Fuir à tout prix: itinéraire d'un journaliste birman réfugié en Espagne

Le journaliste Mratt Kyaw Thu dans le parc du Retiro à Madrid, le 7 juin 2021 (Photo, AFP)
Le journaliste Mratt Kyaw Thu dans le parc du Retiro à Madrid, le 7 juin 2021 (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 08 juin 2021

Fuir à tout prix: itinéraire d'un journaliste birman réfugié en Espagne

Le journaliste Mratt Kyaw Thu dans le parc du Retiro à Madrid, le 7 juin 2021 (Photo, AFP)
  • «Je me suis senti en sécurité une fois à bord de l'avion, après avoir passé les contrôles aux frontières en Thaïlande», confie ce reporter qui s'est retrouvé dans le collimateur de la junte
  • Âgé d'à peine 30 ans, Mratt Kyaw Thu est connu pour ses critiques de la junte depuis le coup d'Etat et pour avoir écrit sur les Rohingyas, la minorité musulmane persécutée dans le pays

MADRID: Il a retenu son souffle jusqu'à l'embarquement de son vol pour l'Europe. Fuyant la Birmanie, le journaliste Mratt Kyaw Thu s'est alors senti en sécurité pour la première fois depuis le coup d'Etat militaire du 1er février.  

« Je me suis senti en sécurité une fois à bord de l'avion, après avoir passé les contrôles aux frontières en Thaïlande », confie ce reporter qui s'est retrouvé dans le collimateur de la junte pour avoir écrit sur la répression sanglante des manifestations d'opposants.  

« C'est à ce moment-là que j'ai commencé à me sentir un peu plus libre », poursuit-il dans un entretien à Madrid, où il est arrivé le 1er juin pour demander l'asile.  

La Birmanie est en proie à des troubles depuis que les militaires ont renversé la dirigeante Aung San Suu Kyi le 1er février, ce qui a déclenché un soulèvement massif de la population.  

La junte a répondu par la force, tirant sur les manifestants, arrêtant des opposants présumés lors de descentes nocturnes, ciblant des journalistes et fermant des organes de presse.   

Plus de 800 personnes sont mortes, selon une ONG locale qui recense les victimes.  

Âgé d'à peine 30 ans, Mratt Kyaw Thu est connu pour ses critiques de la junte depuis le coup d'Etat et pour avoir écrit sur les Rohingyas, la minorité musulmane persécutée dans le pays.  

Il a été récompensé par le prix AFP Kate Webb en 2017 pour sa couverture des conflits ethniques et religieux en Birmanie.  

« La première semaine » après le coup d'Etat, « les militaires ont commencé à arrêter les journalistes et les militants les plus connus car ils pensaient ainsi mettre fin aux énormes manifestations », poursuit Mratt Kyaw Thu.  

Craignant de connaître le même sort, le journaliste a quitté son appartement le 12 février et n'y a jamais remis les pieds.   

Selon l'organisation Reporting ASEAN, 87 journalistes ont été arrêtés depuis le coup d'Etat.   

Surveillée par la junte, la presse birmane souffre aussi d'une certaine défiance de la population, avide d'information en cette période troublée mais méfiante face à la circulation de »fake news ». De nombreux informateurs pro-junte se font par ailleurs passer pour des journalistes.  

Comme Mratt Kyaw Thu, nombre de journalistes se sont enfuis. Les autres changent constamment de numéro de téléphone pour échapper à la surveillance.  

La Birmanie est classée au 140e rang sur 180 dans le classement mondial de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières (RSF).  

« Ils viennent te chercher »  

« On attendait tous que ça frappe à notre porte. Parfois, tu entends des bruits de pas dans les escaliers et là tu te dis que c'est toi qu'ils viennent chercher », raconte le journaliste.  

Et « quand il pleut des trombes d'eau, les gens se mettent à paniquer, croyant entendre des coups de feu », se souvient-il encore.  

Une image le hante, celle d'un militant du parti d'Aung San Suu Kyi: « arrêté et tué pendant sa détention, ils lui ont versé de l'eau bouillante dans la gorge », dit-il en décrivant une photo du supplicié qu'il a pu voir.  

« J'ai compris qu'il ne fallait pas que je sois arrêté ».  

Quelques jours plus tard, un ami l'avertit que des soldats sont dans sa rue. « Quitte Rangoun. Tout de suite », lui écrit-il.  

Malgré les contrôles, il parvient à rejoindre la frontière thaïlandaise, aidé par des amis, des ONG ou des groupes rebelles.  

Mais une fois la frontière franchie, il ne se sent toujours pas en sécurité, craignant d'être renvoyé en Birmanie par les autorités thaïlandaises.   

Au bout de deux semaines, il finit par obtenir un visa pour l'Europe et réserve un avion pour Madrid grâce à ses relations au sein de l'agence de presse espagnole EFE, même si son escale à Francfort (Allemagne) se transforme en calvaire de 39 jours dans un centre de rétention.   

Empreint de « culpabilité », il ne peut s'empêcher de penser à ses amis restés en Birmanie pour lutter contre la junte. « Mais d'un autre côté, si tous les journalistes combattent les militaires, qui va informer les gens? ». 


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.


Ouragan Melissa: près de 50 morts dans les Caraïbes, l'aide afflue

Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
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  • L’ouragan Melissa, le plus puissant à frapper la Jamaïque en près de 90 ans, a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque, laissant derrière lui des destructions massives et des centaines de milliers de sinistrés
  • L’aide internationale afflue vers les Caraïbes, avec des secours venus des États-Unis, du Venezuela, de la France et du Royaume-Uni, alors que les experts rappellent le rôle du réchauffement climatique dans l’intensification de ces catastrophes

CUBA: L'aide internationale afflue vendredi vers les Caraïbes dévastées par le passage de l'ouragan Melissa qui a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque.

Habitations en ruines, quartiers inondés et communications coupées... L'heure est à l'évaluation des dégâts causés par Melissa qui devrait désormais faiblir au dessus dans l'Atlantique nord après avoir passé les Bermudes.

Selon le Centre national américain des ouragans (NHC), les inondations devraient s'atténuer aux Bahamas, mais les crues pourraient demeurer à un niveau élevé à Cuba, en Jamaïque, en Haïti et en République dominicaine voisine.

Rendu plus destructeur par le réchauffement climatique, l'ouragan a été le plus puissant à toucher terre en 90 ans lorsqu'il a frappé la Jamaïque mardi en catégorie 5, la plus élevée sur l'échelle Saffir-Simpson, avec des vents d'environ 300 km/h.

"Le bilan confirmé est désormais de 19 morts" dont neuf à l'extrémité ouest de l'île, a déclaré jeudi soir la ministre jamaïcaine de l'Information Dana Morris Dixon, citée par les médias locaux.

De nombreux habitants n'ont toujours pas pu contacter leurs proches, ont expliqué les autorités. L'armée jamaïcaine s'emploie à dégager les routes bloquées, selon le gouvernement.

"Il y a eu une destruction immense, sans précédent, des infrastructures, des propriétés, des routes, des réseaux de communication et d'énergie", a déclaré depuis Kingston Dennis Zulu, coordinateur pour l'ONU dans plusieurs pays des Caraïbes. "Nos évaluations préliminaires montrent que le pays a été dévasté à des niveaux jamais vus auparavant".

- Melissa "nous a tués" -

A Haïti, pas directement touché par l'ouragan mais victime de fortes pluies, au moins 30 personnes, dont dix enfants, sont mortes, et 20 portées disparues, selon le dernier bilan des autorités communiqué jeudi. Vingt-trois de ces décès sont dus à la crue d'une rivière dans le sud-ouest du pays.

A Cuba, les communications téléphoniques et routières restent largement erratiques.

A El Cobre, dans le sud-ouest de l'île communiste, le son des marteaux résonne sous le soleil revenu: ceux dont le toit s'est envolé s'efforcent de réparer avec l'aide d'amis et de voisins, a constaté l'AFP.

Melissa "nous a tués, en nous laissant ainsi dévastés", a déclaré à l'AFP Felicia Correa, qui vit dans le sud de Cuba, près d'El Cobre. "Nous traversions déjà d'énormes difficultés. Maintenant, évidement, notre situation est bien pire."

Quelques 735.000 personnes avaient été évacuées, selon les autorités cubaines.

- Secouristes -

L'aide promise à l'internationale s'achemine dans la zone dévastée.

Les États-Unis ont mobilisé des équipes de secours en République dominicaine, en Jamaïque et aux Bahamas, selon un responsable du département d'État. Des équipes étaient également en route vers Haïti.

Le secrétaire d'État Marco Rubio a également indiqué que Cuba, ennemi idéologique, est inclus dans le dispositif américain.

Le Venezuela a envoyé 26.000 tonnes d'aide humanitaire à son allié cubain.

Le président du Salvador Nayib Bukele a annoncé sur X envoyer vendredi "trois avions d'aide humanitaire en Jamaïque" avec "plus de 300 secouristes" et "50 tonnes" de produits vitaux.

Kits de première nécessité, unités de traitement de l'eau: la France prévoit de livrer "dans les prochains jours" par voie maritime une cargaison d'aide humanitaire d'urgence en Jamaïque, selon le ministère des Affaires étrangères.

Le Royaume-Uni a débloqué une aide financière d'urgence de 2,5 millions de livres (2,8 millions d'euros) pour les pays touchés.

Le changement climatique causé par les activités humaines a rendu l'ouragan plus puissant et destructeur, selon une étude publiée mardi par des climatologues de l'Imperial College de Londres.

"Chaque désastre climatique est un rappel tragique de l'urgence de limiter chaque fraction de degré de réchauffement, principalement causé par la combustion de quantités excessives de charbon, de pétrole et de gaz", a déclaré Simon Stiell, secrétaire exécutif de l'ONU chargé du changement climatique, alors que la grande conférence climatique des Nations unies COP30 s'ouvre dans quelques jours au Brésil.

Avec le réchauffement de la surface des océans, la fréquence des cyclones (ou ouragans ou typhons), les plus intenses augmente, mais pas leur nombre total, selon le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU, le Giec.