Assemblée: la majorité cherche à sécuriser le prix payé aux agriculteurs

Le ministre français de l'Agriculture Julien Denormandie s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale à Paris (AFP)
Le ministre français de l'Agriculture Julien Denormandie s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale à Paris (AFP)
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Publié le Mardi 22 juin 2021

Assemblée: la majorité cherche à sécuriser le prix payé aux agriculteurs

  • Du côté des agriculteurs, le syndicat majoritaire FNSEA accueille favorablement l'initiative, tout en appelant à renforcer ses dispositions
  • A l'inverse, industriels transformateurs et distributeurs affichent leurs réticences

PARIS : Comment assurer de meilleurs revenus aux agriculteurs? Moins de trois ans après la loi Alimentation, un nouveau texte porté par la majorité arrive à l'Assemblée jeudi afin de renforcer leur pouvoir dans les négociations avec les industriels et les supermarchés.

Objectif: compléter l'arsenal de la loi Alimentation ou "Egalim" votée en 2018, qui a notamment encadré les promotions et relevé le seuil de revente à perte afin d'enrayer la course aux prix bas en magasins, mais qui n'a pas tenu ses promesses en termes de rémunération pour les agriculteurs.

La proposition de loi du député Grégory Besson-Moreau (LREM, Aube), soutenue par le gouvernement, va être examinée en séance publique jeudi, après avoir été adoptée le 16 juin en commission des affaires économiques.

Elle prévoit de généraliser les contrats écrits entre l'agriculteur et l'entreprise qui va transformer ses produits, sur trois ans minimum, en tenant compte des coûts de production. Et de rendre "non négociable", entre l'industriel et le distributeur, la part du prix correspondant au coût des matières premières agricoles.

«Aveu d'échec»

Le but est de "protéger les trois acteurs", a plaidé M. Besson-Moreau auprès de l'AFP. "Les agriculteurs et leur rémunération, bien sûr, mais aussi les industriels" qui vont pouvoir répercuter le prix de la matière première agricole sur les acheteurs de la grande distribution. Quant à cette dernière, "elle sera certaine que le prix proposé par les industriels rémunère bien les agriculteurs".

"La juste rémunération des agriculteurs est l'enjeu le plus important de l'agriculture. Elle sous-tend toutes les questions agricoles: souveraineté alimentaire, renouvellement des générations, transition vers des modèles plus vertueux", a-t-il insisté devant la commission des affaires économiques.

Au nom du groupe Les Républicains (LR), le député Julien Dive a affirmé que le texte sonnait "l'aveu d'échec" d'Egalim: "Le constat est implacable. Depuis Egalim, la rémunération des agriculteurs n'a pas augmenté".

Pour Dominique Potier (groupe socialiste), le nouveau texte est encore "loin du compte", en raison d'un "rapport de force économique qui est totalement déséquilibré".

Du côté des agriculteurs, le syndicat majoritaire FNSEA accueille favorablement l'initiative, tout en appelant à renforcer ses dispositions.

«Soutien total»

A l'inverse, industriels transformateurs et distributeurs affichent leurs réticences.

Les grandes organisations défendant les intérêts des premiers (Ania, Coopération Agricole, FEEF et Ilec) "saluent l'ambition de mettre fin à cette guerre des prix" mais redoutent que leurs professions soient prises en étau entre les distributeurs et les producteurs. Elles veulent que leurs propres coûts soient aussi "sanctuarisés".

De son côté, la Fédération du commerce et de la distribution (FCD) plaidait en mai que "la grande distribution alimentaire est loin d'être le premier débouché des exploitants agricoles" et que "la part de la +négociation annuelle+ avec la grande distribution est marginale dans les revenus des exploitants agricoles".

Moins ouvertement, des acteurs mettent aussi en garde contre le risque de voir des entreprises s'approvisionner davantage à l'étranger si les prix des matières premières agricoles françaises sont déconnectés du marché.

La Fédération française des spiritueux (FFS) a enfin déclaré à l'AFP soutenir "l'objectif" de la loi visant "à préserver le revenu du producteur agricole".

Elle précise toutefois que, "compte tenu du procédé de vieillissement très long" pour elle, il n'y a "pas de réelle corrélation entre le prix de nos matières premières agricoles" à l'achat, et le prix de revente aux consommateurs.

A ses yeux, l'interdépendance entre les deux, prévue par le projet de loi, "pourrait en définitive se révéler nuisible pour tous les opérateurs de la filière".


Le Premier ministre français va marquer ses 100 jours par un discours sur l'autorité

Pour son centième jour à Matignon, le Premier ministre français Gabriel Attal prononcera un "discours sur l'autorité au cœur de la République" jeudi à Viry-Châtillon. (AFP).
Pour son centième jour à Matignon, le Premier ministre français Gabriel Attal prononcera un "discours sur l'autorité au cœur de la République" jeudi à Viry-Châtillon. (AFP).
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  • M. Attal, qui sera accompagné notamment des ministres de l'Education Nicole Belloubet et de la Justice Éric Dupond-Moretti échangera auparavant avec les équipes et les bénéficiaires de la Maison des jeunes et de la culture de Viry, selon Matignon
  • Un peu plus de trois mois après sa nomination, l'ancien ministre de l'Éducation entend s'inscrire dans le droit fil de sa déclaration de politique générale

PARIS: Pour son centième jour à Matignon, le Premier ministre français Gabriel Attal prononcera un "discours sur l'autorité au cœur de la République" jeudi à Viry-Châtillon, dans la banlieue sud de Paris, une ville marquée par la mort d'un adolescent de 15 ans, passé à tabac près de son collège.

Dans cette affaire qui a suscité une vive émotion en France, quatre jeunes hommes, trois mineurs et un majeur, ont été mis en examen pour assassinat. Ils ont tous été placés en détention provisoire.

M. Attal, qui sera accompagné notamment des ministres de l'Education Nicole Belloubet et de la Justice Éric Dupond-Moretti échangera auparavant avec les équipes et les bénéficiaires de la Maison des jeunes et de la culture de Viry, selon Matignon.

Un peu plus de trois mois après sa nomination, l'ancien ministre de l'Éducation entend s'inscrire dans le droit fil de sa déclaration de politique générale.

Il était alors revenu sur les émeutes urbaines qui avaient embrasé le pays au début de l'été 2023 après la mort d'un jeune homme, tué par un policier en région parisienne lors d'un contrôle routier.

Alors que "les violences de juillet dernier ont profondément marqué notre pays", avec parmi les émeutiers "des jeunes, très jeunes parfois, qui semblaient avoir déjà coupé les ponts avec notre société", "nous devons faire respecter l'autorité partout: dans les classes, dans les familles, dans les rues", expliquait-il le 30 janvier devant l'Assemblée nationale.

Avant de lancer son mot d'ordre "tu casses, tu répares, tu salis, tu nettoies, tu défies l'autorité, on t'apprend à la respecter".

En Conseil des ministres mercredi, Emmanuel Macron a demandé à son gouvernement de se lancer dans une grande concertation pour trouver des solutions au "surgissement de l'ultraviolence", en particulier parmi les plus jeunes. Charge au Premier ministre de lancer cette concertation, avec les groupes parlementaires et différents acteurs, avec l'objectif d'aboutir à un projet de loi avant l'été.

Décisions « difficiles et radicales »

Jeudi soir, le Premier ministre sera ensuite longuement interviewé sur la chaîne de télévision BFMTV, toujours pour marquer ses 100 jours à la tête du gouvernement.

Comme il l'a expliqué lors de son récent déplacement au Canada, M. Attal devrait rappeler sa méthode: faire preuve de "lucidité" et même "reconnaître" ce qui a fonctionné ou pas depuis 2017 puis "prendre des décisions" potentiellement "difficiles et radicales" et "surtout les mettre en œuvre".

Appelé à succéder à Élisabeth Borne le 9 janvier, le plus jeune chef de gouvernement de la Ve République a déjà connu plusieurs épreuves, à commencer par la crise des agriculteurs, pas encore totalement résolue en dépit de concessions inédites du gouvernement qui ont suscité en retour la colère des organisations écologistes.

La dégradation de la situation budgétaire, avec une première salve de dix milliards d'euros d'économies et un exercice à renouveler avant l'été, promet également de tendre le débat politique, y compris au sein de la majorité. Quant à la droite, elle menace le gouvernement d'une motion de censure sur ce dossier.

Gabriel Attal entend néanmoins poursuivre ses projets de réforme, tout à sa priorité accordée au "travail" et aux "classes moyennes", en projetant notamment de durcir à nouveau les conditions d'indemnisation du chômage.

Dans ce contexte, et à moins de deux mois des élections européennes du 9 juin, la liste du camp présidentiel conduite par Valérie Hayer continue d'être distancée dans les sondages par l'extrême droite. Elle voit même son avance se réduire fortement avec la liste PS-Place Publique conduite par Raphaël Glucksmann.

Gabriel Attal, présenté dans son camp comme une "arme anti-Bardella" doit-il s'impliquer davantage ? Difficile quand l'idée reste de faire "une campagne européenne, pas un référendum pour ou contre la politique du gouvernement", expliquait récemment une source au sein de l'exécutif.


France: couvre-feu pour les mineurs à Pointe-à-Pitre en Guadeloupe en raison de la délinquance

Ces derniers mois, la sous-préfecture de la Guadeloupe - 14.500 habitants en 2020 - a largement nourri la chronique des faits divers. En mars, une commerçante y a été tuée lors d'un braquage. Puis des touristes en croisière ont été blessés à l'arme blanche par une femme atteinte de troubles psychiatriques. (AFP).
Ces derniers mois, la sous-préfecture de la Guadeloupe - 14.500 habitants en 2020 - a largement nourri la chronique des faits divers. En mars, une commerçante y a été tuée lors d'un braquage. Puis des touristes en croisière ont été blessés à l'arme blanche par une femme atteinte de troubles psychiatriques. (AFP).
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  • Le ministre français de l'Intérieur a ordonné mercredi soir l'instauration pendant deux mois d'un couvre-feu pour les mineurs de moins de 18 ans à Point-à-Pitre, en Guadeloupe
  • Le ministre a précisé que cette mesure entrera en application "à partir du début de semaine prochaine" et sera effectif à partir de 20H00 locales

POINTE-A-PITRE: Le ministre français de l'Intérieur a ordonné mercredi soir l'instauration pendant deux mois d'un couvre-feu pour les mineurs de moins de 18 ans à Point-à-Pitre, en Guadeloupe, afin de lutter contre une flambée de la délinquance.

"Nous sommes très marqués par le fait que les mineurs sont extrêmement nombreux dans la délinquance malheureusement, en Guadeloupe en général et à Pointe-à-Pitre en particulier", a déclaré Gérald Darmanin.

Le ministre a précisé que cette mesure entrera en application "à partir du début de semaine prochaine" et sera effectif à partir de 20H00 locales.

M. Darmanin est arrivé mercredi soir pour une visite de deux jours dans ce territoire français des Antilles, où se déroule une opération dite "Place nette" de renforcement de la séurité.

Il a fait cette annonce après une réunion avec la ministre déléguée chargée des Outre-mer Marie Guévenoux, le Préfet et le maire de Point-à-Pitre.

Ces derniers mois, la sous-préfecture de la Guadeloupe - 14.500 habitants en 2020 - a largement nourri la chronique des faits divers. En mars, une commerçante y a été tuée lors d'un braquage. Puis des touristes en croisière ont été blessés à l'arme blanche par une femme atteinte de troubles psychiatriques.


Le plus grand squat de France évacué, des migrants déboussolés

Agrippés à leurs documents administratifs soigneusement mis sous pochette plastique, les migrants ont à peine quelques minutes pour expliquer leur situation, dans un français parfois approximatif ou un anglais balbutiant. (AFP)
Agrippés à leurs documents administratifs soigneusement mis sous pochette plastique, les migrants ont à peine quelques minutes pour expliquer leur situation, dans un français parfois approximatif ou un anglais balbutiant. (AFP)
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  • La plupart, demandeurs d'asile, sont fortement incités à rejoindre des «sas» --des structures d'accueil provisoires-- à Bordeaux (sud-ouest) et en Val de Loire (centre)
  • Depuis plusieurs mois, les associations dénoncent l'évacuation des squats de la région parisienne et campements de rue à un rythme plus soutenu

VITRY-SUR-SEINE: "Vous savez, en France, il n'y a pas que Paris. Bordeaux, c'est bien, il fait plus chaud qu'ici!": une employée de l'Office de l'immigration tente de convaincre un migrant évacué du plus grand squat de France, près de Paris, de partir dans le sud-ouest du pays. Sans grand succès.

Dans ce squat de Vitry-sur-Seine (sud de la capitale), une entreprise désaffectée occupée depuis presque trois ans, vivaient jusqu'à peu plusieurs centaines de migrants --jusqu'à 450--. Préparés depuis plusieurs jours par les associations à une évacuation imminente, les 300 personnes toujours présentes ont assisté mercredi, dans le calme, à l'arrivée des forces de l'ordre.

Des hommes seuls en majorité, des femmes et quelques enfants en bas-âge, en situation régulière en France pour beaucoup, sont sortis de cette ancienne entreprise de transport. En portant sacs et valise qui contiennent toutes leurs affaires d'une vie d'errance.

Dans le froid, visage fermé et inquiet, ils sont regroupés dans la cour. Derrière des tables, des personnels des préfectures et de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii) les orientent et proposent des relogements provisoires.

Agrippés à leurs documents administratifs soigneusement mis sous pochette plastique, les migrants ont à peine quelques minutes pour expliquer leur situation, dans un français parfois approximatif ou un anglais balbutiant.

Sous la surveillance des forces de l'ordre, les files d'attente s'étirent devant ces bureaux à ciel ouvert. A l'exception de celui dédié aux départs en province.

La plupart, demandeurs d'asile, sont fortement incités à rejoindre des "sas" --des structures d'accueil provisoires-- à Bordeaux (sud-ouest) et en Val de Loire (centre). Les cars en partance pour ces destinations attendent devant les grilles mais peinent à se remplir.

«Je veux rester ici»

"Vous voulez aller en région? Il y a plus de place là-bas, c'est dynamique!", explique une employée de l'Ofii à un jeune migrant à l'air dubitatif qui comprend difficilement la proposition.

"Il n'y pas que Paris comme ville en France", insiste-t-elle. Peine perdue, son interlocuteur explique suivre une formation en Ile-de-France. Il est orienté vers la table voisine pour trouver une place dans un "sas" plus proche de Paris.

Abakar, lui aussi réfugié soudanais, 29 ans, était à Nantes (ouest). Il a rejoint la région parisienne pour suivre une formation en logistique. Le jeune homme dit avoir décroché une promesse d'embauche dans un supermarché: "Je veux rester ici, je ne peux pas toujours partir ailleurs".

Depuis plusieurs mois, les associations dénoncent l'évacuation des squats de la région parisienne et campements de rue à un rythme plus soutenu, selon eux, pour faire place nette avant les Jeux olympiques et ses milliers de touristes.

"Il y a des places dans des structures d'accueil près de Paris, mais, clairement, la volonté est de les éloigner de la capitale. Surtout avant les JO", assure Paul Alauzy, représentant de l'ONG Médecins du monde.

Merci Daniel, demandeuse d'asile soudanaise, a confié ses enfants à une association du Val-de-Marne, au sud-est de la capitale. A l'intérieur du squat, explique-t-elle, "il y avait trop de violence". Mais elle ne veut pas quitter l'Ile-de-France. "J'ai peur de ne pas les revoir". Elle est finalement orientée dans un hôtel à Boissy-Saint-Léger, en région parisienne, pour quelques jours.

Assise sur sa valise, Ishia, enceinte de cinq mois, semble perdue. Comme son mari, Gamaral, rencontré il y a quelques années lors d'un long parcours d'exil, elle a fui le Soudan. Ils sont arrivés en France il y a trois semaines.

Ishia est envoyée dans un hôpital. Gamaral, lui, ne "sait pas quoi espérer".