Panne Orange: des dysfonctionnements «graves et inacceptables» pour Darmanin, Macron « préoccupé »

Une panne massive chez Orange a été traitée dans la nuit de mercredi à jeudi après avoir fortement perturbé les numéros d'urgence. Photo d'illustration ERIC PIERMONT / AFP
Une panne massive chez Orange a été traitée dans la nuit de mercredi à jeudi après avoir fortement perturbé les numéros d'urgence. Photo d'illustration ERIC PIERMONT / AFP
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Publié le Jeudi 03 juin 2021

Panne Orange: des dysfonctionnements «graves et inacceptables» pour Darmanin, Macron « préoccupé »

  • Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a fustigé des «dysfonctionnements graves et inacceptables» après la panne chez l'opérateur Orange qui a perturbé les numéros de secours mercredi soir et pourrait avoir causé la mort de trois personnes
  • Le PDG d'Orange Stéphane Richard est convoqué à 9H00 au ministère de l'Intérieur pour donner des éclaircissements au gouvernement sur la panne

PARIS: La panne des numéros d'urgence a suscité un tollé en FRance et jusqu'au sommet de l'Etat puisque le président de la République Emmanuel Macron a réagi tôt le matin depuis le Lot ou il se trouve. 

Il "est trop tôt pour faire un bilan" de la panne survenue chez l'opérateur Orange qui a perturbé les numéros de secours mercredi soir mais "on est très préoccupés", a ainsi déclaré Emmanuel Macron.

"On est en train de faire le bilan. Il y a eu très vite des numéros à 10 chiffres qui ont été mis à disposition et on a rebasculé les numéros sur les départements. C'est trop tôt pour faire un bilan mais évidemment on est très préoccupés", a répondu le chef de l'Etat à une question d'un habitant lui demandant s'il y avait des décès liés à cette panne, au second jour de son déplacement dans le Lot.

Il "est trop tôt pour faire un bilan" de la panne survenue chez l'opérateur Orange qui a perturbé les numéros de secours mercredi soir mais "on est très préoccupés", a déclaré Emmanuel Macron jeudi dans le Lot.

"On est en train de faire le bilan. Il y a eu très vite des numéros à 10 chiffres qui ont été mis à disposition et on a rebasculé les numéros sur les départements. C'est trop tôt pour faire un bilan mais évidemment on est très préoccupés", a répondu le chef de l'Etat à une question d'un habitant lui demandant s'il y avait des décès liés à cette panne, au second jour de son déplacement dans le Lot.

Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a de son côté fustigé des "dysfonctionnements graves et inacceptables" après la panne chez l'opérateur Orange qui a perturbé les numéros de secours mercredi soir et pourrait avoir causé la mort de trois personnes, dans le Morbihan et à La Réunion.

Le PDG d'Orange Stéphane Richard est convoqué à 9H00 au ministère de l'Intérieur pour donner des éclaircissements au gouvernement sur la panne, a ajouté le ministre, lors d'un point presse.

Une personne souffrant d'une "maladie cardiovasculaire" "serait décédée" dans le Morbihan, faute d'avoir "pu joindre les services de secours à temps" à cause de cette panne, a précisé le ministre.

"Deux autres accidents cardiovasculaires" ont eu lieu à la Réunion", a ajouté M. Darmanin, "mais je ne peux pas dire si le temps (avant l'arrivée des secours, ndlr) a été particulièrement long et s'il est imputable à ce numéro d'urgence".

Interrogé par l'AFP, l'entourage du ministre a précisé que ces deux "accidents" s'étaient soldés par la mort des patients.

"Ce qui est sûr, c'est que les personnes ont témoigné qu'elles ont essayé d'appeler plusieurs fois et qu'elles n'ont pas réussi tout de suite à avoir des opérateurs", a expliqué M. Darmanin.

Une panne d'un équipement chargé d'acheminer les appels a entravé massivement l'accès aux numéros d'urgence (15/17/18/112) et aux lignes fixes mercredi entre 18H et minuit, et de nombreux services de secours étaient difficiles à joindre à travers la France. 

Le PDG d'Orange Stéphane Richard, convoqué à Beauvau, a présenté sur Twitter « ses plus vives excuses ». Par ailleurs, Stéphane Richard, a affirmé jeudi que « la situation » à la mi-journée « est sous contrôle » et qu'il n'y a « aucun signe » d'« attaque externe ».

De son côté, le ministre de la Santé Olivier Véran a indiqué jeudi à la mi-journée qu'une dizaine de régions étaient toujours affectées par la panne qui a gravement perturbé mercredi le fonctionnement des numéros d'appel téléphonique des secours dans toute la France.

"C'est instable. J'ai des remontées à l'instant de onze régions, ou dix régions, de France dans lesquelles il y a encore des appels parfois aléatoires. Pas du tout dans la même ampleur de ce qui a été perçu hier mais avec encore des difficultés", a déclaré le ministre lors d'une visite auprès des équipes du Samu de l'hôpital parisien de Necker, appelant à "absolument solutionner (ce problème) au plus vite".

 

Des interrogations après deux décès dans le Morbihan et en Vendée

Un homme de 63 ans est décédé mercredi soir à l'hôpital de Vannes et un enfant de deux ans et demi jeudi au domicile familial en Vendée lors de la vaste panne des numéros d'urgence qui a touché la France.

Le parquet de Vannes va ouvrir une enquête après le décès de cet homme "en recherche des causes de la mort", a déclaré jeudi François Touron, procureur de la République de Vannes. 

Dans le même contexte, un enfant de 28 mois est décédé jeudi matin au domicile familial, à Chavagnes-en-Paillers, en Vendée. 

"Il apparaît qu'il y a un doute quant aux conséquences que ce dysfonctionnement aurait pu avoir dans le délai d'appel (...). C'est ce doute légitime qui nous conduit à demander une enquête administrative", a déclaré, lors d'un point presse jeudi soir, le préfet de Vendée, Benoît Brocard.

Selon le directeur de l'ARS des Pays de la Loire, Jean-Jacques Coiplet, "un signalement a été transmis au procureur de la République par le centre hospitalier l'hôpital de la Roche-sur-Yon".

Avant de joindre les secours à 8h21 avec le numéro à 10 chiffres, la mère du jeune enfant, victime d'un arrêt cardio-respiratoire, avait tenté "pendant une heure de joindre sans succès le 18 puis le 15". Le décès de l'enfant a été constaté à 9h25 par le smur pédiatrique de Nantes au domicile familial. 

Il y a "encore des perturbations sur le numéro 15, ce soir" dans le département, a observé le préfet de Vendée.

Dans le Morbihan, un homme de 63 ans, originaire du pays d'Auray, est décédé mercredi soir d'un arrêt cardio-vasculaire aux urgences de l'hôpital de Vannes, malgré les tentatives de réanimation.  Il avait été "conduit en voiture par sa conjointe (...) au vu des difficultés constatées pour joindre les services de secours", a expliqué lors d'une conférence de presse le secrétaire général de la préfecture du Morbihan, Guillaume Quenet.

Présent lors de cette conférence, le directeur du Centre hospitalier Bretagne Atlantique Philippe Couturier a demandé une enquête administrative et une enquête judiciaire "de manière à ce qu’on puisse pleinement répondre à la famille". 

Selon M. Couturier "les éléments ne permettent pas de conclure de manière tranchée" à la question du lien entre le décès et la panne des numéros de secours.

L'enquête administrative avait en fait déjà été ouverte dans la nuit de mercredi à jeudi, selon Stéphane Mulliez, directeur général de l'Agence régionale de santé (ARS) de Bretagne.

Dans un communiqué, le procureur de Vannes François Touron a expliqué jeudi soir que le décès de ce patient a été constaté à l'hôpital à 21H05. Il était arrivé "aux urgences à 20 heures 26" et son épouse a indiqué "avoir tenté en vain d’appeler entre 19 heures 54 et 19 heures 59 depuis son domicile le 15 à 4 reprises, puis le 112, avant de décider de le transporter elle-même aux urgences de Vannes", a-t-il précisé.

Incident identifié

Samu, pompiers, police...: cette panne sur un équipement chargé d'acheminer les appels a perturbé massivement l'accès aux numéros d'urgence et aux lignes fixes mercredi entre 18H et minuit. De nombreux services de secours étaient difficiles à joindre à travers la France.

Dès 18H00 mercredi, des dysfonctionnements massifs ont été signalés aux quatre coins du pays, entraînant de grosses difficultés pour les services de secours. Des numéros d'urgence alternatifs, fixes ou mobiles, ont été mis en place, et diffusés sur les réseaux sociaux par les pouvoirs publics.

"Il devait être autour de 18H00 et tous les Samu ont commencé à alerter de problèmes dans les centres d'appels. Les gens ne parvenaient pas à accéder au service, des appels n'arrivaient pas, d'autres se coupaient en pleine conversation…", a expliqué à l'AFP François Braun, président du syndicat Samu-Urgences de France et médecin urgentiste.

"Très vite, on a fait un petit tour de France et on a constaté que presque tous les départements étaient touchés", ajoute-t-il. François Braun explique que traditionnellement "il y a un pic d'appels le soir vers 19H".  

"L'incident qui impacte le réseau fixe notamment les numéros d'urgence est identifié" a tweeté Orange vers 21H. L'opérateur invitait les utilisateurs à renouveler leurs appels, éventuellement via un mobile, pour joindre les services d'urgence, ou d'utiliser leurs numéros temporaires.

Le ministère de l'Intérieur a annoncé la mise en place d'une liste de numéros provisoires dans chaque département. La Sécurité civile a exhorté les usagers à ne pas surcharger les lignes et à n'appeler qu'en cas d'urgence.

"Il faut qu'on puisse répondre le plus vite possible. Il y a un véritable problème de mise en danger d'autrui", a lancé sur BFMTV Patrick Pelloux, le président de l'Association des médecins urgentistes de France (Amuf). 

« Ensemble du territoire »

L'incident a affecté de manière "partielle mais significative la réception des appels d'urgence 15/17/18/112 sur l'ensemble du territoire national", a confirmé le ministère de l'Intérieur dans un communiqué.

Bouygues Telecom et Altice, la maison-mère de SFR, ont également fait état de perturbations. De source proche du dossier, on a exclu tout "piratage" informatique. 

Une panne informatique avait touché l'opérateur belge Proximus début janvier, perturbant les numéros d'urgence en Belgique pendant toute une nuit.

En Nouvelle-Aquitaine, comme dans de nombreuses autres régions, tous les départements ont été touchés par la panne mercredi soir. Certaines préfectures, comme celles de Dordogne et Creuse, ont conseillé de se rendre dans des permanences: casernes, gendarmerie, commissariat, centres hospitaliers.

"Une panne affecte les numéros d’urgence", a prévenu sur Twitter l'Agence régionale de santé (ARS) d'Ile-de-France. "Si votre appel au 15 n'aboutit pas, renouvelez-le sans discontinuer (...). Ne saturez pas les lignes et n'appelez que pour des urgences établies".

"C'est inacceptable", a lancé Patrick Goldstein, chef du Samu du Nord, sur BFMTV. "C'est une source d'ennui maximum, surtout quand ça touche l'ensemble des services. Tous le monde en même temps et à l'échelle nationale, c'est quand même une première".

La panne souligne le besoin de réformer «notre système d'alerte», selon les pompiers

La panne qui a gravement perturbé les numéros d'urgence mercredi soir montre le besoin de rénover « notre système d'alerte » et de créer un numéro unique dédié aux appels d'urgence, le 112, estime jeudi la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF).

« Au final, notre résilience passe par une rénovation majeure de notre système d’alerte et de communication que demandent les sapeurs-pompiers de France depuis longtemps, exprimée par le président de la République en 2017, et qui pourrait enfin voir le jour si le Parlement comprend qu’il faut dorénavant éviter de mettre l'urgent comme le non-urgent dans le même tuyau », souligne la FNSPF dans un communiqué. « Oui au 112 pour l’urgence ».

Cette panne « montre une nouvelle fois le besoin de modernisation sur le plan infrastructurel comme organisationnel, en prenant en compte les nouveaux usages et outils informatiques : applications pour smartphones, réseaux sociaux, mais aussi objets connectés et mails doivent être pris en compte pour communiquer l’alerte », ajoute-t-elle.

« Avec plus de 18 millions d’appels reçus par les sapeurs-pompiers en France chaque année, et 1 intervention toutes les 6,5 secondes, cette panne a éprouvé le système d’alerte français », poursuit la FNSPF.

La panne chez l'opérateur Orange, qui a gravement perturbé les numéros d'urgence mercredi soir, intervient une semaine après l'adoption par l'Assemblée nationale en première lecture d'une proposition de loi qui vise notamment à instaurer un numéro unique dédié aux appels d'urgence, le 112, sur le modèle du « 911 » américain.

Trois modalités seront testées : un rapprochement de « l'ensemble des services » (numéro 15, 17 et 18), un rassemblement sans « police-secours » (15 et 18), ou un simple « regroupement » du Samu et des médecins de garde en lien avec les autres services d'urgence (15 et permanence des soins).

Ce texte consensuel, qui entend consolider le modèle de sécurité civile français reposant largement sur les sapeurs-pompiers volontaires (soit 80% des 250.000 pompiers), est désormais attendu au Sénat.


Proportionnelle: Bayrou consulte mais les avis divergent

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  • Le Premier ministre recevra chacun des chefs de partis et des présidents de groupes parlementaires représentés à l'Assemblée nationale, suivant un ordre lié à leur importance numérique
  • François Bayrou défend un scrutin à la proportionnelle intégrale, dans tous les départements, pour les élections législatives, alors que depuis l'instauration de la Ve République, les députés sont élus au scrutin uninominal majoritaire à deux tours

PARIS: François Bayrou entame mercredi avec le Rassemblement national une série de consultations des forces politiques sur la proportionnelle, que lui-même réclame depuis longtemps mais sur laquelle les désaccords restent nombreux.

Le Premier ministre recevra chacun des chefs de partis et des présidents de groupes parlementaires représentés à l'Assemblée nationale, suivant un ordre lié à leur importance numérique.

La cheffe de file des députés RN Marine Le Pen, qui forment le groupe le plus important à l'Assemblée, et le président du parti à la flamme Jordan Bardella seront ainsi reçus en premier à 10H00.

Suivra un entretien jeudi 1er mai à 17H00 avec le président du groupe macroniste et du parti Renaissance Gabriel Attal. Il sera accompagné par le député Pierre Cazeneuve, qui a mené une analyse comparative des différents modes de scrutin.

François Bayrou défend un scrutin à la proportionnelle intégrale, dans tous les départements, pour les élections législatives, alors que depuis l'instauration de la Ve République - à l'exception des législatives de 1986 -, les députés sont élus au scrutin uninominal majoritaire à deux tours.

Le RN réclame lui aussi la proportionnelle, mais avec une prime majoritaire pour la liste arrivée en tête. "La tripolarisation de la vie politique entraîne une absence de majorité", a soutenu mardi Mme Le Pen, qui "n'imagine pas que le Premier ministre (...) puisse reculer sur ce sujet".

"Moins pire" 

En discutant de cette revendication commune avec le RN, François Bayrou espère sans doute faire baisser la tension avec l'extrême droite, qui fait planer la menace d'une motion de censure contre son gouvernement.

Le RN dénonce l'absence de perspectives législatives sur la proportionnelle, sur l'immigration ainsi que sur la feuille de route énergétique (programmation pluriannuelle de l'énergie, PPE). François Bayrou l'a à cet égard ménagé lundi en reportant la date de publication d'un décret sur la PPE.

Mais le Premier ministre n'est pas assuré d'avoir cette fois le soutien des macronistes, traversés par moult "interrogations", selon Pierre Cazeneuve.

En 2018, le président Emmanuel Macron avait souhaité l'instauration d'un système mixte avec 15% des députés élus à la proportionnelle, puis la réforme avait été abandonnée.

Or les députés Renaissance considèrent désormais que le mode de scrutin actuel est "le moins pire", car la "distorsion" entre le nombre de voix et le nombre de députés "n'existe plus" dans l'Assemblée actuelle, et ce changement n'est "pas forcément une priorité" pour les Français au vu du nouveau contexte international, a expliqué M. Cazeneuve lors d'un point presse.

Cumul des mandats 

Gabriel Attal et Pierre Cazeneuve entendent jeudi élargir le débat à la question de "l'efficacité de l'action publique", en reparlant de la réduction du nombre de parlementaires et de la "simplification du millefeuille administratif".

Mais ils jugent "délétère" de proposer la proportionnelle en échange du cumul des mandats, soutenu avec force par François Bayrou.

Le président du parti Horizons Edouard Philippe défend pour sa part le scrutin majoritaire, qui "impose un lien entre un député et les électeurs d'un territoire". Il pourrait soutenir la proportionnelle "si était rétablie la possibilité de cumuler un mandat exécutif local et le mandat parlementaire".

Les indépendants du groupe Liot sont "plutôt largement très défavorables" à réformer le mode de scrutin, selon son président Laurent Panifous.

A droite, Les Républicains (LR) y sont fermement opposés, comme l'a rappelé Laurent Wauquiez.

"La proportionnelle aboutira à ce qu'on va institutionnaliser le chaos politique qu'on connaît en ce moment", a tonné le patron de la droite dimanche, avant de critiquer mardi la "hiérarchie des priorités" du gouvernement dans un pays "qui est ruiné" et "où il y a une telle explosion de l'insécurité et de l'immigration", au vu des "menaces" sur le plan international.

Le gouvernement souhaite pouvoir légiférer à ce sujet "avant la fin de la session parlementaire si le débat est mûr", a précisé mercredi sa porte-parole LR Sophie Primas.

D'autres partis, notamment à gauche, souhaitent une évolution du mode de scrutin.

Mais le PS est divisé. L'ancien président François Hollande est pour, tandis que son Premier secrétaire Olivier Faure est contre à titre personnel.

Le député PS Emmanuel Grégoire a rappelé mardi que "derrière ce mot un peu vague de proportionnelle, se cache une subtilité immense, immense, de déclinaisons pratiques".


Assemblée: la gauche s'insurge contre le refus d'une minute de silence pour la victime de la mosquée du Gard

La députée de La France Insoumise - Nouveau Front Populaire et présidente de la commission parlementaire des affaires économiques, Aurélie Trouve, s'exprime lors d'une déclaration du gouvernement et d'un débat parlementaire sur la souveraineté énergétique de la France à l'Assemblée nationale française, à Paris, le 28 avril 2025. (AFP)
La députée de La France Insoumise - Nouveau Front Populaire et présidente de la commission parlementaire des affaires économiques, Aurélie Trouve, s'exprime lors d'une déclaration du gouvernement et d'un débat parlementaire sur la souveraineté énergétique de la France à l'Assemblée nationale française, à Paris, le 28 avril 2025. (AFP)
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  • La gauche s'est insurgée mardi contre l'absence de minute de silence à l'Assemblée nationale en hommage à Aboubakar Cissé, tué de plusieurs dizaines de coups de couteau vendredi dans une mosquée du Gard
  • Le parti de gauche a annoncé avoir essuyé un refus de Mme Braun-Pivet au motif qu'il "n'y a pas de minute de silence pour des cas individuels", a rapporté Aurélie Trouvé, députée LFI

PARIS: La gauche s'est insurgée mardi contre l'absence de minute de silence à l'Assemblée nationale en hommage à Aboubakar Cissé, tué de plusieurs dizaines de coups de couteau vendredi dans une mosquée du Gard.

La France insoumise, qui appelle à une "mobilisation nationale contre l'islamophobie" le dimanche 11 mai, a demandé à la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, qu'une minute de silence soit observée mardi en ouverture de la séance des questions au gouvernement.

Le parti de gauche a toutefois annoncé avoir essuyé un refus de Mme Braun-Pivet au motif qu'il "n'y a pas de minute de silence pour des cas individuels", a rapporté Aurélie Trouvé, députée LFI (Seine-Saint-Denis).

La question a été soulevée en conférence des présidents, mais n'a pas recueilli de majorité de voix selon une source parlementaire, qui souligne que cette instance a décidé fin janvier "de ne plus faire de minutes de silence pour des cas individuels".

"On n'est pas sur un cas individuel, on est sur un meurtre islamophobe, sur un climat islamophobe dans le pays, et ne pas rendre hommage à Aboubakar Cissé est une très grave faute politique", a déploré le député LFI Thomas Portes.

Le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, s'est dit sur X "scandalisé par le refus de Yaël Braun-Pivet d'accorder une minute de silence en hommage à Aboubakar Cissé". "Cet hommage républicain doit être rendu dans l'hémicycle", a abondé sur le même réseau social le patron des députés PS Boris Vallaud.

Benjamin Lucas, porte-parole du groupe écologiste, a lui-aussi regretté l'absence de cette minute de silence qui "aurait été un bon signal" envers "nos compatriotes musulmans qui sont insultés, injuriés en permanence".

Une décision également "vivement regrettée" par Stéphane Peu, chef du groupe communiste à l'Assemblée nationale. Son groupe posera mardi après-midi une question au gouvernement sur le meurtre d'Aboubakar Cissé.

Réunis autour de membres de la famille d'Aboubakar Cissé, mardi à l'Assemblée nationale, plusieurs leaders de gauche dont Olivier Faure et l'écologiste Marine Tondelier, ont insisté pour que cette minute de silence puisse avoir lieu.


Le procès d'un ex-rebelle syrien pour complicité de crimes de guerre s'est ouvert à Paris

Il s'agit du deuxième procès qui se tient en France concernant les crimes commis en Syrie, après un premier tenu par défaut en mai 2024 visant de hauts dignitaires du régime syrien, condamnés pour la disparition forcée et la mort de deux Franco-Syriens. (AFP)
Il s'agit du deuxième procès qui se tient en France concernant les crimes commis en Syrie, après un premier tenu par défaut en mai 2024 visant de hauts dignitaires du régime syrien, condamnés pour la disparition forcée et la mort de deux Franco-Syriens. (AFP)
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  • Cet ancien membre de Jaysh al-Islam (JAI, Armée de l'islam), âgé aujourd'hui de 36 ans, conteste les accusations, affirmant n'avoir eu qu'un "rôle limité" dans ce groupe prônant la charia et qui combattait le régime syrien
  • Placé en détention provisoire depuis janvier 2020, il comparaît pour complicité de crimes de guerre et entente en vue de la préparation de crimes de guerre. Il est notamment soupçonné d'avoir aidé à enrôler des enfants ou des adolescents

PARIS: Le procès d'un ex-rebelle salafiste, Majdi Nema, pour complicité de crimes de guerre commis entre 2013 et 2016 en Syrie, s'est ouvert mardi devant la cour d'assises de Paris, qui peut le juger en vertu du principe de la compétence universelle de la justice française.

Cet ancien membre de Jaysh al-Islam (JAI, Armée de l'islam), âgé aujourd'hui de 36 ans, conteste les accusations, affirmant n'avoir eu qu'un "rôle limité" dans ce groupe prônant la charia et qui combattait le régime syrien.

Placé en détention provisoire depuis janvier 2020, il comparaît pour complicité de crimes de guerre et entente en vue de la préparation de crimes de guerre. Il est notamment soupçonné d'avoir aidé à enrôler des enfants ou des adolescents dans les rangs des "Lionceaux de l'islam" et à les former à l'action armée.

Pour ces faits, il encourt 20 ans de réclusion criminelle.

Echanges tendus 

Avant même l'ouverture des débats, les échanges ont été tendus entre les avocats de la défense, Mes Romain Ruiz et Raphaël Kempf, et le président de la cour d'assises, Jean-Marc Lavergne, ce dernier ayant refusé que l'accusé s'exprime en anglais, et exigé qu'il s'exprime dans sa langue maternelle, l'arabe.

Une injonction ignorée par Majdi Nema. Appelé à décliner son identité, l'accusé à la forte corpulence et aux rares cheveux coiffés en catogan, a répondu en anglais. "Il n'y a aucune preuve des faits qu'on me reproche", a-t-il déclaré d'emblée, qualifiant l'affaire de "purement politique".

Il s'agit du deuxième procès qui se tient en France concernant les crimes commis en Syrie, après un premier tenu par défaut en mai 2024 visant de hauts dignitaires du régime syrien, condamnés pour la disparition forcée et la mort de deux Franco-Syriens.

Ex-officier de l'armée syrienne, Majdi Nema avait fait défection en novembre 2012 pour rejoindre Zahran Alloush, fondateur et commandant en chef de Liwa al-Islam, devenu JAI en 2013. Ce groupe avait pris dès 2011 le contrôle de la Ghouta orientale, au nord-est de Damas, et est aujourd'hui soupçonné d'être impliqué dans la commission de crimes de guerre commis notamment au préjudice de la population civile.

Connu sous le nom de guerre d'Islam Alloush, il affirme avoir quitté la Ghouta orientale fin mai 2013 pour rejoindre la Turquie, d'où il agissait comme porte-parole de JAI, ce qui prouverait qu'il n'a pu commettre les crimes reprochés. Il dit avoir quitté le groupe en 2016.

En novembre 2019, il était arrivé en France pour suivre comme étudiant un cycle de conférences à l'Institut de recherche sur le monde arabe et musulman de l'université Aix-Marseille.

Compétence contestée 

Alors qu'une plainte avait été déposée en France contre JAI quelques mois auparavant, il avait été interpellé en janvier 2020 et mis en examen par un juge du pôle crimes contre l'humanité du tribunal de Paris.

Au terme de la procédure, il avait aussi été renvoyé devant les assises pour complicité de disparitions forcées. Il était mis en cause, en tant que membre de JAI, dans l'enlèvement le 9 décembre 2013 de quatre militants des droits humains, dont l'avocate et journaliste syrienne Razan Zeitouneh, jamais retrouvés.

Mais la cour d'appel de Paris a annulé ces poursuites en novembre 2023 pour des raisons procédurales, même si elle affirmait dans son arrêt que "Jaysh al-Islam doit être considéré comme responsable de la disparition" des quatre activistes. Ce qui avait été ensuite validé par la Cour de cassation.

Pendant l'instruction, la défense de Majdi Nema a contesté le principe de la compétence universelle de la justice française, qui lui permet de juger un étranger pour des crimes contre l'humanité ou des crimes de guerre commis à l'étranger contre des étrangers, mais la Cour de cassation a rejeté son pourvoi.

Avant le procès, les avocats de l'accusé ont souligné que la chute en décembre 2024 du régime de Bachar al-Assad ouvrait de nouvelles perspectives et posait la "question de la légitimité" de ce procès.

Pour Me Marc Bailly, avocat de plusieurs parties civiles dans ce dossier, "en l'état actuel, il est impossible de faire un procès en Syrie pour ces crimes".

Verdict prévu le 27 mai.