A Marseille, des milliers font fi des restrictions anti-Covid pour un carnaval

Les gens profitent d'un carnaval non autorisé sur la rue Canebière, à Marseille, dans le sud de la France, le 21 mars 2021 (Photo, AFP).
Les gens profitent d'un carnaval non autorisé sur la rue Canebière, à Marseille, dans le sud de la France, le 21 mars 2021 (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Lundi 22 mars 2021

A Marseille, des milliers font fi des restrictions anti-Covid pour un carnaval

  • Partant du quartier de La Plaine, le défilé a glissé dans l'après-midi dans la rue d'Aubagne, où des habitants n'ont pas hésité à mettre des enceintes sur les rebords des fenêtres transformant la chaussée en dance-floor géant
  • «L'irresponsabilité, les violences et les dégradations commises par les participants sont injustifiables», a condamné la préfète de police

MARSEILLE: Déguisés en tournesol, boulanger ou gorille, des milliers de personnes, majoritairement jeunes et non-masquées, ont défié dimanche à Marseille, dans le sud de la France, les restrictions sanitaires contre la Covid-19 pour un carnaval vécu comme un «exutoire» mais jugé totalement «irresponsable» par la police et des élus.

«Je suis en colère. L'attitude égoïste de quelques irresponsables est inacceptable. Rien ne justifie qu'on détruise les efforts collectifs pour endiguer le virus», a réagi sur Twitter le maire de Marseille Benoît Payan.  

«L'irresponsabilité, les violences et les dégradations commises par les participants sont injustifiables», a condamné la préfète de police Frédérique Camilleri.

Mais pour Romain, 26 ans, «les jeunes en ont marre d'être confinés». «Il n'y a pas de personnes âgées fragiles là, que des jeunes», ajoute, sans donner son nom de famille, le jeune homme déguisé en boulanger dans le cortège avec plumes et paillettes qui a traversé une partie du centre de la deuxième ville de France.

Partant du quartier de La Plaine, le défilé a glissé dans l'après-midi dans la rue d'Aubagne, où des habitants n'ont pas hésité à mettre des enceintes sur les rebords des fenêtres transformant la chaussée en dance-floor géant. 

«Je connais plein de potes qui partent à Madrid où tout est ouvert donc ça fait du bien de voir ça», estimait de son côté Quentin, interne en médecine de 26 ans qui avait son masque... de lion et préférait lui aussi ne pas donner son nom de famille.

A côté de lui passaient des gorilles, un faux Didier Raoult, l'infectiologue en poste à Marseille à l'origine d'une polémique sur un traitement médicamenteux au début de la pandémie.

photo
Marseille n'est pas concernée par les nouvelles restrictions entrées en vigueur samedi pour au moins quatre semaines dans 16 départements dont les Alpes-Maritimes proches (Photo, AFP).

«C'est un événement non déclaré qu'on ne juge pas du tout responsable car les gestes barrières ne sont pas respectés. Nous effectuons des contrôles aux abords du cortège, notamment sur le port du masque et les contrevenants seront verbalisés», avait indiqué la préfecture de police dans un premier temps, estimant le nombre de participants à 6 500.

Neuf interpellations, Beauvau dénonce un rassemblement «inacceptable»

Le carnaval organisé dimanche à Marseille en dépit des restrictions sanitaires contre le Covid-19 est « totalement inacceptable », a déclaré lundi la porte-parole du ministère de l'Intérieur qui a fait état de neuf interpellations et de plusieurs « dizaines de verbalisations ».

« C'est tout à fait inacceptable alors que tous les Français font des efforts, s'adaptent, s'organisent pour respecter au maximum les différentes réglementations qui ont lieu pour lutter contre cette épidémie, on voit un certain nombre de fêtards qui ont, dans l'irresponsabilité totale, participé à ce carnaval », a réagi Camille Chaize sur Franceinfo, à propos de ce carnaval qui a rassemblé 6 500 personnes pour la plupart non masquées. 

« Il y a eu plusieurs dizaines de verbalisations, des interpellations au nombre de neuf, des gardes à vue sont encore en cours et je crois savoir qu'il y a actuellement des liens avec le procureur de la République pour judiciariser au maximum », a-t-elle ajouté. 

A la question de savoir pourquoi les forces de l'ordre n'étaient pas intervenues en amont, elle a répondu : « La dispersion de la foule a eu lieu à 18H00, en terme d'ordre public on attend toujours le moment où on peut intervenir sans causer de troubles : il y avait là des familles, on n’utilise pas des armes de force intermédiaire contre des familles et un public festif ».

« Donc on a attendu le bon moment et notamment le moment où (ont débuté) des dégradations contre un manège et contre différents mobiliers urbains », a-t-elle ajouté.

La pression a encore augmenté sur les services de réanimation en France avec plus de 4 400 malades de Covid-19, soit le chiffre le plus élevé depuis fin novembre, selon les chiffres de Santé Publique France publiés dimanche.

Les carnavaliers déchaînés sont ensuite descendus sur la Canebière où ils ont brûlé leurs traditionnels chars, certains montant sur le manège à côté en dansant sur les barres du carrousel.

«Catharsis» d'un jour 

Samuel dans la foule était un des rares avec un enfant. «J'avais un peu peur, du coup j'avais double masque», un contre la Covid et un vénitien pour le carnaval. 

«C'est très fort, il y a comme une catharsis, tout le monde est là, se retrouve. Un peu comme un jour exutoire où tout est permis» a commenté Samuel qui ne souhaite pas non plus décliner son identité complète.

Mais, comme d'autres, il se demande si cette entorse collective aux règles ne risque pas d'accélérer un resserrement des restrictions ici. 

«A Dunkerque, il y a eu des titres sur le fait que des gens auraient fêté le carnaval en cachette et juste derrière il y a eu des restrictions supplémentaires», ajoute-t-il.  

Vers 18H30 (17H30 GMT), les forces de l'ordre sont intervenues à deux pas du Vieux-Port pour disperser le rassemblement et sept personnes ont été interpellées, selon la préfecture de police.

Marseille n'est pas concernée par les nouvelles restrictions entrées en vigueur samedi pour au moins quatre semaines dans 16 départements dont les Alpes-Maritimes proches. 

Mais les restrictions habituelles pour lutter contre la propagation de la Covid-19 s'y appliquent, dont la limitation des rassemblements et le port obligatoire du masque.

L'année dernière le carnaval de La Plaine avait été annulé avec le premier confinement.


La France rapatrie treize femmes et enfants depuis les camps en Syrie, une première depuis deux ans

La Française Emilie Konig marche dans le camp Al-Roj, dans le nord-est de la Syrie, le 28 mars 2021, où elle est détenue avec d'autres personnes soupçonnées d'être des proches de membres présumés du groupe Daesh. (AFP)
La Française Emilie Konig marche dans le camp Al-Roj, dans le nord-est de la Syrie, le 28 mars 2021, où elle est détenue avec d'autres personnes soupçonnées d'être des proches de membres présumés du groupe Daesh. (AFP)
Short Url
  • La France a rapatrié dix enfants et trois femmes détenus dans des camps jihadistes en Syrie, marquant la première opération du genre depuis deux ans
  • Deux femmes ont été placées en garde à vue, et une troisième présentée à un juge antiterroriste

PARIS: La France a rapatrié tôt mardi matin dix enfants et trois femmes âgées de 18 à 34 ans qui étaient détenus dans des camps de prisonniers jihadistes dans le nord-est de la Syrie, une première depuis deux ans.

Parmi les femmes, "deux ont été placées en garde à vue, sur commission rogatoire du juge d'instruction", a annoncé le Parquet national antiterroriste (Pnat) dans un communiqué.

"Une autre femme, faisant l'objet d'un mandat d'arrêt, sera présentée à un juge d'instruction dans la journée" en vue d'une possible mise en examen, a-t-il ajouté.

"Les mineurs sont pris en charge dans le cadre de procédures d'assistance éducative sous la responsabilité du parquet" de Versailles, a indiqué le Pnat, qui "assurera le suivi centralisé des mineurs concernés, en lien avec les parquets territoriaux".

"La France remercie les autorités syriennes de transition ainsi que l'administration locale du Nord-Est syrien qui a rendu possible cette opération", a déclaré de son coté le porte-parole du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères.

Cette opération est une première depuis juillet 2023 en France, où ces retours restent une question sensible, dix ans après la vague d'attentats jihadistes sur le sol national.

Au total, 179 enfants et 60 femmes adultes ont été rapatriées depuis 2019, précise une source diplomatique.

Mais ces opérations avaient cessé à l'été 2023, faute de volontaires selon les autorités, et ce malgré des condamnations internationales dont celle de la Cour européenne des droits de l'Homme en 2022.

- "Arbitraire" -

"Pour les familles qui attendaient leurs petits-enfants, neveux et nièces depuis plus de six ans, c'est un immense et indescriptible soulagement", a déclaré l'avocate des femmes rapatriées, Marie Dosé, dans un communiqué transmis à l'AFP.

Mais "la France laisse derrière elle 110 autres enfants français, toujours détenus dans le camp Roj", l'un des camps contrôlés comme d'autres centres et prisons par les forces kurdes, depuis plus de six ans, dénonce-t-elle.

Des dizaines de milliers de personnes, d'une cinquantaine de nationalités et soupçonnées de liens avec l'organisation jihadiste État islamique, sont retenues dans ces camps.

En juin, quelque 120 enfants et une cinquantaine de femmes françaises y étaient encore retenus, selon le Collectif des Familles unies, qui rassemble leurs proches.

Après ce rapatriement nocturne, ce collectif a rediffusé sur X mardi matin son message habituel dénonçant la détention sur place d'enfants "coupables de rien" dans "des conditions indignes".

Car pour ces familles, rien n'est encore réglé. "Une nouvelle fois, la France fait le choix de l'arbitraire", regrette Marie Dosé.

"La France, qui refusait de rapatrier des enfants tant que leurs mères n'avaient pas donné leur accord, refuse aujourd'hui leur retour alors qu'ils sont devenus majeurs. Ce faisant et plus que jamais, la France décide donc de faire payer à ces enfants le choix de leurs parents", estime-t-elle aussi.

Elle dénonce également le sort de femmes sans enfant ou dont les enfants sont décédés, et que la France refuse désormais de rapatrier, ainsi que d'enfants nés en France et "conduits de force en Syrie" avant de pouvoir acquérir la nationalité, ou de jeunes majeurs enfermés dans d'autres lieux de détention syriens.

Pour Matthieu Bagard, responsable du pôle expertise Syrie de l'ONG Avocats sans frontières France, "ce rapatriement démontre une nouvelle fois que la France a la possibilité d'organiser ces opérations". Mais il déplore lui aussi la situation des femmes et jeunes majeurs toujours "illégalement détenus".

En février, l'administration kurde a annoncé, en coordination avec l'ONU, son intention de vider d'ici fin 2025 les camps du nord-est de la Syrie des déplacés syriens et irakiens, y compris les proches présumés de jihadistes.


Après «Bloquons tout» et les promesses de «rupture», les syndicats dans la rue jeudi

"Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées. (AFP)
"Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées. (AFP)
Short Url
  • Après sa rencontre avec Sébastien Lecornu lundi, la cheffe de file de la CGT, Sophie Binet, se montrait plus que jamais déterminée, malgré l'abandon de la suppression de deux jours fériés samedi
  • Dès son arrivée à Matignon, Sébastien Lecornu avait promis des "ruptures sur le fond" et "pas que sur la forme"

PARIS: "Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées.

Après sa rencontre avec Sébastien Lecornu lundi, la cheffe de file de la CGT, Sophie Binet, se montrait plus que jamais déterminée, malgré l'abandon de la suppression de deux jours fériés samedi. "(Il) ne s'est engagé à rien du tout. Aucune des mesures catastrophiques du musée des horreurs de M. Bayrou n'est enterrée !", a-t-elle lancé.

Dès son arrivée à Matignon, Sébastien Lecornu avait promis des "ruptures sur le fond" et "pas que sur la forme". Depuis vendredi, il reçoit les syndicats représentatifs - à l'exception de Frédéric Souillot (FO) qui souhaite le rencontrer après le 18. Mais ces derniers maintiennent leur appel à la mobilisation du 18, espérant peser de tout leur poids sur les futures orientations budgétaires.

CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, FSU et Solidaires seront ainsi unis jeudi dans la rue, pour la première fois depuis le 6 juin 2023 - date de la dernière mobilisation contre la réforme des retraites.

Les mesures avancées cet été sont "d'une brutalité sans précédent", dénonçaient-ils fin août dans un communiqué commun, regrettant que l'ancien gouvernement choisisse "encore une fois de faire payer les travailleuses et les travailleurs, les précaires, les retraité·es, les malades".

Ils pointent "des coupes dans les services publics, (...), une énième réforme de l'assurance chômage, le gel des prestations sociales et celui des salaires des fonctionnaires comme des contractuel·les, la désindexation des pensions de retraites, le doublement des franchises médicales, la remise en cause de la 5ème semaine de congés payés…".

L'abandon de la suppression de deux jours fériés, unanimement décriée par le monde syndical, constitue "une première victoire", qui "confirme que nous sommes en position de force", a estimé Sophie Binet.

Même la CFDT, pourtant peu rompue aux cortèges syndicaux, maintient sa participation: vendredi, Marylise Léon a réaffirmé que son syndicat était "plus que jamais motivé pour aller dans la rue", à l'issue de son entrevue avec Sébastien Lecornu.

"Le budget tel qu'il a commencé à être construit n'est pas compatible avec la justice sociale, fiscale et environnementale donc il y a vraiment besoin de le revoir de fond en comble", a-t-elle estimé lundi sur France Inter.

Sur la durée ? 

Sur la taxation des hauts patrimoines, revenue au cœur du débat, Mme Léon a pourtant apprécié que le Premier ministre dise être conscient de la nécessité de "faire quelque chose".

"Le budget, il va se décider dans la rue", insiste Mme Binet. Ainsi, "il faut faire une démonstration de force jeudi prochain et après", laissant entrevoir une mobilisation dans la durée.

Lundi, la CGT annonçait déjà plus de 220 manifestations, un chiffre encore amené à évoluer.

Les organisations syndicales parviendront-elles à dépasser l'affluence du mouvement citoyen "Bloquons tout" - qui a rassemblé près de 200.000 personnes le 10 septembre selon le ministère de l'Intérieur, sans toutefois parvenir à paralyser le pays ? Les manifestants du 10, parfois méfiants vis-à-vis des syndicats, participeront-ils à cette nouvelle journée ?

Aucune inquiétude côté syndical: "Nous avons déjà d'excellents retours sur la mobilisation de jeudi", assure Frédéric Souillot (FO).

"Nous avons l'objectif d'avoir un million de personnes avec nous", avance de son côté Cyril Chabanier (CFTC).

"La colère sociale est toujours là", abonde Julie Ferrua, co-déléguée générale de Solidaires.

De leur côté, les autorités s'attendent à une mobilisation plus importante que le 10 septembre et craignent la présence de plusieurs centaines de manifestants radicaux dans des cortèges. Une cellule de crise sera ouverte dès mardi au ministère de l'Intérieur.

Après le 18, ce sera le tour des agriculteurs de la FNSEA, le 26 septembre, de mener "une grande journée d'actions" autour des échanges internationaux de produits agricoles.


Lecornu va mettre fin aux "avantages à vie" des ex-ministres dès 2026

Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu participe à une réunion alors qu'il visite le centre de santé départemental à Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu participe à une réunion alors qu'il visite le centre de santé départemental à Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
Short Url
  • Le Premier ministre Sébastien Lecornu concrétise une promesse phare pour réduire le « décalage » entre les élites politiques et la réalité des Français, dans un contexte de forte défiance envers sa nomination

PARIS: Fini le chauffeur et la voiture de fonction "à vie" pour les anciens de Matignon: les avantages octroyés aux ex-Premiers ministres seront "supprimés" dès 2026, a annoncé lundi Sébastien Lecornu, concrétisant l'une de ses premières promesses, très symbolique pour l'opinion.

Il n'est "pas concevable" que les anciens ministres "puissent bénéficier d'avantages à vie en raison d'un statut temporaire", a écrit le locataire de Matignon sur X, confirmant la mise en place de cette réforme dès le 1er janvier 2026.

"La protection policière ne sera accordée aux anciens Premiers ministres et ministres de l'Intérieur que pour une durée limitée, et reconduite en fonction de la réalité du risque. Tous les autres moyens mis à disposition des anciens Premiers ministres à vie le seront dorénavant pour une durée limitée", a expliqué M. Lecornu sur ce réseau social.

Sollicité par l'AFP, Matignon a expliqué que le gouvernement avait préparé une "instruction" à destination du Secrétariat général du gouvernement, en vue de revoir le décret du 20 septembre 2019, qui avait déjà restreint les privilèges accordés aux anciens Premiers ministres.

Ces derniers peuvent actuellement se voir octroyer "sur leur demande, un véhicule de fonction et un conducteur automobile", à la charge de l'Etat. Ils peuvent aussi bénéficier d'un "agent pour leur secrétariat particulier" pendant dix ans à compter de la fin de leurs fonctions et au plus tard jusqu'à ce qu'ils atteignent l'âge de 67 ans.

Des avantages qui ne s'appliquent pas pour les "ex" de Matignon lorsque ces derniers disposent déjà de ces privilèges via leur mandat (parlementaire ou local) ou leur fonction publique.

- "Mettre fin aux derniers privilèges" -

Une autre instruction du chef du gouvernement à l'attention de la Direction générale de la police nationale (DGPN) permettra de créer "un cadre" relatif à la "protection policière" des anciens Premiers ministres et ministres de l'Intérieur, a détaillé Matignon.

"On ne peut pas demander aux Français de faire des efforts si ceux qui sont à la tête de l'État n'en font pas. La réforme, ce n'est pas toujours +pour les autres+, cela crée la suspicion", avait lancé Sébastien Lecornu dans un entretien donné à plusieurs titres de la presse régionale durant le week-end.

"Beaucoup de choses ont été réglées pour les anciens présidents de la République. Je vais donc mettre fin aux derniers privilèges", avait-il encore promis, quelques jours seulement après sa prise de fonctions à Matignon, durant laquelle il s'était inquiété du "décalage" observé entre la vie politique et la vie "réelle" des Français.

Le Premier ministre, nommé mardi par Emmanuel Macron après la chute de François Bayrou, met ainsi en musique l'une de ses premières promesses, alors qu'il consulte en parallèle les forces politiques, syndicales et patronales en vue de former un gouvernement susceptible de survivre aux menaces de censure des oppositions.

Il doit aussi batailler contre une opinion publique très défiante vis-à-vis de sa nomination, même si les chiffres de confiance des Français à son égard varient selon les instituts de sondage.

Son prédécesseur, François Bayrou, avait déjà annoncé vouloir passer au crible ces privilèges ministériels: il avait confié fin août une mission à l'ex-député socialiste René Dosière pour identifier les "avantages indus, excessifs, inacceptables" dans un contexte de dérapage des finances publiques.

En réalité, l'économie à espérer de ces annonces est dérisoire par rapport aux dizaines de milliards d'euros recherchées par les gouvernements successifs. Les privilèges accordés au titre du décret de 2019 (chauffeur, secrétariat, véhicule) ont coûté 1,58 million d'euros à l'Etat en 2024, selon le gouvernement.

Un montant auquel il faut ajouter les dépenses de protection policière, évaluées à 2,8 millions d'euros par an dans un rapport parlementaire de 2019.