Afghanistan: l'armement saisi à l'ennemi, une aubaine pour les talibans

Un insurgé taliban lors de l'exécution de trois hommes dans la province de Ghazni le 18 avril 2015. Archives Reuters
Un insurgé taliban lors de l'exécution de trois hommes dans la province de Ghazni le 18 avril 2015. Archives Reuters
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Publié le Samedi 14 août 2021

Afghanistan: l'armement saisi à l'ennemi, une aubaine pour les talibans

  • Les sites internet pro-talibans abondent de vidéos de combattants talibans saisissant une cargaison d'armes, pour la plupart fournies par les puissances occidentales
  • D'autres images de soldats se rendant aux talibans dans la ville de Kunduz, dans le nord-est du pays, montrent des véhicules blindés équipés de lance-roquettes aux mains des insurgés

KABOUL, AFGHANISTAN :Les États-Unis ont dépensé en 20 ans des centaines de milliards de dollars pour former et équiper l'armée afghane. Mais cela n'a pas empêché celle-ci de se désagréger devant l'offensive des talibans qui amassent un redoutable arsenal dérobé à l'ennemi.

"Nous avons fourni à nos partenaires afghans tous les outils, laissez-moi insister là-dessus, tous les outils", avait déclaré en juillet le président américain, Joe Biden, en défendant sa décision de retirer les dernières troupes américaines du pays et de laisser les Afghans se battre pour leur avenir.

Mais les membres des forces de sécurité afghanes n'ont pas montré une grande envie de combattre. Par milliers, ils ont déposé les armes, parfois sans avoir opposé la moindre résistance. Les talibans, eux, se sont empressés de mettre la main sur ces "outils".

Les sites internet pro-talibans abondent de vidéos de combattants talibans saisissant une cargaison d'armes, pour la plupart fournies par les puissances occidentales.

D'autres images de soldats se rendant aux talibans dans la ville de Kunduz, dans le nord-est du pays, montrent des véhicules blindés équipés de lance-roquettes aux mains des insurgés.

Dans la ville occidentale de Farah, des combattants patrouillent les rues dans un véhicule siglé d'un aigle piquant sur un serpent, l'insigne officiel des services de renseignement afghans.

Même si les troupes américaines ont emmené avec elles en se retirant l'équipement dit "sophistiqué", les talibans ont récupéré "des véhicules, des humvees, des armes légères et des munitions", explique à l'AFP Justine Fleischner, de l'ONG Conflict Armament Research (CAR).

«Une énorme aubaine»

Pour les experts, ce butin inespéré a largement aidé les talibans, qui peuvent aussi compter sur leurs propres sources d'approvisionnement en armes. Le Pakistan, notamment, a été accusé de financer et armer les talibans, ce qu'il a toujours démenti.

Cet armement ne va pas seulement aider les talibans à fondre sur Kaboul, mais à "renforcer leur autorité" dans les villes dont ils se sont emparés, estime Raffaello Pantucci, expert à la S. Rajaratnam School of International Studies de Singapour.

Les troupes américaines étant désormais quasiment toutes parties, les talibans se retrouvent les mains remplies de matériel américain, sans avoir eu à dépenser un centime pour l'acquérir.

"C'est incroyablement sérieux. Cela va indéniablement être une énorme aubaine pour eux", ajoute M. Pantucci.

A quelques semaines du 20e anniversaire des attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis, cet arsenal est fièrement exhibé par les talibans, qui continuent, selon l'ONU, à entretenir des liens étroits avec Al-Qaïda, le groupe responsable de ces attaques.

Les Américains étaient préparés à ce que certaines armes soient saisies par les talibans, mais la chute rapide des villes était le scénario le plus pessimiste pour eux, explique à l'AFP Jason Amerine, un ancien membre des forces spéciales américaines qui avait pris part à l'invasion de 2001 pour chasser les talibans du pouvoir.

"Les États-Unis ont équipé l'ANA (l'armée nationale afghane) en présumant que des armes et du matériel pourraient tomber aux mains des talibans", dit-il. "La crise actuelle était le scénario du pire, quand les décisions de dotation ont été prises."

Propagande

A Kunduz, un taliban assis sur une moto rouge est filmé au moment où il regarde, extatique, un hélicoptère militaire posé sur le tarmac proche. 

La même jubilation est perceptible dans tous les territoires conquis par les insurgés. Mais s'ils continueront à montrer ces images pour galvaniser leurs troupes, les talibans ne pourront utiliser cet hélicoptère sans pilote.

"Ce sera à des fins de propagande uniquement", déclare à l'AFP Aki Peritz, un ancien analyste en contre-terrorisme de la CIA.

Les armes légères seront bien plus utiles, comme les véhicules qui faciliteront les déplacements sur ce terrain accidenté. Cet équipement, associé au moral déclinant de l'armée afghane, renforcera la menace posée par les talibans. 

Pourtant, l'administration Biden a indiqué qu'elle continuerait à équiper l'armée afghane, au bord de l'effondrement.

L'histoire se répète pour les États-Unis. Après leur retrait d'Irak, le groupe État islamique (EI) avait pris le contrôle de la ville de Mossoul à la mi-2014, en saisissant des armes et des humvees américains. L'EI s'en était ensuite servi pour proclamer son califat en Irak et en Syrie.

Comme les combattants de l'EI à Mossoul, des recrues talibanes posent pour des photos, sourire aux lèvres, avec des munitions prises à l'ennemi, dans les villes nouvellement conquises, partout en Afghanistan. "Cette retraite tourne à la débâcle", constate M. Peritz.


La BBC doit «se battre» pour défendre son journalisme, dit le DG sortant

Au moment où le groupe est très critiqué et accusé de partialité, en particulier par la droite conservatrice, le DG sortant a reconnu que "les temps sont durs pour la BBC". (AFP)
Au moment où le groupe est très critiqué et accusé de partialité, en particulier par la droite conservatrice, le DG sortant a reconnu que "les temps sont durs pour la BBC". (AFP)
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  • Tim Davie, qui a démissionné dimanche, a reconnu qu'une "erreur" avait été commise dans un documentaire sur le président américain diffusé en octobre 2024, selon ses propos tenus lors d'une visioconférence avec les employés du groupe audiovisuel public
  • Le groupe audiovisuel public britannique est dans la tourmente après avoir réalisé, pour ce documentaire diffusé dans son magazine d'information phare "Panorama", un montage trompeur d'un discours de Donald Trump

LONDRES: La BBC doit "se battre" pour défendre son journalisme, a déclaré mardi le directeur général sortant de la BBC, Tim Davie, alors que le groupe public britannique est menacé de plainte en diffamation par Donald Trump.

Tim Davie, qui a démissionné dimanche, a reconnu qu'une "erreur" avait été commise dans un documentaire sur le président américain diffusé en octobre 2024, selon ses propos tenus lors d'une visioconférence avec les employés du groupe audiovisuel public, rapportés par la chaîne BBC News.

Le groupe audiovisuel public britannique est dans la tourmente après avoir réalisé, pour ce documentaire diffusé dans son magazine d'information phare "Panorama", un montage trompeur d'un discours de Donald Trump, le 6 janvier 2021, qui donnait l'impression que le président sortant incitait explicitement ses partisans à une action violente contre le Congrès.

"Nous avons fait une erreur, et il y a eu un manquement à nos règles éditoriales", a reconnu Tim Davie, expliquant qu'il avait assumé sa "part de responsabilité" en démissionnant.

Il n'a toutefois pas mentionné directement la menace d'action en justice lancée par Donald Trump, ni la date de son départ effectif, lors de cette visioconférence avec le président de la BBC, Samir Shah.

Au moment où le groupe est très critiqué et accusé de partialité, en particulier par la droite conservatrice, le DG sortant a reconnu que "les temps sont durs pour la BBC".

"Mais nous nous en sortirons", et "nous devons nous battre pour défendre notre journalisme", a-t-il insisté.

"Nous sommes une organisation unique et précieuse, et je vois la liberté de la presse mise à rude épreuve, je vois son instrumentalisation", a-t-il encore ajouté.


Le président allemand demande à son homologue algérien de gracier l'écrivain Boualem Sansal

La présidence algérienne a confirmé dans son propre communiqué que M. Steinmeier avait demandé à Abdelmadjid Tebboune "d'accomplir un geste humanitaire en graciant l'écrivain Boualem Sansal", une information reprise par la télévision algérienne par ailleurs. (AFP)
La présidence algérienne a confirmé dans son propre communiqué que M. Steinmeier avait demandé à Abdelmadjid Tebboune "d'accomplir un geste humanitaire en graciant l'écrivain Boualem Sansal", une information reprise par la télévision algérienne par ailleurs. (AFP)
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  • "Un tel geste serait l'expression d'une attitude humanitaire et d'une vision politique à long terme. Il refléterait ma relation personnelle de longue date avec le président Tebboune et les bonnes relations entre nos deux pays"
  • Appelant son homologue Abdelmadjid Tebboune à un "geste humanitaire", Frank-Walter Steinmeier propose aussi que Boualem Sansal soit transféré en Allemagne pour "y bénéficier de soins médicaux (...) compte tenu de son âge avancé (...)"

BERLIN: Le président allemand a exhorté lundi son homologue algérien à gracier l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, emprisonné depuis un an en Algérie et au coeur d'une grave crise diplomatique entre Alger et Paris.

Appelant son homologue Abdelmadjid Tebboune à un "geste humanitaire", Frank-Walter Steinmeier propose aussi que Boualem Sansal soit transféré en Allemagne pour "y bénéficier de soins médicaux (...) compte tenu de son âge avancé (...) et de son état de santé fragile".

"Un tel geste serait l'expression d'une attitude humanitaire et d'une vision politique à long terme. Il refléterait ma relation personnelle de longue date avec le président Tebboune et les bonnes relations entre nos deux pays", a estimé le président allemand, dans un communiqué.

La présidence algérienne a confirmé dans son propre communiqué que M. Steinmeier avait demandé à Abdelmadjid Tebboune "d'accomplir un geste humanitaire en graciant l'écrivain Boualem Sansal", une information reprise par la télévision algérienne par ailleurs.

Selon des spécialistes à Alger, le fait que la présidence et la télévision publique reprennent les éléments de langage du président allemand peut être perçu comme un signe positif.

Mais aucune indication n'a été donnée quant au calendrier de la prise de décision par le président algérien.

Dans une longue interview accordée en septembre dernier, le président Abdelmadjid Tebboune avait par ailleurs évoqué la possibilité de se rendre en Allemagne fin 2025 ou début 2026.

Arrêté à Alger le 16 novembre 2024, le romancier et essayiste franco-algérien Boualem Sansal a été condamné en appel en juillet à cinq ans de réclusion pour avoir notamment déclaré que l'Algérie avait hérité sous la colonisation française de territoires appartenant jusque-là au Maroc.

Jeudi, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, avait souligné que la France menait un "dialogue exigeant" avec Alger pour obtenir la libération de Boualem Sansal.

L'affaire s'inscrit dans un contexte d'hostilité entre Paris et Alger, qui sont empêtrés depuis plus d'un an dans une crise diplomatique sans précédent qui s'est traduite par des expulsions de fonctionnaires de part et d'autre, le rappel des ambassadeurs des deux pays et des restrictions sur les porteurs de visas diplomatiques.


La BBC, dans l'oeil du cyclone, sommée de s'expliquer

Le président de la BBC, Samir Shah, doit s'expliquer lundi au lendemain de la démission retentissante du directeur général du groupe audiovisuel public britannique et de la patronne de sa chaîne d'information BBC News, après le montage trompeur d'un discours de Donald Trump. (AFP)
Le président de la BBC, Samir Shah, doit s'expliquer lundi au lendemain de la démission retentissante du directeur général du groupe audiovisuel public britannique et de la patronne de sa chaîne d'information BBC News, après le montage trompeur d'un discours de Donald Trump. (AFP)
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  • La BBC, institution longtemps chérie des Britanniques mais cible régulière des médias et responsables politiques conservateurs, est dans la tourmente, accusée ces derniers jours d'avoir déformé des propos du président américain dans un documentaire
  • La BBC est mise en cause pour avoir monté des passages différents d'un discours de Donald Trump datant du 6 janvier 2021, jour de l'assaut du Capitole à Washington, de telle façon qu'il semble inciter ses partisans à marcher vers le siège du Congrès

LONDRES: Le président de la BBC, Samir Shah, doit s'expliquer lundi au lendemain de la démission retentissante du directeur général du groupe audiovisuel public britannique et de la patronne de sa chaîne d'information BBC News, après le montage trompeur d'un discours de Donald Trump.

La BBC, institution longtemps chérie des Britanniques mais cible régulière des médias et responsables politiques conservateurs, est dans la tourmente, accusée ces derniers jours d'avoir déformé des propos du président américain dans un documentaire de son magazine d'information phare, "Panorama", diffusé en octobre 2024, une semaine avant la présidentielle américaine.

La BBC est mise en cause pour avoir monté des passages différents d'un discours de Donald Trump datant du 6 janvier 2021, jour de l'assaut du Capitole à Washington, de telle façon qu'il semble inciter ses partisans à marcher vers le siège du Congrès pour se "battre comme des diables".

Or, dans la phrase originale, M. Trump disait: "Nous allons marcher vers le Capitole et nous allons encourager nos courageux sénateurs et représentants et représentantes au Congrès". L'expression "se battre comme des diables" correspondait à un autre passage du discours.

Face à la polémique grandissante, son directeur général, Tim Davie, et la patronne de la chaîne d'information du groupe BBC News, Deborah Turness, ont annoncé dimanche leur démission, qui fait la Une des journaux lundi.

Le président américain a dénoncé les "journalistes corrompus" et "malhonnêtes" de la BBC, sur son réseau Truth Social.

Le président du conseil d'administration du groupe, Samir Shah, doit s'excuser et s'expliquer dans une réponse écrite aux questions de la commission parlementaire sur la culture sur cette affaire, et sur d'autres accusations de partialité sur la couverture de la guerre à Gaza.

"La BBC doit répondre à de graves questions concernant ses normes éditoriales et la manière dont la direction gère les problèmes", a jugé la présidente de la commission, Caroline Dinenage, estimant que le groupe public "se devait d'être exemplaire" face à la montée de la désinformation.

Lundi, la patronne démissionnaire de BBC News a de nouveau assuré qu'il n'y avait "pas de partialité institutionnelle" sur la chaîne, qui a produit le programme mis en accusation.

 

- "Violation des règles" -

 

La classe politique a quasi unanimement critiqué la BBC pour sa gestion de l'affaire, qui tombe d'autant plus mal que le groupe audiovisuel doit renégocier d'ici fin 2027 son nouveau contrat de mission avec le gouvernement.

La cheffe de l'opposition, Kemi Badenoch, a déploré "un catalogue de graves défaillances". Le chef du parti d'extrême droite Reform UK, Nigel Farage, a appelé à "un changement de fond en comble" du groupe public.

La BBC tire une grande part de ses ressources de la redevance annuelle (174,50 livres, soit 198 euros), payée par 22,8 millions de foyers, soit 3,8 milliards de livres.

Samir Shah a dit espérer que le futur directeur général du groupe, dont la nomination pourrait prendre plusieurs mois, "façonnerait positivement" le prochain contrat de mission. la ministre de la Culture, Lisa Nandy, qui a qualifié la situation d'"extrêmement grave", a affirmé que le futur contrat aiderait la BBC à "garantir son rôle" auprès du public.

Le chef du parti libéral démocrate (centriste), Ed Davey, a appelé le Premier ministre Keir Starmer, et la classe politique en général, à défendre la BBC face à Donald Trump et la sphère Maga. "Il est facile de voir pourquoi Trump veut détruire la première source d'information dans le monde. Nous ne pouvons pas le laisser faire", a-t-il prévenu sur la plateforme X.

Le Telegraph a eu connaissance d'une note interne rédigée par l'ancien conseiller indépendant du comité des normes éditoriales de la BBC, Michael Prescott, dans laquelle il suggérait que des erreurs avaient été commises dans le montage. Il affirme que les responsables chargés des normes éditoriales du groupe auprès de qui il a soulevé le problème ont nié toute violation des règles.

En octobre, le régulateur des médias avait épinglé la BBC pour avoir "enfreint les règles de diffusion" à propos d'un reportage à Gaza dans lequel le narrateur principal, un enfant, était le fils d'un haut responsable du mouvement islamiste palestinien Hamas.