Pression inédite des ONG pour mettre fin aux "contrôles au faciès"

Des CRS surveillent une manifestation organisée par les enseignants et les étudiants pour protester contre la gestion par l'Etat de la pandémie. (AFP).
Des CRS surveillent une manifestation organisée par les enseignants et les étudiants pour protester contre la gestion par l'Etat de la pandémie. (AFP).
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Publié le Jeudi 28 janvier 2021

Pression inédite des ONG pour mettre fin aux "contrôles au faciès"

  • Les contrôles au faciès qui sont le quotidien des personnes dites « basanées », c’est-à-dire des personnes noires et arabes
  • Pour mettre fin à ces « contrôles d’identité discriminatoires », six associations ont adressé une mise en demeure notifiant l’Etat français de la nécessité de mettre fin à ces pratiques courantes

PARIS: La démarche est inédite et vise une pratique connue de tous, mais occultée par le déni officiel : les contrôles au faciès qui sont le quotidien des personnes dites « basanées », c’est-à-dire des personnes noires et arabes.

Pour mettre fin à ces « contrôles d’identité discriminatoires », six associations ont adressé une mise en demeure notifiant l’Etat français de la nécessité de mettre fin à ces pratiques courantes, dans un délai de quatre mois.

Au terme de ce délai, les associations dont Amnesty International, affirment vouloir saisir la justice, si aucune mesure n’est prise pour faire cesser ces pratiques reconnues par le président Emmanuel Macron, en décembre dernier.

Cette action intervient après plusieurs affaires de violences policières sur fond de « racisme », dont la plus médiatisée a été celle du passage à tabac du producteur de musique noir Michel Zecler, à Paris en novembre dernier.

Composée d’environ 350 pages, la mise en demeure constitue une compilation de témoignages de victimes, recueillis dans neuf villes françaises dont Paris. Elle comprend aussi des témoignages de membres des forces de l’ordre qui expliquent les contrôles au faciès « par la commodité, quand il faut faire du chiffre ».

Elle vise, selon l’avocat qui l’a élaborée, Antoine Caen, nommément le Premier ministre Jean Castex, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin et le Garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti.

Dans un communiqué commun, les six associations indiquent que « le contrôle d’identité au faciès est un contrôle opéré en raison des caractéristiques physiques de la personne, liées à son origine, qu’elle soit réelle ou supposée ».

De tels contrôles reposent donc, selon les associations, sur « un motif illicite » et par conséquent « discriminatoire ».

Les associations réclament une modification du code de procédure pénale pour « interdire explicitement la discrimination dans les contrôles d’identité » ainsi que la création d’un mécanisme « de plainte efficace et indépendant » et aussi la mise à disposition de toute personne contrôlée « d’une preuve de contrôle ».

Composée d’environ 350 pages, la mise en demeure constitue une compilation de témoignages de victimes, recueillis dans neuf villes françaises dont Paris. Elle comprend aussi des témoignages de membres des forces de l’ordre qui expliquent les contrôles au faciès « par la commodité, quand il faut faire du chiffre ».

Les actions de groupe ont été introduites récemment en France, précisément en 2016, dans le cadre de la loi de la modernisation de la justice française.

Depuis, des actions de groupe ont visé des entreprises privées pour des faits de racisme, alors que l’action des six associations est la première à viser l’Etat, ce qui a amené certains à la qualifier d’historique.

L’avantage de ce genre d’action inspirée des « class actions » répandues aux Etats-Unis, est qu’elle permet un traitement homogène face à un préjudice qui touche de nombreuses personnes.

Elle permet également aux parties concernées d’entamer des discussions dans l’intention d’aboutir à un règlement à l’amiable.

Le but essentiel est donc de mettre en cause une pratique publique connue, mais jamais proscrite depuis de longues années.

Déjà lors de sa campagne électorale, l’ancien président français François Hollande avait abordé ce sujet en s’engageant à ce qu’un récépissé soit fourni par la police à toute personne contrôlée, dans le but d’éviter les répétitions arbitraires.

L’avantage de ce genre d’action inspirée des « class actions » répandues aux Etats-Unis, est qu’elle permet un traitement homogène face à un préjudice qui touche de nombreuses personnes.

Face aux réticences exprimées au sujet de ce récépissé, l’ancien président avait abandonné cet engagement et les contrôles au faciès se sont poursuivis, provoquant de nombreuses crispations et parfois de nombreux affrontements entre des jeunes se sentant stigmatisés et les forces de l’ordre.

 

EN BREF

Une étude menée en 2009 à Paris par Open Society Justice Initiative et le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) montrait qu'en France, les personnes perçues comme "noires" et "arabes" sont contrôlées respectivement six et huit fois plus que celles perçues comme "blanches".

Le président Macron a jeté un pavé dans la mare en affirmant en décembre dernier - dans un entretien accordé à Brut - qu’on a plus de chance d’être contrôlé si on est noir ou arabe, provoquant ainsi la colère des syndicats de police. Ces derniers avaient annoncé que la police allait arrêter les contrôles en protestation contre les propos présidentiels.

Ces mêmes propos n’ont pas recueilli l’adhésion des milieux visés par les contrôles au faciès car le président s’est contenté d’annoncer la mise en place d’une plateforme pour dénoncer ces discriminations.

Les syndicats de police ont toujours rejeté les accusations de racisme les visant, alors que certains déplore l’incapacité du gouvernement à prendre ce dossier à bras le corps.

Par conséquent, le délai de quatre mois notifié dans la mise en demeure des six associations risque d’être marqué par des épreuves de force peu banales.

Il convient de préciser que la mise en demeure vise précisément le Premier ministre Jean Castex, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin et le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti.

Si, à l'issue de la mise en demeure, les associations estiment ne pas avoir obtenu satisfaction, elles "peuvent saisir la justice et les juges peuvent ordonner au gouvernement des mesures pratiques pour que cesse cette discrimination", développe l'avocat Antoine Lyon-Caen.

(Avec AFP)


L'ancien patron de M6 Nicolas de Tavernost rejoint la branche médias de CMA CGM

Nicolas de Tavernost rejoint le groupe CMA CGM du milliardaire Rodolphe Saadé comme vice-président de sa nouvelle holding CMA Médias. (AFP)
Nicolas de Tavernost rejoint le groupe CMA CGM du milliardaire Rodolphe Saadé comme vice-président de sa nouvelle holding CMA Médias. (AFP)
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  • CMA Médias, «holding de tête du pôle média» du géant du transport maritime, selon le communiqué, a été créée pour anticiper la finalisation de l'acquisition du groupe Altice Média
  • Le recrutement surprise de l'ancien patron emblématique du groupe M6 illustre à nouveau les ambitions du milliardaire franco-libanais Rodolphe Saadé dans le secteur

PARIS: A peine parti de M6 après 37 ans à sa barre, Nicolas de Tavernost rejoint le groupe CMA CGM du milliardaire Rodolphe Saadé comme vice-président de sa nouvelle holding CMA Médias, a annoncé mercredi l'armateur marseillais.

Nicolas de Tavernost, 73 ans, "assurera en outre la présidence du comité stratégique et mobilisera son expérience pour assister le groupe dans ses activités médias, dans le choix des investissements et la conduite des opérations", précise CMA CGM dans un communiqué.

CMA Médias, "holding de tête du pôle média" du géant du transport maritime, selon le communiqué, a été créée pour anticiper la finalisation de l'acquisition du groupe Altice Média (BFMTV, RMC...) annoncée en mars, a indiqué CMA CGM à l'AFP.

Cette structure doit à terme englober WhyNot Media (La Tribune, La Provence...), le pôle presse du groupe dirigé par Jean-Christophe Tortora et dont Véronique Albertini-Saadé, épouse de Rodolphe Saadé, est la présidente non exécutive, ainsi que l'entité audiovisuelle découlant du rachat d'Altice Média, selon la même source.

Elle sera présidée par Mme Albertini-Saadé.

Le recrutement surprise de l'ancien patron emblématique du groupe M6 illustre à nouveau les ambitions du milliardaire franco-libanais Rodolphe Saadé dans le secteur.

Outre le rachat prévu d'Altice Media, M. Saadé a déjà mis la main ces deux dernières années sur le journal La Tribune et le groupe La Provence (quotidiens régionaux La Provence et Corse Matin), en plus de participations dans M6 et le média vidéo en ligne Brut.

De son côté, M. de Tavernost prouve qu'il n'entend pas prendre sa retraite. Deux jours après son départ officiel de M6, où David Larramendy lui a succédé fin avril, il avait également été nommé vice-président du conseil d'administration de GL Events, entreprise spécialisée dans l'évènementiel, où il était déjà administrateur indépendant.

Cité dans le communiqué, Rodolphe Saadé s'est "réjoui" de son arrivée dans son groupe, où "il apportera ses compétences au sein de l'équipe média pour accompagner notre diversification dans le secteur".


Nouvelle-Calédonie: Macron annonce l'état d'urgence après quatre morts dans les émeutes

Vue du quartier Motor Pool de Nouméa le 15 mai 2024, au milieu de manifestations liées au débat sur un projet de loi constitutionnelle visant à élargir le corps électoral pour les prochaines élections du territoire français d'outre-mer de Nouvelle-Calédonie. (Photo, AFP)
Vue du quartier Motor Pool de Nouméa le 15 mai 2024, au milieu de manifestations liées au débat sur un projet de loi constitutionnelle visant à élargir le corps électoral pour les prochaines élections du territoire français d'outre-mer de Nouvelle-Calédonie. (Photo, AFP)
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  • Depuis les premières altercations dans la journée de lundi, en marge d'une mobilisation indépendantiste contre la réforme constitutionnelle, deux violentes nuits d'émeutes ont secoué l'île
  • Le président Emmanuel Macron a convoqué mercredi matin une réunion de crise après une nouvelle nuit d'émeutes en Nouvelle-Calédonie

NOUMÉA: Emmanuel Macron a décidé mercredi d'imposer l'état d'urgence en Nouvelle-Calédonie, archipel français du Pacifique secoué par de violentes émeutes qui ont fait quatre morts dont un gendarme, et ont été provoquées par un projet de réforme constitutionnelle rejeté par les indépendantistes.

"Toutes les violences sont intolérables et feront l'objet d'une réponse implacable pour assurer le retour de l'ordre républicain", a indiqué la présidence française dans un communiqué annonçant l'instauration de ce régime d'exception qui étend les pouvoirs des autorités.

Emmanuel Macron, qui présidera une "réunion de suivi" de la situation jeudi, a également rappelé "la nécessité d'une reprise du dialogue politique" en Nouvelle-Calédonie, territoire colonisé par la France au XIXe.

Peu après l'entrée en vigueur de l'état d'urgence à 20H00, heure de Paris (05H00 à Nouméa), le Premier ministre Gabriel Attal a annoncé le déploiement de militaires "pour sécuriser" les ports et l'aéroport de Nouvelle-Calédonie, ainsi que l'interdiction du réseau social TikTok.

Depuis les premières altercations dans la journée de lundi, en marge d'une mobilisation indépendantiste contre la réforme constitutionnelle, deux violentes nuits d'émeutes ont secoué l'île.

Elles ont fait quatre morts, dont un gendarme de 22 ans touché à la tête par un tir.

Plusieurs centaines d'autres personnes ont été blessées dont une centaine de policiers et gendarmes, selon le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin. "On est dans une situation que je qualifierais d'insurrectionnelle", a déclaré le Haut-commissaire de la République, Louis Le Franc.

Malgré le couvre-feu mis en place à Nouméa, principale ville du territoire, les violences ont repris mardi soir dès la nuit tombée, marquée par de nombreux incendies, pillages et d'échanges de tirs, y compris contre les forces de l'ordre. L'aéroport de Nouméa est fermé depuis lundi.

Deux personnes ont par ailleurs été blessées par balles à Ducos, dans le nord-ouest de Nouméa "par un garagiste qui protégeait son entreprise", selon un ministre du gouvernement local.

"Je vous laisse imaginer ce qui va se passer si des milices se mettaient à tirer sur des gens armés", a insisté M. Le Franc, évoquant "une spirale mortelle".

Rencontré par l'AFP, Sébastien, un habitant de 42 ans qui ne donne pas son nom, a dit mener la garde pour "protéger la ville". "Les flics sont débordés alors on essaye de se protéger et dès que ça chauffe, nous prévenons les flics (...). On essaye de faire en sorte que chaque quartier ait sa milice".

"Appel au calme"

Point de crispation de la colère des indépendantistes, le projet de réforme constitutionnelle sur le corps électoral a été adopté par les députés à Paris dans la nuit de mardi à mercredi. Il doit encore réunir les trois cinquièmes des voix des parlementaires réunis en Congrès.

Ce texte vise à élargir le corps électoral aux élections provinciales, cruciales dans l'archipel, à tous les natifs calédoniens et aux résidents depuis au moins dix ans. Les partisans de l'indépendance jugent que ce dégel risque de "minoriser encore plus le peuple autochtone kanak".

Dans une déclaration commune, les principaux partis indépendantistes et loyalistes de Nouvelle-Calédonie ont toutefois lancé mercredi un appel "au calme et à la raison".

"Malgré la situation insurrectionnelle que nous traversons depuis quarante-huit heures et parce que nous sommes appelés à poursuivre le vivre-ensemble, nous appelons solennellement l'ensemble de la population au calme et à la raison", écrivent ces partis.

Le Premier ministre Gabriel Attal a indiqué en début d'après-midi à Paris qu'il allait proposer "dans les prochaines heures" une date de rencontre à Paris aux différentes parties prenantes de Nouvelle-Calédonie.

Mercredi matin, faute d'approvisionnement des commerces, les pénuries alimentaires ont provoqué de très longues files d'attente devant les magasins.

Créé en 1955 pendant la guerre d'Algérie (1954-1962), l'état d'urgence a déjà été instauré huit fois en France afin de répondre à des périls imminents (attentat, guerre) ou des catastrophes naturelles. Réclamée par de nombreuses voix à droite et à l'extrême droite, cette mesure permet notamment d'interdire déplacements ou manifestations.

 

 


La mairie de Paris demande au préfet d'interdire les maraudes d'ultradroite «  discriminatoires  »

Dans le reportage, une vingtaine de membres du groupuscule Luminis proposent, lors d'une maraude nocturne dans la capitale, des aliments contenant du porc, et uniquement à certains sans-abri. (AFP).
Dans le reportage, une vingtaine de membres du groupuscule Luminis proposent, lors d'une maraude nocturne dans la capitale, des aliments contenant du porc, et uniquement à certains sans-abri. (AFP).
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  • Le reportage donne à voir "le pire de l'humanité: le tri dans la solidarité, le tri en fonction de l'ethnie, le tri en fonction de la religion", écrivent Emmanuel Grégoire et Léa Filoche, respectivement premier adjoint et adjointe aux solidarités
  • Dans le reportage, une vingtaine de membres du groupuscule Luminis proposent, lors d'une maraude nocturne dans la capitale, des aliments contenant du porc, et uniquement à certains sans-abri

PARIS: Deux adjoints de la maire de Paris Anne Hidalgo ont demandé mardi au préfet de police Laurent Nunez d'interdire les maraudes "discriminatoires" dans la capitale, menées par des groupes d'ultradroite aux propos "ouvertement racistes", après un reportage de BFMTV.

Le reportage en question donne à voir "le pire de l'humanité: le tri dans la solidarité, le tri en fonction de l'ethnie, le tri en fonction de la religion", écrivent Emmanuel Grégoire et Léa Filoche, respectivement premier adjoint et adjointe aux solidarités, dans un courrier transmis à l'AFP.

Dans le reportage, une vingtaine de membres du groupuscule Luminis proposent, lors d'une maraude nocturne dans la capitale, des aliments contenant du porc, et uniquement à certains sans-abri.

"On ne donne qu'aux Blancs", dit ainsi une jeune femme. "Les noirs évidemment et les arabes, on ne leur donne pas."

Des propos "extrêmement choquants, ouvertement racistes et discriminatoires" pour les deux adjoints, "qui sont de nature, selon nous, à relever d'une qualification pénale et salissent en tout état de cause l'image de notre ville, tout en étant susceptibles de troubler l'ordre public".

Les deux élus de gauche rappellent qu'en 2007, le Conseil d'Etat avait interdit la distribution des "soupes au cochon", une "façon détournée des extrémistes de droite d'exclure les musulmans".

Le groupuscule suivi par BFMTV "va plus loin en revendiquant son racisme et justifiant ces pratiques discriminatoires", s'alarment-ils.

Les élus de la municipalité demandent à Laurent Nunez et au ministre de l'Intérieur de "prendre les mesures d'interdiction de ce genre de distributions alimentaires qui sont plus sûrement des opérations de promotion de la haine que de solidarité".

Samedi, plusieurs centaines de militants d'ultradroite ont défilé à Paris. La préfecture de police de Paris avait pourtant interdit cette manifestation annuelle en arguant d'un risque de troubles à l'ordre public, mais le tribunal administratif de Paris a suspendu cette mesure.