Le bitcoin, un outil prisé mais risqué pour les criminels

Surtout, l'analyse des transactions peut permettre d'identifier les plates-formes de ventes de bitcoins vers lesquelles le portefeuille a renvoyé les bitcoins mal acquis. (Photo, AFP)
Surtout, l'analyse des transactions peut permettre d'identifier les plates-formes de ventes de bitcoins vers lesquelles le portefeuille a renvoyé les bitcoins mal acquis. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 09 juin 2021

Le bitcoin, un outil prisé mais risqué pour les criminels

  • Comment les autorités américaines ont tracé ces transactions, alors que le bitcoin est parfois décrit comme un réseau décentralisé et anonyme?
  • Le nombre de rançons payées en cryptomonnaies s'était déjà envolé en 2020 pour atteindre près de 350 millions de dollars

LONDRES: La cryptomonnaie bitcoin est régulièrement critiquée par les régulateurs pour ses usages illégaux, mais la transparence de son réseau peut jouer contre les criminels, comme l'ont appris à leurs dépens les pirates informatiques de Darkside.

Ces hackeurs, qui avaient reçu une rançon géante de l'entreprise pétrolière Colonial Pipeline de 4,4 millions de dollars, payée en bitcoins, ont vu disparaître l'équivalent de 2,3 millions de ces dollars saisis par les autorités, qui ont tracé leurs transactions financières, a déclaré la ministre adjointe de la Justice Lisa Monaco lundi.

"Suivre l'argent est l'une de nos méthodes les plus basiques, mais aussi les plus efficaces", a affirmé Mme Monaco lors d'une conférence de presse.

Comment les autorités américaines ont tracé ces transactions, alors que le bitcoin est parfois décrit comme un réseau décentralisé et anonyme?

Pour un paiement bancaire classique, la police peut se tourner vers la banque qui a envoyé ou reçu l'argent, mais pour le bitcoin, le registre qui enregistre ces transactions, une chaîne de blocs ou "blockchain", ne demande pas aux utilisateurs de révéler leur identité.

En revanche, cette "blockchain" est aussi publique: tout le monde peut la télécharger, observer ses transactions et ensuite essayer de deviner à qui appartiennent les adresses anonymes où arrivent les bitcoins.

Si certains utilisateurs mettent leurs bitcoins à l'abri sur un portefeuille hors-ligne, par exemple sur une clef USB ou sur un disque dur, ceux de Darkside étaient toujours liés à un compte en ligne, dont les autorités américaines affirment avoir récupéré la clef, sans préciser si elles ont piraté le compte des pirates ou si un informateur leur a envoyé ce sésame.

350 millions de dollars en rançons

En 2019, l'analyse de la "blockchain" avait permis aux autorités britanniques et américaines de démanteler un réseau pédopornographique et d'arrêter plus de 300 personnes dans 38 pays.

Le traçage complexe des transactions est devenu une véritable industrie. Des cabinets spécialisés de l'analyse de la "blockchain" des cryptoactifs se sont développés, comme Chainalysis aux États-Unis ou Elliptic au Royaume-Uni.

Selon un rapport de Chainalysis paru en février, les transactions en cryptomonnaies à des fins illégales ont atteint 10 milliards de dollars en 2020, soit 1% du total de l'activité des cryptomonnaies l'année dernière et moitié moins que l'année précédente, quand ces activités avaient atteint un record de 21,4 milliards de dollars.

"Les cryptomonnaies gardent un attrait pour les criminels, principalement à cause de leur anonymat et de la facilité qu'il y a à envoyer des fonds à travers le monde et ce, malgré leur nature transparente et traçable", y explique le cabinet.

Le nombre de rançons payées en cryptomonnaies s'était déjà envolé en 2020 pour atteindre près de 350 millions de dollars.

Les analystes de Elliptic estiment quant à eux avoir identifié le portefeuille bitcoin qui a reçu la rançon versée par Colonial Pipeline à Darkside et assurent qu'au moins un autre paiement de 4,4 millions de dollars avait été effectué.

Hydre russe

Surtout, l'analyse des transactions peut permettre d'identifier les plates-formes de ventes de bitcoins vers lesquelles le portefeuille a renvoyé les bitcoins mal acquis.

"Cette information donnera des pistes cruciales aux forces de l'ordre pour identifier les perpétrateurs", écrit le chercheur Tom Robinson, d'Elliptic, dans une note.

Les régulateurs du marché ont mis la pression sur les plates-formes d'échanges de cryptomonnaies. Nombre d'entre elles, comme Coinbase, demandent désormais à leurs utilisateurs de dévoiler leur identité avant d'effectuer des transactions.

Mais d'autres plates-formes ne suivent pas les mêmes règles.

Elliptic comme Chainalysis pointent du doigt le rôle grandissant de Hydra, un site de vente à la clientèle russophone, accessible via le darknet, une version du web non référencée sur les moteurs de recherche et où les utilisateurs peuvent garder l'anonymat.

"Hydra propose de retirer de l'argent ainsi que des drogues, des outils de piratage ou de fausses pièces d'identité", énumère M. Robinson.

En utilisant à la fois des sites comme Hydra et des cryptomonnaies, les pirates de Darkside auraient déjà revendu une partie des bitcoins rançonnés.

Alors que le prix du bitcoin s'est envolé ces derniers mois (+240% à près de 33 000 dollars mardi après-midi), les régulateurs adaptent leurs stratégies.

La Banque d'Angleterre a ainsi affirmé lundi que les paiements en stablecoins, ces cryptomonnaies au prix fixe, devraient être régulées avec la même rigueur que les paiements bancaires.

Le congrès du Salvador approuve une loi pour légaliser le bitcoin

Le Congrès du Salvador a approuvé mercredi une loi convertissant le bitcoin en monnaie légale, une initiative sans précédent dans le monde défendue par le président Nayib Bukele afin de dynamiser la croissance du pays d'Amérique centrale.

"La présente loi a pour objet la régularisation du bitcoin comme monnaie à cours légal, sans restriction avec pouvoir libératoire, illimité dans toute transaction", stipule le premier article de cette loi, qui doit être soumise pour ratification au chef de l'Etat.

Samedi dernier, M. Bukele avait annoncé son intention de légaliser le bitcoin, avec pour objectif de générer des emplois et de "permettre une inclusion financière à des milliers de personnes qui sont en dehors de l'économie légale". 

Il avait expliqué que "70% de la population n'avait pas de compte en banque et travaillait dans l'économie informelle".

Dans l'économie dollarisée du Salvador, les envois de fonds des Salvadoriens depuis l'étranger sont un soutien important et équivalent à 22% du produit intérieur brut (PIB).


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
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  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
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  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.