Les supercalculateurs, un enjeu de la bataille mondiale pour la domination technologique

Le plus puissant du monde est depuis juin dernier un supercalculateur japonais Fugaku, développé par le groupe informatique nippon Fujitsu. (Photo, AFP)
Le plus puissant du monde est depuis juin dernier un supercalculateur japonais Fugaku, développé par le groupe informatique nippon Fujitsu. (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 10 avril 2021

Les supercalculateurs, un enjeu de la bataille mondiale pour la domination technologique

  • Washington a restreint les exportations de technologies américaines vers 7 entités chinoises
  • «Aujourd'hui, il n'y a quasiment plus de “crash test” d'automobiles, tout est réalisé par le calcul», explique un expert français de ces machines

PARIS: En ciblant cette semaine les ambitions chinoises dans les «supercalculateurs», les États-Unis ont braqué les projecteurs sur cette industrie stratégique, enjeu d'une compétition féroce à laquelle se mêlent aussi le Japon et l'Union européenne.

Jeudi, Washington a restreint les exportations de technologies américaines vers 7 entités chinoises, fabricants de supercalculateurs ou bien entités de recherche travaillant dans ce domaine, en arguant notamment de la menace qu’elles représentaient pour la sécurité nationale.

«Les capacités en matière de supercalculateurs sont cruciales pour le développement d'un grand nombre - peut-être même de la quasi-totalité - d'armes modernes et de systèmes de sécurité nationale, dont les armes nucléaires et les armes hypersoniques», a souligné la secrétaire au Commerce américaine, Gina Raimondo.

Dans le civil, ces ordinateurs surpuissants sont utilisés de longue date dans la météorologie, la prospection pétrolière ou la recherche scientifique. Ils sont de plus en plus utilisés dans l'industrie traditionnelle, qui ont besoin de leurs formidables capacités à simuler le réel pour tester leurs produits, ou en inventer de nouveaux.

Ils permettent de remplacer ou compléter des expérimentations soit dangereuses (accidents), soit sur des durées très longues ou très courtes (climat), à des échelles de taille très petites ou au contraire gigantesques (protéines, astrophysique). Un supercalculateur peut également simuler un essai nucléaire.

«Aujourd'hui, il n'y a quasiment plus de “crash test” d'automobiles, tout est réalisé par le calcul», explique un expert français de ces machines, qui n'est pas autorisé à s'exprimer publiquement sur le sujet.

«En aéronautique, vous ne testez plus une sonde, une aile ou un pare-brise dans son coin, vous avez besoin de simuler les interactions de tous les composants ensemble».

Les supercalculateurs actuels, des monstres qui s'étalent sur des dizaines, voire des centaines de mètres carrés d'armoires métalliques et de câbles, ont des puissances à donner le vertige, se mesurant en «pétaflops», des millions de milliards d'opérations par seconde. 

Le plus puissant du monde est depuis juin dernier un supercalculateur japonais Fugaku, développé par le groupe informatique nippon Fujitsu.  

Il est capable d'atteindre, en pointe, les 442 petaflops, soit 442 millions de milliards d'opération par seconde, selon les derniers chiffres de la liste «Top500» qui fait figure d'arbitre mondial.

La Chine pas encore complètement autonome 

Mais les États-Unis et la Chine font globalement la course en tête en matière de puissance installée, avec des investissements colossaux pour atteindre les premiers le supercalculateur «exafloppique», dépassant le seuil d'un milliard de milliard d'opérations par seconde.

«Je pense que les États-Unis pourraient y arriver en 2022. Et pour les Chinois, on ne sait pas - il n'est pas impossible qu'ils prennent les États-Unis de vitesse», indique l'expert français.

La décision de Washington risque toutefois de retarder la Chine, qui n'est pas complètement autonome et a besoin de technologies américaines pour bâtir ces machines.

La Chine n'a pas encore prouvé par exemple sa capacité à fabriquer les processeurs au cœur des supercalculateurs, ni à développer les langages nécessaires pour les exploiter- elle dépend de ceux créés par l'Américain Intel ou par ARM, récemment rachetée par l'Américain Nvidia. 

«Si les Chinois ne peuvent utiliser ces types de langage, il va falloir qu'ils en inventent un troisième», explique l'expert.

Mais personne ne doute de la capacité de la Chine, qui investit chaque année des centaines de millions de dollars dans ces supercalculateurs, à in fine parvenir à l'autonomie sur chacun des composants de ces machines.

Au fond, les restrictions à l'accès aux technologies américaines ne sont que des «peaux de banane» glissées sous les pas du géant chinois, qui peuvent le «retarder» mais pas l'empêcher d'atteindre son but, souligne Philippe Notton, le directeur général de SiPearl, une start-up française qui travaille sur la conception d'un processeur européen pour les supercalculateurs du futur.

Derrière les États-Unis et la Chine, le Japon et l'Europe poussent également les feux. 

L'Europe dispose d'un constructeur, Atos (ex-Bull), dont la première machine est au 7e rang du classement Top 500 (44 petaflops, pour une machine installée dans le centre de calcul allemande de Jülich (Rhénanie).

La Commission européenne, des États européens et des industriels ont créé une entreprise commune, EuroHPC, pour fédérer leurs efforts dans le domaine et construire à une échéance qui n'est pas encore fixée, deux machines exafloppiques.


L'Inde cherche à porter la voix du « Sud global » entre le G7 et le Brics

Cette photographie prise et publiée par le Bureau d'information de la presse indienne (PIB) le 6 juin 2025 montre le Premier ministre indien Narendra Modi tenant le drapeau national lors de l'inauguration du pont ferroviaire de Chenab, qui fait partie de la liaison ferroviaire du Cachemire, à Reasi, dans l'État de Jammu-et-Cachemire. (PIB) / AFP)
Cette photographie prise et publiée par le Bureau d'information de la presse indienne (PIB) le 6 juin 2025 montre le Premier ministre indien Narendra Modi tenant le drapeau national lors de l'inauguration du pont ferroviaire de Chenab, qui fait partie de la liaison ferroviaire du Cachemire, à Reasi, dans l'État de Jammu-et-Cachemire. (PIB) / AFP)
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  • L'Inde n'est pas membre du Groupe des Sept (États-Unis, Japon, Allemagne, Royaume-Uni, France, Italie, Canada), mais elle est devenue une habituée de ses sommets, auxquels elle est régulièrement conviée depuis 2019.
  • « Nous contribuons activement à la diplomatie internationale et si cela peut servir de passerelle, c'est un atout pour la diplomatie internationale dans une période de relations difficiles et de tensions accrues », fait valoir M. Jaishankar.

PARIS : Invitée du G7 qui débute dimanche, mais aussi membre fondateur des Brics, l'Inde souhaite porter la voix du « Sud global », se posant en « passerelle » entre les différents acteurs de la scène internationale, affirme son ministre des Affaires étrangères dans un entretien à l'AFP.

L'Inde n'est pas membre du Groupe des Sept (États-Unis, Japon, Allemagne, Royaume-Uni, France, Italie, Canada), mais elle est devenue une habituée de ses sommets, auxquels elle est régulièrement conviée depuis 2019.

« Nous avons été un pays invité depuis plusieurs années et je pense que ça a été bénéfique pour le G7 », déclare à l'AFP Subrahmanyam Jaishankar depuis Paris, où il a clos samedi une visite en France, se félicitant d'avoir « la capacité de travailler avec différents pays sans qu'aucune relation ne soit exclusive ». 

Avec une population en passe de devenir la quatrième économie mondiale, l'Inde est l'un des pays les plus peuplés du globe. Elle siège à la table de nombreuses organisations, avec les Occidentaux au G7 ou au sein du « Quad » (Dialogue quadrilatéral pour la sécurité, avec les États-Unis, le Japon, l'Australie), mais aussi avec la Chine, la Russie et l'Iran au sein des Brics et du Groupe de Coopération de Shangaï.

« Nous contribuons activement à la diplomatie internationale et si cela peut servir de passerelle, c'est un atout pour la diplomatie internationale dans une période de relations difficiles et de tensions accrues », fait valoir M. Jaishankar.

Ancienne colonie britannique, indépendante depuis 1947, l'Inde se pose, avec le Brésil, en héraut du « Sud global », qui réunit « des pays qui ont été victimes de l'ordre mondial ces dernières années, ces derniers siècles ». 

« Dans les pays du Sud, il existe un fort ressentiment face aux inégalités de l'ordre international, une volonté de le changer, et nous en faisons pleinement partie », explique le ministre en poste depuis 2019.

« Aujourd'hui, pour des pays comme les nôtres, il est important de nous exprimer, de mener, de faire sentir notre présence. »

Cette voix passe aussi par les BRICS, devenue « l'une des principales plateformes de rassemblement pour les pays non occidentaux », dont les chefs d'État se réuniront en juillet.

Partisan de « négociations directes » pour résoudre la guerre entre l'Ukraine et la Russie, qui a frappé durement les pays du Sud, M. Jaishankar affiche son scepticisme face aux politiques de sanctions occidentales : « Ça n'a pas vraiment marché jusqu'à présent, non ? » 

Partenaire commercial et allié politique de la Russie, l'Inde pourrait se retrouver exposée en cas de sanctions contre Moscou.

« L'économie mondiale est sous tension. Plus on ajoute des facteurs de tensions, plus les difficultés seront grandes. »

Dans l'ordre mondial actuel, l'Inde doit composer avec la « discontinuité » posée par Donald Trump.

Des négociations en cours sur le sujet ont « bien avancé ».L'Inde doit également chercher « un équilibre » avec la Chine. 

Pékin soutient Islamabad, que New Delhi accuse de soutenir les activités de « terroristes » islamistes sur son sol.

Le 22 avril, une attaque au Cachemire indien a déclenché une confrontation militaire de quatre jours entre les deux pays, la plus grave depuis 1999. Narendra Modi a promis une « riposte ferme » à toute nouvelle attaque « terroriste », renforçant le spectre d'une escalade entre les deux puissances nucléaires.

« En 2008, la ville de Mumbai a été attaquée (plusieurs attentats jihadistes ont fait 166 morts) et nous avons commis l'erreur de ne pas réagir avec fermeté. Nous sommes déterminés à ne pas répéter ces erreurs. Si des terroristes pénètrent en Inde depuis et grâce au soutien d'un pays voisin, nous les poursuivrons et nous les châtierons ».

Mais l'Inde n'a jamais envisagé de recourir à l'arme nucléaire, assure-t-il : « Ces inquiétudes émanaient de personnes mal informées ».

 


Israël appelle les Iraniens à évacuer les zones proches de sites militaires

Des soldats et des membres d'une équipe de recherche et de sauvetage se rassemblent près de voitures endommagées dans la ville de Tamra, dans le nord d'Israël, à la suite d'une attaque à la roquette lancée par l'Iran dans la nuit du 15 juin 2025. (Photo par AHMAD GHARABLI / AFP)
Des soldats et des membres d'une équipe de recherche et de sauvetage se rassemblent près de voitures endommagées dans la ville de Tamra, dans le nord d'Israël, à la suite d'une attaque à la roquette lancée par l'Iran dans la nuit du 15 juin 2025. (Photo par AHMAD GHARABLI / AFP)
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  • L'armée a « demandé à toutes les personnes se trouvant actuellement dans des installations militaires en Iran, ou à proximité, d'évacuer immédiatement les lieux, précisant que leur vie était en danger ».
  • Le communiqué ne précise pas de coordonnées géographiques et n'est accompagné d'aucune carte permettant de localiser ces zones.

JERUSALEM : Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a déclaré dimanche dans un communiqué de son bureau avoir ordonné à l'armée israélienne d'émettre des avis d'évacuation à l'intention des habitants de Téhéran vivant à proximité de sites militaires.

Après cet ordre, l'armée israélienne a appelé les Iraniens à évacuer les zones « à proximité d'installations militaires » dans un communiqué publié sur le réseau social X en persan et en arabe.

L'armée a « demandé à toutes les personnes se trouvant actuellement dans des installations militaires en Iran, ou à proximité, d'évacuer immédiatement les lieux, précisant que leur vie était en danger ».

Le communiqué ne précise pas de coordonnées géographiques et n'est accompagné d'aucune carte permettant de localiser ces zones, contrairement aux communiqués de l'armée israélienne adressés aux Palestiniens de la bande de Gaza, où elle est en guerre contre le mouvement islamiste Hamas.

Cette décision fait partie d'un plan « visant à faire pression sur le régime » en créant des déplacements de population, a déclaré à l'AFP une source sécuritaire israélienne.


La Russie s'apprête à construire la première centrale nucléaire du Kazakhstan

Une vue aérienne montre le village d'Ulken (au premier plan) et le site proposé pour la centrale nucléaire près du village d'Ulken, situé sur les rives du lac Balkhash, à environ 400 kilomètres au nord d'Almaty, le 22 septembre 2024. (Photo de Ruslan PRYANIKOV / AFP)
Une vue aérienne montre le village d'Ulken (au premier plan) et le site proposé pour la centrale nucléaire près du village d'Ulken, situé sur les rives du lac Balkhash, à environ 400 kilomètres au nord d'Almaty, le 22 septembre 2024. (Photo de Ruslan PRYANIKOV / AFP)
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  • « Rosatom a été désigné chef de file du consortium international pour la construction de la première centrale nucléaire au Kazakhstan », a indiqué l'agence kazakhe pour l'énergie atomique.
  • Le Kazakhstan, immense ex-république soviétique et allié de Moscou, est le premier producteur mondial d'uranium (43 %) et le troisième fournisseur d'uranium naturel de l'Union européenne.

ALMATY, KAZAKHSTAN : Le géant russe du nucléaire Rosatom sera le principal constructeur de la première centrale nucléaire du Kazakhstan, ont annoncé samedi les autorités de ce pays d'Asie centrale, premier producteur mondial d'uranium, un chantier que convoitaient la France, la Chine et la Corée du Sud.

« Rosatom a été désigné chef de file du consortium international pour la construction de la première centrale nucléaire au Kazakhstan », a indiqué l'agence kazakhe pour l'énergie atomique.

Le Kazakhstan, immense ex-république soviétique et allié de Moscou, est le premier producteur mondial d'uranium (43 %) et le troisième fournisseur d'uranium naturel de l'Union européenne, mais souffre d'un manque cruel d'électricité pour sa consommation intérieure.

L'agence kazakhe dit désormais « étudier la question de l'obtention de financements publics à l'exportation aux dépens de la Fédération de Russie, conformément aux propositions de Rosatom ». 

Rosatom a salué la décision kazakhe dans un communiqué et promis « la construction d'une centrale nucléaire selon le projet le plus avancé et le plus efficace au monde, basé sur des technologies russes ».

« Les réacteurs VVER-1200 de troisième génération combinent des solutions techniques éprouvées avec les systèmes de protection active et passive les plus récents. Ces derniers ont été développés en stricte conformité avec les normes internationales de sécurité », a ajouté la société.

Rosatom (Russie), China National Nuclear Corporation (Chine), EDF (France) et Korea Hydro & Nuclear Power (Corée du Sud) faisaient partie des quatre entreprises pressenties.

L'agence ajoute qu'elle « continuera à travailler avec des partenaires étrangers pour former un consortium international efficace », sans donner plus de précisions. 

Ce projet de consortium international, qui n'a jamais été spécifié, s'inscrit dans la volonté du dirigeant kazakh Kassym-Jomart Tokaïev de maintenir de bonnes relations avec les grandes puissances.

Moscou, puissance historique en Asie centrale, a ainsi remporté cet appel d'offres aux dépens de la Chine, désormais incontournable dans la région. Cette annonce intervient quelques jours avant la venue du président chinois Xi Jinping au Kazakhstan pour un sommet « Asie centrale-Chine ».

La centrale, dont la construction a été validée lors d'un référendum sans surprise à l'automne, doit être bâtie près du village abandonné d'Ulken, dans le sud du pays, sur les bords du lac Balkhach, le deuxième plus grand d'Asie centrale.

En Ouzbékistan voisin, le géant russe Rosatom va construire une petite centrale nucléaire et a proposé au Kirghizistan un projet similaire.