Les entreprises américaines et la lutte contre les discriminations raciales

Une enseigne de Walmart aux Etats-Unis. (Photo, AFP)
Une enseigne de Walmart aux Etats-Unis. (Photo, AFP)
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Publié le Dimanche 23 mai 2021

Les entreprises américaines et la lutte contre les discriminations raciales

  • Dans les prochaines semaines, des résolutions inhabituelles seront présentées lors des assemblées générales: Walmart doit-il démontrer l'équité de sa grille salariale?
  • Facebook et Alphabet doivent-ils nommer un spécialiste des droits civils à leur conseil d'administration? 

NEW-YORK : Après la mort de l'Afro-Américain George Floyd, les grandes entreprises ont fait des promesses ambitieuses sur la lutte contre les discriminations raciales aux Etats-Unis. Près d'un an plus tard, certains actionnaires leur demandent des comptes.

Dans les prochaines semaines, des résolutions inhabituelles seront présentées lors des assemblées générales: Walmart doit-il démontrer l'équité de sa grille salariale? Facebook et Alphabet doivent-ils nommer un spécialiste des droits civils à leur conseil d'administration? 

Plusieurs propositions de résolutions demandent aussi aux entreprises de présenter un audit sur l'équité raciale dans leur rapport annuel. 

"Un bon nombre d'actionnaires reconnaissent qu'il s'agit d'un problème pouvant endommager la réputation d'un groupe de façon significative", souligne Tejal Patel de CtW Investment Group, un groupe d'actionnaires activistes spécialisé dans les questions de gouvernance. 

Si elles n'ont pas été adoptées, les résolutions appelant à un audit sur l'équité raciale ont tout de même recueilli environ 30% des voix, voire plus, lors des assemblées générales de Citigroup, JPMorgan Chase, Goldman Sachs et Johnson & Johnson. 

Déserts bancaires 

Dans la foulée des manifestations contre les violences policières et le racisme après les morts successives de Breonna Taylor, abattue dans son appartement par des policiers de Louisville, et George Floyd, mort sous le genou d'un policier à Minneapolis, de nombreuses entreprises avaient rapidement émis des communiqués soutenant le mouvement Black Lives Matter ("Les vies noires comptent"). 

Elles promettaient aussi d'être plus attentives aux besoins des clients et employés non blancs. 

Dans la mesure où les grandes sociétés américaines sont encore largement dirigées par des hommes blancs et peinent à accroître la diversité aux plus hauts niveaux, certains activistes ont accueilli ces déclarations avec scepticisme.

CtW et le syndicat représentant les salariés du secteur des services SEIU ont préparé des résolutions présentées aux actionnaires de huit grands établissements financiers. 

Les banques du pays sont régulièrement accusées de discriminations dans l'octroi de prêts ou de snober les centres-villes, créant ainsi des "déserts bancaires" pour certaines catégories de population.

Les résolutions appelaient à un examen approfondi de toutes les pratiques pouvant désavantager les personnes non blanches.

"Je crois que si quelqu'un y met son nez, ce sera plus transparent", estime Toni Smith, une Afro-Américaine de La Nouvelle-Orléans.

Quand elle a eu besoin de prêts pour l'achat d'une voiture et d'équipements professionnels, elle a eu l'impression que sa banque, Chase, la décourageait.

Elle peine désormais à rembourser des prêts à plus de 20% d'intérêts accordés par d'autres organismes.

"Si vous n'avez pas déjà de l'argent d'avance, on ne vous offre pas les opportunités", regrette-t-elle. "On n'arrive pas à avancer."

Les organisations de lutte contre les discriminations raciales mettent régulièrement en avant les difficultés des Afro-Américains à produire de la richesse au fil des générations en raison d'un manque d'accès au crédit et de pratiques racistes dans l'immobilier.

Audit indépendant

Il est essentiel que tout audit sur la question des discriminations raciales soit indépendant, estime M. Patel, de CtW.

Chez Facebook, un tel audit a été entre autres préparé par une ancienne membre de la puissante association de défense des droits civiques ACLU, Laura Murphy. 

Celle-ci a reconnu que Facebook avait bien pris "des mesures positives et importantes" contre l'intolérance ou la falsification des résultats des élections, mais a aussi mis en avant des décisions "problématiques" en matière de droits civiques, en particulier concernant des messages de l'ancien président américain Donald Trump.

Quand Morgan Stanley et BlackRock ont accepté le principe d'un audit, CtW a retiré ses résolutions. 

Les six autres établissements financiers ont choisi de lutter contre les résolutions préparées par CtW en mettant en avant leurs récentes initiatives destinées à lutter contre les discriminations.

JPMorgan Chase a ainsi annoncé en octobre vouloir dédier 30 milliards de dollars à cette cause, notamment en garantissant l'octroi de prêts immobiliers à 40 000 ménages noirs ou latinos.

Mais la banque a une "histoire compliquée" sur le sujet, selon CtW qui met en avant les 55 millions de dollars versés en 2017 pour solder des accusations de discriminations aux prêts immobiliers ou les dons aux fondations des polices de New York et de La Nouvelle-Orléans.

"Nous estimons que nous prenons les mesures nécessaires pour régler les problèmes évoqués dans la résolution", a rétorqué JPMorgan en rejetant l'intérêt d'un audit sur le sujet.

Lors de l'assemblée générale des actionnaires mardi, son PDG Jamie Dimon a affirmé que faire progresser l'équité raciale était "complexe" mais que la banque était "déterminée à faire ce qu'il fallait" pour y parvenir. 

La résolution de CtW a, quelques minutes plus tard, reçu 39% des votes.


Automobile: les équipementiers français pressent Bruxelles d'imposer un contenu local

 Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi. (AFP)
Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi. (AFP)
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  • Les équipementiers européens "contribuent pour 75% à la valeur d'un véhicule et représentent 1,7 million d'emplois" en Europe
  • Mais "les surcapacités mondiales, les importations subventionnées (par le pays exportateur, NDLR) et un déséquilibre commercial accru érodent les fondations de notre industrie"

PARIS: Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi.

Dans cette missive adressée à la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et datée du 12 décembre, les dirigeants des équipementiers Valeo, Forvia et OPmobility demandent à la Commission "des mesures claires sur le contenu local lors des annonces du 16 décembre".

Les équipementiers européens "contribuent pour 75% à la valeur d'un véhicule et représentent 1,7 million d'emplois" en Europe, mais "les surcapacités mondiales, les importations subventionnées (par le pays exportateur, NDLR) et un déséquilibre commercial accru érodent les fondations de notre industrie", écrivent Christophe Périllat (Valeo), Martin Fisher (Forvia) et Félicie Burelle (OPmobility).

"Les perspectives actuelles indiquent que 350.000 emplois et 23% de la valeur ajoutée des automobiles dans l'UE sont en danger d'ici 2030 si des mesures fortes ne sont pas prises de manière urgente", ajoutent-ils.

Ces équipementiers soutiennent "la position des ministres français en faveur de +flexibilités ciblées+ dans la réglementation sur (les émissions de) CO2 si elle est assortie de conditions de critères de contenu local, dans l'intérêt des emplois, du savoir-faire dans l'automobile" et de "l'empreinte carbone" en Europe.

Les constructeurs automobiles européens et l'Allemagne notamment réclament depuis des semaines de nets assouplissements dans l'interdiction de vendre des voitures neuves thermiques ou hybrides prévue à partir de 2035.

Les annonces de la Commission sont attendues mardi après-midi.

La semaine dernière, plusieurs ministres français avaient envoyé une lettre aux commissaires européens pour dire qu'ils acceptaient des "flexibilités ciblées", à condition qu'elles s'accompagnent d'une règlementation incitative à la production en Europe.

"On est prêt à faire preuve de flexibilité", avait ensuite expliqué Roland Lescure, ministre français de l'Economie. "Si vous voulez vendre encore un peu de moteurs thermiques en 2035 très bien, mais il faut qu’ils soient faits en Europe", avec "au moins 75% de la valeur ajoutée faite en Europe", avait-il ajouté.


Espagne: amende de 64 millions d'euros contre Airbnb pour avoir publié des annonces de logements interdits

Le gouvernement espagnol a annoncé lundi avoir infligé une amende de 64 millions d'euros à la plateforme Airbnb pour avoir notamment publié des annonces de logements interdits, une infraction qualifiée de "grave", en pleine crise du logement dans le pays. (AFP)
Le gouvernement espagnol a annoncé lundi avoir infligé une amende de 64 millions d'euros à la plateforme Airbnb pour avoir notamment publié des annonces de logements interdits, une infraction qualifiée de "grave", en pleine crise du logement dans le pays. (AFP)
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  • L'amende qui vise Airbnb et atteint précisément 64.055.311 euros est "définitive", a précisé dans un communiqué le ministère de la Consommation
  • "Des milliers de familles vivent dans la précarité à cause de la crise du logement, tandis que quelques-uns s'enrichissent grâce à des modèles économiques qui expulsent les gens de chez eux"

MADRID: Le gouvernement espagnol a annoncé lundi avoir infligé une amende de 64 millions d'euros à la plateforme Airbnb pour avoir notamment publié des annonces de logements interdits, une infraction qualifiée de "grave", en pleine crise du logement dans le pays.

En Espagne, les plateformes de location de courte durée suscitent un vif débat, surtout dans les grandes villes touristiques, où de nombreux habitants leur reprochent de contribuer à la flambée des loyers.

L'amende qui vise Airbnb et atteint précisément 64.055.311 euros est "définitive", a précisé dans un communiqué le ministère de la Consommation, ajoutant que la plateforme basée aux Etats-Unis devait désormais "corriger les manquements constatés en supprimant les contenus illégaux".

"Des milliers de familles vivent dans la précarité à cause de la crise du logement, tandis que quelques-uns s'enrichissent grâce à des modèles économiques qui expulsent les gens de chez eux", a critiqué le ministre de la Consommation, Pablo Bustinduy, cité dans le communiqué.

"Aucune entreprise en Espagne, aussi grande ou puissante soit-elle, n'est au-dessus des lois", a-t-il poursuivi.

L'Espagne a accueilli en 2024 un nombre record de 94 millions de visiteurs, ce qui en fait la deuxième destination touristique dans le monde derrière la France. Ce chiffre pourrait être battu cette année.

Mais si le tourisme est un moteur de l'économie, de nombreux Espagnols dénoncent la congestion des infrastructures, la disparition des commerces traditionnels, remplacés par des boutiques touristiques, et surtout la flambée des loyers, les propriétaires de logements se tournant vers la location touristique, y compris sur Airbnb, nettement plus rentable.

Face à cette poussée de colère, plusieurs régions et municipalités ont annoncé des mesures ces derniers mois, à l'image de la mairie de Barcelone (nord-est), qui a promis de ne pas renouveler les licences de quelque 10.000 appartements touristiques, qui expireront en novembre 2028.

 


La RATP se cherche un ou une présidente

Cette photographie montre le logo de la société française de transports publics RATP, sur un bâtiment à Paris, le 3 mars 2025. (AFP)
Cette photographie montre le logo de la société française de transports publics RATP, sur un bâtiment à Paris, le 3 mars 2025. (AFP)
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  • Après le départ de Jean Castex à la SNCF, l’Élysée s’apprête à nommer rapidement le nouveau président ou la nouvelle présidente de la RATP
  • Plusieurs profils circulent, tandis que la régie fait face à d’importants défis

PARIS: Après le départ de Jean Castex à la SNCF, la RATP se cherche un ou une présidente, dont la nomination pourrait intervenir "rapidement", selon des sources concordantes.

L'annonce se fera par communiqué de l'Elysée en vertu de l'article 13 de la Constitution qui prévoit que le président de la République nomme aux emplois civils et militaires de l'Etat.

Suivront, deux semaines plus tard, deux auditions de l'impétrant devant les sénateurs, puis devant les députés. Les parlementaires ont la possibilité de s'opposer au candidat d'Emmanuel Macron s'ils réunissent trois cinquième de leurs votes cumulés contre le nom choisi par l'Elysée.

En revanche, si le candidat est adoubé par le Parlement, son nom est proposé en conseil d'administration comme nouvel administrateur, puis confirmé dans la foulée par un décret suivant le conseil des ministres.

Depuis l'arrivée de l'ancien Premier ministre Jean Castex à la tête de la SNCF début novembre, les rumeurs se multiplient sur le nom de celui ou celle qui sera chargé de lui succéder aux commandes de la Régie autonome des transports parisiens, vieille dame créée le 21 mars 1948 et désormais plongée dans le grand bain de l'ouverture à la concurrence.

Les articles de presse pèsent les différents "profils" pressentis, politiques ou techniques qui pourraient "faire le job".

Les noms qui reviennent le plus souvent sont ceux de Xavier Piechaczyk, président du directoire du distributeur d'électricité RTE et ex-conseiller énergie-transport de Jean-Marc Ayrault et François Hollande, Alain Krakovitch, actuel directeur des TGV et Intercités à SNCF Voyageurs, Jean-François Monteils, président du directoire de la Société des grands projets (SGP) et selon la Tribune, Valérie Vesque-Jeancard, présidente de Vinci Airways et directrice déléguée de Vinci Airports.

"Si le nom sort de l'Elysée avant la fin de l'année, cela permettrait au PDG de prendre ses fonctions fin janvier-début février" souligne un fin connaisseur des milieux ferroviaires qui requiert l'anonymat.

- "Aller vite" -

"Une entreprise industrielle comme la RATP ne peut pas rester sans pilote très longtemps" souligne une autre source, proche du dossier, qui requiert aussi l'anonymat, avant d'ajouter "il faut aller vite, car c'est aussi une boite politique, la RATP".

Une entreprise aux enjeux d'autant plus complexes, que malgré son ancrage initial parisien, la RATP dépend du financement de la région Ile-de-France pour ses matériels, s'étend de plus en plus loin dans la banlieue, voire en métropole, et gère des réseaux de transports dans 16 pays sur les cinq continents.

En France, elle est notamment pressentie pour gérer les transports ferroviaires régionaux autour de Caen en Normandie à partir de 2027 après avoir répondu - via sa filiale RATP Dev - à des appels d'offre d'ouverture à la concurrence.

A Paris, la RATP est en train d'introduire progressivement de nouveaux matériels sur son réseau. Le nouveau métro MF19 construit par Alstom, ira d'abord sur la ligne 10 puis sept autres lignes (7 bis, 3 bis, 13 d'ici 2027, puis 12, 8, 3 et 7 d'ici 2034).

L'ensemble du processus prendra une dizaine d'années environ de travaux de modernisation sur les lignes concernées: beaucoup d'ingénierie fine à organiser pour réaliser les travaux pendant la nuit sans interrompre le trafic diurne et de désagréments pour les voyageurs.

A échéance plus lointaine, le ou la future patronne devra déterminer la stratégie du groupe dans les nouvelles ouvertures à la concurrence qui se dessinent: les tramway en 2030 puis le métro en 2040.

Sur le réseau de bus francilien, où la RATP a d'ores et déjà perdu son monopole, elle est parvenue à conserver l'exploitation de 70% des lignes d'autobus qu'elle gérait à l'issue des dernières vagues d'appels d'offre de mise en concurrence qui se sont achevées cet automne.

En particulier, elle continue d'exploiter via RATP Dev tous les bus de Paris intra-muros et a engagé un processus de verdissement de sa flotte de bus, financé par Ile-de-France Mobilités (IDFM), l'autorité organisatrice des transports.

Ses concurrents Keolis (filiale de la SNCF), Transdev et l'italien ATM ont pris les rênes le 1er novembre des lignes remportées.