La France a-t-elle accueilli son premier «réfugié climatique» ? Pas tout à fait

Des enfants se tiennent sur les toits des maisons détruites par les eaux de crue du camp de réfugiés de Yusuf Batir à Maban, au Soudan du Sud, le 25 novembre 2019. (AFP)
Des enfants se tiennent sur les toits des maisons détruites par les eaux de crue du camp de réfugiés de Yusuf Batir à Maban, au Soudan du Sud, le 25 novembre 2019. (AFP)
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Publié le Jeudi 28 janvier 2021

La France a-t-elle accueilli son premier «réfugié climatique» ? Pas tout à fait

  • Un Bangladais, dont l'expulsion de France vient d'être annulée, est-il devenu le premier réfugié climatique de ce pays
  • Début janvier, de nombreux médias ont suggéré que « Sheel » était devenu le « premier réfugié climatique en France »

PARIS : Un Bangladais, dont l'expulsion de France vient d'être annulée, est-il devenu le premier réfugié climatique de ce pays, comme l'affirment certains ? Pas vraiment au regard du droit, qui ne reconnaît pas ce statut, ni sur le fond du dossier, qui relance le débat sur la protection des déplacés environnementaux.

Début janvier, de nombreux médias ont suggéré que « Sheel » était devenu le « premier réfugié climatique en France », en se fondant principalement sur une déclaration de son avocat, Me Ludovic Rivière: « À ma connaissance, pour la première fois, une décision de la justice française a pris en compte cette réalité climatique ».

Qu'en est-il réellement ?

« Sheel » est arrivé en France en 2011 pour demander l'asile, mais ses tentatives d'obtenir le statut de réfugié ont échoué. Après un premier refus en 2014, il s'est vu délivrer par les autorités françaises une carte de séjour comme « étranger malade » en 2015 : il souffre d'un asthme allergique sévère et d'apnée du sommeil. Il travaillait depuis comme serveur à Toulouse (sud-ouest de la France).

Critère de pollution

En 2019, il se voit refuser le renouvellement de son titre de séjour et délivrer une obligation de quitter le territoire français.

Finalement, la Cour administrative d'appel de Bordeaux (sud-ouest) a décidé le 18 décembre d'annuler la mesure d'expulsion. Il s'agit donc d'une décision relative au séjour, et non au droit d'asile, dont les motifs sont fondés sur les questions de santé. Dans cette décision, la Cour rappelle ses problèmes de santé, les difficultés de soins dans son pays d'origine et le taux de pollution qui y sévit, « l'un des plus élevés au monde ».

Le réfugié bangladais « se trouverait confronté dans son pays d'origine à la fois à une aggravation de sa pathologie respiratoire en raison de la pollution atmosphérique, à des risques d'interruption d'un traitement moins bien adapté à son état de santé, et à des dysfonctionnements de l'appareil respiratoire dont il a un besoin vital », a ajouté la juridiction.

« Ce n'est pas vraiment un réfugié climatique, c'était un raccourci journalistique », se défend auprès de l'AFP Me Rivière.

« Le Bangladesh n'est pas submergé par les flots. Mais ça participe de la même idée : il ne peut pas vivre au Bangladesh à cause de la pollution qui y règne. Et à ma connaissance, c'est la première fois qu'une juridiction se fondait sur cet argument pour s'opposer à une décision de refoulement », plaide-t-il.

Changement climatique et pollution sont bien distincts, nuance François Gemenne, expert en migrations environnementales et membre du GIEC (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat).

« Ce n'est certainement pas un réfugié climatique, une notion qui n'existe pas en droit de toute façon », explique-t-il.

La reconnaissance de la pollution comme facteur de risque pour la santé pourrait néanmoins augmenter la délivrance de titres pour ce motif en France, où le séjour est régulièrement accordé aux « étrangers malades », reconnaît M. Gemenne.

« Stratagème »

La France a déjà suspendu des décisions d'expulsion pour cause de catastrophe naturelle dans le pays d'origine, comme pour Haïti.

Chaque année, environ 20 millions de personnes sont déplacées en raison de dégradations liées au changement climatique.

Mais l'idée d'un statut spécifique est mal perçue par les pays pauvres, note François Gemenne. « Les déplacés climatiques sont 85% à migrer vers un autre pays du Sud. Ces derniers voient l'idée de ce statut comme une contrainte, voire un stratagème des pays du Nord pour leur refiler ce fardeau ».

La notion de migration climatique, en revanche, dispose d'une base juridique depuis 2015 et l'adoption par 110 États d'un « agenda pour la protection » des déplacés environnementaux, non-contraignant, qui permet de ne pas expulser des étrangers dont le pays est touché par une catastrophe naturelle.

La convention de Genève, elle, ne prévoit d'accorder le statut de réfugié qu'à ceux qui craignent d'être persécutés du fait de leur « race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un certain groupe social ou de leurs opinions politiques ».

Si le climat ne peut donc être invoqué seul, « il peut y avoir un lien entre changement climatique et conflits : on le voit au Sahel par exemple, où des facteurs comme la sécheresse peuvent aussi conduire à la fuite », explique Céline Schmitt, porte-parole du Haut-commissariat aux réfugiés de l'ONU en France.


Dix passeurs présumés jugés pour un naufrage meurtrier dans la Manche

Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
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  • Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés
  • La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche

LILLE: Dix hommes, dont huit Afghans, sont jugés à partir de lundi à Lille pour leur rôle présumé de passeurs dans le naufrage d'une embarcation clandestine qui avait fait quatre morts et quatre disparus dans la Manche en décembre 2022.

Parti entre 1H00 et 1H30 du matin dans la nuit du 13 au 14 décembre 2022, le canot, qui transportait en majorité des migrants afghans, avait fait naufrage à quelques kilomètres des côtes anglaises.

Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés.

La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche.

Selon les éléments de l'enquête, alors que les migrants gonflaient le bateau avant le départ, plusieurs ont entendu une détonation, synonyme selon eux de crevaison. Les passeurs leur ont dit de ne pas s'en faire et qu'il s'agissait du seul bateau disponible pour eux.

D'après les témoignages des rescapés, il n'y avait pas assez de gilets de sauvetage pour tout le monde et aucune des personnes décédées n'en portait un. La température était glaciale et la mer très agitée.

Après une ou deux heures de traversée, un boudin a commencé à se dégonfler et l'eau à entrer dans l'embarcation, jusqu'à atteindre les genoux des passagers. Paniqués, ils se sont mis debout pour tenter de faire signe à un bateau. Mais le fond du canot, peu solide, a ployé sous leur poids et celui de l'eau, et tous se sont retrouvés à l'eau.

Neuf des prévenus sont jugés, jusqu'à vendredi, pour homicide involontaire par violation d'une obligation de sécurité, deux d'entre eux le sont pour blanchiment, tous pour aide au séjour irrégulier. Huit sont afghans, un syrien, un irakien.

Certains des prévenus sont soupçonnés d'avoir recruté des passeurs et assuré la logistique auprès des passagers, d'autres d'avoir géré l'organisation sur le camp de migrants de Loon-Plage (Nord), où vivaient les migrants avant leur tentative de traversée, toujours selon les éléments de l'enquête. D'autres encore sont jugés pour s'être occupés du transport des migrants vers la plage et de la mise à l'eau du canot, et deux pour avoir collecté une partie des paiements.

Le mineur sénégalais qui pilotait le canot est, lui, inculpé dans le cadre d'une procédure au Royaume-Uni.

Apparu en 2018, le phénomène des traversées de la Manche en petites embarcations est à l'origine de nombreux naufrages, le plus meurtrier ayant coûté la vie à 27 personnes en novembre 2021.

Depuis le début de l'année, au moins 15 migrants sont morts dans la Manche, bras de mer parmi les plus fréquentés du monde et où les conditions météorologiques sont souvent difficiles, selon un décompte de l'AFP à partir de chiffres officiels. En 2024, 78 étaient morts ainsi, un record.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».