L'avenir troublé du contre-terrorisme au Sahel au menu du sommet France-G5

Emmanuel Macron accueille à l'Elysée le président du Niger, Mohamed Bazoum, pour un sommet des chefs d'Etat France-G5 Sahel en visioconférence, après l'annonce de la fin prochaine de Barkhane. (AFP)
Emmanuel Macron accueille à l'Elysée le président du Niger, Mohamed Bazoum, pour un sommet des chefs d'Etat France-G5 Sahel en visioconférence, après l'annonce de la fin prochaine de Barkhane. (AFP)
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Publié le Vendredi 09 juillet 2021

L'avenir troublé du contre-terrorisme au Sahel au menu du sommet France-G5

  • Macron avait annoncé la fin prochaine de l'opération Barkhane avec une revue à la baisse des effectifs français
  • «L'heure de l'explication a sonné entre Macron et ses alliés»

PARIS: Les chefs d'Etat du G5 Sahel devaient s'entretenir vendredi avec Emmanuel Macron, alors que la France n'a encore donné aucun détail sur la réduction de ses forces militaires dans la région, où les groupes jihadistes restent toujours aussi menaçants.

Le nouveau président nigérien Mohamed Bazoum est arrivé vendredi matin à Paris pour une visite bilatérale. Ses homologues tchadien, malien, burkinabè et mauritanien étaient pour leur part réunis en visio-conférence pour un sommet du G5, avant qu'Emmanuel Macron ne se joigne à eux.

"Il y sera invité par les chefs d’Etat du G5 dans le cadre des échanges en cours (...) sur les modalités de la transformation de notre présence militaire au Sahel", a indiqué l'Elysée. 

Après plus de huit ans d'engagement massif, des sommes colossales englouties et 50 soldats morts au combat, le président français avait annoncé en juin la fin prochaine de l'opération Barkhane avec une revue à la baisse des effectifs français (5 100 soldats actuellement), la fermeture de bases militaires et une réarticulation de la lutte antijihadiste autour de partenaires européens.

Et même si Paris avait à plusieurs reprises évoqué la possibilité d'un retrait, les partenaires africains ont été pris de court par cette annonce. Ils sont avides de détails sur une opération qui pourrait considérablement modifier le rapport de forces sur le terrain entre les armées régulières et les jihadistes liés à Al-Qaïda et au groupe Etat islamique (EI). 

"Le Président Emmanuel Macron déballera tout demain", titrait jeudi à Bamako le quotidien Nouvel Horizon. "L'heure de l'explication a sonné entre Macron et ses alliés", estimait de son côté Aujourd'hui au Faso, à Ouagadougou, qui estime que le sommet "devrait être le rendez-vous de mise au point sur les i". 

En principe, la réduction des effectifs français s'opérera progressivement, avec un jalon à environ 3 500 hommes d'ici un an puis 2 500 personnes d'ici 2023, a indiqué récemment une source familière du dossier. Les commandos d'élite de la task force française "Sabre" devraient être maintenus.

«Manque de moyens, parfois de volonté»

Mais dans cette immense région désertique largement délaissée par les pouvoirs centraux, le reste du contre-terrorisme devra être assumé par les armées africaines et l'embryonnaire Force conjointe du G5, que peu d'observateurs jugent capables de relever le défi.

"La Force conjointe n'a pas donné beaucoup de résultats", relève une source travaillant avec cette dernière à Bamako. L'arrivée récente d'un bataillon tchadien dans la zone des trois frontières, entre Mali, Niger et Burkina, "est peut-être la seule chose qui marche réellement. Le reste, c'est du brouillon car il y a un manque de moyens et parfois de volonté".

En face, les groupes jihadistes continuent inlassablement de poser leur empreinte, s'étendent vers le golfe de Guinée, au sud, et provoquent de lourdes pertes dans les forces armées comme au sein des populations civiles.

Paris tentera pourtant de convaincre ses partenaires de la viabilité de son projet européen: elle compte beaucoup sur la task force Takuba, des troupes d'élite censées former les unités maliennes au combat et qui rassemblent aujourd'hui 600 hommes, dont la moitié de Français, et des Estoniens, des Tchèques, des Suédois et des Italiens. 

Côté africain, les situations politiques sont quelque peu incertaines. Au Tchad, Mahamat Idriss Déby Itno a succédé à l'âge de 37 ans à son père tué au front en avril, sans égard pour la constitution mais avec le soutien rapide de Paris. 

Au Mali, la junte a enchaîné deux coups d'Etat en moins d'un an, poussant cette fois la France à suspendre sa coopération militaire avant de la reprendre tout récemment sans guère d'explication.

Au fil des discussions pourrait aussi surgir la question des négociations avec les groupes armés, que plusieurs responsables africains appellent de leurs vœux.

Mais Paris exclut de discuter avec les cadres supérieurs, liés aux centrales jihadistes de l'EI et d'Al-Qaïda. La question "devra ce coup-ci être abordée. Elle n'est plus un sujet tabou", estime ainsi le quotidien Aujourd'hui au Faso.

Au même moment, un autre partenaire étranger sera sollicité : la ministre française des Armées Florence Parly est vendredi aux Etats-Unis pour rencontrer son homologue Lloyd Austin. Il devrait confirmer le soutien apporté par Washington dans la région -- ravitaillement en vol, transport logistique, renseignement. 


Accord EU-USA: Bayrou juge que la France a été "un peu seule"

Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis
  • Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire"

PARIS: Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis, en marge d'un déplacement dans les locaux de Tracfin, organisme de lutte contre la criminalité financière, à Montreuil (93).

Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire", et qu'il fallait "un processus encore pas totalement élucidé de ratification" de cet accord.

"Il y a à vérifier quelle est la portée exacte de ces accords, et les Etats auront d'une manière ou d'une autre leur mot à dire", a-t-il ajouté.

"Je sais que toutes les autorités françaises, et en particulier le président de la République (Emmanuel Macron), ont été ceux qui se sont battus le plus contre des concessions qu'on considérait comme excessives", a-t-il affirmé avant de s'interroger: "Est-ce que nous avons été un peu seuls? Oui".

"Est-ce qu'on a le sentiment qu'à l'intérieur de l'Union européenne, des forces politiques et économiques étaient plutôt sur une ligne de trouver des accommodements? Oui", a-t-il ajouté, en estimant que de son point de vue, "la voie pour l'Europe est une voie d'affirmation et de résistance quand il faut et de fierté le plus souvent possible".

La classe politique française a été unanime à dénoncer l'accord conclu entre le président américain, Donald Trump, et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui prévoit notamment une hausse de 15% des droits de douane sur les exportations européennes.

Le président Emmanuel Macron a déploré mercredi en Conseil des ministres que l'Union européenne n'ait pas été assez "crainte" dans ses négociations commerciales avec les Etats-Unis, affirmant que la France continuerait de faire montre "d'exigence et de fermeté" dans la suite des discussions.


Lille: enquête ouverte après les propos sur internet d'une étudiante gazaouie

L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
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  • Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie

LILLE: Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie, dont Sciences Po Lille a annulé l'inscription mercredi.

"Une enquête a été ouverte pour apologie du terrorisme, apologie de crime contre l'humanité avec utilisation d'un service de communication au public en ligne", a écrit la procureure de la République de Lille, Carole Etienne, à l'AFP.

Des captures d'écran circulant sur les réseaux sociaux montrent qu'un compte, attribué à cette étudiante par des internautes et fermé depuis, a repartagé des messages appelant à tuer des juifs.

Elle a été désinscrite de l'Institut d'études politiques de Lille, où elle devait étudier à partir de septembre, en raison du contenu de certaines de ses publications qui "entre en contradiction frontale avec les valeurs portées par Sciences Po Lille", a indiqué l'établissement mercredi.

"Pourquoi on est passé à travers? Il y a quand même une question, il faut y répondre", a reconnu jeudi sur RMC François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l'Intérieur.

"Il y aura des poursuites qui seront engagées et sur la base de ces éléments-là, elle est susceptible d'être renvoyée dans son pays, bien évidemment", a-t-il ajouté.

"Administrativement, semble-t-il, je suis très prudent, il n'y avait pas de difficulté particulière, sauf que sur les réseaux sociaux, voilà, on s'en est rendu compte", a-t-il ajouté, précisant que "les services des titres de séjour relèvent du ministère des Affaires étrangères".

Sollicité par l'AFP, Sciences Po Lille a expliqué avoir "accueilli cette étudiante sur proposition du consulat général de France à Jérusalem".

L'incident a fait largement réagir dans la classe politique, jusqu'au gouvernement.

"Une étudiante gazaouie tenant des propos antisémites n'a rien à faire en France", a réagi sur X le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Il a indiqué avoir "demandé à ce qu'une enquête interne soit diligentée pour que cela ne puisse en aucun cas se reproduire".

Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a souligné sur le même réseau social avoir "demandé de faire fermer ce compte haineux", et a martelé que "les propagandistes du Hamas n'ont rien à faire dans notre pays".


Restitutions coloniales: le gouvernement français annonce un projet de loi

La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
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  • Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation
  • Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises

PARIS: Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation.

S'appliquant en priorité aux pays africains mais de "portée géographique universelle", ce texte vise à accélérer le retour dans leur pays d'origine de biens culturels appartenant aux collections nationales françaises.

Ils doivent revenir à des "Etats qui, du fait d'une appropriation illicite, en ont été privés" entre 1815 et 1972, selon le ministère français de la Culture.

Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises. Les oeuvres à restituer devront avoir été acquises "dans une situation de vol, de pillage, de cession ou de libéralité obtenue par contrainte ou violence ou d'une personne qui ne pouvait en disposer", a précisé le ministère.

La décision de sortie des collections pour opérer cette restitution ne passera plus par un processus législatif au cas par cas mais pourra intervenir sur seul décret du Conseil d'Etat et après avis, le cas échéant, d'une commission scientifique bilatérale.

Cette commission devra en effet documenter et déterminer, si besoin, le caractère illicite de l'appropriation des oeuvres réclamées à travers un travail qui associerait des experts et historiens français et l'Etat demandeur, selon le ministère.

Concernant la période historique retenue, 1815 correspond à la date d'un règlement des conquêtes napoléoniennes qui est dû à un premier mouvement de restitution d'œuvres à l'échelle européenne. 1972 est celle de l'entrée en application de la convention internationale de l'Unesco protégeant les biens culturels contre le trafic illicite.