A Calais, la présence des migrants suscite «lassitude » et « colère »

La police française évacue quelque 800 migrants après avoir démantelé leur camp situé près de l'hôpital de Calais / AFP
La police française évacue quelque 800 migrants après avoir démantelé leur camp situé près de l'hôpital de Calais / AFP
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Publié le Vendredi 07 mai 2021

A Calais, la présence des migrants suscite «lassitude » et « colère »

  • 65% des Calaisiens estiment que la présence de migrants engendre des problèmes d'insécurité et 71% d'entre eux se disent insatisfaits de la façon dont la situation est « gérée »
  • Bien que « fatigués », les Calaisiens interrogés « ont le sentiment d'être accueillants, gentils, plus patients que la moyenne nationale », relève encore l'étude

CALAIS :  De la "lassitude" et de la "colère" face à une situation "insoluble" et "sans fin": c'est le sentiment qui règne parmi les habitants de Calais concernant la présence des exilés dans leur ville-frontière, selon les résultats d'un sondage publié vendredi.

Après trente ans de vagues migratoires dans cette ville du littoral nord, où les exilés affluent depuis bien avant la crise de 2014 pour tenter de rallier l'Angleterre toute proche, les associations locales et Amnesty international ont mandaté l'institut de sondage Harris interactive pour prendre le pouls des riverains.

Résultat: "On note une lassitude face à une situation que les Calaisiens considèrent comme se dégradant", souligne-t-on dans ce sondage, réalisé en deux temps, d'abord du 30 octobre au 7 novembre 2019, puis fin mars 2021.

"Cette lassitude se transforme aussi en colère, qui s'exprime face au sentiment d’impuissance de ne pas pouvoir réagir face à un problème insoluble et sans fin. Calais est une ville vue par ses habitants comme sinistrée économiquement. Comment être solidaire, accueillir des situations de détresse humaine, quand on est soi-même touché par la pauvreté ?", résume Audrey Boursicot, qui a chapeauté l'enquête pour Amnesty international.

D'ailleurs, lorsqu'ils sont interrogés sur leurs principales préoccupations, les Calaisiens citent avant tout leurs inquiétudes sur la situation économique et la pauvreté, dans une ville où un habitant sur trois vit sous le seuil de pauvreté. La présence des migrants n'arrive qu'ensuite.

« Fracture »

65% des Calaisiens estiment que la présence de migrants engendre des problèmes d'insécurité et 71% d'entre eux se disent insatisfaits de la façon dont la situation est "gérée".

En particulier, ils jugent très sévèrement l'action des autorités: seuls 12% des habitants pensent que le gouvernement "agit dans le bon sens concernant les migrants".

"Il y a une vraie fracture" entre la population et l'Etat sur le sujet, commente Magalie Gérard, directrice adjointe du département politique chez Harris interactive. 

Seules les associations et ONG (66%), et dans une moindre mesure les forces de l'ordre (54%), mènent des actions majoritairement bien perçues.

Bien que "fatigués", les Calaisiens interrogés "ont le sentiment d'être accueillants, gentils, plus patients que la moyenne nationale", relève encore l'étude.

"Ce qui ressort, c'est de l'empathie, de la compassion, le sentiment que la situation est extrêmement malheureuse", ajoute Magalie Gérard, qui note d'après l'écart des réponses obtenues entre 2019 et 2021 que "la crise du Covid est venue renforcer ce sentiment de difficulté perçu des habitants".

Les scenarii de sortie de crise, eux, divisent les Calaisiens. Faut-il prendre le temps de trouver des solutions concertées "dans le respect des droits de l'homme" ? 55% se tournent vers cette hypothèse.

44%, à l'inverse, penchent pour une vision plus expéditive, en "impos(ant)" un départ des migrants.

Des campements aux tribunaux, l'opposition au traitement des migrants à Calais

Des exilés cherchant à gagner l'Angleterre traités "pire que des chiens", une "maltraitance indigne de notre humanité", la "sape continuelle de nos actions par les pouvoirs publics" : fin mars, les catholiques du Calaisis ont à leur tour été invités à s'insurger, en envoyant au préfet une lettre ouverte accusatrice. 

Cet appel du diocèse intervient sur fond de mécanique bien rodée d'expulsions des campements, toutes les 48H pour les petites opérations. 

Le collectif Human Rights Observers a recensé 1.058 expulsions à Calais et à Grande-Synthe en 2020, pour une population migrante actuellement chiffrée par la préfecture à quelque 700 personnes dans le Calaisis -- plus d'un millier à Calais et 400 à Grande-Synthe pour les associations.

Dans une intervention coordonnée par Amnesty International, celles-ci se sont émues vendredi d'une "inversion des valeurs" sur place, diabolisant les actions de solidarité. 

Auparavant, la Défenseure des droits avait dénoncé "la volonté d'invisibiliser" les migrants, et la Commission consultative des droits de l'Homme pointé une violation de leurs "droits fondamentaux".

Des journalistes se sont aussi élevés en vain, jusqu'au Conseil d'Etat, contre leur maintien à distance lors des démantèlements. 

Baptisées "opérations de mise à l'abri" par les autorités, les évacuations se déroulent désormais à "huis clos", déplore Claire Millot, de l'association Salam.

Avec ses pairs, elle dénonce des interventions menées "sous la contrainte", les migrants montant parfois après saisie de leurs tentes dans des bus sans en connaître la destination, pour se retrouver dans des centres éloignés, inadaptés à leurs besoins, dont ils repartent très vite.

La préfecture du Pas-de-Calais justifie ces pratiques par la nécessité d'éviter la reconstitution de "points de fixation", plus de quatre ans après le démantèlement de la "jungle", assurant offrir "des lieux correspondant aux projets des personnes".  

Un arrêté préfectoral reconduit depuis septembre a interdit aux associations non-mandatées par l'Etat -- qui ont échoué à le faire annuler en justice -- de distribuer des repas dans certaines rues de la ville. 

"La préfecture choisit qui elle veut voir sur le terrain", dénonce Anthony Ikni, de l'Observatoire des expulsions collectives. Quitte, selon les associations, à ce que des migrants soient privés d'accès à l'eau parce que l'association mandatée ne dessert plus un campement. 

La mairie vient également de fermer une maison du doyenné transformée en halte pour une quinzaine de migrants particulièrement vulnérables, au motif que la sécurité n'y serait pas assurée en cas d'incendie.

"Juridiquement, notre responsabilité est engagée, mais apparemment pas la leur quand un gars meurt asphyxié sous sa tente parce qu'il y a introduit des braises..." enrage Philippe Demeestère, aumônier du Secours catholique. 

Les associations pointent encore un "détournement du droit", avec le recours à des procédures de flagrance pour les expulsions. 

Autres pièces de cette guérilla judiciaire, des enquêtes de l'IGPN en cours: l'une concerne un Erythréen se disant victime d'un tir de LBD, l'autre une Irakienne, contrôlée alors qu'elle se préparait, sur le point d'accoucher, à embarquer pour l'Angleterre, et dont l'enfant est mort peu après sa naissance.

 

« Fracture »

65% des Calaisiens estiment que la présence de migrants engendre des problèmes d'insécurité et 71% d'entre eux se disent insatisfaits de la façon dont la situation est "gérée".

En particulier, ils jugent très sévèrement l'action des autorités: seuls 12% des habitants pensent que le gouvernement "agit dans le bon sens concernant les migrants".

"Il y a une vraie fracture" entre la population et l'Etat sur le sujet, commente Magalie Gérard, directrice adjointe du département politique chez Harris interactive. 

Seules les associations et ONG (66%), et dans une moindre mesure les forces de l'ordre (54%), mènent des actions majoritairement bien perçues.

Bien que "fatigués", les Calaisiens interrogés "ont le sentiment d'être accueillants, gentils, plus patients que la moyenne nationale", relève encore l'étude.

"Ce qui ressort, c'est de l'empathie, de la compassion, le sentiment que la situation est extrêmement malheureuse", ajoute Magalie Gérard, qui note d'après l'écart des réponses obtenues entre 2019 et 2021 que "la crise du Covid est venue renforcer ce sentiment de difficulté perçu des habitants".

Les scenarii de sortie de crise, eux, divisent les Calaisiens. Faut-il prendre le temps de trouver des solutions concertées "dans le respect des droits de l'homme" ? 55% se tournent vers cette hypothèse.

44%, à l'inverse, penchent pour une vision plus expéditive, en "impos(ant)" un départ des migrants.


Mayotte provoque des frictions entre extrêmes droites française et allemande

Marine Le Pen (au centre), candidate du Rassemblement national (RN) à l'élection présidentielle française de 2022, pose avec des sympathisants lors d'une visite de campagne sur la place Mamoudzou à Mayotte, le 18 décembre 2021. (Photo Ali Al-Daher AFP)
Marine Le Pen (au centre), candidate du Rassemblement national (RN) à l'élection présidentielle française de 2022, pose avec des sympathisants lors d'une visite de campagne sur la place Mamoudzou à Mayotte, le 18 décembre 2021. (Photo Ali Al-Daher AFP)
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  • Dans une question écrite au Bundestag cette semaine, l'AfD a appelé le gouvernement fédéral «à prendre position sur les résolutions de l'Assemblée générale des Nations unies selon lesquelles la France doit restituer l'archipel de Mayotte aux Comores
  • «L’AfD ferait mieux de s'occuper des problèmes de l’Allemagne et je suis fâchée de cette situation», a déclaré la cheffe de file du Rassemblement national (RN)

MAMOUDZOU, France : La dirigeante d'extrême droite française Marine Le Pen, en visite à Mayotte samedi, s'est dite «fâchée» contre son allié allemand au Parlement européen, l'AfD, qui «ferait mieux de s'occuper des problèmes de l'Allemagne» au lieu de questionner l'appartenance à la France de cet archipel de l'océan Indien.

Dans une question écrite au Bundestag cette semaine, l'AfD (Alternative für Deutschland) a appelé le gouvernement fédéral «à prendre position sur les résolutions de l'Assemblée générale des Nations unies selon lesquelles la France doit restituer l'archipel de Mayotte à l'Union des Comores».

«L’AfD ferait mieux de s'occuper des problèmes de l’Allemagne et je suis fâchée de cette situation», a déclaré la cheffe de file du Rassemblement national (RN). «Je vais leur expliquer la raison pour laquelle les Mahorais ont par trois fois déjà exprimé leur souhait d'être Français».

Lors de la proclamation de l'indépendance des Comores, Mayotte a choisi de rester en France par deux référendums en 1974 et 1976. Un troisième référendum en 2009 a fait de Mayotte un département.

Un porte-parole de l'Afd, Matthias Moosdorf, a expliqué à l'AFP que son parti n'avait «pas imaginé que le RN serait contrarié par cette question» et que cette question visait l'ambivalence, selon l'Afd, pratiquée par le gouvernement allemand sur les référendums d'autodétermination, ce dernier ne reconnaissant pas le résultat de celui organisé en Crimée en 2014.

«Ce parallèle avec la Crimée est particulièrement maladroit», a jugé Mme Le Pen qui compte donner à ses alliés «quelques leçons de géopolitique».

Les relations entre les deux partis, qui siègent dans le même groupe «Identité et démocratie» au Parlement européen sont tendues depuis la révélation d'un projet secret d'expulsion massive d'étrangers et de citoyens allemands réputés non-intégrés si l'AfD arrivait au pouvoir.

L'affaire avait provoqué des manifestations d'ampleur contre l'extrême droite dans toute l'Allemagne. Et Mme Le Pen avait déclaré être «en total désaccord» avec cette idée.

Par ailleurs, sur les relations avec les Comores dont sont issus nombre d'immigrants arrivant sur Mayotte, Mme Le Pen a appelé à «siffler la fin de la récréation», les accusant de «vouloir récupérer Mayotte par la démographie».

Elle a évoqué des mesures de rétorsion comme le gel des avoirs des dirigeants comoriens ou la suppression de visas.


Expulsion vers l'Algérie d'un imam officiant en France

Un agent de sécurité se tient à l'entrée de la Grande Mosquée dans le quartier d'Empalot à Toulouse, le 23 juin 2018, lors de son inauguration après 13 ans de rénovation. (Photo Eric Cabanis AFP)
Un agent de sécurité se tient à l'entrée de la Grande Mosquée dans le quartier d'Empalot à Toulouse, le 23 juin 2018, lors de son inauguration après 13 ans de rénovation. (Photo Eric Cabanis AFP)
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  • Mohamed Tataïat était arrivé en France en 1985 comme imam détaché algérien
  • Il a été expulsé vendredi soir vers l'Algérie, après sa condamnation définitive pour provocation à la haine et à la violence envers la communauté juive, ont annoncé les autorités

PARIS : L'imam de nationalité algérienne, Mohamed Tataïat, qui officiait à Toulouse dans le sud de la France, a été expulsé vendredi soir vers l'Algérie, après sa condamnation définitive pour provocation à la haine et à la violence envers la communauté juive, ont annoncé les autorités.

Dans un message posté sur le réseau social X, le ministre français de l'Intérieur, Gérald Darmanin, a fait valoir qu'«une nouvelle fois, la loi immigration (avait permis) d'expulser dans son pays d'origine en moins de 24 heures un +imam+ de Toulouse, prêcheur de haine et condamné par la justice».

L'un des avocats de l'imam a dénoncé une «expulsion manu militari». «Il n'y avait pas d'urgence, il est sur le territoire français depuis 40 ans, il a des enfants, il travaille, il n'a pas fait parler de lui depuis sept ans, et là il se retrouve dans un avion en direction de l'Algérie», a réagi auprès de l'AFP Me Jean Iglesis.

Une audience pour examiner une requête en référé des avocats de l'imam à l'encontre de cet arrêté d'expulsion était prévue lundi au tribunal administratif de Paris, a ajouté Me Iglesis.

«Ce qui se passe est d'une certaine gravité (...) C'est une défiance à l'égard de la défense et de l'autorité judiciaire», a poursuivi le conseil de l'imam, affirmant notamment qu'il n'avait pas pu avoir accès à son client lorsqu'il était en instance d'expulsion à l'aéroport de Toulouse.

Mohamed Tataïat était arrivé en France en 1985 comme imam détaché algérien. Il avait rejoint Toulouse deux ans plus tard pour exercer au sein de la mosquée du quartier Empalot.

En juin 2018, le préfet du département de Haute-Garonne avait signalé des propos tenus lors d'un prêche le 15 décembre à la mosquée En Nour, caractérisant, selon lui, «une provocation à la haine et à la discrimination à l'égard des juifs».

Le 31 août 2022, l'imam avait été condamné par la cour d'appel de Toulouse à 4 mois de prison avec sursis pour ce prêche.

Le 19 décembre dernier, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi de M. Tataïat, rendant ainsi sa condamnation définitive.

Le 5 dernier avril, le ministre de l'Intérieur avait signé son arrêté d'expulsion.


Consulat d'Iran à Paris: un homme interpellé après une alerte

La police française a bouclé vendredi le consulat iranien à Paris suite à des informations selon lesquelles un homme menaçait de se faire exploser. (Reuters)
La police française a bouclé vendredi le consulat iranien à Paris suite à des informations selon lesquelles un homme menaçait de se faire exploser. (Reuters)
La police française a bouclé vendredi le consulat iranien à Paris suite à des informations selon lesquelles un homme menaçait de se faire exploser. (Reuters)
La police française a bouclé vendredi le consulat iranien à Paris suite à des informations selon lesquelles un homme menaçait de se faire exploser. (Reuters)
La police française a bouclé vendredi le consulat iranien à Paris suite à des informations selon lesquelles un homme menaçait de se faire exploser. (Reuters)
La police française a bouclé vendredi le consulat iranien à Paris suite à des informations selon lesquelles un homme menaçait de se faire exploser. (Reuters)
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  • En réalité, aucun explosif n'a été retrouvé «ni dans les locaux du consulat, ni dans le véhicule» du suspect, a annoncé la Préfecture de police de Paris, après l'interventionde la BRI (brigade de recherche et d'intervention)
  • «Selon les premiers éléments, il s'agit d'un homme né en 1963 en Iran», a poursuivi le parquet, ajoutant qu'il était sorti de lui-même du consulat

PARIS: Un homme a été interpellé vendredi après une alerte lancée par le consulat d'Iran à Paris. Un individu aurait été vu dans ses locaux "porteur d'une grenade ou d'un gilet explosif", selon l'intitution.
En réalité, aucun explosif n'a été retrouvé "ni dans les locaux du consulat, ni dans le véhicule" du suspect, a annoncé la Préfecture de police de Paris, après l'interventionde la BRI (brigade de recherche et d'intervention), une unité d'élite de la police
Le parquet de Paris a également affirmé à l'AFP qu'"aucune matière explosive" n'avait été retrouvée "à ce stade, ni sur lui, ni sur place".
"Selon les premiers éléments, il s'agit d'un homme né en 1963 en Iran", a poursuivi le parquet, ajoutant qu'il était sorti "de lui-même" du consulat et qu'il "aurait proféré des menaces de passage à l'acte violent".
"Les vérifications et comptes-rendus se poursuivent afin de préciser la situation judiciaire", selon la même source.
L'affaire avait débuté vers "11H00" avec le signalement d'un homme qui "aurait été aperçu par un seul témoin entrant dans le consulat, rue de Fresnel, porteur d'une grenade ou d'un gilet explosif", avait rapporté un peu auparavant la PP à l'AFP.
En début d'après-midi un périmètre de sécurité avait été mis en place tout autour du consulat, situé dans le 16e arrondissement de Paris près du Trocadéro.
Le trafic sur les lignes de métro 9 et 6 desservant la station Trocadéro, la plus proche du consulat d'Iran, a été interrompu, pour des raisons de sécurité, comme l'a annoncé la RATP sur X.
Le préfet de police de Paris Laurent Nuñez a mobilisé, outre la BRI, d'importantes forces de l'ordre, a constaté un journaliste de l'AFP sur place. Le préfet répondait à une "demande d'intervention" du consulat.
Le consulat et l'ambassade d'Iran partagent le même bâtiment, mais ont des entrées différentes: le 4 avenue d'Iena pour l'ambassade et le 16 rue Fresnel pour le consulat.
Après l'interpellation du suspect, le dispositif sécuritaire était toujours bien en place et une vingtaine de journalistes étaient présents, notamment des journalistes étrangers, selon le journaliste de l'AFP.
Deux camions de police bloquaient le croisement de la rue de la Manutention et de la rue Fresnel où se trouve le consulat d’Iran.
La France a relevé son dispositif Vigipirate en urgence attentat, son plus haut niveau, après l'attentat survenu en mars à Moscou dans une salle de spectacle.