Biden-Poutine, place au tête-à-tête

L'une des questions les plus sensibles est celle de la désinformation en ligne et des attaques informatiques. (Photo, AFP)
L'une des questions les plus sensibles est celle de la désinformation en ligne et des attaques informatiques. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 16 juin 2021

Biden-Poutine, place au tête-à-tête

  • Le 46e président américain a adopté un ton résolument ferme ces derniers jours à l'égard de l'homme fort du Kremlin
  • Même si la Maison Blanche n'a eu de cesse de souligner qu'il ne fallait attendre aucune percée spectaculaire, le président de 78 ans sait qu'il a l'occasion de peaufiner son image de fin négociateur à Genève

GENEVE: Fort du soutien appuyé des alliés des Etats-Unis, Joe Biden rencontre mercredi Vladimir Poutine lors d'un sommet à Genève destiné à apaiser les tensions avec la Russie et tenter de dégager quelques rares terrains d'entente.

Le cadre de la rencontre - une magnifique bâtisse du XVIIIe siècle avec une vue imprenable sur le lac Léman - est enchanteur. Mais les discussions, qui doivent débuter à 13H00 (11H00 GMT), s'annoncent âpres et tendues.

Le 46e président américain a adopté un ton résolument ferme ces derniers jours à l'égard de l'homme fort du Kremlin pour mieux marquer le contraste avec les atermoiements et les ambiguïtés de son prédécesseur républicain, Donald Trump.

Joe Biden a promis de dire à Vladimir Poutine quelles sont "ses lignes rouges". "Nous ne cherchons pas un conflit avec la Russie, mais nous répondrons si la Russie continue ses activités", a-t-il déclaré lundi à la fin du sommet de l'Otan à Bruxelles.

Près de cinq mois après son arrivée au pouvoir, Joe Biden joue gros. Même si la Maison Blanche n'a eu de cesse de souligner qu'il ne fallait attendre aucune percée spectaculaire, le président de 78 ans sait qu'il a l'occasion de peaufiner son image de fin négociateur à Genève.

La ville a déjà accueilli le premier face-à-face entre Ronald Reagan et Mikhaïl Gorbatchev en 1985, qui avait marqué le début du dégel de la Guerre froide.

"Je suis toujours prêt", a répondu mardi à son arrivée le président américain, interrogé sur son état d'esprit avant le rendez-vous qui sera scruté avec attention à travers le monde.

Le président russe, qui est attendu à Genève en milieu de journée, peut faire valoir une longue expérience: il a déjà côtoyé quatre autres présidents américains depuis son arrivée au pouvoir fin 1999.

Et nombre d'experts s'accordent à dire qu'il a déjà obtenu ce qu'il désirait le plus: la tenue du sommet comme illustration de l'importance de la Russie sur la scène mondiale.

Dans un entretien à la chaîne américaine NBC, il a dit espérer que le président démocrate se montre moins impulsif que son prédécesseur républicain. Mais il a aussi saisi l'occasion pour souligner combien Donald Trump était, selon lui, un homme "talentueux".

Le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Riabkov, qui participera aux discussions russo-américaines au format élargi, a résumé la position de Moscou: "La partie russe a fait le maximum pour que le sommet soit positif et soit couronné des résultats qui permettront d’empêcher une détérioration ultérieure des relations bilatérales", dans une déclaration à l'agence de presse RIA Novosti.

Les discussions devraient durer entre quatre et cinq heures mais les deux hommes n'ont pas prévu de manger ensemble, selon un membre de l'administration américaine.

Au programme: une rencontre en format réduit (les présidents américain et russe ainsi que les chefs de la diplomatie américaine et russe, Antony Blinken et Sergueï Lavrov), avant une séance de travail élargie.

«Free Navalny»

Seul point de convergence entre la Maison Blanche et le Kremlin: les relations entre les deux pays sont au plus bas.

Pour le reste, les sujets de discorde sont nombreux et les discussions s'annoncent difficiles, en particulier sur l'Ukraine et le Bélarus.

L'une des questions les plus sensibles est celle de la désinformation en ligne et des attaques informatiques.

Au-delà de la tentative d'ingérence dans l'élection de 2016 au profit de Donald Trump, des cyberattaques massives ont récemment agacé Washington. SolarWinds, Colonial Pipeline, JBS: autant d'opérations imputées à Moscou, ou à des groupes de hackers basés en Russie.

La Russie, qui a toujours démenti, accuse Washington de s'immiscer dans ses affaires en soutenant l'opposition ou en finançant organisations et médias critiques du Kremlin.

"Nous avons été accusés de toutes sortes de choses" mais "pas une seule fois, ils n'ont pris la peine de produire la moindre preuve", a lancé le président russe cette semaine.

Genève bouclée

La ville est sous haute sécurité et plusieurs blindés à roues patrouillent dans les rues quasiment désertes malgré une météo splendide. Les autorités avaient pris soin d'appeler la population à télétravailler dans la mesure du possible en ce mercredi de sommet. 

Des commerces, notamment aux abords de l'hôtel où est descendu M. Biden et qui a été transformé en forteresse, ont décidé de laisser porte-close. Les écoles, elles, ont rappelé que sommet ne voulait pas dire école buissonnière.

Une manifestation de soutien à l'opposant Alexeï Navalny, aujourd'hui emprisonné après voir failli mourir d'un empoisonnement qu'il accuse le Kremlin d'avoir fomenté, n'a attiré qu'une poignée de personnes mardi.

Mardi, depuis Bruxelles, Joe Biden avait lancé un avertissement très clair au sujet du célèbre opposant.

La mort de Navalny "serait une tragédie", a-t-il dit. "Cela ne ferait que détériorer les relations avec le reste du monde. Et avec moi".

Dans ce contexte, les attentes, à Washington comme ailleurs, sont limitées.

"Le sommet de Genève n'a pas pour objectif un nouveau départ ou un percée spectaculaire. Il s'agit d'essayer de mieux gérer une relation difficile qui le restera pour un moment", estime Steven Pifer, du centre de réflexion Brookings.


Russie: le suicide apparent d'un ministre sème la peur au sein de l'élite

Roman Starovoït avait été gouverneur de la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine, avant d'être promu ministre à Moscou en mai 2024, trois mois avant que les troupes ukrainiennes ne prennent le contrôle d'une petite partie de ce territoire lors d'une offensive surprise. Une attaque qui avait été un revers pour le Kremlin. (AFP)
Roman Starovoït avait été gouverneur de la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine, avant d'être promu ministre à Moscou en mai 2024, trois mois avant que les troupes ukrainiennes ne prennent le contrôle d'une petite partie de ce territoire lors d'une offensive surprise. Une attaque qui avait été un revers pour le Kremlin. (AFP)
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  • Si les circonstances de la mort de Roman Starovoït, âgé de 53 ans, restent floues, les médias russes ont évoqué une enquête pour corruption le visant, assurant qu'il devait être arrêté prochainement
  • Limogé par le président Vladimir Poutine, il s'est probablement donné la mort, selon les premiers résultats de l'enquête, qui est en cours

SAINT-PETERSBOURG: Le suicide probable du ministre russe des Transports, Roman Starovoït, annoncé peu après son limogeage lundi par Vladimir Poutine sur fond d'allégations de corruption, a profondément choqué l'élite politique, où chacun redoute de faire les frais de la chasse aux profiteurs.

Ses funérailles ont eu lieu vendredi dans un cimetière de Saint-Pétersbourg en présence de sa famille et de collègues, mais en l'absence de M. Poutine qui n'a pas non plus participé à la cérémonie d'adieu jeudi.

Si les circonstances de la mort de Roman Starovoït, âgé de 53 ans, restent floues, les médias russes ont évoqué une enquête pour corruption le visant, assurant qu'il devait être arrêté prochainement.

Limogé par le président Vladimir Poutine, il s'est probablement donné la mort, selon les premiers résultats de l'enquête, qui est en cours.

"C'est une grande perte pour nous, très inattendue. Nous sommes tous choqués", a déclaré à l'AFP Vassilissa, 42 ans, l'épouse d'un collègue de M. Starovoït, lors de la cérémonie de jeudi.

"Il était tellement actif, joyeux, il aimait énormément la vie. Je ne comprends pas comment cela a pu arriver", ajoute cette femme, les larmes aux yeux.

Après avoir déposé devant le cercueil de grands bouquets de roses rouges, des anciens collègues de M. Starovoït, en costumes sombres, sont repartis très vite dans leurs luxueuses voitures noires.

Dans une ambiance très lourde rappelant les funérailles dans le film culte "Le Parrain" de Francis Ford Coppola, d'autres personnes interrogées par les journalistes de l'AFP dans la foule ont refusé de parler.

"Bouc émissaire" 

Roman Starovoït avait été gouverneur de la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine, avant d'être promu ministre à Moscou en mai 2024, trois mois avant que les troupes ukrainiennes ne prennent le contrôle d'une petite partie de ce territoire lors d'une offensive surprise. Une attaque qui avait été un revers pour le Kremlin.

Son successeur à la tête de cette région, Alexeï Smirnov, a lui été arrêté au printemps pour le détournement des fonds destinés à renforcer les fortifications à la frontière. Celle-là même que les Ukrainiens ont traversé facilement, pour n'être repoussés que neuf mois plus tard.

Les autorités "ont essayé de faire de lui (Roman Starovoït) un bouc émissaire", accuse auprès de l'AFP Andreï Pertsev, analyste du média indépendant Meduza, reconnu "indésirable" et interdit en Russie.

L'incursion ukrainienne "s'est principalement produite parce qu'il n'y avait pas assez de soldats pour protéger la frontière", mais c'était "plus facile de rejeter la faute sur un responsable civil", explique-t-il.

L'affaire Starovoït s'inscrit dans une vague récente de répression visant de hauts responsables soupçonnés de s'être enrichis illégalement pendant l'offensive russe en Ukraine. Et selon des analystes, si les scandales de corruption on toujours existé en Russie, la campagne militaire a changé les règles du jeu politique.

"Il existait des règles auparavant, selon lesquelles les gens savaient: une fois qu'ils montaient suffisamment haut, on ne les embêtait plus", estime M. Pertsev. "Mais elles ne fonctionnent plus."

"On ne vole pas" 

Alors que Vladimir Poutine promettait régulièrement de s'attaquer à la corruption - étant lui même accusé de s'être enrichi illégalement par ses détracteurs -, les rares arrestations médiatisées ont été davantage utilisées pour cibler des opposants ou résultaient de luttes internes entre les échelons inférieurs du pouvoir en Russie.

Depuis l'offensive en Ukraine lancée en février 2022, "quelque chose dans le système a commencé à fonctionner de manière complètement différente", souligne la politologue Tatiana Stanovaïa du Centre Carnegie Russie Eurasie, interdit en Russie en tant qu'organisation "indésirable".

"Toute action ou inaction qui, aux yeux des autorités, accroît la vulnérabilité de l'État face aux actions hostiles de l'ennemi doit être punie sans pitié et sans compromis", estime Mme Stanovaïa en définissant la nouvelle approche du pouvoir.

Pour le Kremlin, la campagne en Ukraine est une "guerre sainte" qui a réécrit les règles, confirme Nina Khrouchtcheva, professeure à The New School, une université de New York, et arrière-petite-fille du dirigeant soviétique Nikita Khrouchtchev.

"Pendant une guerre sainte, on ne vole pas (...) on se serre la ceinture et on travaille 24 heures sur 24", résume-t-elle.

Signe des temps, plusieurs généraux et responsables de la Défense ont été arrêtés pour des affaires de détournement de fonds ces dernières années. Début juillet, l'ancien vice-ministre de la Défense Timour Ivanov a été condamné à 13 ans de prison.

Cette ambiance, selon Mme Stanovaïa, a créé un "sentiment de désespoir" au sein de l'élite politique à Moscou, qui est peu susceptible de s'atténuer.

"À l'avenir, le système sera prêt à sacrifier des figures de plus en plus en vue," avertit-elle.

 


Un trafic de stupéfiants démantelé entre Espagne et France, 13 arrestations

reize personnes, dont le "donneur d'ordres" présumé, ont été arrêtées par des policiers qui ont démantelé un "important" trafic de drogues importées d'Espagne pour alimenter la région Auvergne-Rhône-Alpes, au terme d'une enquête de près de deux ans, a annoncé vendredi la police. (AFP)
reize personnes, dont le "donneur d'ordres" présumé, ont été arrêtées par des policiers qui ont démantelé un "important" trafic de drogues importées d'Espagne pour alimenter la région Auvergne-Rhône-Alpes, au terme d'une enquête de près de deux ans, a annoncé vendredi la police. (AFP)
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  • 2,4 tonnes de résine de cannabis ont été saisies par les enquêteurs de Office anti-stupéfiants (OFAST) de la police judiciaire de Lyon, qui ont mené ces opérations
  • Dans cette première phase, les 11 suspects ont été mis en examen et sont, depuis, en détention provisoire, selon la DIPN

LYON: Treize personnes, dont le "donneur d'ordres" présumé, ont été arrêtées par des policiers qui ont démantelé un "important" trafic de drogues importées d'Espagne pour alimenter la région Auvergne-Rhône-Alpes, au terme d'une enquête de près de deux ans, a annoncé vendredi la police.

Onze suspects ont été interpellés entre décembre 2023 et juillet 2024, notamment grâce à l'interception par les policiers de deux poids-lourds et d'un convoi de voitures "entre la région lyonnaise et le Gard", "au moment où les stupéfiants étaient remis à des équipes locales", explique la Direction interdépartementale de la police (DIPN) du Rhône dans un communiqué.

Dans le même laps de temps, 2,4 tonnes de résine de cannabis ont été saisies par les enquêteurs de Office anti-stupéfiants (OFAST) de la police judiciaire de Lyon, qui ont mené ces opérations.

Dans cette première phase, les 11 suspects ont été mis en examen et sont, depuis, en détention provisoire, selon la DIPN.

Puis l'enquête a permis l'interpellation, le 30 juin dernier, d'un homme "soupçonné d'être le donneur d'ordres" et, le lendemain, d'un autre suspect, "fugitif condamné en 2016" à sept ans de prison pour trafic de stupéfiants. A son domicile dans l'Ain, "54 kg de cocaïne et plusieurs dizaines de milliers d'euros" ont été saisis, précise le communiqué qui n'en dit pas plus sur le profil de ces hommes. Ils ont été mis en examen le 4 juillet et placés en détention provisoire.

La police considère ainsi avoir réussi le "démantèlement de ce groupe criminel organisé (...) réalisant des importations de stupéfiants depuis l'Espagne vers la région Auvergne-Rhône-Alpes" pour des "quantités importantes".

 


Iran: la lauréate du prix Nobel de la Paix Mohammadi se dit «menacée d'élimination physique», selon le comité Nobel

La prix Nobel de la paix iranienne, Narges Mohammadi, dit avoir été "directement et indirectement menacée d'élimination physique" par les autorités iraniennes, a indiqué vendredi le comité Nobel qui s'est entretenu avec elle par téléphone. (AFP)
La prix Nobel de la paix iranienne, Narges Mohammadi, dit avoir été "directement et indirectement menacée d'élimination physique" par les autorités iraniennes, a indiqué vendredi le comité Nobel qui s'est entretenu avec elle par téléphone. (AFP)
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  • La prix Nobel de la paix iranienne, Narges Mohammadi, dit avoir été "directement et indirectement menacée d'élimination physique"
  • Ces menaces "montrent clairement que sa sécurité est en jeu, à moins qu'elle ne s'engage à mettre fin à tout engagement public en Iran"

OSLO: La prix Nobel de la paix iranienne, Narges Mohammadi, dit avoir été "directement et indirectement menacée d'élimination physique" par les autorités iraniennes, a indiqué vendredi le comité Nobel qui s'est entretenu avec elle par téléphone.

Ces menaces "montrent clairement que sa sécurité est en jeu, à moins qu'elle ne s'engage à mettre fin à tout engagement public en Iran" ainsi qu'à "toute apparition dans les médias", ajoute le comité Nobel dans un communiqué. Mme Mohammadi a été récompensée en 2023 pour "son combat contre l'oppression des femmes en Iran et pour la promotion des droits de l'homme".