En Lituanie, les migrants attendent, les tensions montent

Migrants rest in a former school turned into a refugee facility, in Vydeniai village, Lithuania on July 29, 2021. (AFP)
Migrants rest in a former school turned into a refugee facility, in Vydeniai village, Lithuania on July 29, 2021. (AFP)
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Publié le Samedi 07 août 2021

En Lituanie, les migrants attendent, les tensions montent

  • Le gouvernement lituanien a renforcé sa législation pour permettre la détention des migrants et compliquer le processus d'appel contre le rejet des demandes d'asile
  • Bruxelles, qui a envoyé plusieurs dizaines de gardes à la frontière, presse l'Irak de juguler le flux des migrants en contrôlant les liaisons aériennes vers le Bélarus

VYDENIAI: Quand l'angoisse monte, Aman Mehari, un jeune Érythréen, se réfugie sur le terrain de basket de son nouveau foyer, l'école du village de Vydeniai, dans le sud de la Lituanie, transformée en hébergement temporaire pour migrants.

Comme des milliers d'autres ces derniers mois, pour la plupart originaires du Moyen-Orient ou d'Afrique, ce garçon de 16 ans a gagné l'Etat balte depuis le Bélarus.

"Quand tu te réveilles le matin, tu prends ton petit déjeuner. Après, tu ne peux rien faire, alors tu viens ici jouer au basket", raconte Aman Mehari à l'AFP.

Il attend toujours de déposer sa demande d'asile, car dans ce pays de 2,8 millions d'habitants où l'immigration était jusqu'à présent presque nulle, les autorités sont submergées.

Vivre dans cette incertitude est "très stressant" pour Aman Mehari, dont le seul espoir est que sa famille puisse le rejoindre en Lituanie pour "vivre une vie heureuse".

Représailles 
L'immigration clandestine en Lituanie grimpe en flèche. Depuis le début de l'année, le pays membre de l'Union européenne a enregistré plus de 4 000 migrants, pour la plupart des Irakiens, contre 81 pour l'ensemble de 2020.

Les autorités lituaniennes soupçonnent le Bélarus et son homme fort, le président Alexandre Loukachenko, de pousser les migrants à franchir illégalement la frontière en guise de représailles aux sanctions imposées par l'UE.

M. Loukachenko a nié ces accusations, soutenant plutôt que la Lituanie a provoqué elle-même le flux de migrants en annonçant en juillet une accélération du processus de traitement des demandes d'asile, qui devra être bouclé en 10 jours.

Les tensions entre Minsk et Vilnius se sont aggravées l'année dernière après que la Lituanie est devenue un pays d'accueil pour l'opposition bélarusse et sa chef Svetlana Tikhanovskaïa, adversaire de Loukachenko à l'élection présidentielle d'août 2020.

La répression des manifestations contre ces élections contestées avaient amené l'UE à sanctionner le régime.

Bruxelles, qui a envoyé plusieurs dizaines de gardes à la frontière, presse l'Irak de juguler le flux des migrants en contrôlant les liaisons aériennes vers le Bélarus.

«Des réfugiés, pas des criminels»
En Lituanie, l'afflux migratoire a semé l'inquiétude et provoqué des manifestations. 

De leur côté, les migrants protestent contre les conditions de vie dans les campements, dont celui installé dans le centre d'entraînement du ministère de l'Intérieur à Rudninkai. Les migrants y sont provisoirement logés dans des tentes de l'armée.

"Comment pouvons-nous dormir dans des tentes mouillées, comment pouvons-nous ne manger qu'une fois en 24 heures ? Ils nous traitent ici comme des animaux", déplore Amir Taher Mohammed, un Irakien de 29 ans.

"Nous voulons de la liberté, nous voulons des bonnes conditions. Nous voulons être appelés réfugiés, pas criminels", ajoute son compatriote Hussein Ali, 22 ans.

Les locaux se méfient de ces nouveaux arrivants.

"Ils sont trop nombreux. Je ne les ai pas vus, je ne sais rien d'eux, mais je ne pense pas que ce soit une bonne chose", explique Zofija, une habitante de 88 ans du village voisin.

«Pas facile pour eux»
Le gouvernement lituanien a renforcé sa législation pour permettre la détention des migrants et compliquer le processus d'appel contre le rejet des demandes d'asile.

Cette semaine, les garde-frontières ont commencé à repousser les migrants vers le Bélarus, et à les rediriger vers les postes-frontières ou les représentations diplomatiques pour déposer leur demande d'asile.

Une stratégie controversée qui semble fonctionner. Seuls 56 des quelques 700 migrants interceptés par les garde-frontières lituaniens entre mardi et vendredi ont été autorisés à entrer dans l'Etat balte.

Mardi, les garde-frontières bélarusses ont affirmé qu'une quarantaine de migrants, parmi lesquels des femmes et des enfants, étaient revenus au Bélarus avec "des lésions corporelles" après avoir été refoulés par la Lituanie. 

Mercredi, le président Loukachenko ordonnait une enquête sur la mort rapportée d'un Irakien à la frontière avec la Lituanie.

Les autorités lituaniennes ont nié avoir fait usage de la force. Mais les ONG lituaniennes estiment que le refoulement des migrants viole les droits de l'Homme. 

"Cela restreint le droit humain fondamental à demander l'asile dans un état sûr", a déclaré Akvile Krisciunaite, chercheuse de l'ONG Diversity Development Group. 

"Le Bélarus n'est pas un pays sûr et on sait que les droits de l'Homme y sont gravement bafoués", a-t-elle déclaré à l'AFP cette semaine.

Perez, un Camerounais de 30 ans assis sur des marches près de l'école de Vydeniai, dit comprendre les Lituaniens.

"Les choses ne sont pas faciles pour nous, mais ne le sont pas non plus pour eux. On a appris que des personnes arrivent tous les jours", dit-il. "Nous, on est juste là, à attendre".


Rubio promet un soutien "indéfectible" à Israël, avant une visite à Doha

Le secrétaire d'État américain Marco Rubio et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu visitent le Mur occidental, le lieu de prière le plus sacré du judaïsme, dans la vieille ville de Jérusalem. (AP)
Le secrétaire d'État américain Marco Rubio et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu visitent le Mur occidental, le lieu de prière le plus sacré du judaïsme, dans la vieille ville de Jérusalem. (AP)
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  • En visite à Jérusalem, le secrétaire d’État Marco Rubio a réaffirmé le soutien « indéfectible » des États-Unis à Israël dans sa guerre contre le Hamas à Gaza
  • Alors que les offensives israéliennes se poursuivent, causant de lourdes pertes civiles à Gaza, les critiques internationales s’intensifient

Jérusalem: Le secrétaire d'Etat Marco Rubio a promis lundi à Jérusalem le "soutien indéfectible" des Etats-Unis à Israël pour éliminer le mouvement islamiste palestinien Hamas à Gaza, à la veille d'un déplacement à Doha.

Durant la visite de M. Rubio, l'armée israélienne a poursuivi son offensive dans la bande de Gaza assiégée et affamée, la Défense civile locale faisant état d'au moins 49 morts, dont des enfants.

Lancée en riposte à une attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, cette offensive a fait des dizaines de milliers de morts et détruit une grande partie du territoire palestinien, où le mouvement islamiste a pris le pouvoir en 2007.

Le déplacement de M. Rubio a coïncidé avec un sommet arabo-islamique à Doha, quelques jours après une attaque israélienne inédite le 9 septembre au Qatar contre des chefs du Hamas.

"Les habitants de Gaza méritent un avenir meilleur, mais cet avenir meilleur ne pourra commencer que lorsque le Hamas sera éliminé", a déclaré M. Rubio après une rencontre à Jérusalem avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu.

"Vous pouvez compter sur notre soutien indéfectible et notre engagement à voir cela se concrétiser", a-t-il ajouté.

M. Rubio se rend mardi au Qatar, en route pour Londres, afin de "réaffirmer le soutien total des Etats-Unis à la sécurité et la souveraineté du Qatar après l'attaque israélienne", selon le département d'Etat.

La frappe aérienne au Qatar, un médiateur entre Israël et le Hamas, a contrarié le président Donald Trump.

"Le Qatar a été un très grand allié. Israël et tous les autres, nous devons faire attention. Quand nous attaquons des gens, nous devons être prudents", a-t-il dit dimanche.

Malgré cette critique, M. Netanyahu a estimé que M. Trump était "le plus grand ami" qu'Israël ait jamais eu à la Maison Blanche.

- "Animaux barbares" -

Au sommet de Doha, l'émir du Qatar, cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, s'en est prix à Israël, l'accusant de "vouloir faire échouer les négociations" en vue d'un cessez-le-feu à Gaza et d'une libération des otages enlevés durant l'attaque du 7-Octobre.

Un communiqué final du sommet a appelé "tous les Etats à revoir les relations diplomatiques et économiques avec Israël", alors que les six monarchies du Golfe ont appelé les Etats-Unis à "user de leur influence" pour contenir Israël.

A Jérusalem, M. Rubio s'est montré pessimiste quant à la possibilité d'une solution "diplomatique" à Gaza, qualifiant le Hamas d'"animaux barbares".

"Même si nous souhaitons vivement qu'il existe un moyen pacifique et diplomatique pour mettre fin (à la guerre) -et nous continuerons à explorer cette voie-, nous devons également nous préparer à la possibilité que cela ne se produise pas", a-t-il dit.

M. Rubio a aussi affiché la solidarité des Etats-Unis avec Israël avant un sommet coprésidé par la France et l'Arabie saoudite le 22 septembre à l'ONU, destiné à promouvoir la reconnaissance d'un Etat de Palestine, au côté d'Israël.

Une initiative largement symbolique dans la mesure où Israël s'oppose fermement à la création d'un tel Etat auquel aspirent les Palestiniens.

Les Etats-Unis sont également hostiles à cette démarche, qui selon M. Rubio, a "enhardi" le Hamas.

En soirée, le secrétaire d'Etat a rencontré à Jérusalem des familles d'otages, selon un responsable du département d'Etat. Sur les 251 personnes enlevées durant l'attaque du 7-Octobre, 47 sont encore retenues à Gaza, dont 25 décédées selon l'armée israélienne.

- "Un corps sans âme" -

Dans le territoire palestinien, la Défense civile a indiqué que plus de la moitié des 49 Palestiniens tués l'avaient été à Gaza-ville, où l'armée a intensifié ses attaques avec l'objectif de s'en emparer.

Compte-tenu des restrictions imposées aux médias à Gaza et des difficultés d'accès sur le terrain, l'AFP n'est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les informations des différentes parties.

L'armée israélienne, qui présente Gaza-ville comme l'un des derniers bastions du Hamas dans le territoire palestinien, y a détruit plusieurs tours d'habitation en accusant le Hamas de s'y cacher.

Les Palestiniens continuent de fuir, en grand nombre, la ville et ses environs, qui comptaient un million d'habitants selon l'ONU.

"Je me sens comme un corps sans âme", dit Susan Annan, une Palestinienne qui habitait dans l'une de tours détruites. "Nous avons quitté notre maison avec seulement nos vêtements. Nous n'avons rien pu emporter."

L'attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts à Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire. L'ONU y a déclaré la famine, ce que Israël dément.


La flottille pour Gaza quitte la Tunisie, direction le territoire palestinien

Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
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  • Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place
  • Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser"

BIZERTE: Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire.

"Nous essayons d'envoyer un message à la population de Gaza, (de lui dire) que le monde ne l'a pas oubliée", a dit à l'AFP la militante écologiste suédoise Greta Thunberg avant d'embarquer dans le port de Bizerte, dans le nord de la Tunisie.

"Lorsque nos gouvernements ne prennent pas leurs responsabilités, nous n'avons pas d'autre choix que de prendre les choses en main", a-t-elle ajouté.

Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place.

Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser", "nous partons par solidarité, dignité et pour la justice".

Les embarcations arrivées d'Espagne s'étaient transférées à Bizerte après un séjour mouvementé à Sidi Bou Saïd, près de Tunis.

La "Global Sumud Flotilla", accueillie par des rassemblements de soutien, a indiqué que deux de ses bateaux avaient été visés par des attaques de drones deux nuits de suite la semaine passée, publiant des vidéos à l'appui. Après la deuxième annonce, les autorités tunisiennes ont dénoncé "une agression préméditée" et dit mener une enquête.

L'eurodéputée franco-palestinienne Rima Hassan qui, comme Greta Thunberg, avait été détenue à bord du "Madleen" lors d'une précédente traversée vers Gaza, a dit à l'AFP redouter "bien entendu" de nouvelles attaques, ajoutant: "on se prépare aux différents scénarios".

Selon elle, les personnalités les plus en vue - dont l'actrice française Adèle Haenel - ont été réparties entre les deux plus gros bateaux de coordination "de manière à équilibrer et (ne) pas concentrer toutes les personnalités visibles dans un seul et même bateau".

Le départ de Tunisie a été repoussé à plusieurs reprises en raison de motifs de sécurité, de retard dans les préparatifs pour certains bateaux et de la météo.

La Global Sumud Flotilla ("sumud" signifie "résilience" en arabe), qui comprend aussi des embarcations parties ces derniers jours de Corse (France), Sicile (Italie) et Grèce, avait initialement prévu d'atteindre le territoire palestinien à la mi-septembre, après deux tentatives bloquées par Israël en juin et juillet.

 


Les ministres du Groupe E3 condamnent les frappes israéliennes à Doha

Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
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  • Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza
  • Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas

PARIS: Les ministres des Affaires étrangères de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni ont condamné, dans une déclaration conjointe, les frappes israéliennes ayant visé Doha le 9 septembre. Ils estiment que ces attaques constituent une violation de la souveraineté du Qatar et représentent un risque d’escalade supplémentaire dans la région.

Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza. « Nous appelons toutes les parties à intensifier leurs efforts pour parvenir à un cessez-le-feu immédiat », ont-ils insisté.

Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas. Ils appellent les parties à « faire preuve de retenue » et à saisir l’opportunité de rétablir la paix.

Les ministres ont réaffirmé que la priorité devait rester la mise en place d’un cessez-le-feu permanent, la libération des otages et l’acheminement massif d’aide humanitaire à Gaza pour enrayer la famine. Ils demandent l’arrêt immédiat des opérations militaires israéliennes dans la ville de Gaza, dénonçant les déplacements massifs de civils, les pertes humaines et la destruction d’infrastructures vitales.

Ils exhortent par ailleurs à garantir aux Nations unies et aux ONG humanitaires un accès sûr et sans entrave à l’ensemble de la bande de Gaza, y compris dans le Nord.

Enfin, le Groupe E3 a rappelé sa condamnation « sans équivoque » des crimes commis par le Hamas, qualifié de mouvement terroriste, qui doit, selon eux, « libérer immédiatement et sans condition les otages, être désarmé et écarté définitivement de la gouvernance de la bande de Gaza ».