En Lituanie, les migrants attendent, les tensions montent

Migrants rest in a former school turned into a refugee facility, in Vydeniai village, Lithuania on July 29, 2021. (AFP)
Migrants rest in a former school turned into a refugee facility, in Vydeniai village, Lithuania on July 29, 2021. (AFP)
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Publié le Samedi 07 août 2021

En Lituanie, les migrants attendent, les tensions montent

  • Le gouvernement lituanien a renforcé sa législation pour permettre la détention des migrants et compliquer le processus d'appel contre le rejet des demandes d'asile
  • Bruxelles, qui a envoyé plusieurs dizaines de gardes à la frontière, presse l'Irak de juguler le flux des migrants en contrôlant les liaisons aériennes vers le Bélarus

VYDENIAI: Quand l'angoisse monte, Aman Mehari, un jeune Érythréen, se réfugie sur le terrain de basket de son nouveau foyer, l'école du village de Vydeniai, dans le sud de la Lituanie, transformée en hébergement temporaire pour migrants.

Comme des milliers d'autres ces derniers mois, pour la plupart originaires du Moyen-Orient ou d'Afrique, ce garçon de 16 ans a gagné l'Etat balte depuis le Bélarus.

"Quand tu te réveilles le matin, tu prends ton petit déjeuner. Après, tu ne peux rien faire, alors tu viens ici jouer au basket", raconte Aman Mehari à l'AFP.

Il attend toujours de déposer sa demande d'asile, car dans ce pays de 2,8 millions d'habitants où l'immigration était jusqu'à présent presque nulle, les autorités sont submergées.

Vivre dans cette incertitude est "très stressant" pour Aman Mehari, dont le seul espoir est que sa famille puisse le rejoindre en Lituanie pour "vivre une vie heureuse".

Représailles 
L'immigration clandestine en Lituanie grimpe en flèche. Depuis le début de l'année, le pays membre de l'Union européenne a enregistré plus de 4 000 migrants, pour la plupart des Irakiens, contre 81 pour l'ensemble de 2020.

Les autorités lituaniennes soupçonnent le Bélarus et son homme fort, le président Alexandre Loukachenko, de pousser les migrants à franchir illégalement la frontière en guise de représailles aux sanctions imposées par l'UE.

M. Loukachenko a nié ces accusations, soutenant plutôt que la Lituanie a provoqué elle-même le flux de migrants en annonçant en juillet une accélération du processus de traitement des demandes d'asile, qui devra être bouclé en 10 jours.

Les tensions entre Minsk et Vilnius se sont aggravées l'année dernière après que la Lituanie est devenue un pays d'accueil pour l'opposition bélarusse et sa chef Svetlana Tikhanovskaïa, adversaire de Loukachenko à l'élection présidentielle d'août 2020.

La répression des manifestations contre ces élections contestées avaient amené l'UE à sanctionner le régime.

Bruxelles, qui a envoyé plusieurs dizaines de gardes à la frontière, presse l'Irak de juguler le flux des migrants en contrôlant les liaisons aériennes vers le Bélarus.

«Des réfugiés, pas des criminels»
En Lituanie, l'afflux migratoire a semé l'inquiétude et provoqué des manifestations. 

De leur côté, les migrants protestent contre les conditions de vie dans les campements, dont celui installé dans le centre d'entraînement du ministère de l'Intérieur à Rudninkai. Les migrants y sont provisoirement logés dans des tentes de l'armée.

"Comment pouvons-nous dormir dans des tentes mouillées, comment pouvons-nous ne manger qu'une fois en 24 heures ? Ils nous traitent ici comme des animaux", déplore Amir Taher Mohammed, un Irakien de 29 ans.

"Nous voulons de la liberté, nous voulons des bonnes conditions. Nous voulons être appelés réfugiés, pas criminels", ajoute son compatriote Hussein Ali, 22 ans.

Les locaux se méfient de ces nouveaux arrivants.

"Ils sont trop nombreux. Je ne les ai pas vus, je ne sais rien d'eux, mais je ne pense pas que ce soit une bonne chose", explique Zofija, une habitante de 88 ans du village voisin.

«Pas facile pour eux»
Le gouvernement lituanien a renforcé sa législation pour permettre la détention des migrants et compliquer le processus d'appel contre le rejet des demandes d'asile.

Cette semaine, les garde-frontières ont commencé à repousser les migrants vers le Bélarus, et à les rediriger vers les postes-frontières ou les représentations diplomatiques pour déposer leur demande d'asile.

Une stratégie controversée qui semble fonctionner. Seuls 56 des quelques 700 migrants interceptés par les garde-frontières lituaniens entre mardi et vendredi ont été autorisés à entrer dans l'Etat balte.

Mardi, les garde-frontières bélarusses ont affirmé qu'une quarantaine de migrants, parmi lesquels des femmes et des enfants, étaient revenus au Bélarus avec "des lésions corporelles" après avoir été refoulés par la Lituanie. 

Mercredi, le président Loukachenko ordonnait une enquête sur la mort rapportée d'un Irakien à la frontière avec la Lituanie.

Les autorités lituaniennes ont nié avoir fait usage de la force. Mais les ONG lituaniennes estiment que le refoulement des migrants viole les droits de l'Homme. 

"Cela restreint le droit humain fondamental à demander l'asile dans un état sûr", a déclaré Akvile Krisciunaite, chercheuse de l'ONG Diversity Development Group. 

"Le Bélarus n'est pas un pays sûr et on sait que les droits de l'Homme y sont gravement bafoués", a-t-elle déclaré à l'AFP cette semaine.

Perez, un Camerounais de 30 ans assis sur des marches près de l'école de Vydeniai, dit comprendre les Lituaniens.

"Les choses ne sont pas faciles pour nous, mais ne le sont pas non plus pour eux. On a appris que des personnes arrivent tous les jours", dit-il. "Nous, on est juste là, à attendre".


Sahel: Washington va retirer des soldats du Tchad, après le Niger

Des milliers de Tchadiens assistent au meeting de Mahamat Idriss Deby Itno, président de la transition et candidat à l'élection présidentielle au Tchad, dans le stade en construction au quartier Dombao, à Moundou, le 25 avril 2024. (AFP)
Des milliers de Tchadiens assistent au meeting de Mahamat Idriss Deby Itno, président de la transition et candidat à l'élection présidentielle au Tchad, dans le stade en construction au quartier Dombao, à Moundou, le 25 avril 2024. (AFP)
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  • Washington a entamé cette semaine des discussions avec Niamey sur le retrait du Niger des plus de 1 000 soldats américains présents dans le pays
  • Dans un courrier au ministre des Armées, le chef d'état-major de l'armée de l'air tchadienne avait réclamé début avril le départ des soldats américains

WASHINGTON: Les Etats-Unis vont retirer temporairement des soldats du Tchad, a annoncé le Pentagone quelques jours après leur accord pour retirer leurs forces du Niger voisin.

Au Tchad, les Etats-Unis disposent d'une centaine de soldats dans le cadre de la lutte antijihadiste au Sahel.

"L'Usafricom envisage actuellement de repositionner certaines forces militaires américaines depuis le Tchad, dont le départ d'une partie était déjà prévu", a déclaré lors d'une conférence de presse jeudi le porte-parole du Pentagone, Pat Ryder, se référant au commandement militaire américain en Afrique.

"Il s'agit d'une étape temporaire dans le cadre d'une révision en cours de notre coopération de sécurité, qui reprendra après l'élection présidentielle du 6 mai au Tchad", a-t-il ajouté.

Dans un courrier au ministre des Armées lu par l'AFP, le chef d'état-major de l'armée de l'air tchadienne avait réclamé début avril le départ des soldats américains, incriminant un défaut de documents sur un accord permettant leur présence.

Selon ce courrier, "l'armée de l'air a demandé à l'attaché de défense américain d'arrêter immédiatement les activités militaires sur la BAK", la base aérienne d'Adji Kossei où les soldats américains entraînent des forces spéciales tchadiennes à lutter contre le groupe jihadiste Boko Haram.

"Nous vous demandons d'intercéder auprès de qui de droit afin de prévenir les Américains que nous avons pris la décision d'arrêter leur activité", ajoute la lettre.

"La présence des forces américaines au Tchad était initialement motivée par l'engagement commun dans la lutte contre le terrorisme, un objectif partagé par les deux nations", a déclaré vendredi à l'AFP le porte-parole du gouvernement tchadien.

Discussions supplémentaires 

"Cependant, des préoccupations ont été exprimées par l'état-major tchadien quant à cette présence" et "en reconnaissance des préoccupations exprimées, le gouvernement américain a décidé de retirer temporairement ses forces du Tchad", a ajouté M. Abderaman Koulamallah.

"Il est important de souligner que ce retrait ne signifie en aucun cas une rupture de la coopération entre les deux pays dans la lutte contre le terrorisme", a-t-il dit.

"Des discussions supplémentaires auront lieu pour explorer la possibilité d'un retour des forces américaines dans le cadre d'un accord bilatéral précis et convenu entre les deux pays", a encore indiqué le porte-parole.

Au Niger, autre pivot de la stratégie des Etats-Unis et de la France pour combattre les jihadistes dans la région, la junte militaire au pouvoir depuis juillet a dénoncé en mars l'accord de coopération militaire en vigueur avec les Etats-Unis, estimant que la présence américaine était désormais "illégale".

Washington a entamé cette semaine des discussions avec Niamey sur le retrait du Niger des plus de 1.000 soldats américains présents dans le pays.

Les Etats-Unis disposent notamment au Niger d'une base de drones importante près d'Agadez, construite pour environ 100 millions de dollars.

Washington va "continuer à explorer les options possibles afin d'assurer que nous soyons toujours en mesure de faire face aux potentielles menaces terroristes", avait déclaré lundi Pat Ryder après l'annonce la semaine dernière du retrait américain du Niger.

Au Tchad, le général Mahamat Idriss Deby Itno a annoncé en mars sa candidature à la présidentielle, qu'il est quasi-assuré de remporter après que son régime a violemment réprimé dans la rue et muselé toute opposition et éliminé toute concurrence.

Il avait été proclamé par l'armée président de transition le 20 avril 2021, à la tête d'une junte de 15 généraux, à la mort de son père Idriss Déby Itno, lequel régnait d'une main de fer sur le Tchad depuis 30 ans.

Son principal adversaire, Yaya Dillo, a été tué fin février par des militaires dans l'assaut de son parti, d'une "balle dans la tête à bout portant" selon l'opposition, puis les candidatures de dix autres potentiels rivaux ont été invalidées.


Chine et Etats-Unis doivent être «des partenaires, pas des rivaux», dit Xi à Blinken

Le président chinois Xi Jinping (à droite) s'entretient avec le secrétaire d'État américain Antony Blinken lors de leur rencontre au Grand Palais du Peuple à Pékin, le 26 avril 2024. (Photo de Mark Schiefelbein / POOL / AFP)
Le président chinois Xi Jinping (à droite) s'entretient avec le secrétaire d'État américain Antony Blinken lors de leur rencontre au Grand Palais du Peuple à Pékin, le 26 avril 2024. (Photo de Mark Schiefelbein / POOL / AFP)
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  • Antony Blinken effectue depuis mercredi sa deuxième visite en Chine en moins d'un an
  • La Chine reproche aux Etats-Unis ses multiples pressions concernant la mer de Chine méridionale, Taïwan, le commerce ou ses relations avec la Russie

PEKIN: Le président chinois Xi Jinping a déclaré vendredi au secrétaire d'Etat américain Antony Blinken que les deux pays devaient "être des partenaires, pas des rivaux" même si "de nombreux problèmes" restaient encore à résoudre.

Antony Blinken effectue depuis mercredi sa deuxième visite en Chine en moins d'un an. Il a évoqué durant ses rencontres officielles plusieurs dossiers où les deux pays ont des divergences, comme la Russie, Taïwan et le commerce.

En accueillant le chef de la diplomatie américaine au Palais du Peuple à Pékin, Xi Jinping a déclaré que les deux pays avaient "réalisé des progrès" depuis sa rencontre avec son homologue Joe Biden en novembre, selon la télévision publique CCTV.

"Les deux pays doivent être des partenaires, pas des rivaux" même si "de nombreux problèmes doivent encore être résolus et des efforts supplémentaires sont encore possibles", a indiqué M. Xi.

"Nous espérons que les Etats-Unis pourront aussi adopter une vision positive du développement de la Chine", a ajouté le président chinois. "Quand ce problème fondamental sera résolu (...) les relations pourront véritablement se stabiliser, s'améliorer et avancer."

Plus tôt dans la journée, le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, a averti Antony Blinken que les multiples pressions américaines sur la Chine pourraient entraîner une "détérioration" des liens entre les deux pays.

Le chef de la diplomatie chinoise a rappelé que la question de Taïwan, île de 23 millions d'habitants revendiquée par Pékin et soutenue militairement par Washington, était la "première ligne rouge à ne pas franchir" dans les relations sino-américaines.

Le cas TikTok

De son côté, Antony Blinken a décrit ses plus de cinq heures et demie de discussions avec Wang Yi dans le complexe diplomatique de Diaoyutai, entouré de jardins, comme "approfondies et constructives"

Le secrétaire d'Etat doit rencontrer la presse vendredi soir à l'ambassade des Etats-Unis à Pékin.

La Chine reproche aux Etats-Unis ses multiples pressions concernant la mer de Chine méridionale, Taïwan, le commerce ou ses relations avec la Russie, qui se sont renforcées depuis l'invasion de l'Ukraine en février 2022.

Pékin est également vent debout contre les restrictions américaines sur les exportations vers la Chine de technologies avancées, dont les semi-conducteurs.

Autre sujet de friction plus récent: le réseau social TikTok est menacé d'interdiction aux Etats-Unis s'il ne coupe pas ses liens avec sa maison mère chinoise ByteDance.

Washington dit soupçonner l'application d'être utilisée pour espionner des Américains, collecter des informations personnelles et servir également la propagande chinoise. TikTok dément catégoriquement ces allégations.

Malgré ces tensions, les relations entre les deux puissances "commencent à se stabiliser" depuis le sommet Xi-Biden en novembre, a estimé Wang Yi, mettant toutefois en garde contre la persistance d'"éléments négatifs".

"Les droits légitimes de la Chine en matière de développement ont été indûment opprimés et nos intérêts fondamentaux sont remis en question", a souligné M. Wang, dans une allusion aux restrictions américaines dans le secteur technologique.

«Erreurs de calcul»

"La Chine et les Etats-Unis doivent-ils continuer à aller dans la bonne direction, celle de la stabilité, ou retourner dans celle d'une détérioration?", a-t-il feint de s'interroger.

De son côté, Antony Blinken a fait part à Wang Yi de ses préoccupations concernant le présumé soutien de la Chine "à la base industrielle de défense russe", a déclaré le porte-parole du département d'Etat américain, Matthew Miller.

Si les entreprises chinoises ne fournissent pas directement d'armes à la Russie, Washington les accuse de livrer du matériel et des technologies à double usage à ce pays qui facilitent son effort de réarmement.

Les Etats-Unis et la Chine doivent être aussi "clairs que possible dans les domaines dans lesquels nous avons des divergences, au moins pour éviter les malentendus et les erreurs de calcul", a déclaré le secrétaire d'Etat américain.

Le déplacement d'Antony Blinken en Chine est le signe d'une baisse relative des frictions entre Pékin et Washington, exacerbées sous l'ancien président américain Donald Trump.

Ce dernier promet à nouveau une ligne dure face à la Chine s'il remporte l'élection présidentielle de novembre.

Tout en recherchant une plus grande stabilité entre les deux plus grandes économies mondiales, Joe Biden cherche toutefois à maintenir la pression sur le géant asiatique.


Tim Lenderking à Arab News: «Aidons le Yémen à tracer sa propre voie»

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  • Tim Lenderking souligne que ce serait une «terrible tragédie» de gâcher les progrès réalisés en faveur de la paix au cours des deux années précédentes
  • Une trêve, négociée en avril 2022 entre les parties en présence au Yémen, avait, dans un premier temps, conduit un léger apaisement de la situation humanitaire désastreuse dans le pays

NEW YORK: Les attaques des Houthis contre la navigation internationale en mer Rouge et dans le golfe d’Aden en réponse à l’offensive militaire israélienne contre le Hamas à Gaza ne doivent pas faire dérailler le processus de paix au Yémen, déclare Tim Lenderking, l’envoyé spécial américain pour le Yémen.

Depuis le début de la guerre à Gaza en octobre de l’année dernière, les attaques des Houthis contre des navires commerciaux et militaires dans les voies navigables stratégiques ont fortement perturbé le commerce mondial.

Le groupe politique et religieux armé soutenu par l’Iran, officiellement connu sous le nom «Ansar Allah», se considère comme faisant partie de «l’axe de la résistance» dirigé par l’Iran contre Israël, les États-Unis et l’Occident dans son ensemble.

Il a menacé de poursuivre ses attaques contre les navires jusqu’à ce qu’Israël mette fin à son attaque sur Gaza. Depuis le mois de janvier, le Royaume-Uni et les États-Unis, en coalition avec cinq autres pays, ont répondu par des frappes de représailles contre des cibles houthies au Yémen.

Les États-Unis mettront fin à ces frappes de représailles lorsque la milice houthie cessera ses attaques contre les navires, déclare M. Lenderking dans un entretien accordé à Arab News, plaçant la responsabilité de la désescalade de la situation entre les mains de la milice.

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Les Yéménites organisent une marche propalestinienne à Sanaa, la capitale dirigée par les Houthis. (AFP)

«Il incombe aux Houthis de mettre fin aux attaques en mer Rouge. Cela peut nous inciter à commencer à ralentir, à désamorcer la situation au Yémen, à la ramener à ce qu’elle était au 6 octobre – soit au stade où elle était beaucoup plus prometteuse que ce à quoi nous assistons actuellement. C’est sur cela que nous voulons mettre l’accent.»

Tim Lenderking appelle l’Iran à «cesser d’alimenter le conflit et de faire entrer clandestinement des armes et du matériel de guerre au Yémen, en violation des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU».

Le Yémen n’avait jamais été aussi proche de la paix avant que le processus ne soit interrompu par les derniers troubles régionaux, précise M. Lenderking. La guerre civile yéménite dure depuis trop longtemps. «Elle doit cesser», ajoute-t-il.

«Les Yéménites souffrent de cette guerre depuis maintenant huit ans. Ils veulent récupérer leur pays. Ils veulent qu’il soit en paix. Ils ne veulent pas de combattants étrangers au Yémen. Ils ne veulent pas des Iraniens à Sanaa. Ils ne veulent pas que le Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI) erre dans Sanaa.»

«Aidons les Yéménites à reconquérir leur pays et à tracer leur propre voie. Tel est le vœu le plus cher des États-Unis.»

Il poursuit: «Nous nous efforçons de déployer des efforts internationaux pour que l’accent soit mis sur le processus de paix au Yémen et la situation humanitaire très critique.»

«Mais il y a la terrible tragédie qui se déroule à Gaza. La guerre de la Russie en Ukraine. L’Afghanistan. Le Soudan. Il existe de nombreuses crises concurrentes qui détournent l’attention des États-Unis et de la communauté internationale.»

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Le cargo Rubymar a été partiellement submergé au large des côtes du Yémen après avoir été touché par un missile houthi. (AFP)

Alors que la guerre au Yémen est liée à d’autres conflits qui font rage dans la région, l’ONU a récemment déclaré que le monde avait une obligation envers les Yéménites: celle de veiller à ce que la résolution de la guerre au Yémen ne soit pas subordonnée à la résolution d’autres problèmes et que les espoirs de paix du Yémen ne deviennent pas un «dommage collatéral».

«Nous ne pouvons échapper à ce qui se passe à Gaza», renchérit Tim Lenderking. «Pas un jour ne passe sans que les gens à qui je parle du Yémen n’évoquent également Gaza. Nous savons donc qu’il s’agit d’une situation tragique à laquelle il faut absolument remédier.»

«Cette situation freine notre capacité à recentrer l’attention sur le processus de paix au Yémen, à tirer parti d’une feuille de route élaborée par le gouvernement yéménite et les Houthis en décembre et à inciter les Houthis à recentrer leurs priorités non sur les attaques en mer Rouge – qui nuisent d’ailleurs aux Yéménites et au Yémen – mais sur les efforts de paix dans le pays.»

S’exprimant lors d’un point de presse du Conseil de sécurité de l’ONU la semaine dernière, Hans Grundberg, l’envoyé de l’ONU pour le Yémen, soutient que la menace de nouvelles attaques des Houthis contre les navires persiste en l’absence d’un cessez-le-feu à Gaza – dont l’urgente nécessité a été soulignée par la récente escalade des hostilités entre Israël et l’Iran.

M. Lenderking affirme: «Les Houthis continuent de nous dire que ces deux questions sont liées et que les Houthis ne mettront pas fin aux attaques contre les navires de la mer Rouge tant qu’il n’y aura pas de cessez-le-feu à Gaza.»

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Tim Lenderking appelle l’Iran à «cesser d’alimenter le conflit et de faire entrer clandestinement des armes et du matériel de guerre au Yémen, en violation des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU». (AFP)

«Nous pensons que des progrès significatifs peuvent être réalisés dès maintenant. Vingt-cinq membres de l’équipage du Galaxy Leader, le navire qui a été pris par les Houthis le 19 novembre de l’année dernière, sont toujours détenus.»

«Ils sont originaires de cinq pays différents. Il n’y a aucune raison pour que ces individus, qui sont des marins innocents, soient détenus à Hodeïda par les Houthis. Relâchez-les. Libérez le navire. Il y a des mesures qui pourraient être prises. Nous pourrions continuer à œuvrer pour la libération de prisonniers.»

«Ce type d’action démontrera au peuple yéménite qu’il y a encore de l’espoir et que la communauté internationale se préoccupe toujours de sa situation.»

Tim Lenderking souligne que ce serait une «terrible tragédie» de gâcher les progrès réalisés en faveur de la paix au cours des deux années précédentes.

Une trêve, négociée en avril 2022 entre les parties en présence au Yémen, avait, dans un premier temps, conduit à une réduction des violences et à un léger apaisement de la situation humanitaire désastreuse dans le pays. Deux ans plus tard, l’ONU déplore qu’il n’y ait plus grand-chose à célébrer.

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Des enfants yéménites se rassemblent pour recevoir de l’aide humanitaire à la périphérie de Marib. (AFP)

«Les détenus dont nous avions espéré la libération à temps pour passer la fête de l’Aïd avec leurs proches restent en détention», déclare l’envoyé de l’ONU Grundberg. «Les routes que nous espérions voir ouvertes demeurent fermées.»

«Nous avons également été témoins de la mort tragique et des blessures infligées à seize civils, dont des femmes et des enfants, lorsqu’une résidence a été démolie par des Houthis dans le gouvernorat d’Al-Bayda.»

La situation humanitaire au Yémen s’est également nettement aggravée, ces derniers mois, en raison de l’insécurité alimentaire croissante et de la propagation du choléra.

Edem Wosornu, directrice des opérations et du plaidoyer au Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires (BCAH), a déclaré au Conseil de sécurité lors du même point de presse que la situation s’était encore détériorée après que le Programme alimentaire mondial (PAM) avait suspendu la distribution de l’aide alimentaire dans les zones contrôlées par les Houthis en décembre 2023.

Cette pause fait suite à des désaccords avec les autorités locales sur la question de savoir qui devrait recevoir une assistance prioritaire et elle a été amplifiée par les effets d’une grave crise de financement concernant les efforts humanitaires du PAM au Yémen.

«Les personnes les plus vulnérables – notamment les femmes et les filles, les groupes marginalisés comme les Mouhamachines, les personnes déplacées à l'intérieur du pays, les migrants, les demandeurs d’asile et les réfugiés, ainsi que les personnes handicapées – dépendent toujours de l’aide humanitaire pour survivre», affirme Mme Wosornu.

Edem Wosornu exprime également son inquiétude face à l’augmentation des cas de choléra au Yémen dans un contexte de détérioration des institutions et des services publics.

«La réémergence du choléra et les niveaux croissants de malnutrition sévère sont des indicateurs révélateurs de la capacité affaiblie des services sociaux», soutient-elle.

«Près d’un enfant de moins de cinq ans sur deux souffre d’un retard de croissance, soit plus du double de la moyenne mondiale: 49% contre 21,3%.»

«Les stocks de fournitures essentielles sont presque épuisés. Et les systèmes de soutien à l’eau, à l’assainissement et à l’hygiène doivent être renforcés de toute urgence.»

Le plan de réponse humanitaire pour le Yémen n’est financé qu’à hauteur de 10%, le financement des programmes de sécurité alimentaire et de nutrition n’atteignant respectivement que 5% et 3%, selon une mise à jour informelle présentée au Conseil de sécurité par le BCAH cette semaine.

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Des partisans de la milice houthie du Yémen participent à un rassemblement pour marquer la commémoration annuelle de la Journée Al-Qods (Jérusalem) à Sanaa. (AFP)

Mme Wosornu appelle la communauté internationale à prendre des mesures urgentes pour contribuer à combler les déficits de financement.

Commentant le manque de financement, M. Lenderking explique: «Lorsqu’il y aura une réelle possibilité d’un processus de paix au Yémen, les donateurs se mobiliseront. Mais le fait que nous soyons dans ce flou, où le processus de paix est suspendu pendant que les Houthis poursuivent leurs attaques en mer Rouge, doit être imputé aux Houthis parce qu’ils font dérailler ce qui était un processus de paix légitime.»

«Mais une fois que nous pourrons y revenir, je pense que nous pourrions appeler la communauté internationale à nous indiquer qu’il y a une lueur d’espoir. Il y a un processus. Il y a un engagement. Les États-Unis soutiennent un effort international. Nous pouvons convaincre les donateurs de revenir au Yémen, malgré toute la concurrence pour ces ressources très limitées.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com