Explosion de Beyrouth: de trop nombreuses interrogations

« Les causes de la catastrophe de Beyrouth sont d’une plus grande ampleur que celles avancées par les autorités libanaises ». (Photo fournie).
« Les causes de la catastrophe de Beyrouth sont d’une plus grande ampleur que celles avancées par les autorités libanaises ». (Photo fournie).
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Publié le Vendredi 07 août 2020

Explosion de Beyrouth: de trop nombreuses interrogations

  • « Les causes de la catastrophe de Beyrouth sont d’une plus grande ampleur que celles avancées par les autorités libanaises »
  • « La décision de stocker des produits chimiques et explosifs dans le port civil de Beyrouth pour pouvoir les utiliser en cas de nécessité provient-elle d’un acteur non étatique ? »

BEYROUTH : Le Liban est en deuil. La capitale, Beyrouth, décrétée « ville sinistrée », a été en partie ravagée le 4 août, vers 18h10, par deux gigantesques explosions dans la zone portuaire. Entretien avec Khaled Hamadé, ancien général et ancien directeur du Centre de recherche et d’études stratégiques de l’armée libanaise, pour décrypter la situation.

Selon la version officielle libanaise, la cause des explosions est accidentelle. Cette thèse est toutefois contestée par de nombreux observateurs. Quelle est votre opinion ?

Il est intéressant de noter le flou qui entoure les déclarations de l’État libanais concernant les explosions qui ont eu lieu dans le port de Beyrouth mardi. Pendant les deux premières heures, l’explication du gouvernement était que l’explosion a eu lieu dans l’entrepôt n°12, et qu’il était lié à des feux d’artifices. Face à l’ampleur des dégâts, ce mensonge n’était pas crédible. Le directeur de la Sûreté générale libanaise, Abbas Ibrahim, a donc révélé au grand public qu’il y avait dans l’entrepôt en question des produits stockés hautement explosifs. Cette confusion illustre le manque de professionnalisme de l’État ainsi qu’une volonté de faire croire aux Libanais que cette catastrophe est le résultat d’une erreur administrative qui aurait pu être commise n’importe où dans le monde.

Toutes les actions du gouvernement – y compris la mise en place d’une commission d’enquête, qui doit rendre son rapport dans cinq jours, et la collecte des preuves – s’orientent dans la direction d’un simple accident. Je rejette ce scénario. Les causes de la tragédie de Beyrouth sont d’une plus grande ampleur que celles qui sont avancées par les autorités libanaises.

Comment se fait-il, d’un point de vue sécuritaire, qu’un stock important de nitrate d’ammonium soit placé dans un port civil situé près de zones résidentielles densément peuplées ?

Le stockage de tout produit explosif, chimique ou non, se fait dans des lieux qui lui sont dédiés ou incombe aux autorités officielles qui sont habituées à traiter ce type de produit. La régulation au Liban est stricte. Les produits explosifs sont stockés par l’armée libanaise, qui les redistribue aux particuliers ou aux organismes, au cas par cas.

À titre d’exemple, les clubs de tirs qui ont pourtant l’agrément ne peuvent pas stocker les munitions. Ces dernières sont stockées par l’armée libanaise qui les leur redistribue ensuite. Il n’y aucune raison pour que ces prétendus stocks de nitrate d’ammonium soient présents au sein du port civil de Beyrouth. Ce stockage est contraire à la loi car seule l’armée libanaise est habilitée à gérer ce type de produits.

Qui sont selon vous les responsables de cette terrible catastrophe ?

Une commission d’enquête est en cours. Elle devra rendre son rapport d’ici cinq jours. Mais on peut logiquement douter de son efficacité. Il convient de noter que Mohamad Fahmi, ministre de l’Intérieur, a refusé toute coopération extérieure y compris avec l’État français. Le 5 août, le parquet de Paris a ouvert une enquête car 21 Français ont été blessés.

Concernant la responsabilité des services étatiques, plusieurs interrogations émergent : la justice a-t-elle demandé que le contrôle de ces produits soit transféré à l’armée libanaise ? Si tel est le cas, est-ce la justice qui n’en a pas demandé la mise en œuvre ou bien l’armée qui n’a pas voulu s’en charger ?

La question la plus importante qui se pose est la suivante : la décision de stocker des produits chimiques et explosifs dans le port civil de Beyrouth pour pouvoir les utiliser en cas de nécessité provient-elle d’un acteur non étatique ?

C’est plausible lorsque l’on sait que le Hezbollah stocke des armes dans le sud du fleuve Litani, une zone officiellement sous le contrôle de l’armée libanaise et de la Force intérimaire des nations unies au Liban (FINUL). Le port de Beyrouth, de nature civile, est ainsi utilisé comme une infrastructure militaire par le Hezbollah. Ce qui conduit la capitale libanaise à être un acteur essentiel du conflit ouvert entre l’Iran et les États-Unis.

L’armée libanaise va-elle être amenée à jouer un rôle plus important dans les semaines à venir ?

Suivant les recommandations du Conseil supérieur de la défense, le gouvernement a décrété l’état d’urgence pour deux semaines. L’armée libanaise est chargée d’assurer la sécurité pendant cette période.

Le rôle de l’armée sera principalement de protéger du vol les propriétés endommagées et de porter assistance dans les opérations humanitaires.

Ce sera l’occasion de vérifier si les autorités politiques peuvent supporter ou non de voir l’armée libanaise gérer la sécurité de Beyrouth pendant deux semaines, voire plus. La population a confiance en l’armée libanaise. Il se peut qu’il y ait une demande populaire pour que l’armée assure la sécurité de zones spécifiques. Toutefois, je ne pense pas que le rôle de l’armée libanaise va évoluer au cours de ces prochaines semaines, en raison du contrôle sécuritaire que le Hezbollah exerce dans certaines zones du pays, notamment dans la banlieue Sud de Beyrouth.

Les propos de Khaled Hamadé ont été traduits par l’auteur.


Syrie: opération israélienne aéroportée près de Damas, selon un média d'Etat

Israël, qui mène régulièrement des frappes en Syrie, n'a pas confirmé cette opération mais son ministre de la Défense, Israël Katz, a affirmé jeudi que les forces israéliennes opéraient "jour et nuit" partout où cela était nécessaire pour la sécurité du pays. (AFP)
Israël, qui mène régulièrement des frappes en Syrie, n'a pas confirmé cette opération mais son ministre de la Défense, Israël Katz, a affirmé jeudi que les forces israéliennes opéraient "jour et nuit" partout où cela était nécessaire pour la sécurité du pays. (AFP)
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  • L'aviation israélienne avait frappé mardi ce site près de Kesweh, à une trentaine de km au sud de Damas, tuant six soldats syriens, selon le ministère syrien des Affaires étrangères
  • Mercredi, le site a été bombardé à nouveau, selon la télévision d'Etat, puis l'armée israélienne a "mené une opération aéroportée dont les détails ne sont pas encore connus", a rapporté l'agence de presse officielle Sana, citant une source gouvernementale

DAMAS: Un média d'Etat syrien a affirmé jeudi que l'armée israélienne avait mené mercredi soir une opération aéroportée dans un secteur au sud de Damas qu'elle avait auparavant bombardé.

Israël, qui mène régulièrement des frappes en Syrie, n'a pas confirmé cette opération mais son ministre de la Défense, Israël Katz, a affirmé jeudi que les forces israéliennes opéraient "jour et nuit" partout où cela était nécessaire pour la sécurité du pays.

Si ce raid est confirmé, il s'agirait de la première opération du genre près de la capitale depuis l'arrivée au pouvoir en décembre d'une coalition islamiste qui a renversé le président Bachar al-Assad.

L'aviation israélienne avait frappé mardi ce site près de Kesweh, à une trentaine de km au sud de Damas, tuant six soldats syriens, selon le ministère syrien des Affaires étrangères.

Mercredi, le site a été bombardé à nouveau, selon la télévision d'Etat, puis l'armée israélienne a "mené une opération aéroportée dont les détails ne sont pas encore connus", a rapporté l'agence de presse officielle Sana, citant une source gouvernementale.

Depuis décembre, Israël a mené des centaines de frappes sur la Syrie et des incursions terrestres dans le sud du pays.

Un responsable du ministère de la Défense avait indiqué mardi à l'AFP que le site visé par Israël abritait des bâtiments de l'armée syrienne.

Des soldats syriens avaient trouvé mardi des "dispositifs de surveillance et d'écoute" dans la zone avant les frappes israéliennes, selon Sana, qui ne précise pas qui les avait installés.

"Les frappes aériennes et les drones ont continué à empêcher l'accès à la zone jusqu'à mercredi soir", avant l'opération aéroportée, a indiqué la même source.

"D'après ce que nous comprenons, les forces syriennes ont découvert des dispositifs de surveillance et de renseignement, apparemment israéliens", a expliqué au bureau de l'AFP à Jérusalem l'analyste israélienne Carmit Valensi.

"Les forces israéliennes tentaient essentiellement de démanteler les dispositifs de renseignement qui avaient été installés, afin d'empêcher qu'ils ne tombent entre les mains de diverses forces syriennes", a-t-elle ajouté.

Le site abritait des armes utilisées par le Hezbollah libanais, soutenu par l'Iran et allié de M. Assad, selon selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), basé au Royaume-Uni mais disposant d'un vaste réseau de sources en Syrie.

Interrogée par l'AFP, l'armée israélienne n'a fait aucun commentaire sur les frappes.

"Nos forces opèrent sur tous les théâtres de guerre, jour et nuit, pour la sécurité d’Israël", a écrit jeudi M. Katz, sans plus de détails, sur son compte X.

Israël et la Syrie sont techniquement en état de guerre depuis des décennies, mais ont entamé un dialogue sous l'égide des Etats-Unis depuis la prise de pouvoir par le président par intérim  Ahmad al-Chareh, dans le but affiché de parvenir à des arrangements de sécurité.

 


Gaza: des experts de l'ONU dénoncent des «disparitions forcées» sur des sites d'aide

Des experts des droits de l'Homme de l'ONU ont qualifié de "crime odieux" jeudi des informations faisant état de "disparitions forcées" de Palestiniens affamés en quête de nourriture dans des sites de distribution gérés par la Fondation Humanitaire de Gaza. (AFP)
Des experts des droits de l'Homme de l'ONU ont qualifié de "crime odieux" jeudi des informations faisant état de "disparitions forcées" de Palestiniens affamés en quête de nourriture dans des sites de distribution gérés par la Fondation Humanitaire de Gaza. (AFP)
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  • Les sept experts indépendants ont assuré dans une déclaration commune avoir reçu des informations selon lesquelles plusieurs personnes, dont un enfant, avaient disparu après avoir visité des sites de distribution d'aide à Rafah
  • L'armée israélienne était "directement impliquée dans les disparitions forcées de personnes cherchant de l'aide", ont ajouté les experts, mandatés par le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU, mais qui ne parlent pas au nom des Nations Unies

GENEVE: Des experts des droits de l'Homme de l'ONU ont qualifié de "crime odieux" jeudi des informations faisant état de "disparitions forcées" de Palestiniens affamés en quête de nourriture dans des sites de distribution gérés par la Fondation Humanitaire de Gaza.

Les sept experts indépendants ont assuré dans une déclaration commune avoir reçu des informations selon lesquelles plusieurs personnes, dont un enfant, avaient disparu après avoir visité des sites de distribution d'aide à Rafah.

L'armée israélienne était "directement impliquée dans les disparitions forcées de personnes cherchant de l'aide", ont ajouté les experts, mandatés par le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU, mais qui ne parlent pas au nom des Nations Unies.

"Les signalements de disparitions forcées visant des civils affamés cherchant à exercer leur droit fondamental à se nourrir ne sont pas seulement choquants, mais équivalent à de la torture", ont-ils déclaré. "Utiliser la nourriture comme un outil pour mener des disparitions ciblées et massives doit cesser immédiatement", selon eux.

De son côté, la Fondation humanitaire de Gaza (GHF) a déclaré jeudi qu'il n'y avait "aucune preuve de disparitions forcées" dans ses sites d'aide dans les territoires palestiniens, après que des experts de l'ONU ont fait état d'informations sur de telles exactions.

"Nous opérons dans une zone de guerre où de graves allégations pèsent contre toutes les parties opérant en dehors de nos sites. Mais à l'intérieur des installations de la GHF, il n'y a aucune preuve de disparitions forcées", a déclaré la fondation dans un communiqué à l'AFP.

L'ONU a déclaré une famine dans le gouvernorat de Gaza la semaine dernière, accusant l'"obstruction systématique" des livraisons humanitaires par Israël. Israël, qui a accusé le Hamas de piller l'aide fournie par l'ONU, a imposé un blocus total sur Gaza entre mars et mai.

Une fois que les restrictions ont commencé à s'assouplir, la GHF, une organisation privée soutenue par Israël et les États-Unis, a été créée pour distribuer l'aide alimentaire, mettant de fait à l'écart les agences de l'ONU.

Le bureau des droits de l'Homme de l'ONU a déclaré la semaine dernière qu'il avait documenté la mort de 1.857 Palestiniens cherchant de l'aide depuis fin mai, dont 1.021 près des sites du GHF.


Liban: des formations palestiniennes remettent leurs armes à l'armée

Des formations palestiniennes ont remis jeudi à l'armée libanaise des armes lourdes qu'elles détenaient dans trois camps de réfugiés du sud du pays, ont annoncé les autorités libanaises et palestiniennes. (AFP)
Des formations palestiniennes ont remis jeudi à l'armée libanaise des armes lourdes qu'elles détenaient dans trois camps de réfugiés du sud du pays, ont annoncé les autorités libanaises et palestiniennes. (AFP)
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  • Le Liban accueille environ 222.000 réfugiés palestiniens, selon l'ONU, dont une majorité vit dans des camps. En vertu d'un accord tacite, les organisations palestiniennes contrôlent ces camps où l'armée libanaise ne pénètre pas
  • Dans un communiqué, le Comité de dialogue libano-palestinien (officiel) a annoncé jeudi que "huit camions" contenant "des armes lourdes appartenant aux factions de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) ont été remis à l'armée

TYR: Des formations palestiniennes ont remis jeudi à l'armée libanaise des armes lourdes qu'elles détenaient dans trois camps de réfugiés du sud du pays, ont annoncé les autorités libanaises et palestiniennes.

Lors d'une visite à Beyrouth en mai, le président palestinien Mahmoud Abbas avait conclu avec le président libanais Joseph Aoun un accord prévoyant la remise aux autorités de toutes les armes présentes dans les camps palestiniens.

L'application de cet accord a commencé le 21 août lorsque le Fatah de Mahmoud Abbas a remis des armes dans le camp de réfugiés de Bourj al-Barajneh, à la périphérie de Beyrouth.

Le Liban accueille environ 222.000 réfugiés palestiniens, selon l'ONU, dont une majorité vit dans des camps. En vertu d'un accord tacite, les organisations palestiniennes contrôlent ces camps où l'armée libanaise ne pénètre pas.

Dans un communiqué, le Comité de dialogue libano-palestinien (officiel) a annoncé jeudi que "huit camions" contenant "des armes lourdes appartenant aux factions de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) dans les camps de Rachidiyé, Bass et Bourj Chemali ont été remis à l'armée".

Un photographe de l'AFP a vu au moins sept camions dans une caserne de l'armée dans la ville côtière de Tyr, que jouxte le camp de Rachidiyé.

Le Fatah est la plus importante composante de l'OLP dont le Hamas islamiste ou le Jihad islamique, alliés du Hezbollah libanais, ne font pas partie.

Selon le communiqué, le processus va se poursuivre dans les autres camps palestiniens du Liban.

A Ramallah, en Cisjordanie occupée, le porte-parole de la présidence palestinienne, Nabil Abou Roudeina, a confirmé que "la deuxième partie d'armes de l'OLP" dans les trois camps avait été remise, conformément à l'accord.

La remise des armes des formations palestiniennes intervient dans le cadre de la décision des autorités libanaises de désarmer tous les groupes non étatiques.

Sous forte pression américaine, le gouvernement libanais a également chargé ce mois-ci l’armée d’élaborer un plan visant à désarmer le Hezbollah pro-iranien d’ici la fin de l’année.

Des factions armées palestiniennes, dont le Hamas, ont revendiqué des tirs sur le territoire israélien au cours de la guerre entre Israël et le Hezbollah qui s'est terminée en novembre 2024.