Pourquoi le projet australien sur les géants de la tech est-il autant scruté?

Cette réglementation ne s'appliquera qu'en Australie, mais les autres pays scruteront avec attention la manière dont elle entrera en vigueur afin d'envisager des mesures similaires (Photo, AFP).
Cette réglementation ne s'appliquera qu'en Australie, mais les autres pays scruteront avec attention la manière dont elle entrera en vigueur afin d'envisager des mesures similaires (Photo, AFP).
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Publié le Vendredi 12 février 2021

Pourquoi le projet australien sur les géants de la tech est-il autant scruté?

  • Une étude australienne montre que pour 100 dollars dépensés en publicité en ligne, Google perçoit 53 dollars, Facebook 28 dollars et le reste est réparti entre d'autres géants de l'internet
  • Facebook et Google s'opposent à la mise en place de toute réglementation menaçant de mettre à mal le modèle économique qui leur a permis de devenir des entreprises parmi les plus rentables du monde

SYDNEY: L’Australie a fait vendredi un pas de plus vers l'introduction d'une législation novatrice contraignant les géants de la tech à rémunérer les médias pour leurs contenus, qui, à terme, pourrait changer beaucoup de choses pour les internautes de toute la planète.

Voici un aperçu du projet australien, des raisons pour lesquelles des firmes telles que Facebook et Google le rejettent et ce qu'il signifie pour les internautes.

Quelle est la situation?

Depuis leur apparition il y a deux décennies, des géants comme Google et Facebook sont très peu réglementés. 

En Australie, les autorités se sont penchées sur la manière dont ils captent une part importante des revenus publicitaires et sur les conséquences de cette domination pour les médias en grande difficulté financière.

Une étude australienne montre que pour 100 dollars dépensés en publicité en ligne, Google perçoit 53 dollars, Facebook 28 dollars et le reste est réparti entre d'autres géants de l'internet.

Ceux-ci sont accusés par la presse de tirer profit de ses contenus sans partager les revenus qu'ils en tirent. 

Pour que les règles soient plus équitables, l'Australie souhaite que Google et Facebook rémunèrent les médias australiens quand ils utilisent leurs contenus d'actualité. 

Après plusieurs mois, le Sénat australien a rendu son rapport vendredi et recommande que les mesures proposées deviennent une loi.

Pourquoi une attention mondiale pour ce projet?

Cette réglementation ne s'appliquera qu'en Australie, mais les autres pays scruteront avec attention la manière dont elle entrera en vigueur afin d'envisager des mesures similaires. 

Microsoft qui, avec son moteur de recherches Bing, entend combler le vide que menace de laisser Google en Australie, a soutenu ces propositions, appelant d'autres pays à suivre l'exemple de Canberra et le secteur des technologies à s'engager pour relancer un journalisme indépendant qui «est au coeur de nos libertés démocratiques».

L'administration américaine de l'ex-président Donald Trump était opposée à de telles propositions, mettant en garde contre les "conséquences négatives à long terme" pour les entreprises américaines. 

Les députés européens les ont accueillies favorablement. L'Union européenne a instauré en 2019 un «droit voisin» qui doit permettre la rémunération des éditeurs de presse pour les contenus utilisés par les plateformes en ligne.

Pourquoi Google et Facebook s'y opposent? 

Facebook et Google s'opposent à la mise en place de toute réglementation menaçant de mettre à mal le modèle économique qui leur a permis de devenir des entreprises parmi les plus rentables du monde. 

Ils disent ne pas être opposés au fait de rémunérer les informations fournies par les médias. Ils paient déjà certains groupes de presse pour leurs contenus mais refusent que le montant de la rémunération leur soit imposé. 

Selon le projet australien, un arbitre indépendant pourrait décider si les accords conclus sont équitables, pour garantir que ces géants n'utilisent pas leur position dominante sur le marché de la publicité en ligne pour dicter leurs conditions.  

Ces derniers font également valoir que cette législation serait un cadeau du gouvernement conservateur australien au groupe News Corp de Rupert Murdoch afin de soutenir ses journaux en difficulté.  

Qu'est-ce que cela signifie ? 

Pour Tim Berners-Lee, un des inventeurs du Web en 1989, le projet australien est «irréalisable» et sape un «principe fondamental» de l'internet.

«Si ce précédent était suivi ailleurs, il pourrait rendre le web inapplicable dans le monde entier», a-t-il averti, redoutant que cela n'ouvre une boîte de Pandore.

Facebook comme Google ont menacé de suspendre leurs services si le projet australien était mis en œuvre sous sa forme actuelle.

La directrice générale de Google Australia, Mel Silva, avait avancé en janvier que si le projet passait tel quel, son groupe «n'aurait guère d'autre choix» que de suspendre son moteur de recherches en Australie, qui capte plus de 90% de ce marché. 

De même, Facebook a averti qu'il pourrait empêcher les utilisateurs australiens de partager des informations locales via sa plateforme. 

Si l'adoption des mesures australiennes aurait un impact limité sur les résultats de ces entreprises, il est peu probable que ces dernières puissent bloquer de la même façon leurs services si d'autres pays décidaient de mettre en œuvre un projet similaire.


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
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  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
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  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.