Après la Covid, une autre mondialisation est-elle possible?

Une pharmacie parisienne affiche la mention « plus de masques » sur sa devanture, la France essuyant une pénurie de ceux-ci au début de l’épidémie (Photo, AFP).
Une pharmacie parisienne affiche la mention « plus de masques » sur sa devanture, la France essuyant une pénurie de ceux-ci au début de l’épidémie (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 22 mars 2021

Après la Covid, une autre mondialisation est-elle possible?

  • L'hypermondialisation n'est plus de mise au moment où les Etats cherchent à recouvrer une part de leur souveraineté industrielle
  • Antérieur à l'irruption de la Covid-19, le procès de la mondialisation, synonyme de délocalisations et de chômage de masse, a été ravivé par la pandémie

PARIS: La crise sanitaire n'a pas débouché sur la « démondialisation » désirée par certains, mais l'hypermondialisation n'est plus de mise au moment où les Etats cherchent à recouvrer une part de leur souveraineté industrielle, selon des économistes interrogés.

Antérieur à l'irruption de la Covid-19, le procès de la mondialisation, synonyme de délocalisations et de chômage de masse, a été ravivé par la pandémie qui, partie de Chine, s'est propagée à toute la planète à la faveur des flux de voyageurs. 

Plus encore, la pénurie de biens vitaux - masques, respirateurs ou anesthésiants - créait un électrochoc dans de nombreux pays, soudain conscients de l'ampleur de leur dépendance à l'égard de la Chine.

Peut-on dire cependant, comme l'affirme l'ancien ministre français de l'Economie Arnaud Montebourg, que la « démondialisation est en train de se réaliser » à la faveur de cette crise ?  

« Aujourd'hui, on ne voit pas de démondialisation. On a vu un ralentissement des flux commerciaux en plein pic du confinement mais qui était lié à l'arrêt de la production, et non aux chaînes de valeur mondiales », estime Cécilia Bellora, économiste au Cepii (Centre d'études prospectives et d'informations internationales).

En 2020, les échanges de marchandises ont ainsi baissé de « seulement » 9,2%, selon l'Organisation mondiale du commerce (OMC), qui table sur un rebond de 7,2% en 2021.

De manière inattendue, « les produits les plus intégrés aux chaînes de valeur sont ceux dont le commerce a le moins chuté, à l’inverse de ce qui s'est passé en 2008 », affirme Bellora. 

En effet, la crise actuelle a affecté les « services plutôt que le manufacturier » alors que la déroute du secteur bancaire en 2008 avait privé les entreprises de « crédits pour commercer ».

Choc du Brexit

Pour Isabelle Méjean, professeure à l'Ecole polytechnique, « alors que la logistique était très compliquée », les chaînes de valeur mondiales ont même étonnamment bien résisté.

Elle prend l'exemple de l'automobile où, malgré les tensions actuelles dans l'approvisionnement en semi-conducteurs, la production ne s'est pas arrêtée durablement alors que « 10 000 composants », produits aux quatre coins du monde, entrent dans la fabrication d'une voiture. 

Pour cette économiste, le Brexit a représenté ainsi un « choc beaucoup plus gros » que le virus pour l'Europe, étant donné l'importance du Royaume-Uni et son intégration très poussée dans les chaînes de valeur. 

En janvier, les exportations britanniques vers l'UE ont plongé de 41%, tandis que les importations en provenance du Vieux continent ont reculé de 29%. 

Pour l'ancien directeur de l'OMC Pascal Lamy, la crise de la Covid-19 a révélé « les vertus et les défauts de cette mondialisation ». 

D'un côté, « on a assisté à la production scientifique d’un vaccin en un temps absolument record ». De l'autre, cet ancien commissaire européen au Commerce pointe du doigt « la vitesse de propagation de cette épidémie, et le fait que nous n'avons pas de gouvernance correspondant à ce type de menace ». 

Pour lui, « cette crise va changer le mode de la mondialisation : on ne va pas démondialiser mais changer de mondialisation, avec des Etats qui pèseront davantage sur les décisions économiques ».

« Carbone et commerce »

C'est déjà le cas. Critiquant les pénuries « inacceptables » qui ont mis en danger l'an passé les soignants, le président américain Joe Biden a signé fin février un décret visant à passer au crible les chaînes d'approvisionnement américaines en biens « essentiels ». 

Un examen qui pourrait déboucher sur des relocalisations aux Etats-Unis, conscients de leur trop grande dépendance à l'égard d'une Chine qui produit par exemple l'essentiel des terres rares.  

Hydrogène, batteries électriques, semi-conducteurs, ordinateurs quantiques : de son côté la Commission européenne multiplie les annonces pour renforcer la souveraineté technologique de l'Europe face à la Chine et aux Etats-Unis.

Mais pour Isabelle Méjean, la mondialisation post-Covid devra aussi « lier les questions de carbone et de commerce », car « on importe beaucoup notre pollution ».

Si le projet de taxe carbone aux frontières de l'UE, approuvé début mars par le Parlement européen, va dans le bon sens, il doit s'inscrire dans le cadre multilatéral de l'OMC, selon l'économiste. Au risque sinon de provoquer de nouvelles « tensions protectionnistes », qui auraient pour effet de faire monter les prix en Europe.

Adversaire résolu de la « démondialisation », l'économiste en chef de Natixis, Patrick Artus, a calculé lui que « déglobaliser réduirait le pouvoir d'achat des Français de 3,3% ». 


Monnaie numérique, IA et santé mentale au programme de l’Open Forum Riyadh

Des représentants gouvernementaux, des artistes, des leaders de la société civile, des entrepreneurs et des PDG de multinationales interviendront au cours des différentes tables rondes. (Photo, AFP)
Des représentants gouvernementaux, des artistes, des leaders de la société civile, des entrepreneurs et des PDG de multinationales interviendront au cours des différentes tables rondes. (Photo, AFP)
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  • Cet événement se déroulera parallèlement à la réunion spéciale du WEF sur la collaboration mondiale
  • «Dans le cadre de Vision 2030 de l’Arabie saoudite, Riyad est devenue une capitale mondiale pour le leadership éclairé, l’action et les solutions»

LONDRES: L'Open Forum Riyadh, une série de tables rondes publiques qui se tiendront dans la capitale saoudienne dimanche et lundi, «mettra l’accent sur les défis et les opportunités au niveau mondial», selon les organisateurs.

Cet événement, fruit d’une collaboration entre le Forum économique mondial (WEF) et le ministère saoudien de l’Économie et de la Planification, se déroulera parallèlement à la réunion spéciale du WEF sur la collaboration mondiale, la croissance et l’énergie pour le développement, qui aura lieu à Riyad les 28 et 29 avril.

«Dans le cadre de Vision 2030 de l’Arabie saoudite, Riyad est devenue une capitale mondiale pour le leadership éclairé, l’action et les solutions, favorisant l’échange de connaissances et d’idées innovantes», affirme dans un communiqué de presse Faisal F. Alibrahim, ministre saoudien de l’Économie et de la Planification. Ce dernier précise que l’organisation de l’Open Forum de cette année à Riyad «témoigne de l’influence et du rôle croissants de la ville sur la scène internationale».

Le forum est ouvert au public et «vise à faciliter le dialogue entre les leaders éclairés et le grand public sur une série de sujets, notamment les défis environnementaux, la santé mentale, les monnaies numériques, l’intelligence artificielle [IA], le rôle des arts dans la société, l’entrepreneuriat moderne et les villes intelligentes», indique un communiqué.

Au programme, des tables rondes qui portent sur l’impact des monnaies numériques au Moyen-Orient, sur le rôle de la culture dans la diplomatie publique, sur le développement urbain pour les villes intelligentes ainsi que sur les actions qui ont pour objectif d’améliorer le bien-être mental dans le monde.

L’Open Forum, qui a lieu chaque année, a été créé en 2003 dans le but de permettre à un public plus large de participer aux activités du WEF. Il a été organisé dans plusieurs pays, dont le Cambodge, l’Inde, la Jordanie et le Vietnam.

Des représentants gouvernementaux, des artistes, des leaders de la société civile, des entrepreneurs et des PDG de multinationales interviendront au cours des différentes tables rondes.

Parmi les intervenants de cette année figurent Yazid A. al-Humied, gouverneur adjoint et responsable des investissements dans la région Mena au Fonds public d’investissement saoudien (PIF), la princesse Rima bent Bandar al-Saoud, ambassadrice d’Arabie saoudite aux États-Unis, et la princesse Beatrice, fondatrice du Big Change Charitable Trust et membre de la famille royale britannique.

Michèle Mischler, responsable des affaires publiques suisses et de la durabilité au WEF, a fait savoir dans un communiqué de presse que la participation du public aux tables rondes de l’Open Forum «favorise la diversité des points de vue, enrichit le dialogue mondial et renforce les solutions collectives pour un avenir plus inclusif et durable».

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le FMI ouvre son premier bureau dans la région Mena à Riyad

Le bureau permettra une collaboration plus étroite entre le FMI et les institutions régionales. (Shutterstock)
Le bureau permettra une collaboration plus étroite entre le FMI et les institutions régionales. (Shutterstock)
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  • Ce nouveau bureau a pour but de renforcer le développement des capacités, la surveillance régionale et la communication
  • Il permettra une collaboration plus étroite entre le FMI et les institutions régionales, les gouvernements et les autres parties prenantes

RIYAD: Le Fonds monétaire international (FMI) a ouvert son premier bureau dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (Mena) à Riyad.

Le bureau a été inauguré lors de la Conférence régionale conjointe sur les politiques industrielles de diversification, organisée conjointement par le FMI et le ministère des Finances le 24 avril.

Selon l’agence de presse saoudienne (SPA), ce nouveau bureau a pour but de renforcer le développement des capacités, la surveillance régionale et la communication afin de favoriser la stabilité, la croissance et l’intégration régionale, promouvant ainsi les partenariats au Moyen-Orient et au-delà.

En outre, le bureau permettra une collaboration plus étroite entre le FMI et les institutions régionales, les gouvernements et les autres parties prenantes, indique la SPA. Cette dernière indique que le FMI a remercié l’Arabie saoudite de sa contribution financière visant à renforcer le développement des capacités dans ses États membres, y compris les pays fragiles.

Abdoul Aziz Wane, chef de mission chevronné du FMI qui a une connaissance approfondie de l’institution et dispose d’un vaste réseau de décideurs et d’universitaires dans le monde entier, sera le premier directeur du bureau de Riyad.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L'UE impose des règles renforcées au champion chinois du prêt à porter Shein

Shein, spécialiste de la "fast-fashion", qui a son siège social à Singapour, vend ses vêtements exclusivement en ligne, auprès d'une clientèle jeune très présente sur les réseaux sociaux. (Photo, AFP)
Shein, spécialiste de la "fast-fashion", qui a son siège social à Singapour, vend ses vêtements exclusivement en ligne, auprès d'une clientèle jeune très présente sur les réseaux sociaux. (Photo, AFP)
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  • L'application fondée en Chine en 2012, emblème des dérives sociales et environnementales de la mode à petits prix, devient la 23ème plateforme, aux côtés de X, TikTok, Google ou Facebook, à se voir imposer les règles de l'UE les plus strictes
  • Shein revendique chaque mois 108 millions d'utilisateurs de son site dans l'Union européenne, soit nettement plus que le seuil de 45 millions à partir duquel les acteurs peuvent être soumis à la régulation renforcée

BRUXELLES: Bruxelles a ajouté vendredi le champion du prêt-à-porter bon marché Shein à la liste des très grandes plateformes en ligne soumises à des contrôles renforcés dans le cadre de la nouvelle législation sur les services numériques (DSA).

L'application fondée en Chine en 2012, emblème des dérives sociales et environnementales de la mode à petits prix, devient la 23ème plateforme, aux côtés de X, TikTok, Google ou Facebook, à se voir imposer les règles de l'UE les plus strictes pour "protéger les consommateurs contre les contenus illégaux", a annoncé la Commission européenne dans un communiqué.

Shein, spécialiste de la "fast-fashion", qui a son siège social à Singapour, vend ses vêtements exclusivement en ligne, auprès d'une clientèle jeune très présente sur les réseaux sociaux. Elle revendique chaque mois 108 millions d'utilisateurs de son site dans l'Union européenne, soit nettement plus que le seuil de 45 millions à partir duquel les acteurs peuvent être soumis à la régulation renforcée.

Ces entreprises doivent notamment analyser les risques liés à leurs services en matière de diffusion de contenus ou produits illégaux et mettre en place les moyens pour les atténuer. Cette analyse doit faire l'objet d'un rapport annuel remis à la Commission européenne qui assume désormais un rôle de gendarme du numérique dans l'UE.

"Des mesures devront être mises en œuvre pour protéger les consommateurs contre l'achat de produits dangereux ou illégaux, en mettant particulièrement l'accent sur la prévention de la vente et de la distribution de produits qui pourraient être nocifs pour les mineurs", a expliqué la Commission.

Les très grandes plateformes doivent aussi fournir au régulateur un accès à leurs algorithmes pour que le respect du règlement puisse être contrôlé. Elles doivent se soumettre une fois par an à un audit externe indépendant, à leurs propres frais.

Ces obligations s'appliqueront à Shein à partir de fin août.

Les contrevenants aux règles peuvent se voir infliger des amendes jusqu'à 6% de leur chiffre d'affaires annuel mondial, voire une interdiction d'opérer en Europe en cas de violations graves et répétées.

Réagissant à sa désignation comme très grande plateforme vendredi, Shein a affirmé sa volonté de se conformer aux règles européennes. "Nous partageons l'ambition de la Commission de faire en sorte que les consommateurs de l'UE puissent faire leurs achats en ligne en toute sérénité et nous nous engageons à jouer notre rôle", a déclaré Leonard Lin, responsable mondial des affaires publiques du groupe.

Les très grandes plateformes concernées par les contrôles européens renforcés incluent aussi le géant du commerce en ligne Amazon et son concurrent AliExpress, filiale du géant chinois Alibaba.

Une autre application chinoise de e-commerce, Temu, devrait s'ajouter prochainement à cette liste après avoir annoncé en avril qu'elle comptait environ 75 millions d'utilisateurs mensuels dans l'Union européenne.

Le DSA a montré son efficacité cette semaine en imposant à TikTok de suspendre dans l'UE la fonctionnalité de sa nouvelle application TikTok Lite qui récompense les utilisateurs pour le temps passé devant les écrans.

La Commission craignait des risques d'addiction, notamment pour les adolescents, et a ouvert une enquête. Elle soupçonne le réseau social, propriété du groupe chinois ByteDance, de ne pas avoir conduit l'analyse obligatoire des risques, en particulier pour la santé mentale des utilisateurs.

Toujours dans le cadre du DSA, Bruxelles a aussi ouvert en décembre une enquête visant le réseau social X pour des manquements présumés aux obligations de modération des contenus.