La victoire des talibans était-elle inévitable?

Un insurgé taliban à Kaboul: "Ce que l'on a appris au cours des deux dernières semaines, c'est que si nous étions restés un an de plus, ou deux ans, ou cinq ans, ou dix ans, aucun niveau de formation, d'équipement, ou d'argent, ou de vies perdues par les Etats-Unis n'allaient rendre l'armée afghane capable de soutenir ce pays par elle seule", a martelé sur la chaîne NBC Jake Sullivan, le conseiller à la sécurité nationale de Joe Biden. (Photo, AFP)
Un insurgé taliban à Kaboul: "Ce que l'on a appris au cours des deux dernières semaines, c'est que si nous étions restés un an de plus, ou deux ans, ou cinq ans, ou dix ans, aucun niveau de formation, d'équipement, ou d'argent, ou de vies perdues par les Etats-Unis n'allaient rendre l'armée afghane capable de soutenir ce pays par elle seule", a martelé sur la chaîne NBC Jake Sullivan, le conseiller à la sécurité nationale de Joe Biden. (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 17 août 2021

La victoire des talibans était-elle inévitable?

  • L'effondrement fulgurant du gouvernement afghan a renforcé l'argument du président Biden que rien de plus n'aurait pu être fait pour éviter la débâcle
  • Les sondages montraient encore il y a quelques jours que l'opinion publique américaine voulait mettre un terme à la guerre lancée après les attentats du 11 septembre

WASHINGTON : L'effondrement fulgurant du gouvernement afghan a renforcé l'argument du président américain Joe Biden que rien de plus n'aurait pu être fait pour éviter la débâcle. Mais la victoire des talibans était-elle réellement inévitable?

Pour ceux qui fustigent sa décision de mettre fin à la plus longue guerre des Etats-Unis, les 2500 militaires américains qui restaient en Afghanistan dans les derniers mois démontraient que Washington pouvait, à un faible coût pour le Pentagone, garantir une certaine stabilité.

Le président américain et ses alliés rejettent cet argument, estimant que les troupes américaines étaient restées en sécurité uniquement parce que les talibans avaient accepté de ne pas les cibler dans le cadre d'un accord sur le retrait.

"Ce que l'on a appris au cours des deux dernières semaines, c'est que si nous étions restés un an de plus, ou deux ans, ou cinq ans, ou dix ans, aucun niveau de formation, d'équipement, ou d'argent, ou de vies perdues par les Etats-Unis n'allaient rendre l'armée afghane capable de soutenir ce pays par elle seule", a martelé sur la chaîne NBC Jake Sullivan, le conseiller à la sécurité nationale de Joe Biden.

Lucas Kunce, un ancien combattant américain en Afghanistan et candidat démocrate au Sénat américain l'a résumé sans détour:  "J'y étais", ce qu'il se passe "aujourd'hui était inévitable. Quiconque vous dit le contraire ment ou nous aurait fait rester là-bas pour toujours."

Malgré ses critiques au vitriol de Joe Biden, l'ex-président républicain Donald Trump avait lui-même semblé reconnaître ce caractère inévitable lorsque son administration avait signé l'accord de retrait avec les talibans en février 2020.

Les troupes afghanes sont-elles capables de se défendre seules? "Je l'espère, mais je ne sais pas", avait-il répondu quelques jours plus tard.

Après plus de 2000 milliards de dollars dépensés et la mort de près de 2500 Américains, les sondages montraient encore il y a quelques jours que l'opinion publique américaine voulait mettre un terme à la guerre lancée après les attentats du 11 septembre 2001.

Mais pour Richard Fontaine, un expert du cercle de réflexion Center for a New American Security, une présence américaine limitée aurait permis de protéger les avancées obtenues, notamment pour les femmes et tous les Afghans qui craignent désormais le retour d'une ère brutale. 

"Il se trouve qu'une présence modeste, viable, de troupes internationales --dont les Etats-Unis ne fournissaient d'ailleurs pas la majorité-- n'était pas capable de vaincre les talibans, mais faisait la différence entre la chute du gouvernement afghan face aux talibans" ou son maintien, souligne cet ex-conseiller du défunt sénateur John McCain.

H.R. McMaster, ex-conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump, avait lui vivement rejeté la semaine dernière que la débâcle s'inscrivait dans la longue histoire d'un Afghanistan "cimetière des empires", comme avec les Russes ou les Britanniques.

"Cela ne présente même pas la question correctement. Nous nous battons avec des Afghans, pour des Afghans, contre ce groupe abominable de terroristes appelés talibans", avait-il lancé.

Nous "nous sommes conditionnés pour la défaite en Afghanistan", avait affirmé ce général à la retraite. Et "nous sommes en train de voir les Afghans payer le prix de notre aveuglement."

Adela Raz, l'ambassadrice afghane à Washington, avait jugé vendredi "extrêmement injuste" le fait de mettre en doute la volonté de se battre de l'armée de son pays.

Elle avait en revanche épinglé la perte du soutien aérien américain et l'effet psychologique des négociations américaines avec les talibans.

Ce "qu'ils ont compris chez nous c'est qu'ils sont en train d'être abandonnés", avait-elle déclaré sur la chaîne PBS.

Si les Etats-Unis martelaient que l'accord de retrait de 2020 dépendrait du respect de ses termes par les talibans --notamment de ne pas protéger Al-Qaïda ou attaquer de grandes villes-- aussi bien Donald Trump que Joe Biden avaient énoncé clairement qu'ils comptaient, de toute façon, mener à bien le retrait.

Pour Trita Parsi, expert du groupe Quincy Institute for Responsible Statecraft qui soutient une plus grande retenue sur le plan militaire au profit de la diplomatie, tout accord de retrait lié à des conditions aurait été vain, car le gouvernement afghan n'avait pas intérêt à ce que les Américains partent.

"Les Etats-Unis auraient pu rester un an de plus, cinq ans de plus, cela n'aurait rien changé."


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.


Ouragan Melissa: près de 50 morts dans les Caraïbes, l'aide afflue

Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
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  • L’ouragan Melissa, le plus puissant à frapper la Jamaïque en près de 90 ans, a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque, laissant derrière lui des destructions massives et des centaines de milliers de sinistrés
  • L’aide internationale afflue vers les Caraïbes, avec des secours venus des États-Unis, du Venezuela, de la France et du Royaume-Uni, alors que les experts rappellent le rôle du réchauffement climatique dans l’intensification de ces catastrophes

CUBA: L'aide internationale afflue vendredi vers les Caraïbes dévastées par le passage de l'ouragan Melissa qui a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque.

Habitations en ruines, quartiers inondés et communications coupées... L'heure est à l'évaluation des dégâts causés par Melissa qui devrait désormais faiblir au dessus dans l'Atlantique nord après avoir passé les Bermudes.

Selon le Centre national américain des ouragans (NHC), les inondations devraient s'atténuer aux Bahamas, mais les crues pourraient demeurer à un niveau élevé à Cuba, en Jamaïque, en Haïti et en République dominicaine voisine.

Rendu plus destructeur par le réchauffement climatique, l'ouragan a été le plus puissant à toucher terre en 90 ans lorsqu'il a frappé la Jamaïque mardi en catégorie 5, la plus élevée sur l'échelle Saffir-Simpson, avec des vents d'environ 300 km/h.

"Le bilan confirmé est désormais de 19 morts" dont neuf à l'extrémité ouest de l'île, a déclaré jeudi soir la ministre jamaïcaine de l'Information Dana Morris Dixon, citée par les médias locaux.

De nombreux habitants n'ont toujours pas pu contacter leurs proches, ont expliqué les autorités. L'armée jamaïcaine s'emploie à dégager les routes bloquées, selon le gouvernement.

"Il y a eu une destruction immense, sans précédent, des infrastructures, des propriétés, des routes, des réseaux de communication et d'énergie", a déclaré depuis Kingston Dennis Zulu, coordinateur pour l'ONU dans plusieurs pays des Caraïbes. "Nos évaluations préliminaires montrent que le pays a été dévasté à des niveaux jamais vus auparavant".

- Melissa "nous a tués" -

A Haïti, pas directement touché par l'ouragan mais victime de fortes pluies, au moins 30 personnes, dont dix enfants, sont mortes, et 20 portées disparues, selon le dernier bilan des autorités communiqué jeudi. Vingt-trois de ces décès sont dus à la crue d'une rivière dans le sud-ouest du pays.

A Cuba, les communications téléphoniques et routières restent largement erratiques.

A El Cobre, dans le sud-ouest de l'île communiste, le son des marteaux résonne sous le soleil revenu: ceux dont le toit s'est envolé s'efforcent de réparer avec l'aide d'amis et de voisins, a constaté l'AFP.

Melissa "nous a tués, en nous laissant ainsi dévastés", a déclaré à l'AFP Felicia Correa, qui vit dans le sud de Cuba, près d'El Cobre. "Nous traversions déjà d'énormes difficultés. Maintenant, évidement, notre situation est bien pire."

Quelques 735.000 personnes avaient été évacuées, selon les autorités cubaines.

- Secouristes -

L'aide promise à l'internationale s'achemine dans la zone dévastée.

Les États-Unis ont mobilisé des équipes de secours en République dominicaine, en Jamaïque et aux Bahamas, selon un responsable du département d'État. Des équipes étaient également en route vers Haïti.

Le secrétaire d'État Marco Rubio a également indiqué que Cuba, ennemi idéologique, est inclus dans le dispositif américain.

Le Venezuela a envoyé 26.000 tonnes d'aide humanitaire à son allié cubain.

Le président du Salvador Nayib Bukele a annoncé sur X envoyer vendredi "trois avions d'aide humanitaire en Jamaïque" avec "plus de 300 secouristes" et "50 tonnes" de produits vitaux.

Kits de première nécessité, unités de traitement de l'eau: la France prévoit de livrer "dans les prochains jours" par voie maritime une cargaison d'aide humanitaire d'urgence en Jamaïque, selon le ministère des Affaires étrangères.

Le Royaume-Uni a débloqué une aide financière d'urgence de 2,5 millions de livres (2,8 millions d'euros) pour les pays touchés.

Le changement climatique causé par les activités humaines a rendu l'ouragan plus puissant et destructeur, selon une étude publiée mardi par des climatologues de l'Imperial College de Londres.

"Chaque désastre climatique est un rappel tragique de l'urgence de limiter chaque fraction de degré de réchauffement, principalement causé par la combustion de quantités excessives de charbon, de pétrole et de gaz", a déclaré Simon Stiell, secrétaire exécutif de l'ONU chargé du changement climatique, alors que la grande conférence climatique des Nations unies COP30 s'ouvre dans quelques jours au Brésil.

Avec le réchauffement de la surface des océans, la fréquence des cyclones (ou ouragans ou typhons), les plus intenses augmente, mais pas leur nombre total, selon le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU, le Giec.