Barnier nommé Premier ministre: Macron amorce un changement d’ère

Il a fallu soixante jours à Macron pour parvenir à faire bouger les lignes et désigner Barnier. Combien de temps faudra-t-il à ce dernier pour former son équipe gouvernementale et l’assortir d’un programme de travail? (AFP)
Il a fallu soixante jours à Macron pour parvenir à faire bouger les lignes et désigner Barnier. Combien de temps faudra-t-il à ce dernier pour former son équipe gouvernementale et l’assortir d’un programme de travail? (AFP)
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Publié le Lundi 09 septembre 2024

Barnier nommé Premier ministre: Macron amorce un changement d’ère

  • Cette nomination a permis à la France de sortir du brouillard politique dans lequel elle était plongée à la suite des élections législatives anticipées de juillet dernier
  • Le Premier ministre est libre et indépendant quand il s’agit du choix de son directeur de cabinet, libre de proposer des noms de ministres au président de la République, libre de dérouler sa propre méthode de gouvernement

PARIS: Au bout de sept années passées au pouvoir, le président français Emmanuel Macron semble déterminé à amorcer une rupture, censée être incarnée par la nomination de l’ancien ministre des Affaires étrangères et ancien commissaire européen Michel Barnier à la tête du nouveau gouvernement.

Cette nomination a non seulement permis à la France de sortir du brouillard politique dans lequel elle était plongée à la suite des élections législatives anticipées de juillet dernier, elle est également et surtout, selon l’entourage du président, l’expression d’un changement d’ère.

Depuis 2017, la France était dirigée par un président qui présidait et gouvernait à la fois. On lui reprochait de se mêler de tout et de vouloir toujours être à la manœuvre dans tous les domaines. 

Dorénavant, ce ne sera plus le cas, affirme l’entourage présidentiel. Barnier sera libre et indépendant dans la manière de conduire le gouvernement de la France. Ainsi, le président présidera et le gouvernement gouvernera.

Le nouveau Premier ministre issu du parti «Les Républicains» (la droite), a été désigné à la suite d’une longue série de discussions avec les forces politiques du pays, durant lesquelles les noms de plusieurs personnalités de gauche comme de droite ont été évoqués.

À l’issue de ces consultations, le profil de Barnier qui se définit comme un «gaulliste social» est apparu le mieux placé pour gouverner dans la conjoncture particulière où se trouve la France, au regard de ses capacités de stabilité et de rassemblement.

Il est surtout apparu comme étant le moins susceptible d’être censuré par le nouveau Parlement partagé entre trois blocs tous dépourvus de majorité absolue leur permettant de gouverner, d’où sa nomination par Macron qui l’a chargé de constituer un gouvernement de large rassemblement. 

Nouveau style

Sommé de s’expliquer sur le changement d’ère, l’entourage du président indique, qu’auparavant, il y avait des conseillers partagés entre le palais de l’Élysée et Matignon (siège du Premier ministre). Il n’y en aura désormais plus. L’Élysée, qui participait aux réunions interministérielles, n’y participera plus, ce qui donnera lieu à une nouvelle manière de travailler ensemble.

Cette nouvelle manière de travailler est décrite par cet entourage comme étant «une coopération exigeante» étant donné que la majorité sortante proche du président ne sera pas dans l’opposition. Il est donc inapproprié de parler de «cohabitation».

Plus encore, durant cette nouvelle phase, le Premier ministre est libre et indépendant quand il s’agit du choix de son directeur de cabinet, libre de proposer des noms de ministres au président de la République, libre de dérouler sa propre méthode de gouvernement.

Le président, affirme-t-on, n’a défini aucune ligne rouge au Premier ministre. Il est totalement libre et indépendant pour composer avec les autres forces politiques son programme de gouvernement.

Conscient de la difficulté de la tâche, l’entourage présidentiel affirme qu’on est au début d’un processus un peu long, qu’il faut avancer vers une coalition qui faisait défaut jusque-là, puisqu'il y a quelques semaines chacune des familles politiques restait dans son coin et personne ne voulait gouverner avec les autres.

C’est donc une phase expérimentale qui s’amorce avec tout ce que cela comporte comme interrogations, à commencer par quel Premier ministre Barnier sera-t-il? Et comment va-t-il gouverner avec Macron?

Ce dernier parviendra-t-il à le laisser décider en toute liberté? Sur quelle assise parlementaire va-t-il s’adosser puisque le poids de sa famille politique se limite à 47 sièges parlementaires?

Il est vrai qu’il est supposé compter sur le soutien du bloc «Ensemble pour la République» proche du président composé de 166 députés, mais même comme ça il reste loin de la majorité absolue qui est de 289 députés.

Il lui faudra donc ratisser large, voire débaucher des personnalités de la gauche, pour les inclure dans son gouvernement, mais le cas échéant comment faire travailler ensemble les membres d’une équipe issus de familles politiques qui s’opposent?

Autres questions, il a fallu soixante jours à Macron pour parvenir à faire bouger les lignes et désigner Barnier. Combien de temps faudra-t-il à ce dernier pour former son équipe gouvernementale et l’assortir d’un programme de travail?

Et si cette liberté et cette indépendance qui lui sont accordées par le président de la République ne visent qu’à lui faire endosser tout seul les difficultés et les échecs probables tant la France est fragilisée socialement, économiquement et surtout financièrement et sur le plan budgétaire?

Les dernières prévisions montrent que la France devra faire 110 milliards d’économie sur les trois prochaines années, alors que le déficit budgétaire risque d’atteindre 6,2 pour cent si rien n’est fait.

C’est à l’évidence ce qui lui fait dire que «la situation est très grave» et que la possibilité qui s’offre à lui est de «mieux gérer l’argent public» pour parvenir à «l’efficacité» car «sans faire des miracles, on peut faire des progrès». 


Vote de confiance: Bayrou juge la démarche du PS «pas très cohérente»

François Bayrou doit rencontrer les socialistes jeudi mais n'a fait aucune concession réelle à leur égard mercredi qui leur permettrait de revenir sur leur décision de toute façon "irrévocable" selon M. Faure. (AFP)
François Bayrou doit rencontrer les socialistes jeudi mais n'a fait aucune concession réelle à leur égard mercredi qui leur permettrait de revenir sur leur décision de toute façon "irrévocable" selon M. Faure. (AFP)
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  • "Est ce qu'il est logique, cohérent de dire 'je vais abattre votre gouvernement et après vous me soutiendrez?'", s'est interrogé le Premier ministre sur BFMTV/RMC
  • "Je ne suis pas sûr que ça marche parce qu'il y a un minimum de logique dans la vie. La démarche d'Olivier Faure, dont il ne fait pas mystère qu'il veut devenir Premier ministre, cette démarche me paraît risquée, pas très cohérente et pas très logique"

PARIS: François Bayrou a jugé mercredi "pas très cohérente" la démarche du Parti socialiste de "vouloir abattre son gouvernement" lors du vote de confiance du 8 septembre tout en réclamant de gouverner ensuite avec "le soutien du bloc central".

"Est ce qu'il est logique, cohérent de dire +je vais abattre votre gouvernement et après vous me soutiendrez?+", s'est interrogé le Premier ministre sur BFMTV/RMC.

"Je ne suis pas sûr que ça marche parce qu'il y a un minimum de logique dans la vie. La démarche d'Olivier Faure, dont il ne fait pas mystère qu'il veut devenir Premier ministre, cette démarche me paraît risquée, pas très cohérente et pas très logique", a jugé M. Bayrou qui restera, même s'il quitte Matignon, le leader d'un des partis du bloc central.

Le Premier secrétaire du PS Olivier Faure réclame qu'Emmanuel Macron nomme un Premier ministre de gauche et s'est dit prêt à ne pas recourir à l'article 49.3 de la Constitution pour gouverner, ce qui suppose de trouver des compromis avec le bloc central, faute de majorité pour la gauche à l'Assemblée.

François Bayrou doit rencontrer les socialistes jeudi mais n'a fait aucune concession réelle à leur égard mercredi qui leur permettrait de revenir sur leur décision de toute façon "irrévocable" selon M. Faure.

Au contraire, il a de nouveau balayé les propositions budgétaires du PS, qui veut diviser par deux l'année budgétaire l'effort voulu par le Premier ministre de 44 milliards d'euros.

"Ce n'est pas diviser l'effort, c'est décider qu'on va de nouveau emprunter 20 et quelques milliards supplémentaires", a-t-il jugé.

Même sur la mesure la plus impopulaire de son plan, la suppression de deux jours fériés, il s'est contenté de répéter sans conviction qu'il était "ouvert" à la réexaminer à condition que les 4 milliards que cette suppression devait rapporter soient compensés

"Je suis ouvert à ce que nous trouvions une organisation qui permette d'obtenir les mêmes buts sans avoir les inconvénients, à supposer que ces inconvénients soient majeurs", a-t-il répondu dans une périphrase.

En dépit de l'arithmétique qui lui annonce une chute certaine lundi, il a refusé de se montrer "défaitiste".

"Si vous êtes représentant du peuple, comme c'est la vocation d'un député, alors vous devez vous demander où est l'intérêt national", a-t-il lancé aux députés.

 


Journalistes tués en Syrie en 2012: Bachar al-Assad visé par un mandat d'arrêt français

Sept mandats d'arrêt ont été délivrés en août par la justice française à l'encontre d'anciens hauts dignitaires du régime syrien, dont l'ex-président Bachar al-Assad, pour le bombardement en 2012 d'un centre de presse à Homs, dans lequel ont péri les journalistes Marie Colvin et Rémi Ochlik. (AFP)
Sept mandats d'arrêt ont été délivrés en août par la justice française à l'encontre d'anciens hauts dignitaires du régime syrien, dont l'ex-président Bachar al-Assad, pour le bombardement en 2012 d'un centre de presse à Homs, dans lequel ont péri les journalistes Marie Colvin et Rémi Ochlik. (AFP)
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  • Le 22 février 2012, lorsque le bâtiment avait essuyé de premiers tirs, les journalistes qui s'y trouvaient avaient décidé de sortir
  • Les deux premiers à franchir la porte, la reporter américaine du Sunday Times Marie Colvin, 56 ans, et le photographe free-lance français Rémi Ochlik, 28 ans, avaient été tués par un obus de mortier

PARIS: Sept mandats d'arrêt ont été délivrés en août par la justice française à l'encontre d'anciens hauts dignitaires du régime syrien, dont l'ex-président Bachar al-Assad, pour le bombardement en 2012 d'un centre de presse à Homs, dans lequel ont péri les journalistes Marie Colvin et Rémi Ochlik.

Le 22 février 2012, lorsque le bâtiment avait essuyé de premiers tirs, les journalistes qui s'y trouvaient avaient décidé de sortir. Les deux premiers à franchir la porte, la reporter américaine du Sunday Times Marie Colvin, 56 ans, et le photographe free-lance français Rémi Ochlik, 28 ans, avaient été tués par un obus de mortier, tandis qu'à l'intérieur, la journaliste française Edith Bouvier, le photographe britannique Paul Conroy et leur traducteur syrien Wael al-Omar avaient été blessés.

"Après 13 ans d'enquête, les juges d'instruction du pôle crimes contre l'humanité du tribunal judiciaire de Paris ont délivré des mandats d'arrêt à l'encontre de sept anciens hauts gradés syriens pour complicité de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité", ont expliqué des avocats dans un communiqué transmis par la Fédération internationale des droits humains (FIDH).

Outre Bachar al-Assad, exilé en Russie, ces mandats signés par les juges le 19 août visent notamment Maher al-Assad, frère du président déchu et chef de facto de la 4e division blindée syrienne au moment des faits ; Ali Mamlouk, alors directeur des renseignements généraux syriens ; Ali Ayoub, chef d'état-major de l'armée syrienne au moment des faits, et Rafik Shahada, alors chef du comité militaire et sécuritaire de Homs.

"Réduire au silence" 

Ces mandats "constituent une étape décisive qui ouvre la voie à un procès en France", a souligné Clémence Bectarte, avocate de la FIDH et du Centre syrien pour les médias et la liberté d'expression (SCM).

Contactée par l'AFP, Edith Bouvier, qui avait été grièvement blessée à la jambe, a exprimé son bonheur: "C'était long, mais on y arrive enfin, c'est génial!". "C'est le premier pas vers la fin d'une ignoble impunité!", a réagi de son côté son avocate Me Marie Dosé.

Même s'il sera difficile d'obtenir l'arrestation de Bachar al-Assad, "le nom est posé", s'est félicitée Edith Bouvier. "Je ne voulais pas qu'on aille uniquement à la recherche des seconds couteaux. (Ces bombardements) n'étaient pas des décisions prises ville par ville, c'était vraiment une volonté de l'État de réduire les journalistes et les civils au silence", a ajouté la reporter.

Elle a tenu à saluer "le boulot incroyable, pour en arriver là", de documentation et d'enquête réalisé par le reporter syrien Samer Al Deyaei.

"L'étau se resserre" 

Reporters sans frontières s'est félicité de "cette avancée majeure (...) dans un dossier central pour la lutte contre l'impunité des crimes internationaux commis à l'encontre des journalistes". "L'étau se resserre jusque dans les plus hauts cercles du régime déchu de Bachar al-Assad, lequel avait érigé les journalistes indépendants et la presse libre en ennemis du pouvoir", a ajouté l'ONG.

Le centre de presse informel était abrité dans une maison du quartier de Bab Amr, un bastion de la rébellion de l'Armée syrienne libre (ASL).

A Paris, le parquet avait ouvert dès mars 2012 une enquête pour les victimes françaises pour meurtre et tentative de meurtre. En octobre 2014, l'enquête a été élargie à des faits de crimes de guerre, et en décembre 2024, à des faits de crimes contre l'humanité, un développement inédit en ce qui concerne des victimes journalistes.

Dans un réquisitoire supplétif du 7 juillet, dont l'AFP avait eu connaissance, le parquet national antiterroriste, compétent en matière de crimes contre l'humanité, avait demandé aux juges d'instruction de localiser une vingtaine "d'agents du régime" syrien, ainsi que Bachar al-Assad, 59 ans.

"Cette avancée significative s'inscrit dans la lignée de l'arrêt de la Cour de cassation du 25 juillet" qui - dans le dossier des attaques chimiques menées en août 2013 en Syrie - "consacrait la possibilité de poursuivre tout ancien chef d'Etat étranger (...) en présence de crimes internationaux", se sont félicitées Mes Clémence Witt et Jeanne Sulzer, qui représentent Paul Conroy et Free syrian lawyers association (FSLA), l'ONG cofondée par Samer Al Deyaei, qui documente les crimes de l'ancien régime syrien.


Pas de "miracle" à Matignon: Le Pen et Bardella demandent une dissolution "ultra-rapide"

Le président du parti d'extrême droite Rassemblement national (RN), Jordan Bardella (G), et la présidente du groupe parlementaire du Rassemblement national, Marine Le Pen, arrivent à l'hôtel de Matignon à Paris, le 2 septembre 2025. (AFP)
Le président du parti d'extrême droite Rassemblement national (RN), Jordan Bardella (G), et la présidente du groupe parlementaire du Rassemblement national, Marine Le Pen, arrivent à l'hôtel de Matignon à Paris, le 2 septembre 2025. (AFP)
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  • Marine Le Pen et Jordan Bardella ont demandé mardi une "dissolution ultra-rapide" de l'Assemblée nationale après la chute probable du gouvernement de François Bayrou la semaine prochaine

PARIS: Marine Le Pen et Jordan Bardella ont demandé mardi une "dissolution ultra-rapide" de l'Assemblée nationale après la chute probable du gouvernement de François Bayrou la semaine prochaine, considérant que "le miracle n'a pas eu lieu" à l'issue de leur entretien avec le Premier ministre.

M. Bayrou a entamé lundi une série de consultations des forces politiques, à une semaine du vote de confiance qu'il sollicite de l'Assemblée nationale le 8 septembre autour de la question budgétaire et qui pourrait sceller le sort de son gouvernement.

"Nous appelons, Jordan et moi-même, à une dissolution ultra-rapide. Parce que la réalité, c'est qu'il faut que la nouvelle majorité issue de ces nouvelles élections puisse construire un budget", a affirmé la cheffe de file des députés du Rassemblement national, à l'issue d'un entretien d'environ une heure avec M. Bayrou.

"Plus tôt on retournera aux urnes, plus tôt la France aura un budget", a renchéri le président du parti Jordan Bardella, pour qui "le miracle n'a pas eu lieu" lors de cet entretien, qui "ne fera pas changer le Rassemblement national d'avis", à savoir voter contre la confiance au gouvernement lundi.

"Les portes n'étaient pas très ouvertes. Le Premier ministre a indiqué (...) qu'il était prêt peut-être un jour à regarder ce qu'il pouvait y avoir du côté de l'immigration. Mais je pense que le temps n'est plus à la discussion", a-t-il ajouté, fustigeant les "milliards (d'euros) qui partent en fumée dans une immigration qui est devenue une immigration de guichet social qui pèse sur les comptes de l'Etat".

"Je n'ai pas eu le sentiment que François Bayrou entrait dans une phase de négociation", a appuyé Mme Le Pen.

"La réponse est simple: nous n'avons pas confiance" et "le seul moyen pour un Premier ministre de pouvoir avoir une durée de vie un peu plus longue serait de rompre avec le macronisme", a-t-elle développé.