Pass sanitaire: pour l'exécutif, un succès à consolider

L'application de la loi sur le pass sanitaire «sera un cas de conscience» pour les chefs d'entreprises, a estimé vendredi Patrick Martin, président délégué du Medef. (Photo, AFP)
L'application de la loi sur le pass sanitaire «sera un cas de conscience» pour les chefs d'entreprises, a estimé vendredi Patrick Martin, président délégué du Medef. (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 06 août 2021

Pass sanitaire: pour l'exécutif, un succès à consolider

  • Il s'agit de reprendre la main au lendemain de manifestations aux rangs toujours plus fournis
  • Plus de 43 millions de Français ont reçu au moins une dose du vaccin

PARIS: L'exécutif entend mettre à son crédit le feu vert du Conseil constitutionnel à l'extension du pass sanitaire, même s'il faut encore franchir l'étape de l'application sur le terrain et que de nouvelles manifestations d'opposants sont prévues samedi.

Emmanuel Macron s'est mis en première ligne depuis le début de la semaine en égrainant sur les réseaux sociaux une douzaine de vidéos pédagogiques, en mode selfie, où il a répondu à des questions des internautes sur la vaccination et le pass. Bilan: déjà près de 50 millions de vues.

Il s'agissait de reprendre la main au lendemain de manifestations aux rangs toujours plus fournis - ils étaient plus de 200 000 partout en France à protester contre le pass sanitaire le week-end dernier selon le ministère de l'Intérieur - et dont la virulence, voire la violence, autant que l'apparente absence de leaders et la capacité à agréger les colères inquiète les autorités.

La situation n'en est pas moins paradoxale, puisque la loi a été votée à la fois par l'Assemblée nationale et le Sénat, à majorité de droite, en cantonnant les oppositions les plus véhémentes au RN et à LFI, dont les leaders Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon se refusent à se joindre aux cortèges du samedi.

En préemptant la communication politique, l'exécutif estime avoir réussi son pari, auréolé du blanc-seing des juges suprêmes.

Surtout, l'Élysée et Matignon se félicitent de la poursuite du "sprint vaccinal", qui depuis le discours du chef de l'État le 12 juillet garde un rythme soutenu autour de 600 000 injections par jour. Déjà plus de 43 millions de Français ont reçu au moins une dose. 

Un chiffre qui relativise largement selon eux les rassemblements d'opposants et démontre le succès de la méthode choisie. 

Même la censure - inattendue - de l'article qui prévoyait l'isolement des malades, jugé "disproportionné" par le Conseil constitutionnel, n'est pas apparue comme un véritable camouflet, tant la disposition n'était pas au cœur des débats.

Le gouvernement rappelle par ailleurs que les voisins européens adoptent aux aussi le pass sanitaire: l'Italie a mis en place le sien vendredi, l'étendant même aux enseignants, à l'instar de la Grèce, l'Autriche, le Portugal et certaines régions espagnoles et allemandes.

«Rodage»

Pour autant, l'exécutif n'a pas levé toutes les hypothèques. À commencer par les nouveaux appels à manifester samedi dans 150 villes. À Paris, où environ 10 000 personnes sont attendues, quatre cortèges sont prévus.

"La contestation, toute relative, tient d'une part au stop and go permanent de l'exécutif, qui alterne entre grandes annonces sur la fin prochaine de l'épidémie et nouvelles mesures restrictives, et d'autre part à un conflit personnel non réglé entre une partie de la population et Emmanuel Macron, ce qu'il symbolise ou représente", analyse le politologue Philippe Moreau-Chevrolet. 

Baroud d'honneur ou cristallisation d'un mouvement de fond contre une supposée "dictature sanitaire"? "La décision du Conseil constitutionnel devrait mettre fin aux revendications d'atteintes aux libertés fondamentales, qui sont désormais illégitimes car l'état du droit est fixé. La raison commanderait d'arrêter de prétendre que cette réforme porte atteinte aux libertés individuelles", veut croire l'avocat Patrice Spinosi, spécialiste des libertés publiques. 

Mais, pour le professeur de droit public à l'université de Grenoble-Alpes Serge Slama, "le Conseil constitutionnel n'a pas posé de bornes plus importantes pour éteindre les manifestations: il ne dit même pas que c'est important que les tests restent gratuits, ce qui aurait pu être une réserve utile pour différencier ce pass d'une obligation vaccinale."

L'exécutif parie néanmoins sur l'acceptation du pass, en s'appuyant sur une nette majorité de Français favorables au dispositif - 55% selon un sondage Elabe de mercredi. 

Alors que de nombreux restaurateurs et cafetiers ont exprimé leurs réticences, notamment en ce qui concerne les terrasses, le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, a promis vendredi "une semaine de rodage".

"C'est un outil nouveau pour un certain nombre de professionnels, il faut qu'ils puissent se l'approprier", a expliqué le porte-parole, en assurant que le gouvernement "n'ignore pas" l'"impact" du pass en termes d'organisation au quotidien.

Un «cas de conscience» pour les chefs d'entreprise, selon le Medef

L'application de la loi sur le pass sanitaire "sera un cas de conscience" pour les chefs d'entreprises, a estimé vendredi Patrick Martin, président délégué du Medef, interrogé sur franceinfo.

"Le fait est que ce sera très compliqué pour une entreprise (...) d'engager une procédure de licenciement contre un salarié qui ne se conformerait pas au pass sanitaire", constate M. Martin. Mais par ailleurs les dirigeants d'entreprises voudront protéger salariés, clients et autres contacts. 

"Donc ce sera un cas de conscience pour les chefs d'entreprise. Moi je ne pense pas que massivement les chefs d'entreprise joueront avec cette réglementation", a-t-il avancé.

D'autant que la période est difficile pour le recrutement. "Les entreprises hésiteront donc à se séparer d'un salarié, a fortiori d'un salarié qui par ailleurs donne satisfaction", a-t-il expliqué.

Patrick Martin a rappelé que son organisation soutenait le pass sanitaire. Même s'il est d'ores et déjà clair que l'activité a baissé dans les premiers établissements à l'appliquer (parcs d'attraction, cinémas), mais "entre cela et un reconfinement, très sincèrement on préfère gérer les petits problèmes de mise en place du pass sanitaire", a-t-il conclu.


Grève nationale : les syndicats unis contre le budget du futur gouvernement

Des policiers attendent l'arrivée du ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau à la Porte d'Orléans à Paris, le 18 septembre 2025, avant une journée de grèves et de protestations à l'échelle nationale à l'appel des syndicats sur le budget national de la France. (AFP)
Des policiers attendent l'arrivée du ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau à la Porte d'Orléans à Paris, le 18 septembre 2025, avant une journée de grèves et de protestations à l'échelle nationale à l'appel des syndicats sur le budget national de la France. (AFP)
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  • Journée de grève nationale ce jeudi à l’appel des 8 principaux syndicats français, unis contre les mesures budgétaires jugées « brutales »
  • Les autorités redoutent des débordements à Paris, avec jusqu’à 100 000 manifestants attendus et la présence annoncée de casseurs. 900 000 personnes pourraient se mobiliser dans toute la France

Les syndicats français ont promis une "journée noire" de manifestations et de grèves jeudi pour peser sur les choix budgétaires du prochain gouvernement, en pleine crise politique dans la deuxième économie de l'UE.

A Paris, le préfet de police s'est dit "très inquiet" de la présence de nombreux casseurs venant pour "en découdre" dans la manifestation prévue dans la capitale, qui pourrait selon lui rassembler 50.000 à 100.000 personnes.

Les autorités s'attendent à une mobilisation massive, avec plus de 250 cortèges annoncés qui pourraient réunir jusqu'à 900.000 personnes à travers le pays, soit cinq fois plus que lors du mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre lancé sur les réseaux sociaux, hors de tout cadre syndical.

Cette mobilisation lancée par les huit syndicats français, unis pour la première fois depuis le 6 juin 2023, vise les mesures budgétaires "brutales" préconisées cet été par le Premier ministre François Bayrou pour réduire le déficit de la France (coupes dans le service public, réforme de l'assurance chômage, gel des prestations sociales notamment).

Son gouvernement alliant le centre droit et la droite, minoritaire à l'Assemblée nationale, a été renversé par les députés le 8 septembre.

Nommé le lendemain, son successeur Sébastien Lecornu - troisième Premier ministre d'Emmanuel Macron depuis juin 2024, le cinquième depuis sa réélection en 2022 - s'est lui aussi engagé à réduire le déficit qui plombe les comptes de la nation (114% du PIB), tout en promettant des "ruptures sur le fond" en matière budgétaire.

Ce fidèle du président a entamé une série de consultations avec les partis politiques avant de composer un gouvernement et présenter son programme, en vue de boucler dès que possible un projet de budget pour 2026.

Il a également reçu quasiment tous les syndicats, qui n'en ont pas moins maintenu leur mot d'ordre, espérant une mobilisation similaire à celles de 2023 contre la réforme des retraites qui avaient régulièrement réuni un million de manifestants, dont un pic à 1,4 million.

- "Démonstration de force" -

"Aucune des mesures catastrophiques du musée des horreurs de M. Bayrou n'est enterrée !", s'est indignée lundi la leader de la CGT, Sophie Binet, après avoir rencontré le nouveau Premier ministre.

L'abandon par Sébastien Lecornu de la très controversée suppression de deux jours fériés voulue par François Bayrou est "une première victoire", qui "confirme que nous sommes en position de force", a-t-elle estimé.

Même la CFDT, syndicat réputé plus apte au compromis, est "plus que jamais motivée pour aller dans la rue", a fait savoir sa responsable Marylise Léon qui attend "des faits et des preuves" du nouveau chef de gouvernement, et notamment un "besoin d’efforts partagés".

Elle a apprécié à cet égard que le successeur de François Bayrou se dise selon elle conscient de la nécessité de "faire quelque chose" au sujet de la taxation des hauts patrimoines, revenue au cœur du débat.

"Le budget va se décider dans la rue", estime Mme Binet, qui évoque une "démonstration de force" et laisse entrevoir une mobilisation dans la durée.

Côté transports, le trafic sera "perturbé" voire "très perturbé" dans la capitale, ainsi que pour les trains interurbains.

Ce sera moins le cas pour les trains régionaux et les TGV. Un service proche de la normale est attendu dans les aéroports, le principal syndicat de contrôleurs aériens ayant reporté sa grève.

A l'école, un tiers des enseignants du premier degré (écoles maternelles et élémentaires) seront grévistes. L'ampleur du mouvement dans la fonction publique en générale reste encore à préciser.


Le PDG de CMA CGM assure «ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale» des médias qu'il possède

Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
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  • "Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media
  • Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique"

PARIS: Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC.

"Les journaux ou chaînes de télévision qu'on a rachetés ont une indépendance, ce sont des journaux qui sont nuancés, qui offrent le pluralisme. Je ne m'immisce pas dans la ligne éditoriale de ces journaux", a-t-il déclaré lors d'une audition devant la commission des affaires économiques de l'Assemblée.

Il répondait au député France insoumise René Pilato qui suggérait une "grande loi de séparation des entreprises et des médias".

"Si des investisseurs comme le groupe CMA CGM ne viennent pas, ces médias malheureusement tombent", a ajouté M. Saadé, rappelant que le secteur des médias est "très sinistré".

"Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media.

Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique".

"Dans un monde traversé par les +fake news+, je crois que les industriels ont un rôle à jouer pour défendre le pluralisme, l'indépendance et la qualité de l'information. Si nous voulons continuer à produire de l'information en France et résister à la domination des grandes plateformes, nous devons garantir des groupes de médias solides capables de créer des contenus de qualité et de les diffuser sur tous les supports", a-t-il défendu.

Outre BFMTV, RMC, et désormais Brut, CMA Media possède les journaux La Tribune et La Tribune Dimanche, La Provence et Corse Matin. Le groupe vient également de racheter la chaîne télé Chérie 25 (NRJ Group).

Vendredi, les Sociétés des journalistes (SDJ) de BFMTV, RMC et La Tribune avaient déploré qu'"une prise de position de Rodolphe Saadé sur l'actualité politique et sociale du pays (ait) été diffusée à l'antenne de BFMTV" jeudi.

Il s'agissait d'extraits écrits tirés d'une tribune publiée dans La Provence après le mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre. "Les entreprises ne sont pas des adversaires, elles sont des partenaires de la Nation", y écrivait notamment M. Saadé.

 


Faure «sur sa faim» après son entretien avec Lecornu, resté «très flou» sur ses intentions

Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
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  • Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu
  • Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland

PARIS: Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions".

"Pour l'instant, nous sommes restés sur notre faim et nous verrons bien ce qu'il a à nous dire dans les prochains jours", a déclaré le premier secrétaire du PS, à l'issue de sa première rencontre à Matignon, qui a duré près de deux heures.

Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu à la veille d'une importante journée de mobilisation syndicale.

Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland.

A propos de la journée d'actions de jeudi, il a expliqué que ces manifestations seraient "aussi un élément du rapport de force que nous devons installer avec un exécutif qui, jusqu'ici, n'a pas fait la démonstration de sa capacité à comprendre la colère et même l'exaspération des Français".

Olivier Faure a également dit qu'il ne souhaitait pas "voir revenir sur la table une loi immigration", estimant que le Premier ministre macroniste était "tiraillé par une droite qui lorgne de plus en plus vers l'extrême droite" et avait  "beaucoup de problèmes dans son propre socle commun".

"Nous ne cherchons pas la censure, nous ne cherchons pas la dissolution, nous ne cherchons pas la destitution. Nous cherchons à ce que les Français soient entendus", a-t-il plaidé, en citant un sondage Ifop commandé par le parti montrant que les Français, quelles que soient leurs sensibilités, plébiscitent les mesures poussées par le PS.

"Il y a des mesures qui sont très majoritaires dans le pays, pour la taxe Zucman" sur les hauts patrimoines, "pour en finir" avec la réforme des retraites, pour "rendre du pouvoir d'achat", notamment à travers "un taux différentiel de CSG", a-t-il détaillé.