Le « Made in Hong Kong » victime des tensions sino-américaines

Le 27 août 2020, Daniel Chan pose avec une boîte de sauce Hoisin et une étiquette indiquant « Fabriqué à Hong Kong » à l'usine de sauce Koon Chun fondée par son arrière-grand-père en 1928. (Anthony WALLACE / AFP)
Le 27 août 2020, Daniel Chan pose avec une boîte de sauce Hoisin et une étiquette indiquant « Fabriqué à Hong Kong » à l'usine de sauce Koon Chun fondée par son arrière-grand-père en 1928. (Anthony WALLACE / AFP)
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Publié le Lundi 07 septembre 2020

Le « Made in Hong Kong » victime des tensions sino-américaines

  • L'adoption de la loi sur la sécurité nationale est considérée comme une réponse de la Chine aux mois de manifestations en faveur de la démocratie qui avaient ébranlé Hong Kong en 2019
  • « Dans 20 ans, dans 30 ans, les gens n'auront plus que du "Made in China" et oublieront Hong Kong », déplore-t-il, avant d'ajouter « c'est très triste »

HONG KONG : A Hong Kong, les employés de l'usine de sauces Koon Chun s'échinent à recouvrir des centaines de milliers de bouteilles d'une nouvelle étiquette « Made in China »: cette marque hongkongaise populaire est victime des tensions sino-américaines.

Fondée il y a près d'un siècle, l'entreprise familiale a survécu à une guerre mondiale, à de nombreuses crises économiques et à la lente disparition de l'industrie manufacturière hongkongaise au profit de la main-d'oeuvre bien moins chère de la Chine continentale.

Ce fabriquant de sauces demeure l'une des marques du centre financier qui perdure. Elle produit notamment les sauces de soja ou d'huître qui figurent en bonne place dans les restaurants chinois et les cuisines du monde entier.

Mais à compter de novembre, pour pouvoir être vendues aux Etats-Unis, les marchandises importées de Hong Kong devront porter le label « fabriqué en Chine ». 

Cette mesure été imposée par Washington en réponse à la nouvelle loi draconienne sur la sécurité nationale imposée par Pékin dans le territoire semi-autonome.

Cette nouvelle règlementation a été annoncée en août par les douanes américaines, soit deux jours avant le départ d'une cargaison de 1.300 boîtes de sauces Koon Chun pour Atlanta.

Du jour au lendemain, les employés ont été contraints de coller de nouvelles étiquettes sur toute la cargaison ainsi que sur les autres marchandises destinées à partir pour les États-Unis cet été.  

« C'était mission impossible », a affirmé à l'AFP, Daniel Chan, depuis l'usine fondée en 1928 par son grand-père.

L'adoption de la loi sur la sécurité nationale est considérée comme une réponse de la Chine aux mois de manifestations en faveur de la démocratie qui avaient ébranlé Hong Kong en 2019.

Parer au plus pressé

Mais aussi bien Pékin que les autorités locales avaient affirmé que cette nouvelle législation n'aurait aucune conséquence sur les entreprises. 

Cependant, la révocation, en juillet, à titre de représailles du statut commercial préférentiel accordé à Hong Kong par Washington est lourde de conséquences. 

Les répercussions économiques ne se sont pas faites attendre dans l'ex-colonie britannique, déjà en récession. 

Les produits « Made in Hong Kong » ont été les premiers à en faire les frais. 

M. Chan, qui a étudié à Harvard aux États-Unis, s'attendait à ce que le paysage politique change à Hong Kong mais ne pensait pas que ce serait aussi rapide.

« J'imaginais quelque chose de plus proche de 2047, date officielle de la fin du principe +Un pays, deux systèmes+ », affirme M. Chan, faisant référence à l'accord de rétrocession qui garantissait pendant 50 ans aux Hongkongais des libertés inconnues dans le reste de la Chine.

Ces dernières semaines, les 90 employés de l'usine ont été contraints de s'adapter au changement.

Après avoir paré au plus pressé en estampillant les produits d'un « fabriqué en Chine », l'entreprise fait fabriquer de nouvelles étiquettes sur lesquelles la mention « Made in Hong Kong » qui apparaissait en gros caractères sera remplacée par des plus petites « Made in China ».

Beaucoup de temps a été consacré à réorganiser le stockage des marchandises, les expéditions étant retardées.

« C'est très triste » 

Les entreprises ont cependant obtenu un sursis après que le ministre hongkongais du Commerce, Edward Yau, a annoncé la décision de Washington de reporter à novembre la nouvelle règlementation sur les étiquettes. 

« Cela nous permet de gagner un peu de temps », souligné M. Chan. 

Mais, selon lui, ce n'est qu' « une solution à court terme à ce fiasco politique ».

Le ministre hongkongais a menacé de poursuivre les États-Unis devant l'Organisation du commerce international.

Il a également affirmé que les expéditions de produits hongkongais  vers les États-Unis ne représentaient que 3,7 milliards de dollars hongkongais (400 millions de dollars US) en 2019, soit moins de 0,1% des exportations brutes de la ville.

Mais M. Chan ne voit pas les choses ainsi, environ la moitié de ses marchandises étant destinées aux Etats-Unis, où la marque est particulièrement appréciée par l'importante diaspora chinoise. 

« Nous sommes la seule entreprise qui n'est basée qu'à Hong Kong et qui continue à faire ce genre de production à grande échelle et à l'expédier aux Etats-Unis », estime-t-il.

Quant il se pense à l'avenir, M. Chan redoute que d'autres marchés internationaux ne fassent comme les États-Unis. 

« Dans 20 ans, dans 30 ans, les gens n'auront plus que du +Made in China+ et oublieront Hong Kong », déplore-t-il, avant d'ajouter « c'est très triste ».


A l'ONU, l'enquêtrice en chef sur Gaza a encore espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés

Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés. (AFP)
Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés. (AFP)
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  • Selon les enquêteurs, le président israélien, Isaac Herzog, le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, ont "incité à commettre un génocide"
  • Israël a "rejeté catégoriquement" ce "rapport biaisé et mensonger"

GENEVE: Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés.

"La justice est lente", a affirmé l'ancienne juge sud-africaine, dans un entretien à l'AFP.

Mais "comme l'a dit (Nelson) Mandela, cela semble toujours impossible, jusqu'à ce qu'on le fasse. Je considère qu'il n'est donc pas impossible qu'il y ait des arrestations et des procès" à l'avenir, a-t-elle ajouté.

La commission d'enquête, qui ne s'exprime pas au nom de l'ONU, a établi qu'Israël commet un génocide à Gaza depuis le début de la guerre déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas du 7-Octobre.

Selon les enquêteurs, le président israélien, Isaac Herzog, le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, ont "incité à commettre un génocide".

Israël a "rejeté catégoriquement" ce "rapport biaisé et mensonger".

La Cour pénale internationale (CPI) avait déjà émis des mandats d'arrêt contre MM. Netanyahu et Gallant.

Mme Pillay reconnaît que la CPI dépend des Etats pour la mise en œuvre des mandats d'arrêt car elle n'a "ni shérif, ni forces de police".

Mais elle veut y croire, faisant une comparaison : "Je n'aurais jamais pensé que l'apartheid prendrait fin de mon vivant".

"Tellement douloureux" 

Jeune avocate d'origine indienne dans l'Afrique du Sud de l'apartheid, devenue juge et Haute-Commissaire aux droits de l'homme à l'ONU (2008-2014), Mme Pillay, 83 ans, a l'art de traiter des dossiers difficiles.

Sa carrière l'a menée des cours sud-africaines, où elle a défendu les activistes anti-apartheid et obtenu des droits cruciaux pour les prisonniers politiques, au Tribunal pénal international pour le Rwanda, en passant par la CPI.

Sa mission est des plus ardues depuis qu'elle préside, depuis sa création en 2021, la commission chargée par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU d'enquêter sur les atteintes aux droits dans les territoires palestiniens et en Israël.

Elle déplore d'avoir été qualifiée d'"antisémite" depuis et dénonce les appels sur les réseaux sociaux de ceux qui réclament que les Etats-Unis la sanctionnent, comme Washington l'a fait pour une rapporteure de l'ONU, des juges de la CPI et des ONG palestiniennes.

Mais le plus dur, pour elle et son équipe, est de visionner les vidéos provenant de Gaza.

"Nous nous inquiétons pour notre personnel. Nous les surmenons et c'est traumatisant ces vidéos", dit-elle, citant "des violences sexuelles contre les femmes" et "les médecins qui sont dénudés par l'armée".

"C'est tellement douloureux" à regarder même si "on ne peut pas comparer notre souffrance à celle de ceux qui l'ont vécue", poursuit-elle.

Alors qu'elle présidait le Tribunal pénal international pour le Rwanda, des vidéos de civils abattus ou torturés l'ont aussi "marqué à vie".

Selon elle, la comparaison entre le Rwanda et Gaza ne s'arrête pas là : "Je vois des similitudes. Ce sont les mêmes méthodes".

Du Rwanda à Gaza 

"Dans le cas du Rwanda, c'était le groupe des Tutsi qui était visé. Ici, tous les éléments de preuve montrent que c'est le groupe palestinien qui est visé", dit-elle.

Elle mentionne aussi les propos de dirigeants israéliens qui "déshumanisent" les Palestiniens en les comparant à des "animaux". Comme lors du génocide rwandais, lorsque les Tutsi étaient "traités de cafards", ce qui revient à dire qu'"il est acceptable de les tuer", dénonce-t-elle.

Mme Pillay a indiqué qu'à l'avenir la commission entendait se pencher aussi sur des crimes supposés commis par d'autres "individus", expliquant qu'une grande partie des preuves a été publiée par les soldats israéliens eux-mêmes sur les réseaux sociaux.

Elle déplore toutefois que, faute de financements, la commission n'ait pas pu encore examiner si certains Etats qui fournissent de l'armement à Israël pouvaient être considérés complices.

Un travail qu'elle laisse à son successeur. Elle quitte la commission le 3 novembre en raison de son âge et de problèmes de santé.

Avant cela, elle doit présenter un dernier rapport devant l'Assemblée générale de l'ONU à New York. "J'ai déjà un visa", confie-t-elle.


Gaza: Bruxelles propose de taxer des biens importés d'Israël dans l'UE et de sanctionner deux ministres

La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu.  "Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas. (AFP)
La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu. "Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas. (AFP)
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  • L'exécutif européen avait déjà proposé en août 2024 de sanctionner ces deux ministres. Une tentative vaine, faute d'accord au sein des 27 Etats membres
  • Ces sanctions pour être adoptées requièrent l'unanimité des pays de l'UE

BRUXELLES: La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu.

"Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas.

Les mesures commerciales devraient, si elles étaient adoptées par les pays de l'UE, renchérir de quelque 227 millions d'euros le coût de certaines importations israéliennes, principalement d'origine agricole.

La Commission européenne a également proposé de sanctionner deux ministres israéliens d'extrême droite, Itamar Ben-Gvir, chargé de la Sécurité nationale, et Bezalel Smotrich chargé des Finances, selon un responsable de l'UE.

L'exécutif européen avait déjà proposé en août 2024 de sanctionner ces deux ministres. Une tentative vaine, faute d'accord au sein des 27 Etats membres. Ces sanctions pour être adoptées requièrent l'unanimité des pays de l'UE.

"Tous les États membres conviennent que la situation à Gaza est intenable. La guerre doit cesser", a toutefois plaidé mercredi Mme Kallas. Ces propositions seront sur la table des représentants des 27 Etats membres dès mercredi.

Les sanctions dans le domaine commercial ne nécessitent que la majorité qualifiée des Etats membres. Mais là encore, un accord sera difficile à obtenir, jugent des diplomates à Bruxelles.

Des mesures beaucoup moins ambitieuses, également présentées par la Commission européenne il y a quelques semaines, n'avaient pas trouvé de majorité suffisante pour être adoptées. Avait notamment fait défaut le soutien de pays comme l’Allemagne ou l'Italie.

Les exportations israéliennes vers l'UE, son premier partenaire commercial, ont atteint l'an dernier 15,9 milliards d'euros.

Seuls 37% de ces importations seraient concernés par ces sanctions, si les 27 devaient donner leur feu vert, essentiellement dans le secteur agro-alimentaire.


Trump s'en prend à des magistrats après l'assassinat de Charlie Kirk

Cette capture d'écran provenant de la diffusion en direct du tribunal de l'Utah montre Tyler Robinson, suspect dans le meurtre du militant politique Charlie Kirk, assistant à une audience à distance depuis sa cellule de prison à Provo, dans l'Utah, le 16 septembre 2025. (AFP)
Cette capture d'écran provenant de la diffusion en direct du tribunal de l'Utah montre Tyler Robinson, suspect dans le meurtre du militant politique Charlie Kirk, assistant à une audience à distance depuis sa cellule de prison à Provo, dans l'Utah, le 16 septembre 2025. (AFP)
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  • Dans le viseur du locataire de la Maison Blanche, sur son réseau Truth, se trouvent deux de ses cibles privilégiées : l'ex-procureur spécial Jack Smith, et le juge Juan Merchan qui avait présidé son procès pour des paiements cachés à une star du X
  • Donald Trump reproche à Jack Smith d'avoir ouvert il y a quelques années une enquête sur Turning Point, le mouvement créé par l'influenceur ultraconservateur américain Charlie Kirk, assassiné le 10 septembre

WASHINGTON: Le président américain Donald Trump a de nouveau stigmatisé mercredi des magistrats qui l'avaient poursuivi et jugé durant le mandat de Joe Biden, prenant prétexte du récent assassinat de l'influenceur ultraconservateur Charlie Kirk.

Dans le viseur du locataire de la Maison Blanche, sur son réseau Truth, se trouvent deux de ses cibles privilégiées : l'ex-procureur spécial Jack Smith, et le juge Juan Merchan qui avait présidé son procès pour des paiements cachés à une star du X.

Donald Trump reproche à Jack Smith d'avoir ouvert il y a quelques années une enquête sur Turning Point, le mouvement créé par l'influenceur ultraconservateur américain Charlie Kirk, assassiné le 10 septembre.

"Pourquoi le merveilleux Turning Point a-t-il été mis sous ENQUÊTE par le +Dérangé+ Jack Smith et l'administration Biden Corrompue et Incompétente ?", s'interroge Donald Trump dans un message sur Truth.

"Ils ont essayé de forcer Charlie, ainsi que de nombreuses autres personnes et mouvements, à cesser leurs activités. Ils ont instrumentalisé le ministère de la Justice contre les opposants politiques de Joe Biden, y compris MOI!", s'offusque-t-il encore.

Jack Smith, lui-même visé par une enquête administrative depuis le retour au pouvoir de Donald Trump, avait été nommé procureur spécial en 2022.

Il avait lancé des poursuites fédérales contre Donald Trump, pour tentatives illégales d'inverser les résultats de l'élection de 2020 et rétention de documents classifiés après son départ de la Maison Blanche.

Les poursuites avaient été abandonnées après la réélection de Trump, en vertu de la tradition consistant à ne pas poursuivre un président en exercice. Jack Smith avait ensuite démissionné du ministère de la Justice.

Sans jamais le citer nommément, le président Trump s'en prend également sur le réseau Truth à Juan Merchan, qui a présidé le procès Stormy Daniels. Le président avait été reconnu coupable de 34 chefs d'accusation, pour des paiements cachés de 130.000 dollars à l'ex-star du X.

Donald Trump exprime le souhait que le juge "corrompu" paie "un jour un prix très élevé pour ses actions illégales".

Depuis l'assassinat de Charlie Kirk, le camp républicain redouble de véhémence contre les démocrates et organisations progressistes, accusés de promouvoir la violence politique.

"La gauche radicale a causé des dégâts énormes au pays", a affirmé le président républicain mardi, avant son départ au Royaume-Uni. "Mais nous y remédions".

Selon le Washington Post, un élu républicain du Wisconsin a déposé une proposition de loi visant à bloquer les fonds fédéraux aux organisations employant des personnes "qui tolèrent et célèbrent la violence politique".

Le New York Times précise pour sa part que sont notamment dans le viseur l'Open Society Foundation du milliardaire George Soros ainsi que la Ford Foundation, qui toutes deux financent des organisations de gauche.