la Santé, au moins 25 personnes, dont un Syrien, ont été tuées en octobre.

L'ONU avait indiqué mardi que 111 civils avaient été tués au Liban par les forces israéliennes depuis la fin de la guerre.

Le chef de la diplomatie allemande a apporté son soutien au président libanais, affirmant qu'il exhorterait son homologue israélien, Gideon Saar, à retirer l'armée israélienne du sud du Liban.

"Il doit y avoir un retrait des troupes israéliennes. Je comprends qu'Israël ait besoin de sécurité (...) Mais nous avons maintenant besoin d'un processus de confiance mutuelle. Et je m'engage à ce que les deux parties se parlent", a dit le ministre allemand.

Il a également "encouragé le gouvernement libanais à veiller à ce qu'un processus crédible, compréhensible et rapide de désarmement du Hezbollah soit mis en place", une "tâche colossale" mais, a-t-il estimé, "la condition sine qua non" pour régler les relations avec Israël.

Le Hezbollah est sorti très affaibli du conflit et les Etats-Unis exercent une intense pression sur le gouvernement libanais pour que le mouvement chiite livre ses armes à l'armée nationale, ce qu'il refuse jusqu'à présent.


Israël a rendu à Gaza 30 corps de Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages 

Israël a rendu vendredi à l'hôpital Nasser les corps de 30 Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages israéliens restituées la veille par le mouvement islamiste palestinien Hamas, a indiqué à l'AFP cet établissement du sud de la bande de Gaza. (AFP)
Israël a rendu vendredi à l'hôpital Nasser les corps de 30 Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages israéliens restituées la veille par le mouvement islamiste palestinien Hamas, a indiqué à l'AFP cet établissement du sud de la bande de Gaza. (AFP)
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  • "Les corps de 30 prisonniers palestiniens ont été reçus de la partie israélienne dans le cadre de l'accord d'échange", a précisé l'hôpital, situé à Khan Younès
  • Au total, en échange de 15 dépouilles d'Israéliens, 225 dépouilles de Palestiniens ont été rendues conformément aux termes de l'accord de cessez-le feu en vigueur depuis le 10 octobre

GAZA: Israël a rendu vendredi à l'hôpital Nasser les corps de 30 Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages israéliens restituées la veille par le mouvement islamiste palestinien Hamas, a indiqué à l'AFP cet établissement du sud de la bande de Gaza.

"Les corps de 30 prisonniers palestiniens ont été reçus de la partie israélienne dans le cadre de l'accord d'échange", a précisé l'hôpital, situé à Khan Younès.

Les otages avaient été enlevés lors de l'attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, qui avait déclenché la guerre dans la bande Gaza.

Au total, en échange de 15 dépouilles d'Israéliens, 225 dépouilles de Palestiniens ont été rendues conformément aux termes de l'accord de cessez-le feu en vigueur depuis le 10 octobre.

Depuis cette date, le Hamas a également rendu deux dépouilles d'otages non-israéliens, un Thaïlandais et un Népalais.

Le mouvement islamiste a jusqu'à présent restitué les restes de 17 des 28 corps qui se trouvaient encore à Gaza et auraient dû être rendus au début de la trêve, assurant que localiser les autres dépouilles est "complexe" dans le territoire dévasté par deux ans de guerre.

Des équipes égyptiennes autorisées à entrer dans le territoire palestinien par Israël participent aux recherches avec des engins de chantiers.

Lundi soir, le Hamas avait rendu à Israël les restes d'un otage, identifié comme étant ceux d'Ofir Tzarfati, dont une partie de la dépouille avait déjà été récupérée en deux fois.

Les retards successifs dans la remise des corps des otages ont provoqué la colère du gouvernement israélien, qui a accusé le Hamas de violer l'accord de trêve. Et les familles des otages ont exigé des mesures plus sévères pour contraindre le groupe palestinien à se conformer à l'accord.

Dix corps d'otages du 7-Octobre seraient encore à Gaza, ainsi que celui d'un soldat mort durant une guerre en 2014. Tous sont israéliens sauf un Tanzanien et un Thaïlandais.

Par ailleurs, à deux reprises depuis le 10 octobre, Israël a mené des bombardements massifs sur Gaza en représailles à des tirs qui ont tué trois de ses soldats. Le 19 octobre, les bombardements israéliens avaient fait au moins 45 morts et mardi 104.

Le Hamas, qui dément avoir tiré sur les soldats israéliens, a accusé Israël de violer le cessez-le-feu.