DeepSeek: les restrictions américaines derrière le succès de l'IA chinoise?

DeepSeek n'est pas la première entreprise chinoise contrainte d'innover de la sorte. Le géant technologique Huawei, fabricant notamment de smartphones et visé par des sanctions américaines, a par exemple réussi à réorienter ses activités. (AFP)
DeepSeek n'est pas la première entreprise chinoise contrainte d'innover de la sorte. Le géant technologique Huawei, fabricant notamment de smartphones et visé par des sanctions américaines, a par exemple réussi à réorienter ses activités. (AFP)
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Publié le Mercredi 29 janvier 2025

DeepSeek: les restrictions américaines derrière le succès de l'IA chinoise?

  • Une réussite obtenue malgré des restrictions des Etats-Unis, qui bloquent l'accès des entreprises chinoises aux puces les plus avancées, nécessaires au développement de modèles d'apprentissage massif pour l'IA
  • Le fondateur de DeepSeek, Liang Wenfeng, a reconnu que l'"embargo sur les puces haut de gamme" représentait un obstacle majeur

PEKIN: Les restrictions américaines sur les puces high-tech ont pu, sans le vouloir, propulser le succès du chatbot DeepSeek, ce qui inquiète les Etats-Unis sur leur capacité à contrer la Chine dans la course à l'intelligence artificielle (IA).

Conçu par une start-up de Hangzhou (est de la Chine), ce robot conversationnel a stupéfié les acteurs du secteur par sa capacité à égaler ses concurrents américains - à un coût apparemment très inférieur.

Une réussite obtenue malgré des restrictions des Etats-Unis, qui bloquent l'accès des entreprises chinoises aux puces les plus avancées, nécessaires au développement de modèles d'apprentissage massif pour l'IA.

Le fondateur de DeepSeek, Liang Wenfeng, a reconnu que l'"embargo sur les puces haut de gamme" représentait un obstacle majeur.

Ces restrictions ambitionnent de maintenir la domination technologique américaine, mais ont poussé DeepSeek à imaginer des solutions ingénieuses pour les contourner, soulignent des analystes.

La start-up dit avoir utilisé des puces H800, moins performantes mais autorisées pour l'exportation vers la Chine jusqu'à fin 2023.

"Les contraintes pesant sur la Chine en matière d'accès aux puces ont forcé l'équipe de DeepSeek à concevoir des modèles plus efficaces, toujours compétitifs mais à moindre coût d'entraînement", souligne Jeffrey Ding, de l'Université George Washington.

Les restrictions américains "ne parviennent pas à empêcher d'autres pays de concevoir des modèles de pointe" et "l'histoire a prouvé qu'il est impossible de mettre sous cloche" une technologie comme l'IA, estime-t-il.

DeepSeek n'est pas la première entreprise chinoise contrainte d'innover de la sorte. Le géant technologique Huawei, fabricant notamment de smartphones et visé par des sanctions américaines, a par exemple réussi à réorienter ses activités.

Effet de surprise 

Mais c'est la première fois qu'un tel vent de panique souffle dans la Silicon Valley et à Washington.

Investisseur réputé dans la tech, Marc Andreessen a décrit l'irruption de DeepSeek comme "le moment Spoutnik de l'IA", en référence au lancement en 1957 du premier satellite artificiel par Moscou, qui avait provoqué un choc en Occident.

Beaucoup jugeaient la suprématie américaine incontestable en matière d'IA, avec des géants comme OpenAI ou Meta (la société mère de Facebook).

Si la Chine ambitionne de devenir leader mondial de l'intelligence artificielle d'ici 2030, les réalisations des entreprises chinoises ne suscitaient jusqu'alors guère d'inquiétudes aux Etats-Unis.

Le mastodonte chinois Baidu, qui veut rivaliser avec ChatGPT, a déçu au moment de lancer son robot conversationnel Ernie Bot, confortant l'idée, répandue côté américain, selon laquelle la stricte réglementation chinoise étoufferait l'innovation.

Puis DeepSeek est arrivé.

"Cela remet en question le postulat, que beaucoup avaient, vis-à-vis de la puissance de calcul et du traitement des données nécessaires à l'innovation", estime Samm Sacks, membre du Paul Tsai China Center, un cercle de réflexion américain.

"La question, c'est peut-on avoir accès à une intelligence artificielle de pointe, à une fraction du coût et avec une fraction de la puissance de calcul qu'on pensait nécessaire?"

La stratégie américaine en matière d'IA consiste à "injecter de plus en plus de puissance de calcul et de performance afin d'obtenir des résultats de plus en plus performants", note M. Ding, de l'université George Washington.

"Peur" 

C'est l'idée directrice de "Stargate", un projet présenté par Donald Trump, qui réunit OpenAI et le géant japonais SoftBank et prévoit d'investir jusqu'à 500 milliards de dollars dans des infrastructures IA aux Etats-Unis.

Cependant, le succès du chatbot R1 de DeepSeek — dont les développeurs affirment qu'il a été conçu pour seulement 5,6 millions de dollars — suggère que l'innovation peut être bien moins coûteuse.

Certains experts restent prudents: l'ensemble des coûts engagés par la start-up sont peut-être plus importants qu'annoncé.

Donald Trump a toutefois décrit DeepSeek comme un "avertissement" pour les entreprises américaines.

L'onde de choc DeepSeek remet-elle en cause l'efficacité des restrictions américaines?

Non, estime Mark Kennedy, directeur de l'Institut Wahba pour la concurrence stratégique au Wilson Center, un centre de réflexion américain.

Le gouvernement américain pourrait dorénavant "étendre les restrictions sur les puces d'IA" et renforcer sa surveillance des technologies auxquelles les entreprises chinoises peuvent accéder, souligne-t-il.

"Etant donné les limites des mesures purement défensives, il pourrait aussi augmenter les investissements dans l'IA aux Etats-Unis, renforcer les alliances et affiner les politiques pour s'assurer de maintenir son leadership sans pousser davantage de pays vers l'écosystème chinois."

Côté américain, la "peur" de "prendre du retard par rapport à la Chine pourrait désormais catalyser cette dynamique", indique Rebecca Arcesati, analyste à l'institut Merics, un centre de réflexion dédié à la Chine.

 


Les Rencontres Économiques de l’IMA: la place des femmes dans l’économie à l’ère de l’IA

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  • Quatre tables rondes, réunissant le temps d’une journée des personnalités féminines éminentes du monde arabe et de la France, ont échangé sur la manière de mettre en lumière le rôle des femmes dans la transformation numérique
  • Parmi la trentaine de participantes figuraient notamment la ministre marocaine de la Transition numérique Amal El Fallah Seghrouchni, l’ancienne ministre française de la Culture Rima Abdul Malak, aujourd’hui à la tête d’un média francophone libanais

PARIS: Organisée par l’Institut du Monde Arabe à Paris autour du thème « Femmes, business et innovation », la 16ᵉ édition des Rencontres économiques du monde arabe a décortiqué tous les aspects de l’économie au féminin.

Quatre tables rondes, réunissant le temps d’une journée des personnalités féminines éminentes du monde arabe et de la France, ont échangé sur la manière de mettre en lumière le rôle des femmes dans la transformation numérique, l’entrepreneuriat et la création, ainsi que sur les moyens de favoriser des synergies franco-arabes.

Parmi la trentaine de participantes figuraient notamment la ministre marocaine de la Transition numérique Amal El Fallah Seghrouchni, l’ancienne ministre française de la Culture Rima Abdul Malak, aujourd’hui à la tête d’un média francophone libanais, des femmes d’affaires telles que Hajar El Haddaoui, directrice générale de Digital Cooperation Organization (Maroc–Arabie saoudite), ou encore Olfa Zorgati, membre du conseil d’administration d’Ubisoft, ainsi que des ambassadrices comme Delphine O, et Shayna Al Zuhairi, directrice générale du Iraq Business Women Council.

IA et leadership

Parmi les temps forts figuraient un fireside chat sur l’intelligence artificielle et le leadership, plusieurs tables rondes réunissant cheffes d’entreprise et responsables d’institutions, ainsi qu’une keynote consacrée à la transformation des médias.

Dans le fireside chat dédié à l’IA et au leadership, Amal El Fallah Seghrouchni et Anne Bouverot (envoyée spéciale pour l’IA en France) ont croisé leurs visions, soulignant l’importance d’une gouvernance responsable et partagée de l’IA entre l’Europe et le monde arabe, conciliant innovation et protection des droits.

Elles ont également mis en avant la place centrale des femmes et de l’éducation dans la formation, pour réduire la fracture numérique et encourager l’industrialisation de solutions locales.

La programmation, détaillée par l’IMA, a alterné débats sur l’intelligence artificielle et le leadership, sessions sur les industries culturelles et créatives (ICC), et interventions consacrées au financement et à la coopération institutionnelle.

Les intervenantes issues du monde de la tech et du secteur privé (start-up, entreprises, écosystèmes) ont discuté des opportunités de co-développement entre acteurs français et arabes, ainsi que du besoin d’écosystèmes favorables (financement, cadres réglementaires, formation) pour transformer le talent féminin en entreprises viables.

La transformation des médias à l’ère des transitions

Une autre table ronde, réunissant un panel mixte de diplomates et de femmes actives dans les secteurs des financements publics, du droit et de l’IA, a insisté sur la nécessité d’aligner les réponses aux défis climatiques, énergétiques et numériques à travers des partenariats bilatéraux et multilatéraux.

Rima Abdul Malak a prononcé une courte keynote sur la transformation des médias à l’ère des transitions, montrant comment innover avec l’IA tout en préservant la déontologie et la diversité culturelle.
Elle a également souligné le rôle des femmes dirigeantes dans la recomposition du paysage médiatique.

Les tables rondes de l’après-midi ont porté sur les industries culturelles et créatives, les synergies franco-arabes pour la création artistique, les modèles de financement (fondations, philanthropie, fonds publics) et la médiation culturelle à l’ère de l’IA.

Sur le fond, deux lignes directrices ont traversé les discussions. D’abord, l’idée que l’émancipation économique des femmes constitue un levier stratégique de développement. Les intervenantes, issues des secteurs public et privé, ont insisté sur la nécessité de traduire les discours en dispositifs concrets : accès au financement, incubateurs dédiés, formations techniques et réseaux de mentorat.

Ensuite, la nécessité d’une coopération pratique à travers des partenariats, des centres d’excellence et des mécanismes de financement conjoints, plutôt que de simples déclarations d’intention.

Tout au long de la journée, les intervenantes françaises et arabes ont appelé à bâtir des cadres éthiques communs et des programmes de formation destinés à réduire la fracture numérique.
L’enjeu n’est plus seulement technique, a-t-il été rappelé, mais également politique. Il concerne la régulation, la souveraineté technologique et la capacité des pays du Sud à développer des solutions adaptées à leurs usages.

La table ronde dédiée aux industries culturelles et créatives a insisté sur l’importance des modèles hybrides — mécénat, fonds d’impact, structures de coopération publique-privée — permettant de soutenir la création sans l’enfermer dans des logiques purement marchandes.

Les intervenantes issues du monde de l’art et des fondations ont partagé leurs retours d’expérience et proposé des pistes concrètes pour professionnaliser les filières tout en préservant la diversité culturelle.

Plusieurs participantes ont également souligné l’importance d’instruments financiers adaptés : garanties publiques, fonds de capital-risque dédiés aux entrepreneures et dispositifs de venture philanthropy pour accompagner les premières étapes des projets culturels et technologiques.

Ces rencontres confirment la maturation d’un agenda franco-arabe centré sur l’économie du savoir et la création, et réaffirment que la question du genre ne peut demeurer un simple enjeu symbolique, mais doit se traduire par une véritable architecture d’accompagnement (financement, formation, incubateurs, réglementation).

Pour que les promesses tiennent, les participantes ont appelé à une feuille de route opérationnelle, assortie de calendriers, de budgets et d’indicateurs, afin de transformer l’énergie du plaidoyer en actions mesurables.


Budget: un effort d'une trentaine de milliards d'euros, selon le ministre de l'Economie

Le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, observe pendant la réunion annuelle du Forum économique mondial (WEF) à Davos, le 22 janvier 2025. (AFP)
Le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, observe pendant la réunion annuelle du Forum économique mondial (WEF) à Davos, le 22 janvier 2025. (AFP)
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  • "Il y a une partie qui va se faire par des hausses de prélèvements obligatoires", à hauteur de 14 milliards d'euros, a-t-il détaillé
  • "Face à ça, il y a des économies de dépenses", a-t-il ajouté, citant le montant de 25 milliards d'euros

PARIS: L'effort budgétaire prévu par le gouvernement pour 2026 est d'une trentaine de milliards d'euros, dont 14 milliards d'euros de nouveaux prélèvements obligatoires, a indiqué mercredi le ministre de l'Economie Roland Lescure, soulignant que le projet de budget était ouvert à "négociation".

"C'est les ordres de grandeur", a indiqué Roland Lescure sur RTL, répondant à la question de savoir si l'effort serait de 30 ou 31 milliards d'euros.

"Il y a une partie qui va se faire par des hausses de prélèvements obligatoires", à hauteur de 14 milliards d'euros, a-t-il détaillé.

"Face à ça, il y a des économies de dépenses", a-t-il ajouté, citant le montant de 25 milliards d'euros. Ce chiffre est à comprendre hors hausse de la charge de la dette, qui devrait augmenter l'an prochain d'environ 8 milliards d'euros à plus de 60 milliards d'euros, deuxième poste budgétaire après l'éducation nationale.

Dans un avis publié mardi qui reprenait des chiffres du gouvernement, le HCFP avait indiqué que le projet de budget (PLF) prévoyait autour de 14 milliards d'euros de recettes fiscales supplémentaires et environ 17 milliards d'économies de dépenses.

L'objectif présenté dans le PLF est de ramener le déficit public de 5,4% du produit intérieur brut (PIB) cette année à 4,7% en 2026.

"Bien sûr que c'est l'objectif, parce que c'est une marche (...) qui permettra de poursuivre l’escalier jusqu’à la stabilisation de la dette publique en France", a déclaré Roland Lescure sur RTL.

"Je serai le garant du cadre du budget. Cela veut dire (qu') on doit respecter nos engagements européens", à savoir le retour du déficit public sous 3% du PIB en 2029, un niveau permettant de stabiliser la dette, a-t-il ajouté.

Le ministre a toutefois rappelé que le projet de budget était "une copie de départ" ouverte à "négociation" au Parlement.

"C'est la négociation qui permettra d'avoir le chiffre final" du déficit, a indiqué Roland Lescure. "Mais le compromis, ce n'est pas la compromission", a-t-il poursuivi, mettant en garde contre les tentations de "matraquage fiscal (qui) ne marche pas".

 


General Motors: charge de 1,6 milliard de dollars au 3T liée aux véhicules électriques

L'administration de Donald Trump a supprimé depuis son retour à la Maison Blanche en janvier toute une série d'aides destinées à promouvoir la transition énergétique, que ce soit l'achat de véhicules électriques ou l'installation de stations de recharge. (AFP)
L'administration de Donald Trump a supprimé depuis son retour à la Maison Blanche en janvier toute une série d'aides destinées à promouvoir la transition énergétique, que ce soit l'achat de véhicules électriques ou l'installation de stations de recharge. (AFP)
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  • L'administration de Donald Trump a supprimé depuis son retour à la Maison Blanche en janvier toute une série d'aides destinées à promouvoir la transition énergétique, que ce soit l'achat de véhicules électriques ou l'installation de stations de recharge
  • Dernier épisode en date: la suppression fin septembre d'un crédit d'impôt de 7.500 dollars pour l'achat d'un véhicule électrique. Dans les semaines qui ont précédé, cela a dopé les ventes des constructeurs

NEW YORK: Le constructeur automobile américain General Motors a annoncé mardi l'inscription d'une charge de 1,6 milliard de dollars dans ses comptes du troisième trimestre, qu'il doit présenter le 21 octobre, du fait d'un "réalignement" stratégique dans les véhicules électriques.

Il précise avoir pris cette décision "à la suite de récents changements de politiques de la part du gouvernement américain", et prévient que des charges supplémentaires pourraient être nécessaires dans les prochains mois.

L'administration de Donald Trump a supprimé depuis son retour à la Maison Blanche en janvier toute une série d'aides destinées à promouvoir la transition énergétique, que ce soit l'achat de véhicules électriques ou l'installation de stations de recharge.

Dernier épisode en date: la suppression fin septembre d'un crédit d'impôt de 7.500 dollars pour l'achat d'un véhicule électrique. Dans les semaines qui ont précédé, cela a dopé les ventes des constructeurs mais les experts s'attendent à un creux dans les prochains mois.

Une situation qui s'inscrit dans le sillage d'une prise de conscience dès 2024 que les consommateurs américains n'étaient pas aussi friands de ce type de motorisation que ce qui avait été anticipé.

Les constructeurs avaient par conséquent déjà réduit la voilure, repoussé voire abandonné des projets d'expansion ou de construction d'usines.

GM "a procédé à des investissement importants et à des engagements contractuels dans le développement des véhicules électriques pour aider la gamme du groupe à se conformer aux régulations qui devaient être de plus en plus drastiques en terme d'émissions (de gaz à effet de serre) et de consommation de carburant", explique le groupe mardi.

Mais, du fait du rétropédalage politique, "nous nous attendons à ce que le taux d'adoption des véhicules électriques ralentisse", a-t-il poursuivi, précisant avoir dès lors "réévalué" ses capacités et ses infrastructures de production.

Résultat: le 7 octobre, le comité d'audit de son conseil d'administration a approuvé une charge de 1,6 milliard concernant GM North America (GMNA) au troisième trimestre en fonction de ce "réalignement stratégique".

Elle est constituée d'une charge notamment pour dépréciation de 1,2 milliard et de 400 millions au titre de frais d'annulation et d'accords commerciaux.

General Motors prévient également que son processus d'évaluation se poursuit, en particulier concernant sa production de batteries, et qu'il est "raisonnablement possible" que des charges additionnelles soient nécessaires à l'avenir.

Dans les échanges électroniques avant l'ouverture de la Bourse de New York, l'action GM reculait de 2,28%.