Au Liban, «on manque de tout», même de pain

Avec la crise, 78% de la population libanaise vit désormais sous le seuil de pauvreté d'après les Nations unies. (Photo, AFP)
Avec la crise, 78% de la population libanaise vit désormais sous le seuil de pauvreté d'après les Nations unies. (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 14 août 2021

Au Liban, «on manque de tout», même de pain

  • A Tripoli, les boulangeries restées ouvertes peinent, comme dans la capitale libanaise, à faire face à la demande des habitants
  • A Saïda, la pénurie est telle que les habitants se résignent au pain noir, des boulangeries ayant rationné le pain blanc à un paquet seulement par personne

BEYROUTH : A Beyrouth, Mikhail Hamati, 72 ans, sort épuisé d'une longue file d'attente pour trouver du pain, désespéré par les pénuries croissantes qui touchent même les aliments de base au Liban en plein effondrement économique.

"Il n'y a plus rien dans ce pays", se lamente-t-il en quittant la boulangerie où il était venu se ravitailler.

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Avant l'aube vendredi, une longue file d'attente s'est ainsi créée devant la boulangerie. (Photo, AFP)

Le Liban traverse l'une des pires crises économiques au monde depuis 1850, selon la Banque mondiale, et connaît d'importantes pénuries de carburants qui affectent l'approvisionnement en biens de première nécessité.

De nombreuses enseignes ont fermé après que la Banque du Liban a annoncé mercredi ne plus être en mesure de subventionner le carburant, faisant craindre une énième hausse des prix pour alimenter les générateurs d'électricité privés nécessaires à la fabrication du pain, le courant étant coupé environ 20 heures par jour.

Et celles qui restent ouvertes doivent rationner leur production pour ne pas épuiser trop vite les réserves de farine subventionnée, créant des pénuries en rayons.

«Du diesel et de la farine»

Avant l'aube vendredi, une longue file d'attente s'est ainsi créée devant la boulangerie vers laquelle M. Hamati s'était dirigé.

"Je n'ai pu obtenir qu'un seul paquet", soupire-t-il, sueur sur le front.

"Que reste-t-il dans ce pays? On manque de tout", ajoute le septuagénaire. Toutes les épiceries qu'il fréquente habituellement ont "fermé leurs portes".

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«Il faut nous fournir du diesel et de la farine». (Photo, AFP)

"Il faut nous fournir du diesel et de la farine", réclame Jacques el-Khouri, le boulanger de 60 ans occupé depuis trois heures du matin à la préparation du pain, heure à laquelle les premiers clients sont arrivés pour faire la queue.

"Le stock de farine qu'on me fournit (pour un mois) suffit pour une semaine seulement", affirme-t-il.

Avec la crise, 78% de la population libanaise vit désormais sous le seuil de pauvreté d'après les Nations unies, tandis que la livre libanaise a perdu en moins de deux ans plus de 90% de sa valeur par rapport au dollar sur le marché noir.

Dirigeants «déconnectés»

"Les boulangeries sont incapables de s'approvisionner en diesel", estime Ali Ibrahim, le président du syndicat des boulangers. Selon lui, le dirigeants "sont complètement déconnectés".

Les pénuries de carburants touchent le pays depuis le début de l'été, les importateurs accusant le gouvernement d'en être responsables en ayant retardé l'ouverture de lignes de crédits.

Les autorités accusent elles les distributeurs d'avoir retenu leurs stocks pour vendre le carburant plus cher sur le marché noir ou en Syrie voisine.

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Des conducteurs de scooter font la queue devant une station-service à Beyrouth, la capitale libanaise, le 13 août 2021. (Photo, AFP)

A Tripoli (nord), les boulangeries restées ouvertes peinent, comme dans la capitale libanaise, à faire face à la demande des habitants. 

"Nous avons imposé un rationnement sur la distribution de pain aux magasins", explique un ouvrier d'une des plus importantes boulangeries de la ville.

"Nous fournissons moins de la moitié de la quantité que nous envoyions auparavant", résume-t-il.

A Saïda (sud), la pénurie est telle que les habitants se résignent au pain noir, des boulangeries ayant rationné le pain blanc à un paquet seulement par personne.

Les ménages au Liban dépensent désormais cinq fois le salaire minimum pour leurs seuls besoins alimentaires, selon un rapport publié en juillet par l'Observatoire de la crise de l'Université américaine de Beyrouth.

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«Nous avons imposé un rationnement sur la distribution de pain aux magasins», explique un ouvrier d'une des plus importantes boulangeries de la ville. (Photo, AFP)

"Une fois le loyer payé, il ne nous reste plus rien", raconte Mohammad Abdel Kader, 62 ans, dans la pâtisserie beyrouthine où il travaille. 

Ce père de cinq enfants dit ne plus pouvoir acheter de la viande, regardant "la boucherie de loin et continuant (son) chemin". 

Il a également envie de pastèques et de raisins mais ne peut même plus s'en procurer. "Hier, j'ai mangé du pain sec" avec des oignons et des tomates. 


Soudan: l'UE sanctionne le numéro deux des paramilitaires du FSR

L'Union européenne a annoncé jeudi des sanctions contre le numéro deux des Forces de soutien rapide (FSR), accusé d'exactions au Soudan, pays africain en proie à une guerre civile meurtrière entre ces paramilitaires et l'armée régulière. (AFP)
L'Union européenne a annoncé jeudi des sanctions contre le numéro deux des Forces de soutien rapide (FSR), accusé d'exactions au Soudan, pays africain en proie à une guerre civile meurtrière entre ces paramilitaires et l'armée régulière. (AFP)
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  • Le conflit au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts et déplacé près de 12 millions de personnes
  • Il a connu une nouvelle accélération avec la chute aux mains des FSR fin octobre de la ville d'El-Facher, dernier bastion de l'armée dans le Darfour

BRUXELLES: L'Union européenne a annoncé jeudi des sanctions contre le numéro deux des Forces de soutien rapide (FSR), accusé d'exactions au Soudan, pays africain en proie à une guerre civile meurtrière entre ces paramilitaires et l'armée régulière.

"Cela envoie un signal que la communauté internationale poursuivra ceux qui sont responsables", a affirmé la cheffe de la diplomatie de l'UE Kaja Kallas, à l'issue d'une réunion à Bruxelles des ministres des Affaires étrangères de l'UE.

Ces sanctions, qui prévoient une interdiction d'entrée dans l'UE et un gel des avoirs, ne concernent que ce responsable soudanais, Abdelrahim Hamdan Dagalo, frère du numéro un des FSR.

Elles ont volontairement été limitées afin de garder des canaux de communication ouverts, alors que l'UE dit être en mesure de parler aux deux parties, a expliqué un responsable européen.

Le conflit au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts et déplacé près de 12 millions de personnes. Il a connu une nouvelle accélération avec la chute aux mains des FSR fin octobre de la ville d'El-Facher, dernier bastion de l'armée dans le Darfour.

Depuis, des survivants décrivent massacres, violences à caractère ethnique, enlèvements, viols et agressions sexuelles.

"L'Union européenne condamne dans les termes les plus forts les atrocités graves et continues perpétrées par les Forces de soutien rapide au Soudan, notamment après la prise de la ville d'El Facher", a indiqué un communiqué des 27.

Les meurtres à motivation ethnique et les violences sexuelles systématiques sont susceptibles de "constituer des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité", a ajouté l'UE dans ce communiqué..


Gaza: 27 morts dans des frappes israéliennes, Israël et le Hamas s'accusent de violer la trêve

Des frappes aériennes israéliennes sur la bande de Gaza ont tué 27 personnes mercredi selon les autorités locales, Israël et le mouvement islamiste palestinien Hamas s'accusant mutuellement d'avoir violé le fragile cessez-le-feu. (AFP)
Des frappes aériennes israéliennes sur la bande de Gaza ont tué 27 personnes mercredi selon les autorités locales, Israël et le mouvement islamiste palestinien Hamas s'accusant mutuellement d'avoir violé le fragile cessez-le-feu. (AFP)
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  • Il s'agit de l'une des journées les plus meurtrières à Gaza depuis le 10 octobre et l'entrée en vigueur de la trêve à laquelle ont poussé les Etats-Unis après plus de deux ans de guerre
  • Israël a également mené mercredi des frappes dans le sud du Liban, après avoir lancé des appels à évacuer

GAZA: Des frappes aériennes israéliennes sur la bande de Gaza ont tué 27 personnes mercredi selon les autorités locales, Israël et le mouvement islamiste palestinien Hamas s'accusant mutuellement d'avoir violé le fragile cessez-le-feu.

Il s'agit de l'une des journées les plus meurtrières à Gaza depuis le 10 octobre et l'entrée en vigueur de la trêve à laquelle ont poussé les Etats-Unis après plus de deux ans de guerre.

Israël a également mené mercredi des frappes dans le sud du Liban, après avoir lancé des appels à évacuer. L'armée israélienne a dit viser le mouvement islamiste Hezbollah qu'elle accuse de se réarmer en violation du cessez-le-feu en vigueur à sa frontière nord depuis bientôt un an.

"Les bombardements et les morts ont recommencé. Ils ne nous laissent même pas le temps de respirer", déplore auprès de l'AFP Ahraf Abu Sultan, 50 ans, tout juste rentré à Gaza-ville pour réparer sa maison détruite après avoir été déplacé un an dans le sud du territoire.

"Il n'y a aucun espoir pour la vie à Gaza", se lamente Nivine Ahmed, déplacée sous une tente à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, évoquant le bruit des explosions, la fumée, les gens qui courent et les sirènes des ambulances.

"Nous n'en pouvons plus, nous voulons que la guerre se termine complètement ou que les passages soient ouverts" pour permettre à la population de fuir, a confié Noha Fathi, déplacée dans le sud de la bande de Gaza.

Selon la Défense civile de la bande de Gaza, organisation de premiers secours opérant sous l'autorité du Hamas, quatorze personnes ont été tuées mercredi à Gaza-ville, et 13 dans la région de Khan Younès. Deux hôpitaux contactés par l'AFP ont confirmé ce bilan.

"Escalade dangereuse" 

L'armée israélienne a affirmé "frapper des cibles terroristes du Hamas dans toute la bande de Gaza" en riposte à des tirs "en direction de la zone où [ses] soldats opèrent à Khan Younès".

Ces tirs n'ont fait aucun blessé a précisé l'armée mais constituent "une violation de l'accord de cessez-le-feu".

Rejetant une "piètre tentative pour justifier [...] des violations qui ne cessent jamais", le Hamas a dénoncé une "escalade dangereuse" et appelé les Etats-Unis à "exercer une pression immédiate et sérieuse pour [forcer Israël] à respecter le cessez-le-feu".

Compte tenu des restrictions imposées aux médias à Gaza et des difficultés d'accès sur le terrain, l'AFP n'est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les informations des différentes parties.

La trêve a déjà été marquée par plusieurs accès de violences dans le territoire palestinien dévasté par plus de deux ans d'hostilités déclenchées par l'attaque sanglante du Hamas en Israël le 7 octobre 2023.

Depuis le 10 octobre, plus de 300 Palestiniens ont été tués par des frappes ou des tirs israéliens selon le ministère de la Santé de Gaza, placé sous l'autorité du Hamas. L'armée israélienne affirme ne frapper qu'en riposte à des violations de la trêve.

Les raids israéliens les plus meurtriers ont tué, le 29 octobre, plus de cent Gazaouis, selon la Défense civile et des données recueillies par l'AFP auprès de cinq hôpitaux.

Selon la Défense civile, qui ne fait jamais état de combattants tués, les bombardements de mercredi ont notamment tué un couple et ses trois enfants à Gaza-ville, et deux mineurs à Khan Younès.

Deuxième phase ? 

Le porte-parole de l'organisation, Mahmoud Bassal, est apparu dans une vidéo exhibant les corps de trois jeunes enfants.

L'accord de cessez-le-feu a permis dans sa première phase le retour des vingt derniers otages vivants du 7-Octobre, en échange de la libération de plusieurs centaines de prisonniers palestiniens, et le retour de 25 corps d'otages morts, sur 28 que le Hamas s'est engagé à rendre.

Israël réclame leur remise, en accusant de retard le mouvement islamiste, qui invoque la difficulté de les retrouver dans un territoire noyé sous des tonnes de décombres.

La mise en œuvre de la deuxième phase du plan du président américain Donald Trump n'a pas encore été approuvée. Elle prévoit notamment le désarmement du Hamas, la mise en place d'une autorité de transition pour gouverner le territoire et le déploiement d'une force internationale de stabilisation.

Le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté lundi une résolution pour endosser ce plan Trump, mais le Hamas, écarté de tout rôle dans la gouvernance du territoire et qui refuse de désarmer aux conditions posées par Israël, a dénoncé un texte qui "ne répond pas aux exigences et aux droits politiques et humains" du peuple palestinien.

L'attaque du 7 octobre 2023 a entraîné la mort de 1.221 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP établi à partir de données officielles.

Plus de 69.500 Palestiniens ont été tués par la campagne militaire israélienne de représailles, selon le ministère de la Santé de Gaza. Le ministère, dont les chiffres sont jugés fiables par l'ONU, ne précise pas le nombre de combattants tués mais ses données indiquent que plus de la moitié des morts sont des mineurs et des femmes.


Israël appelle à des évacuations dans deux villages du sud du Liban en prévision de frappes

L'armée israélienne a ordonné à deux villages du sud du Liban d'évacuer les bâtiments situés à proximité de ce qu'elle qualifie de sites du Hezbollah, alors que les tensions entre Israël et les groupes militants s'intensifient. (AFP)
L'armée israélienne a ordonné à deux villages du sud du Liban d'évacuer les bâtiments situés à proximité de ce qu'elle qualifie de sites du Hezbollah, alors que les tensions entre Israël et les groupes militants s'intensifient. (AFP)
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  • L’armée israélienne a appelé les habitants de Deir Kifa et Chahour à évacuer, affirmant que des infrastructures militaires du Hezbollah s’y trouvent et annonçant des frappes imminentes
  • Malgré le cessez-le-feu de novembre 2024, Israël poursuit des attaques ciblées au Liban avec le soutien tacite des États-Unis, accusant le Hezbollah de reconstruire ses capacités militaire

JERUSALEM: L'armée israélienne a appelé mercredi la population à évacuer les zones de bâtiments abritant selon elle des installations militaires du mouvement islamiste libanais Hezbollah dans deux villages du sud du Liban, annonçant son intention de les frapper sous peu.

"Les forces [israéliennes] attaqueront prochainement des infrastructures militaires appartenant au groupe terroriste Hezbollah dans différentes zones du sud du Liban, en réponse aux tentatives illégales de l'organisation de se rétablir dans la région", annonce le colonel Avichay Adraee, porte-parole de l'armée israélienne dans un message en arabe sur X.

L'officier appelle précisément la population à évacuer sans tarder les alentours de deux bâtiments dont il précise, cartes à l'appui, la localisation dans les villages de Deir Kifa et Chahour.

Malgré un cessez-le-feu entré en vigueur en novembre 2024, à l'issue de plus d'un an d'hostilités entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne continue de mener, avec l'aval tacite des Etats-Unis, des attaques régulières au Liban contre ce qu'elle présente comme des membres ou des installations du mouvement chiite, qu'elle accuse de chercher à reconstituer ses capacités militaires.

Le Hezbollah, allié de la République islamique d'Iran - ennemi juré d'Israël, a été très affaibli par la dernière guerre avec Israël, et Washington a accru la pression ces dernières semaines sur les autorités libanaises pour qu'elles obtienne son désarment, ce que le mouvement islamiste refuse pour l'heure.