"Au lendemain de l’explosion de Beyrouth, il est difficile de nommer l’innommable"

Michèle M. Gharios, poète et romancière libanaise (Photo, fournie).
Michèle M. Gharios, poète et romancière libanaise (Photo, fournie).
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Publié le Samedi 22 août 2020

"Au lendemain de l’explosion de Beyrouth, il est difficile de nommer l’innommable"

  • "La poésie, comme toute forme artistique, possède un atout majeur : celui de pouvoir changer le regard que nous portons sur le monde pour le transformer et le rendre meilleur"
  • "Mon attachement est palpable, il est bien là, comme un nœud au ventre, et je le vis parfois comme une malédiction tellement mon pays est complexe"

BEYROUTH: Malgré le drame qui a frappé Beyrouth le 4 août, nous avons choisi de maintenir notre entretien autour de la poésie francophone avec Michèle M. Gharios, poète et romancière libanaise, en l’articulant autour de cette terrible tragédie. 

Vous avez écrit, en réaction à l'inaction de l'État face à l'incendie qui a ravagé une partie de la montagne libanaise en octobre 2019, les mots suivants :


« Le Liban n'est pas leur pays
C'est de leurs bouches sangsues
Qu'ils le vident de son sang
Jusqu'aux larmes du ciel. »


Après avoir vécu et vu la catastrophe qui a frappé récemment Beyrouth, les mots ont-ils encore une importance pour vous ?
Au lendemain de l’explosion de Beyrouth, il est difficile de nommer l’innommable. Il ne passe pas une minute sans que je ne reçoive une mauvaise nouvelle. Les morts se comptent par dizaines, les blessés luttent pour leur survie, les disparus attendent d’être déterrés inertes des entrailles de la montagne de gravats du port de la capitale, de cette terre de miel et d’encens qui les a vu naître. Au lendemain de cet accident abject, ce crime contre l’humanité, après le choc, après le désespoir, après l’indignation, après le décompte des victimes, vient le devoir d’action, aussi difficile soit-il dans ce contexte absurde, devoir d’action nécessaire comme un cri de vie, car la vie doit l’emporter face à la mort. 
Comment ne pas écrire, ne pas « hurler en silence » ma rage face à l’horreur ? Comment rester les bras croisés ou la plume silencieuse face à l’inertie d’un gouvernement en faillite qui a permis qu’une explosion dévastatrice de cette envergure ait lieu ? Écrire, oui, il le faut, pour rapporter les faits, dénoncer, accuser, juger les responsables, pour ensuite panser nos plaies, autant physiques, matérielles que morales, pour être capable de prendre un nouveau départ. Écrire pour agir. Or, pas d’action sans verbe, et donc, pour répondre à votre question, les mots prennent toute leur importance dans ce contexte où il pourrait paraître dérisoire d’écrire, peu importe la forme, mais où l’immobilité serait impensable et où, par instinct de survie, par volonté, il faut avancer, nommer, placer les mots l’un après l’autre comme on met un pied devant l’autre pour cheminer vers la lumière du changement et tordre le cou à la mort, à l’injustice, à l’inertie.

Votre parcours et votre œuvre, notamment Nous n'irons plus en Nostalgie et À l'Aube de soi, s'illustrent par un fort attachement au Liban. Cet attachement perdure-t-il ?
« Je suis d’un autre pays que le vôtre, d’un autre quartier, d’une autre solitude », a chanté l’immense Léo Ferré. On est tous de quelque part, on naît tous d’un point originel, même lorsque nous nous voulons multiple ou électron libre, ou lorsque nous aspirons à l’universel dans notre humanité, quelque chose nous ramène inexorablement vers ce point de départ. Alors, cet attachement, comment le vivre ? Faut-il le décrier ? Faut-il le maudire ? Un proverbe bien de chez nous dit : « Celui qui renie ses origines n’a pas d’origine. » Je suis attachée au pays, mais pas ligotée pour autant, même si parfois je me sens prise au piège, ou dans une impasse. D’aucuns diraient que les racines emprisonnent, enfoncent, empêchent d’avancer…, ce qui pourrait être vrai si je décidais de regarder le sol, pas les étoiles. Mon attachement est palpable, il est bien là, comme un nœud au ventre, et je le vis parfois comme une malédiction tellement mon pays est complexe et qu’il porte en lui cette ambivalence désarmante, susceptible de torturer l’être au plus profond de son âme. Il me suffit de regarder les étoiles, « mes deux pieds plantés dans l’encrier », pour jouir d’une absolue liberté. Même si je suis enracinée, ou ensevelie – en hommage aux personnes disparues après l’explosion de Beyrouth –, ou enracinée à mon port d’attache, à mon pays, je deviens libre, je deviens de partout, sans que rien ne puisse arrêter mon voyage ou ma quête de territoires à explorer, sans doute pour revenir à moi enrichie et me connaître mieux.

La poésie libanaise de langue française est souvent associée à des figures comme Nadia Tuéni, qui ont lancé des cris d'alarme bien avant le déclenchement de la guerre du Liban en 1975. Est-elle encore de nature militante ? Quel est son intérêt de nos jours ?
La poésie libanaise est multiple et, lorsqu’elle se veut engagée, porteuse d’un message universel, lorsqu’elle a pour ambition de briser les barrières de la peur, de traverser les frontières et d’apostropher le monde, la langue française lui donne des ailes. Cela ne veut pas du tout dire que la poésie engagée ne peut l’être que lorsqu’elle emprunte une langue étrangère, à savoir la langue française. Tout dépend du rapport que le poète entretient avec les mots. Par ailleurs, je me demande si la francophonie a des degrés. Qui sommes-nous, nous autres Libanais francophones, et où nous situons-nous sur l’échelle de la francophonie ? Sommes-nous une sous-catégorie de Français qui formons avec eux une grande famille unie par une même langue dotée de différents outils et cultures pour la mettre à l’honneur ? Lorsque nous nous disons francophones, le sommes-nous aussi bien lorsque notre inconscient travaille que lorsque nous nous exprimons en toute conscience ? Dans quelle langue rêvons-nous ? 
La langue est le reflet de notre appartenance culturelle et, dans le cas de la langue française, elle jette des ponts et unit dans la complicité celles et ceux qui peuvent grâce à elle partager en toute liberté, quelles que soient leurs origines. À travers le monde entier, la francophonie occupe une place de choix en tant qu’identité culturelle et linguistique. L’élégance de cette langue en est la raison. L’élégance et la liberté de pouvoir l’emprunter pour dire avec plus de précision et d’une manière plus adéquate ce à quoi nous pensons. Et cette liberté étend ses ramifications dans notre inconscient, pour atteindre son summum dans le rêve. Francophone et libre, je me permets de dire que je rêve en français. Dans un pays en souffrance, dans un monde où, malgré la perte de bien des repères, tout continue de se monnayer, un monde qui court sur un pied à une vitesse grand V, où l’humanité se perd dans les dédales de la technologie rampante, où le virtuel remplace la réalité dans la vie des gens, où de moins en moins de personnes lisent, la poésie constitue-t-elle un sujet dérisoire ? Sans doute pour certains, mais pas pour tout le monde, pas pour beaucoup ! La poésie, comme toute forme artistique, possède un atout majeur : celui de pouvoir changer le regard que nous portons sur le monde pour le transformer et le rendre meilleur. Nous en avons besoin maintenant plus que jamais. Comme l’avait écrit Éluard : « Il y a un autre monde, mais il est dans celui-ci. » À nous de le baigner dans les mots pour le révéler au monde entier.
 


Kehlani réagit à l'annulation de son concert en raison de sentiments «anti-Israël»

Kehlani, connue pour ses positions pro-palestiniennes, a réagi sur les réseaux sociaux cette semaine à l'annulation de son concert à l'université de Cornell. (Getty Images)
Kehlani, connue pour ses positions pro-palestiniennes, a réagi sur les réseaux sociaux cette semaine à l'annulation de son concert à l'université de Cornell. (Getty Images)
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  • La semaine dernière, le président de Cornell, Michael Kotlikoff, a annoncé qu'il retirait l'invitation de la chanteuse R&B à se produire lors de l'événement en raison de ce qu'il a qualifié de "sentiments antisémites et anti-Israël"
  • "Malheureusement, même si ce n'était pas l'intention, le choix de Kehlani comme tête d'affiche de cette année a semé la division et la discorde au Slope Day", a écrit M. Kotlikoff la semaine dernière, en faisant référence au concert

DUBAI : La chanteuse américaine Kehlani s'est exprimée sur les médias sociaux après l'annulation de sa participation au concert annuel de l'université de Cornell en raison de sa position pro-palestinienne.

La semaine dernière, le président de Cornell, Michael Kotlikoff, a annoncé qu'il retirait l'invitation de la chanteuse R&B à se produire lors de l'événement en raison de ce qu'il a qualifié de "sentiments antisémites et anti-Israël".

"Malheureusement, même si ce n'était pas l'intention, le choix de Kehlani comme tête d'affiche de cette année a semé la division et la discorde au Slope Day", a écrit M. Kotlikoff la semaine dernière, en faisant référence au concert.

"Pour cette raison, j'annule l'invitation de Kehlani et je m'attends à ce qu'une nouvelle programmation pour un grand Slope Day 2025 soit annoncée sous peu".

Il poursuit : "Dans les jours qui ont suivi l'annonce de Kehlani, j'ai entendu de graves préoccupations de la part de notre communauté : beaucoup sont en colère, blessés et confus que le Slope Day présente un artiste qui a épousé des sentiments antisémites et anti-israéliens dans ses spectacles, ses vidéos et sur les médias sociaux. Dans notre pays, tout artiste a le droit d'exprimer des opinions haineuses, mais le Slope Day a pour but d'unir notre communauté, et non de la diviser.

Dans une nouvelle vidéo Instagram réagissant à l'annulation, Kehlani a déclaré : "On me demande et on m'appelle à clarifier et à faire une déclaration encore une fois pour la millionième fois, que je ne suis pas antisémite ni antijuive. Je suis contre le génocide, je suis contre les actions du gouvernement israélien, je suis contre l'extermination d'un peuple entier, je suis contre le bombardement d'enfants innocents, d'hommes, de femmes... c'est ce que je suis contre".

Le jeune homme de 30 ans, qui collabore fréquemment avec le groupe Jewish Voice for Peace, a ajouté une légende : "Je sais que vous avez vu que l'université Cornell a annulé mon spectacle, et maintenant il y a des tentatives d'autres annulations qui s'ajoutent à celles que j'ai déjà subies au cours de l'année écoulée. Si vous voulez me priver d'une opportunité, dites-vous que c'est à cause de votre sionisme. n'en faites pas une question antijuive. c'est un jeu joué. tout cela parce que nous voulons que les gens arrêtent de mourir. J'espère que cela vous aidera.


Comment Netflix fait voyager l'humour français d'Astérix et d'Alain Chabat

En Allemagne, deuxième marché d'Astérix derrière la France et où l'expression "Die spinnen, die Römer!" ("Ils sont fous ces Romains!") est passée dans le langage courant, les lecteurs du "Combat des Chefs" devraient ainsi s'y retrouver. (AFP)
En Allemagne, deuxième marché d'Astérix derrière la France et où l'expression "Die spinnen, die Römer!" ("Ils sont fous ces Romains!") est passée dans le langage courant, les lecteurs du "Combat des Chefs" devraient ainsi s'y retrouver. (AFP)
"C'est très très important que l'humour voyage": doublée dans près de 40 langues et diffusée dans 190 pays sur Netflix, la série animée du réalisateur français Alain Chabat, tirée d'Astérix, a nécessité "un énorme" travail de traduction, en collaboration avec les éditions Albert René. (AFP)
"C'est très très important que l'humour voyage": doublée dans près de 40 langues et diffusée dans 190 pays sur Netflix, la série animée du réalisateur français Alain Chabat, tirée d'Astérix, a nécessité "un énorme" travail de traduction, en collaboration avec les éditions Albert René. (AFP)
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  • Arabe, coréen, croate, hébreu ou encore mandarin... 38 versions seront proposées aux quelque 300 millions d'abonnés de la plateforme, où débarque mercredi "Astérix et Obélix: le combat des chefs", inspiré de l'album éponyme
  • Netflix a "fait un super boulot" pour ne "pas perdre l'humour à la traduction" et adapter les calembours et références indissociables de la saga

PARIS: "C'est très très important que l'humour voyage": doublée dans près de 40 langues et diffusée dans 190 pays sur Netflix, la série animée du réalisateur français Alain Chabat, tirée d'Astérix, a nécessité "un énorme" travail de traduction, en collaboration avec les éditions Albert René.

Arabe, coréen, croate, hébreu ou encore mandarin... 38 versions seront proposées aux quelque 300 millions d'abonnés de la plateforme, où débarque mercredi "Astérix et Obélix: le combat des chefs", inspiré de l'album éponyme.

Netflix a "fait un super boulot" pour ne "pas perdre l'humour à la traduction" et adapter les calembours et références indissociables de la saga, a assuré à l'AFP Céleste Surugue, le directeur général des Editions Albert René, qui détiennent les droits des albums.

Le géant du streaming, qui n'a pas répondu à l'AFP à ce sujet, s'est notamment appuyé sur les traductions existantes de l’œuvre originale, qui ne manquent pas: avec 120 langues et dialectes au compteur, "Astérix" est la bande dessinée la plus traduite au monde.

"On a travaillé main dans la main, que ce soit sur les noms des personnages (...) certaines phrases célèbres", l'éditeur ayant fait "relire et valider" les scripts avec une société spécialisée partenaire et donné accès à ses traducteurs "quand il y avait des interrogations, des difficultés", selon Céleste Surugue.

En Allemagne, deuxième marché d'Astérix derrière la France et où l'expression "Die spinnen, die Römer!" ("Ils sont fous ces Romains!") est passée dans le langage courant, les lecteurs du "Combat des Chefs" devraient ainsi s'y retrouver.

Fastanfurious 

De même, en anglais, Idéfix s'appelle toujours Dogmatix, comme l'a baptisé la traductrice britannique historique d'Astérix Anthea Bell, tout comme Abraracourcix conserve le nom Vitalstatistix.

Quid des ajouts d'Alain Chabat, connu pour son humour ultra-référencé? Sur "un certain nombre d'endroits", le réalisateur et scénariste "est très fidèle, voire très proche dans les dialogues à ce qu'on a dans l'album" sorti en 1966, souligne Céleste Surugue.

Pour les nouveaux personnages, "des noms fonctionnant dans plein de pays" ont souvent été choisis, comme Metadata, Potus (abréviation de "President of the United States") ou encore Fastanfurious (en référence à la franchise centrée sur les voitures).

Quant aux "références culturelles locales", les traducteurs "ont pris soin d'essayer de trouver des équivalents à chaque fois".

Pour autant, certaines blagues semblent impossibles à transposer, comme une allusion au duo français Omar et Fred (Omar Sy et Fred Testot) impliquant... homard et fraises.

Une "problématique" commune aux albums, relève Céleste Surugue, citant l'exemple des Romains "déplaçant des bornes" dans "Astérix et la Transitalique".

Connu dans le monde entier, avec plus de 400 millions d'exemplaires vendus, Astérix "est particulièrement fort en Europe continentale", et est, en langue anglaise, surtout prisé dans "les pays du Commonwealth" comme l'Afrique du Sud, la Nouvelle-Zélande, l'Australie ou l'Inde, selon M. Surugue.

Son adaptation sur Netflix devrait permettre de le faire découvrir à un public plus large que les films dédiés au cinéma, notamment aux Etats-Unis et en Angleterre, où ses aventures sont généralement cantonnées aux salles d'art et essai, en version originale, d'après M. Surugue.

Succès public en France en 2023 avec 4,6 millions d'entrées, le long-métrage de l'acteur et metteur en scène français Guillaume Canet, "L'empire du milieu", doublé dans "une petite trentaine de langues", avait bénéficié d'une sortie dans plus de 50 pays.


Le prince héritier jordanien célèbre le 31e anniversaire de la princesse Rajwa

Le prince héritier de Jordanie, Hussein ben Abdullah, a adressé lundi ses meilleurs vœux à son épouse d'origine saoudienne, la princesse Rajwa Al-Hussein, à l'occasion de son 31e anniversaire (Instagram).
Le prince héritier de Jordanie, Hussein ben Abdullah, a adressé lundi ses meilleurs vœux à son épouse d'origine saoudienne, la princesse Rajwa Al-Hussein, à l'occasion de son 31e anniversaire (Instagram).
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  • La famille royale partage un nouveau portrait officiel de la princesse.
  • La princesse Rajwa a donné naissance à Iman – la première petite-fille du roi Abdallah II de Jordanie et de la reine Rania – en août de l'année dernière

DUBAI : Le prince héritier de Jordanie, Hussein ben Abdullah, a adressé lundi sur les réseaux sociaux ses meilleurs vœux à son épouse d'origine saoudienne, la princesse Rajwa Al-Hussein, à l'occasion de son 31e anniversaire.

"Joyeux anniversaire Rajwa ! Reconnaissant pour l'amour, la gentillesse et la chaleur que tu apportes dans la vie d'Iman et la mienne", a-t-il écrit, faisant référence à leur petite fille, la Princesse Iman.

La princesse Rajwa a donné naissance à Iman – la première petite-fille du roi Abdallah II de Jordanie et de la reine Rania – en août de l'année dernière.

rajwa
La famille royale jordanienne a partagé un nouveau portrait officiel de la princesse Rajwa pour célébrer son anniversaire (Instagram).

La famille royale jordanienne a partagé un nouveau portrait officiel de la princesse Rajwa pour célébrer son anniversaire. On la voit porter un ensemble composé d'un haut à col bénitier et d'un pantalon à jambe large de la marque Simkhai, basée à Los Angeles. Elle a accessoirisé son look avec le collier lariat two letters de Joy Jewels, qui reprend les premières lettres arabes des noms du prince héritier et de la princesse Rajwa.