PARIS: Une nouvelle étape du marathon budgétaire s'ouvre mardi à l'Assemblée: avec la suspension de la réforme des retraites et d'autres mesures explosives, le budget de la Sécurité sociale arrive dans l'hémicycle, où son adoption la semaine prochaine est on ne peut plus incertaine.
Les députés vont examiner le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), sans avoir réussi à terminer l'examen du budget de l'Etat qui va reprendre mi-novembre.
Franchises médicales, durée des arrêts de travail, cotisation sur les tickets-restaurants... Les discussions sur le PLFSS s'annoncent inflammables, la gauche dénonçant "un musée des horreurs".
Le gouvernement a prévu des économies massives pour réduire le déficit de la Sécu à 17,5 milliards en 2026, contre 23 cette année.
Mais le texte sera sans aucun doute remanié. Le Premier ministre Sébastien Lecornu a lui-même déclaré vendredi être prêt à renoncer au gel des pensions de retraite et minimas sociaux, l'une des mesures les plus contestées.
Une nouvelle concession, après avoir fait inscrire la suspension de la réforme des retraites dans le texte, l'une des conditions du Parti socialiste pour ne pas censurer.
"En réalité c'est sur le PLFSS que le sort du gouvernement se joue dans les jours qui viennent", a déclaré à l'AFP le socialiste Jérôme Guedj.
Les débats débuteront vers 17H00 mardi et doivent durer jusqu'à dimanche soir.
La suspension de la réforme des retraites ne sera discutée qu'en fin d'examen - sauf si l'exécutif décide d'avancer cet article en priorité.
En commission, elle a été adoptée grâce aux voix du RN et des socialistes, et des abstentions, dont celle des députés Renaissance. Les Républicains et Horizons veulent au contraire supprimer l'article.
Mais des incertitudes planent sur l'épineuse question de son financement. Elle coûterait au moins 100 millions d'euros en 2026 et 1,4 milliard en 2027.
La commission a largement rejeté les propositions du gouvernement: une surtaxe sur les complémentaires santé dont beaucoup craignent qu'elle se répercute sur les assurés, et une sous-indexation des pensions de retraite par rapport à l'inflation.
- "Fortes incertitudes" -
Le PS propose une hausse de la CSG sur les revenus du capital. Telle qu'adoptée en commission, elle ferait entrer 2,7 milliards d'euros. Un mécanisme auquel Sébastien Lecornu a semblé ouvert.
"Je ne suis pas sûr qu'il y ait une majorité en séance là-dessus", relève à l'AFP le rapporteur général du texte, Thibault Bazin (LR), pointant que la mesure concerne aussi les plans d'épargne logement (PEL).
Elle représentera "quelques euros" sur ce type de placement, balaye M. Guedj.
Autre point chaud: le doublement des franchises médicales (reste à charge des patients sur des consultations et médicaments), qui rapporterait 2,3 milliards d'euros.
La mesure ne figure pas dans le texte et peut être prise par décret mais elle est vivement combattue à droite comme à gauche, alors qu'elle est l'une des clés prévues pour la réduction du déficit de la Sécu.
Selon M. Bazin, la copie sortie de commission équivaudrait à un déficit "entre 22 et 25 milliards", loin de l'objectif.
La Cour des comptes s'est inquiétée lundi que le redressement proposé par le gouvernement soit "exposé à de fortes incertitudes".
En fonction du débat parlementaire, "on pourrait même assister à un maintien, voire une augmentation du déficit", a alerté son président, Pierre Moscovici.
Il faut que le gouvernement arrive avec "de nouvelles propositions" pour "montrer que la maîtrise du déficit reste la priorité", souligne à l'AFP le président de la commission des Affaires sociales, Frédéric Valletoux (Horizons).
- Vote le 12 novembre -
Les députés devront en tout cas se hâter pour finir dimanche: près de 2.500 amendements ont été déposés (une partie sera irrecevable).
Un vote solennel est ensuite prévu le 12 novembre. Même si l'examen n'est pas terminé ce jour-là, le texte sera quoiqu'il arrive transmis au Sénat en raison des délais constitutionnels.
Si le vote a bien lieu, son adoption dépendra en grande partie des abstentions.
Celle des écologistes et des communistes, qui réclament notamment que les carrières longues soient comprises dans la suspension de la réforme des retraites via un amendement gouvernemental.
Celle du PS, qui a pour l'instant exclu de voter pour.
Et celle du RN, Marine Le Pen n'ayant pas exclu la possibilité d'une abstention - tout comme celle d'un vote contre.

                            
                            
                            
                            





